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INSTITUTEUR.

ÉPINEUX.

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

(11 novembre 1909)

ÉTAT. ACCIDENT. ÉLÈVE. CHUTE.

BUISSON

ABSENCE DE QUASI-DÉLIT. IMMEUBLE DESTINÉ A UN

SERVICE PUBLIC.

AMÉNAGEMENT.

COMPÉTENCE.

L'État, substitué à l'instituteur en vertu de la loi du 20 juillet 1899, ne saurait être rendu responsable d'un accident survenu à un élève alors que ce dernier est tombé, en jouant, sur des buissons épineux, entraînant dans sa chute un de ses camarades qui courait derrière lui, la chute du premier des enfants étant seule la véritable cause, impossible à prévoir ou à empêcher, de l'accident.

Si la présence du buisson épineux, dont l'installation a été faite par la municipalité et acceptée par l'autorité académique, pout être de nature à engager la responsabilité de la Ville ou de l'État, les tribunaux civils ne sont pas compétents pour apprécier cette installation, qui constitue un travail fait à un immeuble aménagé en vue d'un service public et appartenant à une administration publique.

M. Beltramé, dont le fils a perdu l'œil droit en faisant une chute sur un buisson épineux, dans la cour de l'école maternelle de Bouhoure, a assigné en dommages-intérêts la directrice de cette école, Mile Dencausse.

Par jugement du 13 décembre 1906, le tribunal de Toulouse a décidé qu'aucune faute personnelle ne pouvant être relevée à l'égard de l'institutrice, c'est contre l'État que l'action devait être dirigée, en vertu de la loi du 20 juillet 1899.

M. Beltramé actionna alors l'État en dommages-intérêts, mais il fut débouté de sa demande par jugement du tribunal civil de Toulouse, en date du 30 janvier 1908.

En appel, la cour, sur conclusions de M. Reverdin, avocat général, a rendu l'arrêt confirmatif suivant :

La Cour,

Attendu que, par un précédent jugement qui a acquis l'autorité de la chose jugée, le tribunal civil de Toulouse a décidé que la demoiselle. Dencausse, directrice de l'école maternelle de Bouhoure, n'a commis aucune faute personnelle engageant sa responsabilité suivant les termes de l'article 1382 du Code civil; qu'il s'agit aujourd'hui, dans le jugement dont est appel, de rechercher si la responsabilité civile de l'État est engagée en vertu de la disposition finale de l'article 1384;

Attendu, en effet, qu'aux termes de cet article, texte ancien, l'instituteur était civilement responsable du dommage causé par les élèves placés sous sa surveillance et que la loi du 20 juillet 1899 a substitué la responsabilité civile de l'État à celle du maître d'école;

Qu'il s'agit donc de savoir si le jeune Beltramé a été blessé par le fait d'un de ses camarades;

Attendu que, des renseignements fournis par l'inspection académique, il résulte que, le jeudi 15 juin 1905, le jeune Fernand Beltramé jouait aux chevaux dans la cour de l'école; qu'il tomba sur les buissons épineux qui protégeaient un jeune arbre et qu'en même temps son camarade qui courait derrière lui fut entraîné dans sa chute, de telle sorte qu'ils roulèrent tous les deux sur le buisson;

Attendu que, si le poids du corps du second enfant a pu rendre la chute du premier plus dangereuse, il n'en est pas moins vrai que c'est le jeune Beltramé qui a provoqué, en tombant, la chute de son camarade;

Attendu que, dans ces conditions, aucun fait quasi délictueux ne peut être reproché au second enfant, d'où il suit que l'État ne saurait être recherché comme responsable d'une faute qui n'a pas été commise;

Attendu, il est vrai, que l'appelant conclut à ce qu'il soit procédé à une enquête, mais que les faits articulés ne sont pas pertinents; qu'au surplus, il convient de remarquer que l'accident remonte à plus de trois ans; qu'il s'est produit dans la cour de l'école en présence de tout jeunes enfants dont les déclarations n'offriraient pas des garanties suffisantes et d'une surveillante qui a déjà fait connaître ce qu'elle savait, ainsi qu'en témoigne le rapport de M. l'inspecteur d'académie.

Attendu, enfin, que, dans le mémoire qu'il adressait à M. le préfet, le sieur Beltramé père indiquait que l'accident était arrivé parce que l'on avait eu le tort de mettre des buissons autour des arbres dans le lieu où. les enfants s'amusaient; que, de son côté, dans son rapport du 1er mars 1907, M. l'inspecteur d'académie déclarait que, dès qu'il avait eu connaissance des faits, il avait invité la directrice à demander à la municipalité de faire disparaître les buissons qui entouraient les arbres et qui pouvaient être particulièrement dangereux dans une école maternelle; de telle sorte que le plaignant et l'autorité académique paraissent d'accord pour reconnaître que c'est la présence des buissons qui a été la cause véritable de l'accident;

Attendu que cette installation a été faite par la municipalité et acceptée par l'autorité académique et qu'on pourrait se demander si la ville et l'État n'ont pas encouru une responsabilité de ce chef;

Mais attendu qu'il s'agit dans l'espèce d'apprécier un travail fait à un immeuble aménagé en vue d'un service public et appartenant à une administration publique, et que le juge civil est incompétent, comme l'a dit avec raison le tribunal;

Par ces motifs et ceux donnés par les premiers juges;

Rejette comme inutile et non pertinente l'offre en preuve articulée; ce faisant, confirme le jugement dont est appel avec amende et dépens.

TRIBUNAL CIVIL DE GRAY
(14 janvier 1909)

COMMUNE. CONCESSION D'ÉCLAIRAGE PUBLIC ET PRIVÉ.

DROIT DU CANALISATIONS ANTÉRIEURES AU TRAITÉ DE ROUTES NATIONALES ET

PERMISSIONS DE VOIRIE.

CONCESSIONNAIRE.

CONCESSION.

DÉPARTEMENTALES.

La commune qui a accordé le monopole de l'éclairage public et privé sur son territoire à un concessionnaire, n'a pas conféré à celui-ci plus de droits qu'elle n'en avait elle-même.

S'il existait, antérieurement au traité de concession, des canalisations établies dans l'intérieur de la commune pour l'éclairage particulier, en vertu de permissions de voirie qu'il n'appartenait pas à la municipalité d'accorder ou de refuser, la commune et le concessionnaire, qui lui est substitué, sont sans droit et sans qualité pour en demander la suppression.

Le préfet est resté, comme il l'était avant la circulaire ministérielle du 15 août 1893 et la loi du 15 juin 1906, compétent pour délivrer des permissions de voirie en vue de l'adduction de l'eau et de la lumière chez des particuliers, sans l'intervention du corps municipal, lorsqu'il s'agit d'installations qui ne comportent pas un acte de concession, effectuées sur des routes nationales ou départementales traversant le territoire de la commune.

La commune et le concessionnaire ne sont pas fondés à demander la suppression de canalisations établies antérieurement au traité de concession, en vertu de permissions de voirie régulièrement accordées par le préfet au moment où elles sont intervenues.

Il appartient à l'autorité administrative seule de prendre telles mesures qu'elle juge nécessaires lorsqu'une canalisation a été établie sur une route départementale sans permission régulière.

Les circonstances de la cause sont exposées dans le jugement suivant, rendu sur les conclusions de M. Blavin, procureur de la République :

Le Tribunal,

Attendu que Bardot, agissant en qualité de représentant de la Compagnie du gaz de Gray, est opposant à un jugement par défaut faute de conclure du 22 juillet 1908; que son opposition est régulière en la forme;

Au fond attendu que Régnier, directeur de la Société des grands moulins de Gray, concessionnaire de l'éclairage public et privé de la commune d'Arc-lès-Gray et exerçant les droits de ladite commune, demande que Bardot, ès qualités qu'il agit, soit tenu de cesser l'utilisation en vue de l'éclairage privé de toutes les canalisations par lui établies sous les routes nationales nos 69 et 70 et le chemin de grande communication no 2, en tant qu'elles empruntent le territoire de la commune d'Arc; que, pour justifier sa demande, il se prévaut d'un traité conclu avec la municipalité d'Arc, le 7 avril 1902, par lequel il aurait obtenu

le monopole de l'éclairage public et particulier sur tout le territoire d'Arc;

Attendu qu'aux termes de ce traité, la commune s'interdit d'autoriser tout établissement pouvant faire concurrence à l'entreprise de Régnier, pour l'éclairage privé, pendant la durée de la concession, mais sans prendre aucun engagement pour le passé; qu'elle a, en effet, prévenu Régnier que la Compagnie du gaz de Gray avait déjà établi les canalisations dont la suppression est aujourd'hui demandée, en lui indiquant qu'elles avaient été installées sans l'autorisation de la municipalité et qu'il pouvait, de ce chef, exercer les droits de la commune, si bon lui semblait à ses risques et périls et sans aucun recours;

Attendu que, dans ces conditions il y a lieu de rechercher uniquement si la commune, aux droits de laquelle Régnier est substitué, avait ou aurait eu qualité pour s'opposer à ce que les permissions de voirie, en vertu desquels les travaux de canalisation ont été exécutés, en 1886 et en 1891, c'est-à-dire plus de dix ans avant la signature du traité avec la Société des grands moulins, fussent accordés par l'autorité compétente; Attendu que Bardot et les habitants d'Arc, qui traitaient avec lui dans la plénitude de leurs droits pour l'adduction du gaz chez eux, empruntaient exclusivement le sous-sol des routes dépendant du domaine de l'État et du département; que, par suite, le préfet avait seul qualité pour accorder ou refuser, dans l'intérêt de la circulation ou de l'entretien de la chaussée, les permissions de voirie nécessaires; qu'à la vérité, une circulaire ministérielle du 15 août 1893, émanant des ministres de l'intérieur et des travaux publics, a décidé, sur avis conforme du Conseil d'État en date du 27 juin 1893, que les communes pourraient accorder des concessions de distribution d'eau et de lumière pour toutes les voies publiques du territoire communal, même pour celles de grande voirie, mais que l'avis du Conseil d'État et la circulaire précités ont formellement réservé le pouvoir qu'a le préfet de donner des permissions de voirie, sans l'intervention du corps municipal, lorsqu'il s'agissait, comme dans l'espèce, d'installations qui ne comportent pas un acte de concession; que cette doctrine n'a pas été modifiée par la loi du 15 juin 1906 sur le transport de l'énergie électrique, dont l'article 5 reproduit la même réserve;

Attendu que la commune d'Arc, et par suite, Régnier, son ayant cause, ne sont pas fondés à se prévaloir de ce que la municipalité n'aurait pas donné son consentement préalable à l'établissement de canalisations installées antérieurement au traité de concession de 1902, en vertu de permissions de voirie régulièrement délivrées par le préfet à l'époque où elles sont intervenues;

Qu'ils sont également sans droit pour soutenir que l'une des canalisations (celle établie pour l'éclairage de la gare de l'Est), qui emprunte, sur un faible parcours, le chemin de grande communication no 2, dans la traversée d'Arc, avait été établie en 1886, sans qu'il soit justifié d'une permission régulière délivrée à cette époque, puisque la commune d'Arc

n'avait pas à donner d'autorisation sur une route dépendant du domaine du département et qu'il aurait appartenu à l'autorité administrative seule de relever une contravention dans les limites de son pouvoir et de sa compétence;

Par ces motifs,

Recevant en la forme et au fond l'opposition de Bardot au jugement du 22 juillet 1908, dit Régnier ès qualités mal fondé dans son action; l'en déboute, etc., etc. »

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Celui qui, d'un département où la chasse est ouverte, expédie du gibier dans un département où la chasse est fermée, en déclarant à la gare de départ la nature de la marchandise, d'ailleurs emballée de façon apparente, n'encourt aucune responsabilité pénale.

Son expédition constitue un mandat donné par l'expéditeur au transporteur d'effectuer l'expédition en respectant les règles administratives concernant le transport du gibier, mandat dont l'infraction ne peut lui être imputée.

Au commencement de janvier 1909, alors que la chasse était encore ouverte dans le département de la Lozère, M. Ernest Grousset, propriétaire à Villeneuve-la-Crémade, commune de Chastel-Nouvel, désirant offrir un lièvre à un parent de Paris, l'a fait emballer, en laissant, suivant l'usage, apparaître la tête et la queue, et l'a fait porter à la gare du chemin de fer de Mende en ayant soin de déclarer la nature du colis et de retirer récépissé.

Quelques jours après, il apprit qu'à Paris la chasse était fermée, que le colis avait été confisqué à l'octroi et que procès-verbal lui avait été dressé pour colportage de gibier en temps prohibé.

Poursuivi devant le tribunal correctionnel, il a été relaxé, après réquisitions de M. Viguier, substitut du procureur de la République, par le jugement ainsi conçu :

Le Tribunal,

Attendu qu'il est argué et qu'il n'est point contesté : 1o que le lièvre expédié par M. Grousset à Paris, par colis postal, a été déposé par l'ex

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