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des illusions pareilles à celles qu'une expérience récente a dissipées; soit pour relever, au milieu d'elle, des institutions qui étaient déjà caduques, quand elle a commencé d'en démolir l'édifice, et dont le ridicule seul est resté ineffaçable à ses yeux. Or, si on ne parvient ni à l'une ni à l'autre de ces deux fins; si le succès ne couronne ni les plagiaires des artifices de la seconde époque, ni les preux adversaires des entreprises de la première, devenus les imitateurs de ses excès: la troisième semblera d'autant mieux appelée à établir avec franchise et en réalité les garanties individuelles, qu'elles sont, comme nous l'avons vu, le plus véritable intérêt, et du prince, et des ministres, et des grands, et du corps entier des gouvernés.

Qu'auraient, en effet, les garanties de si redoutable au pouvoir, de si nuisible aux hommes puissans, et qu'est-ce, après tout, qu'elles exigent?

Qu'on ne puisse être arrêté ni détenu que pour être régulièrement jugé dans le plus bref délai possible;

Que les propriétés consacrées par les lois soient à l'abri de toute atteinte et de toute extorsion arbitraire;

Que l'industrie, si elle n'est pas délivrée de

toutes ses entraves, n'ait plus à craindre au moins celles qui ont été abolies;

Que l'injure, la calomnie et la sédition soient poursuivies comme des délits ou des crimes, et que toute autre opinion manifestée de vive voix, par écrit ou par la presse, soit affranchie de toute censure préalable ou subséquente, et de toute direction administrative;

Que le culte privilégié, entretenu aux frais de tous les citoyens, même de ceux qui ne le professent pas, ne restreigne au moins en aucun sens et en aucune manière la liberté des autres croyances religieuses quelconques.

Voilà les seuls points à garantir; et, pour y parvenir, voici quelles sont les institutions strictement nécessaires :

Que les juges, sagement choisis et aussitôt institués que nommés, soient inamovibles, sauf le cas de forfaiture jugée ;

Que toutes les questions entre les citoyens et l'autorité publique soient jugées par eux ou par des jurés, et non par les agens amovibles du gouvernement;

Que tous les faits à punir comme crimes ou comme délits, soient préalablement vérifiés et déclarés par des jurés que l'autorité suprême n'ait pas choisis ni fait choisir par ses agens;

Enfin, qu'une assemblée de représentans régulièrement et librement élus, sans influence ministérielle, exprime, avec une parfaite indépendance, le consentement de la nation à tout impôt, à tout emprunt, à toute loi nouvelle.

Or, de telles barrières défendent le pouvoir suprême encore plus qu'elles ne le circonscrivent; car que lui interdisent-elles, sinon des violences, des vols, des fraudes, des attentats ou méfaits pareils à ceux qu'il réprime? Sans doute, la tyrannie n'obtient quelque sécurité qu'en retenant un peuple superstitieux et dépravé dans les ténèbres et dans la misère; mais une autorité sage et modérée a pour garanties toutes celles qu'elle donne, les lumières qu'elle laisse briller autour d'elle, les industries qu'elle anime, les propriétés qu'elle protége et qu'elle respecte. L'homme qui repousse les garanties individuelles, quelle que soit sa position, sa condition actuelle ou passée, qu'il soit plébéien, noble, ministre ou même prince, méconnaît ses intérêts les plus immédiats et les plus chers: apparemment il trouve si doux l'espoir de nuire à autrui, qu'il consent, pour le conserver, à courir les risques d'être opprimé, persécuté, proscrit lui-même. Cette manière

de sentir, qui ne diffère aucunement de celle des malfaiteurs de l'autre espèce, savoir, de ceux qui commettent les attentats particuliers que les lois punissent, ne saurait, ce semble, devenir ou rester commune au sein d'une nation qui a subi les dures épreuves des deux premières époques dont nous avons parlé; et il nous paraît permis d'espérer que l'établissement réel des garanties immortalisera la troisième.

Z.

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SUR LES DÉMÊLES DES COURS

DE BAVIÈRE ET DE BADE,

PRÉCÉDÉ

De considérations sur l'utilité de l'intervention de l'opinion publique dans la politique extérieure des états.

Par M. BIGNON.

[Brochure in-8°. de 126 pages. ]

LES institutions les plus utiles ne se propagent qu'avec lenteur, et il faut quelquefois un siècle pour qu'une invention commode et connue de tout le monde, reçoive une application nouvelle que chacun pourrait avantageusement faire s'il s'avisait seulement d'y songer. Est-il rien de plus utile au commerce, par exemple, Cens. Europ.

TOM. X.

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