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Par ces motifs,

Rejette les conclusions principales du sieur Troccaz, tendant à l'annulation de la procédure suivie contre lui et du jugement qui est intervenu; mais, infirmant ledit jugement, dit que les propos relevés à l'encontre du prévenu et proférés dans un lieu public constitueraient, s'ils étaient établis, une diffamation individuelle adressée à certains membres du Parlement; qu'en conséquence, la juridiction correctionnelle est incompétente pour connaître du procès; se déclare incompétente et renvoie le ministère public à se pourvoir ainsi qu'il avisera.

COUR D'APPEL DE LYON

(12 novembre 1908.)

COMMUNE.

MAIRE.

-

CIPATION.

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CONCESSION DE SÉPULTURE.
CONSTRUCTION D'UN CAVEAU. AUTORISATION DU MAIRE.
RESPONSABILITÉ DE LA COMMUNE.

FAUTE DU MAIRE.

ANTI

Une commune est responsable des fautes commises par son maire en qualité d'adn.inistrateur des biens communaux.

Lorsqu'une concession dans un cimetière a été accordée sous la condition que le concessionnaire ne pourrait élever aucune construction ou monument sur le terrain concédé sans qu'au préalable le projet ait été soumis au maire et approuvé, et que le concessionnaire a soumis le plan du caveau au maire, qui, lors de la prise de possession, lui indiqua, au moyen de piquets plantés dans le sol, les limites de 'sa concession, c'est aux frais et par les soins de la commune que le caveau doit être ramené aux dimensions demandées par celle-ci, le concessionnaire ne pouvant être tenu des conséquences d'une faute commise par le maire.

Cette solution résulte de l'arrêt suivant qui expose suffisamment les circonstances de l'affaire.

La Cour,

Considérant qu'en l'état de la cause, la cour n'a pas à rechercher si la concession accordée à Guillaume a constitué pour la totalité l'aliénation régulière d'un bien communal; que Guillaume ne prétend pas conserver, comme lui ayant été valablement concédée, la surface de terrain (1m 30 carré), dont la commune lui demande l'abandon et le paiement; Qu'il conclut à ce qu'il lui soit donné acte de sa déclaration qu'il se désintéresse de la surface réclamée par la commune, ou laisse celle-ci libre de ramener le caveau à la dimension qu'elle demande, à charge par Doutre ès qualités de pourvoir aux frais afférents à cette opération, luimême demeurant exempt de tous frais;

Qu'il y a lieu de lui donner acte de cette déclaration;

Que la seule question à trancher est donc de savoir si, comme le sou

tient l'intimé, l'empiétement reproché est imputable au maire, et si la commune, voulant faire cesser cet empiétement, est tenue de rendre le concessionnaire indemne des conséquences d'une faute commise par son représentant;

Considérant, en principe, qu'une commune est responsable des fautes commises par son maire en qualité d'administrateur des biens commu

naux;

Considérant, en fait, que l'acte de concession du 22 janvier 1896, approuvé le 27 du même mois par le sous-préfet de Villefranche, stipule que « Guillaume ne pourra élever aucune construction ou monument sur le terrain concédé sans qu'au préalable le projet ait été soumis au maire et approuvé par lui »;

Qu'en exécution de cette clause, l'intimé soumit au maire son projet d'édification d'un caveau;

Qu'il offre de prouver d'abord que, lors de sa prise de possession, le maire en personne lui donna les limites de sa concession, lesquelles n'auraient pas été modifiées, et fit lui-même planter les piquets destinés à les marquer, et, en outre, que le maire observa, dans la délivrance de cette concession, un usage constamment suivi et auquel le maire actuel s'est fréquemment conformé;

Que la preuve de certains de ces faits a été admise par le tribunal, et que la preuve des autres est offerte devant la cour;

Que l'appelant proteste contre la demande d'enquête au motif que les faits articulés ne seraient ni pertinents ni concluants; mais que sa protestation n'est pas fondée;

Considérant, en effet, qu'il y a intérêt à autoriser Guillaume à établir l'existence de l'usage allégué, non à raison de l'importance qu'il pourrait avoir quant à la validité de la totalité de la concession, puisque la cour n'a pas à examiner cette question, mais parce qu'il rendrait vraisemblables les autres faits articulés et contribuerait ainsi à leur démonstration;

Que ces autres faits, s'ils étaient prouvés, justifieraient les prétentions de l'intimé;

Que, d'une part, il en résulterait que l'empiétement reproché est imputable non à Guillaume, mais au maire donnant une délimitation inexacte; Considérant, en conséquence, qu'il y a lieu de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a admis la preuve de certains de ces faits, et d'autoriser en outre l'intimé à prouver dans la même enquête les nouveaux faits articulés par lui devant la cour;

Adoptant au surplus les motifs des premiers juges non contraires à ceux qui précèdent :

Donne acte à Guillaume de sa déclaration qu'il se désintéresse de la surface réclamée par la commune, et laisse celle-ci libre de ramener le caveau à la dimension qu'elle demande, à charge par Doutre ès qualités de pourvoir aux frais afférents à cette opération, Guillaume demeurant exempt de tous frais;

Confirme le jugement attaqué qui sortira son plein et entier effet; autorise en outre l'intimé à prouver dans l'enquête déjà ordonnée : 1o que Doutre, suivant l'exemple du maire Chanay, a octroyé de nombreuses concessions réalisant les prétendus empiétements en façade reprochés à Guillaume; 2o qu'au moment même où Doutre poursuivait l'instance actuelle, il concédait gratuitement, à ceux qui n'avaient pas voulu la soutenir, la jouissance en profondeur de l'espace subsistant entre le mur du cimetière et le rectangle de 2 mètres aligné sur l'allée; réserve à Doutre ès qualités la preuve contraire; rejette toutes autres conclusions des parties; condamne l'appelant à l'amende et aux dépens d'appel.

COUR D'APPEL DE NIMES

(3 décembre 1908.)

CONGREGATION AUTORISÉE. LICENCIEMENT DE L'ÉTABLISSEMENT SCO-
LAIRE FERMÉ PAR DÉCRET.
DISTINCT NON DESTINÉ A L'ENSEIGNEMENT. ABSENCE DE DÉLIT.

PERSISTANCE D'UN ÉTABLISSEMENT

Quand un établissement scolaire, dépendant d'une congrégation autorisée, fermé par arrêté ministériel, a été licencié et a cessé d'être occupé et exploité par les services auxquels il était précédemment affecté, le fait, par certains congréganistes, de continuer à habiter partie de l'immeuble constituant un établissement distinct du pensionnat fermé, en l'espèce une procure (ou économat) de province ou de district, est exclusif de tout délit.

L'établissement dont s'agit n'étant pas affecté à l'enseignement au sens de la loi du 7 juillet 1901, appartenant à une congrégation autorisée qui n'est pas encore juridiquement dissoute, conserve dès lors sa personnalité telle que l'a constituée le statut particulier qui la régit et n'a pas un caractère illicite.

Ces solutions résultent d'un arrêt rendu sur renvoi de cassation par la cour de Nimes, et dont le Droit a publié le texte dans son numéro du 23 janvier dernier.

CONFIS

VENTE PUBLIQUE DE MARCHANDISES NEUVES. SOLDES, LIQUIDATIONS,
DÉBALLAGES. AUTORISATION DU MAIRE NÉCESSAIRE.
DOMMAGES-INTÉRÊTS. PARTIES CIVILES.
COMMERÇANTS AGISSANT « UT

CATION.

AMENDE.

ASSOCIATION DE COMMERÇANTS.

SINGULI ».

(24 décembre 1908.)

Constitue l'infraction aux dispositions de l'article 1 de la loi du 30 décembre 1906 le fait de mettre en vente, sans autorisation spéciale du maire, des marchandises neuves sous forme de déballages, soldes, ventes forcées ou liquidations.

La confiscation des marchandises doit être prononcée en même temps que l'amende, mais le juge ne saurait ordonner qu'une somme d'argent, arbitrairement fixée, sera substituée aux marchandises qui n'ont pas été mises aux mains de justice. Une association légalement constituée et qui, aux termes de ses statuts, se propose, entre autres objets « de veiller attentivement à l'observation des lois et règlements concernant les commerces nomades, les organisations commerciales illicites ou susceptibles de porter préjudice à la légalité et à l'honnêteté du commerce et de l'in dustrie a le droit de se porter partie civile et de réclamer une réparation pécuniaire distincte des dommages que chacun de ses membres peut réclamer par une action personnelle pour le préjudice qu'il a personnellement souffert. Les actions des commerçants, agissant ut singuli sont recevables à la condition que chacun des membres fasse la preuve d'un préjudice particulier, résultant des actes illicites retenus à la charge du prévenu.

Ainsi décidé par infirmation partielle d'un jugement rendu le 10 novembre 1908 par le tribunal correctionnel de Nîmes; on trouvera le texte de l'arrêt dans la Gazette des Tribunaux du 2 février 1909.

COUR D'APPEL DE PARIS

(1er décembre 1998.)

DIFFAMATION.

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-

ENTREPRENEUR DE TRAVAUX PUBLICS.
ADJUDICA-
ABSENCE DE SERVICE OU MANDAT
TRIBUNAL CORRECTIONNEL COMPÉTENT.

TAIRE DE TRAVAUX MUNICIPAUX.
PUBLIC.

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Un entrepreneur chargé, en suite d'une adjudication, d'exécuter des travaux au lieu et place et pour le compte d'une ville, ne recevant du fait de l'adjudication - même si ces travaux présentent un caractère d'intérêt public aucune délégation de l'autorité, ne saurait prétendre à la qualité de citoyen chargé d'un service ou d'un mandat public, aux termes de l'article 31 de la loi du 29 juillet 1881, sur la presse. En cas de connexité entre des chefs de prévention rentrant dans la compétence des tribunaux correctionnels et d'autres chefs rentrant dans celle de la cour d'assises, la juridiction correctionnelle ne peut refuser de statuer sur les chefs dont l'examen lui est dévolu par la loi, lorsque la cour d'assises n'est pas encore saisie des autres chefs.

Ces solutions résultent de l'arrêt confirmatif suivant, rendu conformément aux conclusions de M. l'avocat général Servin.

La Cour,

Considérant que, sur l'appel interjeté le 1er août 1508 du jugement rendu à la même date, pa le tribunal de Reims, lequel a rejeté l'exception d'incompétence soulevé par les prévenus, les nommés Rauty et Lepage (Adrien) seuls comparaissent, donne défaut contre les autres prévenus;

Considérant qu'à l'appui de leur appel Rauty et Lepage ont fait sou

tenir devant la cour que le tribunal correctionnel est incompétent, - en premier lieu, parce que l'entrepreneur chargé pour le compte d'une ville de travaux présentant un caractère d'intérêt public est un citoyen chargé d'un service ou d'un mandat public; et, en second lieu, que l'administration municipale de la ville de Reims étant, simultanément avec les entrepreneurs Tixier et Ragot, parties civiles, visée dans l'affiche contenant les expressions déférées au tribunal de première instance, il y a connexité et indivisibilité entre le délit qui leur est imputé par les parties civiles et les attaques par eux dirigées contre la municipalité, et que, par suite, la seule juridiction compétente est celle qui peut connaître de l'affaire dans son ensemble, c'est-à-dire la cour d'assises;

Sur le premier moyen :

Considérant que l'entrepreneur chargé, en suite d'une adjudication, d'exécuter des travaux au lieu et place et pour le compte d'une ville, ne reçoit, même si ces travaux présentent un caractère d'intérêt public, du fait de l'adjudication, aucune délégation de l'autorité; qu'il n'est substitué à aucun des droits de la ville, considérée comme puissance publique vis-à-vis de ceux avec lesquels il est en rapport; que, dans de telles conditions, il est seulement un entrepreneur lié par un traité de forme spéciale, dont il s'est obligé à observer les clauses et ne saurait, en aucune manière, prétendre à la qualité de citoyen chargé d'un se vice ou d'un mandat public, aux termes de l'article 31 de la loi du 29 juillet 1881; Sur le second moyen :

Considérant qu'ensuite de la publication de l'affiche dont s'agit, aucune poursuite n'a été intentée par la municipalité de Reims contre les signataires de ladite affiche;

Considérant qu'en cas de connexité entre des chefs de prévention entrant dans la compétence des tribunaux correctionnels et d'autres chefs entrant dans celle de la cour d'assises, la juridiction correctionnelle ne peut refuser de statuer sur le chef dont l'examen lui est dévolu par la loi, lorsque la cour d'assises n'est pas encore saisie des autres chefs;

Considérant que l'indivisibilité invoquée par la défense, à supposer qu'elle existât, ne saurait modifier les règles de la connexité;

Considérant, en effet, qu'adopter la thèse contraire conduirait à un véritable déni de justice à l'égard des sieurs Tixier et Ragot, puisque ceux-ci ne seraient point recevabl s à agir seuls devant la cour d'assises, leur action n'ayant pour base qu'un délit de diffamation, lequel aurait été commis envers un simple particulier;

Considérant, en conséquence, que les appelants sont sans droit pour opposer une exception d'incompétence tirée de la qualité de personnes étrangères au litige;

Par ces motifs :

Confirme le jugement dont es' appel et condamne les appelants aux dépens.

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