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tement expédiée, le ministre de l'intérieur fut informé de cette décision qui paraissait désirée;

Attendu qu'en réponse à une observation qui lui fut faite par le président de la cour, T... déclara qu'il ne croyait pas qu'il fût tenu au secret professionnel; que le prévenu est poursuivi à raison de ces faits, sous prévention d'avoir révélé en justice un ensemble de faits confidentiels par leur nature, qui ne lui avaient été confiés et dont il n'avait eu connaissance qu'à raison de son ancienne qualité;

Qu'il convient de rechercher si T... devait se conformer aux prescriptions de l'article 80 du Code d'instruction criminelle, ou s'il devait se refuser à témoigner;

Qu'il faut écarter des débats le fait de la communication de la lettre de l'administration des douanes, relative à la transaction, l'information n'ayant pas établi que cette communication ait été faite par le prévenu; Qu'il n'y a pas intérêt à savoir si la déposition de T... a été précédée ou suivie d'observations concernant le secret professionnel; que l'interdiction imposée par l'article 378 du Code pénal est d'ordre public, et que les médecins, chirurgiens, pharmaciens, sages-femmes et autres personnes dépositaires par état ou profession des secrets qu'on leur confie, ne peuvent être relevés de la défense qui leur est faite de faire connaître ces secrets; que si certaines professions sont assimilées sans difficultés à celles qui sont énumérées dans l'article 378 du Code pénal, pareil accord ne se reproduit pas même à l'égard des greffiers, avoués, notaires et autres officiers ministériels;

Que les fonctionnaires manquent à leurs devoirs s'ils révèlent sans nécessité des faits qu'ils n'ont connus qu'à raison de leurs fonctions, comme l'employé qui ferait connaître la situation commerciale ou les procédés de fabrication de celui qui l'occupe; que les administrations ont intérêt, comme le commerçant ou le chef d'industrie, à ce que certains faits de leur gestion ne soient pas portés à la connaissance du public; mais que l'obligation pour les fonctionnaires de ne pas manquer à ces devoirs et de ne pas troubler par leurs indiscrétions les services publics dont ils sont chargés doit céder devant un intérêt supérieur et d'ordre public qui veut que la justice ne statue, surtout en matière criminelle, que lorsque tous les faits qui peuvent l'éclairer se sont librement manifestés devant elle; qu'on ne saurait admettre que les fonctionnaires ne pussent déposer sur les faits relatifs à leur service qu'avec l'autorisation de leurs chefs; que cette pratique pourrait avoir les résultats les plus fâcheux; qu'à défaut d'un texte précis, il ne faut pas multiplier le nombre de ceux qui sont autorisés à ne pas déposer en justice;

Que la disposition exceptionnelle de l'article 378 du Code pénal n'a été inscrite dans nos lois qu'à une époque relativement récente, et dans le but de donner la certitude aux particuliers que les secrets qu'ils seraient obligés de confier à certaines personnes qui ne peuvent être vraiment utiles qu'en connaissant toute la vérité, ne seraient jamais divulgués; que ce serait donner à cet article une portée qu'il n'a pas, que de vouloir y trou

ver une sanction pénale contre les fonctionnaires qui manquent à leurs devoirs administratifs;

Que le fait que le législateur de 1810 a fait figurer cette disposition nouvelle à la suite des délits commis contre les particuliers indique bien que son intention n'était pas de réprimer des faits qui constitueraient des délits contre l'État;

Qu'il n'y a pas lieu, dans ces conditions, de rechercher si T..., en déposant devant la cour d'assises, a eu une intention frauduleuse, si les faits qu'il a indiqués avaient encore un caractère secret, ou si ses révélations ont pu porter atteinte à des intérêts privés;

Attendu que le prévenu, en livrant à la justice des faits dont il avait eu connaissance dans son service, n'a pas révélé un secret qui lui aurait été confié par un particulier à raison de sa fonction; qu'il n'a pas commis le délit prévu par l'article 378 du Code pénal;

Par ces motifs,

Renvoie T... des fins de la poursuite.

CHRONIQUE

CHRONIQUE D'ALLEMAGNE

I. L'assurance contre le chômage. -II. Les régies communales et les travailleurs municipaux.

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Allemagne

I. L'assurance contre le chômage. Parmi les questions que soulève la condition des travailleurs, l'une des plus graves est celle du chômage et des moyens de protection contre les misères qu'il produit. En première ligne figure l'assurance; malheureusement ce système est peu pratique, l'administration d'une compagnie d'assurance contre le chômage exige un personnel considérable, pour contrôler les assurés dont le manque de travail est souvent dû à leur propre faute et qui recourent parfois à tous les moyens pour rester le plus longtemps possible en chômage du moment où l'assurance pourvoit à leur subsistance. C'est ce qui explique pourquoi, alors que les compagnies d'assurance qui se sont établies pour couvrir à peu près tous les risques de l'existence. humaine, ont en général rejeté de leurs opérations le risque du chômage.

En dehors de ce système, on a eu recours à divers procédés en vue de remédier au chômage des ouvriers.

Le premier qui ait existé dans un certain nombre d'États, c'est l'association mutuelle. Elle présente un avantage particulier en ce sens que la surveillance des mutualistes qui chôment est facile, et que, comme l'association poursuit d'autres buts, les frais d'administration sont moins coûteux. En Autriche, pendant l'année 1907, les associations ouvrières ont distribué en secours de chômage : 1.147.535 couronnes. Dans la Grande-Bretagne, cent associations de même nature ont réparti entre leurs membres 8.425.840 shillings. Le système s'est développé également en Allemagne. En 1907, 67 associations de travailleurs, renfermant plus de 1.800.000 membres,

ont distribué 6.527.577 marks. Toutefois, il ne faudrait pas croire que toutes les associations ont prévu les secours de chômage dans leurs statuts; il en existe un certain nombre qui n'admettent pas

ces secours.

Le second procédé est l'assurance obligatoire. Elle a fonctionné en Suisse, dans l'État de Saint-Gall. Aux termes de la loi cantonale du 19 mai 1894, il a été établi dans les diverses communes de cet État une caisse de chômage obligatoire, dont font partie nécessairement tous les ouvriers à gages qui reçoivent un salaire égal ou inférieur à 5 francs. Le montant de la cotisation à verser à la caisse par chaque travailleur est fonction de son salaire : 15 centimes par semaine si le salaire est au-dessous de 3 francs par jour, 20 centimes de 3 à 4 francs; 30 centimes de 4 à 5 francs. La caisse ne fournit aucun subside en cas de chômage dans le cas où l'ouvrier a cessé son travail à la suite d'une faute qui a motivé son renvoi, où lorsqu'il a fait grève. En toute hypothèse, la caisse ne commence à payer l'assuré qu'à partir du cinquième jour de chômage. Le subside alloué est également fonction de la cotisation : il est de 1o 80 par jour pour la cotisation de 15 centimes; de 2o 10 pour celle de 20 centimes; de 2o 40 pour celle de 30 centimes. En aucun cas l'allocation n'est prolongée au delà de soixante jours de chômage.

Cette organisation du canton de Saint-Gall a sombré au bout de deux ans ; les cotisations rentraient mal, les indemnités dépassaient souvent les taux fixés aux statuts, et étaient payées dans des cas où les chômeurs n'y avaient aucun droit. La ville de Saint-Gall y perdit une subvention de 22.135 francs, le canton 6.000 francs, c'est-à-dire les frais d'administration de la caisse qu'il avait pris en charge. Cet échec n'était pas de nature à encourager les autres États de la confédération. Bâle et Zurich, qui avoient préparé des projets calqués sur celui de Saint-Gall, les abandonnèrent immédiatement.

Le troisième système est l'assurance facultative. Il fonctionne dans la ville de Berne depuis 1893; à cette époque, il a été créé dans cette capitale une institution sous le titre de caisse d'assurance contre le chômage, alimentée par une cotisation hebdomadaire de 70 centimes. par adhérent. Pour être reçu membre de l'association, le candidat doit justifier qu'il a travaillé l'année précédente pendant au moins six mois, qu'il est valide physiquement, et qu'il n'a pas dépassé l'âge de soixante ans. La caisse fournit un subside de chômage de

150 par jour; et 2 francs si le chômeur à des charges de famille. L'allocation n'est payée qu'après une semaine de chômage et seulement pendant soixante-dix jours, de décembre à mars. Cette caisse ne vit qu'au moyen des subventions qui lui sont allouées par la ville de Berne et par le canton; le nombre de ses adhérents dépasse 700; elle se compose surtout d'ouvriers du bâtiment, de travailleurs manuels, et d'ouvriers ruraux. Dans ces dernières années, on a compté jusqu'à 70% de chômeurs. Quoi qu'il en soit, le système inauguré par la ville de Berne a été copié à Bâle, à Bologne et à Venise; en 1896, il a été établi à Cologne, où la ville a fondé une caisse, qui n'alloue des secours que pendant l'hiver et qui est surtout alimentée par une subvention de la ville, qui s'est élevée l'année dernière à 20.000 marcs.

Les différents procédés décrits plus haut et fondés sur l'assurance mutuelle, facultative ou obligatoire, ne semblent pas avoir donné les résultats qu'on en attendait, aussi paraissent-ils devoir être abandonnés pour faire place à un quatrième système, inventé par la ville de Gand et qui s'est depuis étendu dans divers pays : l'Allemagne, le Danemark, la Norvège et la France. Le système gantois a pour base une entente entre les administrations municipales et les associations ouvrières. Les syndicats ouvriers perçoivent sur leurs adhérents une taxe proportionnelle au salaire, qui reçoit une affectation spéciale, pour former un fonds de réserve en cas de chômage; lorsque cet événement se produit, la commune ou, d'une manière générale, la personne publique, État, province ou commune, majore le secours alloué par la caisse, à l'ouvrier en chômage, dans une proportion déterminée par les statuts. Mais pour que le système puisse s'étendre à tous les ouvriers d'une même circonscription administrative, qu'ils fassent ou non partie d'une association, il a été décidé que les ouvriers non syndiqués seraient admis à faire des versements destinés à compléter le fonds de secours; que ces versements gérés par les établissements publics seraient placés en réserve dans des caisses d'épargne, et qu'au cas de chômage ils recevraient le secours majoré de la subvention accordée par la commune. Le système organisé par la ville de Gand en 1901, d'abord pour une durée de trois ans, a été, en présence des résultats heureux qu'il a donnés, adopté définitivement à partir de 1903. Il a été, depuis cette époque, introduit dans quatorze commu

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