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4° Qu'avant ce renouvellement, ils n'appartiendraient réellement pas à la congrégation.

Ces conditions ayant été quelques mois après approuvées par le chapitre général, l'union devint effective.

Cependant le conflit, ayant été en même temps porté à Rome par l'évêque de Cahors, allait prendre des proportions considérables (1).

Le P. Guérin, pensant qu'on avait profité du dernier bref pour différer le chapitre général, s'était gardé de mettre en oubli la supplique de la congrégation. En présence des difficultés qu'il rencontrait, il se crut en droit de la modifier au lieu d'une autorisation générale et indéfinie, il limitait à la personne du P. Faure, et pour quatre fois seulement, le renouvellement du supériorat. La supplique dans ces termes fut accueillie le 19 novembre 1640 (2), et la concession transmise immédiatement à Paris.

Quelques-uns, le P. Boulart tout le premier, étaient d'avis de procéder à de nouvelles élections, tant on désirait voir le P. Faure remis à la tête de la congrégation! Mais, la réflexion faisant comprendre tout ce qu'il y aurait là d'insolite, l'idée ne put faire son chemin.

L'amour de la règle inspira également au cardinal un acte d'autorité. Le chapitre, en considération des fonctions du commissaire général, n'avait pas nommé d'assistants. Le cardinal ne partagea point cette manière de voir, et pour faire rentrer, autant que possible, dans la constitution, il nomma lui-même, en vertu de ses pouvoirs apostoliques, à la dignité d'assistants le P. Faure et le P. Blanchart.

Si le P. Faure était l'objet d'un respect, d'une vénération unanimes dans la congrégation, la calomnie au dehors s'acharnait parfois contre lui. Saint-Victor paraissait

(1) Ms. 215, p.p. 152 et suiv., 221 et suiv., 261 et suiv.

(2) Bref transcrit, ms. 2216, tom. XVI du Recueil, fol. 491 et suiv.

ne vouloir pas désarmer. Vaincu à Rome, il essaya de prendre sa revanche à Paris. Inattaquable sous tous les rapports, c'était toujours le caractère de ce religeux, son ambition qu'on essayait de peindre sous les plus tristes couleurs cet homme était une véritable plaie pour la congrégation. La calomnie s'introduisait jusqu'au pied du trône et allait frapper les oreilles du puissant ministre. La reine en fit bon marché, grâce à de hautes et bienveillantes interventions. Richelieu manda le supérieur général : il lui fallut les explications de ce dernier pour ètre pleinement édifié à ce sujet (1).

Le dernier chapitre général avait changé l'époque de ces grandes assemblées capitulaires. Le printemps avait semblé préférable à l'automne : avec les progrès de la congrégation, de si longs, de si difficiles voyages étaient parfois imposés Nécessairement il fallait avancer ou reculer de six mois le nouveau chapitre, et par là se trouverait avancée ou reculée dans la même proportion l'élection du supérieur général. On s'arrêta au premier parti. Un bref parut nécessaire, et on cut encore recours au P. Guérin qui l'obtint le 19 novembre 1642.

Cependant, le cardinal, l'esprit toujours fixé sur la règle, n'était pas du sentiment d'abréger ainsi le temps du supériorat actuel. Il tenait d'ailleurs au P. Boulart; et il avait fini par se laisser influencer défavorablement à l'endroit du

(1) Même ms. 213, p. 59-70. « Le P. Boulart, le pria (Richelieu) de « croire que c'estoient de pures calomnies, inventées par la malice de ses a ennemis pour ternir sa réputation, luy faire perdre son crédit et ruiner a tous les desseins qu'il avoit entrepris pour la gloire de Dieu, et le res«tablissement de nostre ordre; qu'au reste c'estoit un vray serviteur de << Dieu dont les intentions estoient aussy dégagées des intérests de la «terre que ses actions esloignées des respects humains; que sa vie estoit << très saincte, sa vertu très solide et sa conduite très sage et très prudente, et que bien loin de rechercher les charges, il les avoit tousjours « refuy autant qu'il avoit peu. Son Eminence fut fort satisfaite de ces res«ponses du P. coadjuteur, l'embrassa avec grande tendresse, l'assura «qu'elle feroit estime doresnavant du P. Faure, qu'elle luy rendroit ser« vice et à toute la congrégation. »><

P. Faure, le supérieur futur que désignait depuis longtemps l'opinion commune. Les instances du P. Boulart l'ébranlérent (1); mais il ne donna son assentiment qu'après avoir pris, selon son habitude, conseil au dehors.

Le quatrième chapitre général fut indiqué pour le 26 avril. Il n'y eut encore que les supérieurs pour représenter les monastères. On remit l'élection au 1er mai. Le 30 avril eut lieu la vérification des pouvoirs et la nomination du secrétaire. Le lendemain, on se réunit dans la galerie des appartements du cardinal dont l'indisposition ne lui permettait pas de se rendre au chapitre. Avec les religieux conventuels de Sainte-Geneviève, le nombre des votants s'élevait à quarante-neuf. Le P. Faure obtint quarante-huit voix. Il fut facile de deviner encore celle qui lui manquait. Tel fut l'empressement à user du dernier bref (2).

Le développement de la congrégation demandait l'institution de visiteurs spéciaux, car il devenait impossible au supérieur général d'accomplir par lui-même, comme il l'avait fait jusqu'alors, le grave devoir de l'inspection monastique. Avant de se dissoudre, le chapitre nomma quatre visiteurs pour les maisons éloignées de Paris, le supérieur

(1) Ce fut encore le P. Boulart qui parvint à dissiper dans le cardinal de La Rochefoucauld les mauvaises impressions à l'égard du P. Faure; et sur l'estime, l'amitié de l'un pour l'autre, aucune ombre ne passa plus désormais.

(2) Devant un pareil résultat, le cardinal se prit à s'écrier: « En vérité, le doigt de Dieu est ici. « Quoi! Cela est-il vrai ! Mes yeux ne me « trompent-ils point? Quel consentement, Seigneur! quelle union! Non, « ce n'est pas ici l'esprit de l'homme. Allez, mon Père, c'est Dieu qui vous choisit; il se déclare visiblement, et j'en suis si convaincu, « que, quand un ange me diroit le contraire, je ne le croirois pas. Prenez « courage, mon Père, et croyez que celui qui vous établit si visiblement « le chef de son peuple, vous aidera pour le conduire. Pour moi, contez que je vous aime et que je vous honore; contez que vous aurez « toute ma confiance, et que reconnaissant en vous le don de Dieu pour « le gouvernement de cette congrégation qu'il a formée par vos mains, « je tâcherai en toutes choses de coopérer avec vous et de vous donner << tout le secours et la protection dont je serai capable. » (Vie du P. Faure, p. 478-479.)

se réservant les autres ainsi que les séminaires. Ces nouveaux dignitaires étaient aussi nommés pour trois ans (1).

Le chapitre de la cathédrale d'Uzès (2), Notre-Dame de Ham (3), Notre-Dame de Quarante (4), Notre-Dame de Cha

(1) Même ms., p.p. 261 et suiv. Voir aussi Vie du P. Faure, p. 474-482. Ces premiers visiteurs étaient :

1o Le P. Blanchart pour les monastères de Notre-Dame de Chatrices, Saint-Pierre d'Auxerre, Saint-Martin de Nevers, Saint-Ambroise de Bourges, Saint-Pierre d'Enaux, la cathédrale d'Uzès;

2o Le P. Sconin pour les monastères de Saint-Eloi- Fontaine, Saint-Martin d'Amiens, Notre-Dame-d'Eu, Saint-Lo de Rouen, Sainte-Barbe-en-Auge; 3o Le P. Beurrier pour les monastères de la Madeleine de Châteaudun, Saint-Séverin de Château-Landon, Saint-Jacques de Provins, Saint-Loup de Troyes, Notre-Dame de Châtillon, Val des Écoliers, Saint-Jean de Sens;

4o Le P. Billoré pour ceux de Saint-Euverte d'Orléans, Notre-Dame de Beaugency, Notre-Dame de Beaulieu-lez-Mans, Saint-Jean de Mélinais, Saint-Pierre de Rillé, Saint-Denys de Rennes, Saint-Jacques de Montfort, Toussaint d'Angers.

On l'a compris, la triennalité pour les députés aux principaux emplois, était une loi de la congrégation; mais, à la différence du général, les assistants, les visiteurs, le procureur général et les prieurs pouvaient être indéfiniment continués dans leur charge.

(2) Complications, quand il s'agissait de l'opérer, conflits, quand elle fut passée à l'état de fait accompli, voilà ce que naturellement présenta ou occasionna l'incorporation d'un chapitre cathédratique, qui relevait de l'évêque, à une congrégation, qui avait son autonomie.

Les nouveaux chanoines firent entre les mains de l'évêque la promesse d'obéissance canonique. Le serment de fidélité au roi se prêta entre celle du commissaire chargé de l'exécution de l'arrêt royal, car on avait dû avoir recours à S. M. C'est ainsi que le chapitre d'Uzès appartint à la congrégation (janvier 1641).

(Ms. fr. H. 215, in-fol., p.p. 78 et suiv.)

(3) Ham est surtout connu par son château-fort, reste imposant des anciennes fortifications rasées par Louis XIV, aujourd'hui prison d'État qui s'est fermée sur d'éminents personnages politiques. Cette petite ville renfermait autrefois une abbaye de chanoines réguliers qui datait des premières années du xire siècle et dont, en 1628, le cardinal de Richelieu fut pourvu. Sous lui et par lui, la discipline devait renaître dans le monastère.

En cas de résistance des anciens chanoines, le gouverneur de Ham devait prêter main-forte. Mais ceux-ci estimèrent avec raison qu'il était plus prudent de s'exécuter avec grâce. C'est ce qu'ils firent à l'arrivée des Génovéfains : ils les mirent en possession, le 25 mai 1641, « au contentement de toute la ville ».

(Gall., tom. IX, col. 1121-1125; Expilly, Dictionn.; même ms., p.p. 132 et suiv.)

(4) Il y avait à peine quelques mois que les Génové fains étaient éta

trices (1), Notre-Dame de Beaulieu-lez-Mans (2), Notre-Dame de Beaugency (3), Notre-Dame de Chage-lez-Meaux (4), telles

blis à Uzès, que déjà leur réputation de sainteté s'étendait par le Languedoc.

Dans le diocèse de Narbonne, était une abbaye de chanoines qui se glorifiait d'avoir Charlemagne pour fondateur. C'était Notre-Dame de Quarante. Son nom lui venait de quarante corps de martyrs placés dans une chapelle spéciale, chapelle si vénérée qu'on n'osait y pénétrer et qui, pour cette raison, s'appelait le Saint des Saints.

Les chanoines se reconnaissant indignes d'habiter en ce lieu si auguste, concurent le pieux dessein d'y appeler des religieux de la Congrégation de France. En novembre 1611, ils députaient deux des leurs à Uzès, pour sonder les dispositions qui étaient favorables. En avril 1642, ils adressaient une requête à l'archevêque de Narbonne qui leur donna non seulement l'autorisation désirée, mais de chaleureux encouragements.

Un traité fut conclu. Une des clauses portait que les Génovéfains seraient appelés à fur et à mesure des vacances. L'archevêque, trouvant qu'une pareille clause rendait l'établissement aléatoire et pouvait même le rendre problématique, « obligea les habitants de la ville de Quarante, à fournir la subsistance de quelques religieux de la congrégation, moyennant quoy i les fit exempter de logements de gens de guerre ». Deux pères et un frère convers furent donc envoyés sans retard et purent assister à l'office de l'abbaye le 15 août de la même année 1642.

(Même ms., p.p. 166 et suiv.; Vie du P. Faure, p. 457.)

(1) Dans les bois de l'Argonne, sur l'Aisne, et à cinq quarts de licues de Sainte-Menehould, s'élevait Chatrices (Castriacæ, Castri-locus), abbaye du xe siècle, laquelle fut affiliée quelque temps à Arrouaise, et entra, des siècles après, dans la Congrégation de France.

A cette dernière époque, elle avait pour chanoines d'assez bonnes gens qui ne se montraient nullement hostiles à l'idée de réformation. L'ordonnance d'union fut rendue en juin 1639; mais deux ans s'écoulèrent encore avant la prise de possession.

(Gall., tom. IX, col. 952; Expilly, Dictionn.; même ms., p.p. 175 et suiv.; Vie du P. Faure, p. 458.)

(2) Cette abbaye s'offrait aux regards dans un des faubourgs de la cité, vers le Nord, sur la rive occidentale de la Sarthe. L'emplacement avait été donné par Bernard, baron de Sillé-le-Guillaume, et la donation acceptée par l'illustre évêque Hildebert. C'est fixer au XIe siècle l'origine de NotreDame.

Sollicitée longtemps car la congrégation ne pouvait satisfaire à toutes les demandes, contrariée ensuite par le mauvais vouloir de l'ordinaire et des chanoines, l'incorporation s'accomplit enfin en octobre 1642.

(Gall., tom. XIV, col. 512; Expilly, Dictionn.; même ms., p.p. 181 ct suiv.)

(3) Ce chapitre s'était heureusement ressenti des libéralités des seigneurs de la ville. (Gall, tom. VIII, col. 1579; même ms., p.p. 192 et suiv.)

(4) Une église avait été construite par les premiers chrétiens sur l'emplacement de la vieille cité de Jatinum. Brûlée avec la nouvelle, Meaux.

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