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Donat et autres. La première pierre des nouvelles constructions avait été posée en 1720 par le régent (1).

Quoique cette bibliothèque ne soit pas publique «lisons-nous dans l'Almanach royal de 1756, MM. de « Sainte-Geneviève se font un honneur et un devoir d'en partager les richesses avec les savants qui veulent étu«dier. » Cette attention si digne d'éloges remontait même à vingt ans plus haut (2). Trois années plus tard, l'ouverture de la bibliothèque au public se trouvait ainsi fixée : les lundis, mercredis et vendredis, excepté les jours de fêtes et le temps des vacances, de deux heures à cinq (3).

Le cabinet des antiques était contigu à la bibliothèque. Il devait dans la suite occuper deux pièces non moins splendides que les galeries réservées aux livres. Ces pièces. communiquaient à l'extrémité occidentale de la galerie sud avec laquelle elles formaient un angle droit. Le très curieux cabinet s'ouvrait également aux visiteurs les lundis et mercredis (4).

(1) Gall. christ., tom. VII, col. 814: Regnante Ludovico XV, sub moderamine Philippi, Aurelianensium ducis, nova tandem exsurgit ædificii moles splendorem regali magnificentia non indignum conciliatura... (Inscription commémorative).

(2) Suivant des citations faites par M. A. Franklin, Anciennes Bibliothèques de Paris, tom. I. Paris, 1867, p.p. 80 et 83.

(3) Almanach royal, années 1759 et suiv.

(4) M. A. Franklin, Anciennes Bibliothèques de Paris, tom. I, p. 84, d'après le Guide des amateurs et des étrangers à Paris.

Source générale inême ms. 212, p.p. 887 et suiv. Voir pour plus de détails M. A. Franklin, Loc. cit., p.p. 72 et suiv., lequel a aussi beaucoup puisé dans notre manuscrit.

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II

LA NOUVELLE ÉGLISE

« Dieu ayant exaucé les vœux et les prières des Français « en rendant une parfaite santé à ce monarque, il est venu à Sainte-Geneviève le 17 novembre 1744 en rendre ses « très humbles actions de grâce au souverain arbitre de la « vie et de la mort; la reine, Monseigneur le dauphin, «Mesdames de France, les princes et princesses du sang << ont accompagné Sa Majesté très chrétienne dans cette «< cérémonie; et la confiance qu'ils ont témoigné avoir « dans la puissante protection de sainte Geneviève a auto<«< risé les abbé et chanoines réguliers de l'abbaye de «Sainte-Geneviève à présenter au roi une requête, par

laquelle ils lui ont exposé la vétusté de cette église et son <«< insuffisance pour contenir un peuple si nombreux; et sur « cette requête le roi, étant en son conseil, a rendu un « arrêt le 9 décembre 1754 par lequel il a ordonné qu'à << compter du 1er mars 1755 les billets des trois loteries qui « se tirent chaque mois dans la ville de Paris, seraient augmentés d'un cinquième et demeureraient à vingt<< quatre sols chaque billet, dont deux pour l'augmentation << des lots et deux autres sols pour la construction de la « nouvelle église (1). »

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Ces loteries étaient celles de Saint-Sulpice, des Enfantstrouvés et des communautés religieuses.

Plusieurs plans furent présentés. On adopta celui de Soufflot, architecte du roi et contrôleur des édifices royaux. Le temple, qu'on désirait un des plus vastes de la capi

(1) Arch. nat., série 01, carton 1695, Projet du procès-verbal de la pose de la première pierre de Sainte-Geneviève. On ne sait si ce procès-verbal a été officiellement adopté. Mais le document n'en demeure pas moins précieux et exact. C'est lui que nous suivons.

tale, aurait la forme d'une croix grecque dont les quatre bras ou nefs viendraient se relier à un dôme central. Toutefois, les nécessités du culte exigeaient que la nef d'entrée et celle du fond fussent plus longues que les deux autres (1). La châsse de la patronne de Paris serait placée sous le dôme; et un double escalier circulaire conduirait de là à la chapelle souterraine pratiquée sous la nef du fond et devant recevoir le tombeau également si vénéré de la sainte. Des péristyles régneraient autour des nefs et s'en détacheraient sensiblement par une élévation de cinq marches. Les nefs seraient éclairées par le haut, et les péristyles par des croisées placées entre chaque entre-colonnement, mais de façon à permettre de ranger au-dessous les mausolées de l'abbaye et ceux que dans l'avenir l'on y voudrait ériger (2). A l'extérieur, le dôme, orné d'une colonnade d'ordre corinthien, devait être flanqué de quatre massifs en avant-corps pour opposer la résistance nécessaire à la poussée des voûtes. A chacun de ces avant-corps, sur des soubassements en harmonie avec la colonnade, l'on poserait un groupe des huit principaux Pères tant de l'Église orientale que de l'occidentale. Le sommet (3), élevé de trente toises au-dessus du sol, aurait pour couronnement un piédestal destiné à la Religion qu'entoureraient les quatre

(1) Le plan premier de l'architecte était de conserver aux nefs la symétrie d'une parfaite égalité. Mais il dut le modifier dans le sens indiqué. Le même motif détermina l'addition de deux tours sur le chevet: ces tours devaient servir de clochers.

(2) Certaines dépendances de la crypte deviendraient facilement ca

veaux.

(3) Le plan premier du dôme, quant à la partie supérieure, fut aussi modifié. « Soufflot, dit Rondelet, content de nos moyens de construction, me chargea d'en faire l'application à un projet de dôme à pans coupés qu'il imagina, ensuite à un projet de dôme circulaire avec des avant-corps, et enfin à celui existant qui fut sa dernière idée. » (Mémoire historique sur le dome du Panthéon français, Paris, 1797, in-4°, p. 2.) La lanterne parut même pour le dôme définitivement adopté un amortissement préférable au groupe que nous allons signaler. (Dulaure, Histoire... de Paris, Paris, 1837-38, tom. VI, p. 103.)

Évangélistes. Quant au corps de l'édifice, seule l'entrée principale serait l'objet d'importantes décorations: d'abord une colonnade formerait en avant un splendide péristyle; puis des bas-reliefs viendraient enrichir ou varier l'ensemble du frontispice. On se contenterait pour les autres parties de l'entablement qui couronnerait extérieurement les hauts murs. Comme on le voit, l'architecte visait à la sobriété dans l'ornementation (1).

En ces quelques lignes, l'on a reconnu l'édifice religieux qui domine encore si majestueusement la montagne SainteGeneviève.

La direction des travaux demeurait confiée à l'architecte lui-même. Les constructions se feraient au nom et au compte de Sainte-Geneviève dont la grande ressource était sa quote-part dans le bénéfice des loteries (2). Le roi

(1) Rondelet, Mémoire cité; Piganiol de La Force, Description historique de la ville de Paris..., nouv. édit., tom. V1, p.p. 98 et suiv. Pour plus de détails consulter ce même Mémoire ou lire l'Histoire de l'église SainteGeneviève, par M. l'abbé Ouin-Lacroix, Paris, 1852, lequel a transcrit ou résumé le travail de cet architecte.

(2) Après les trois loteries désignées, d'autres s'établirent dont SainteGeneviève bénéficia également. Chez nous, ce mode de se procurer de l'argent était alors en vogue plus que jamais. Aussi trouvons-nous deux arrêts rendus en conseil d'Etat, à quelques jours d'intervalle, l'un le 31 août 1762, l'autre le 7 septembre suivant, portant création, le premier d'une loterie générale à trois livres le billet, le second d'une loterie de piété à vingtquatre sols le billet pour remplacer celle de Saint-Sulpice. Dans les trois premières années, c'est-à-dire de mars 1755 à janvier 1758, l'abbaye reçut environ un million cinq cent mille livres, soit cinq cent mille livres par an. Un autre compte nous fait connaître que les recettes, du 20 mars 1759 au 24 janvier 1770, s'élevèrent à trois millions cinq cent quatre-vingt-treize mille quatre cents livres, ce qui, les centimes écartés, faisait par année moyenne trois cent vingt-six mille six cent soixante-douze livres. Un notaire du Châtelet était nommé par arrêt du conseil d'Etat pour percevoir et payer sur ordonnancement les travaux de la nouvelle église. Les honoraires étaient fixés à deux mille quatre cents livres. (Arch. nat., ser. H, cart. 3632-33.) Le gouvernement se réservait encore la haute direction et surveillance, ain siqu'il conste, en particulier, de ce fragment d'une lettre de Necker, directeur général des finances, en date du 4 septembre 1780 : «....... Il s'agit « de Sainte-Geneviève. Le roi m'a dit qu'il me chargerait de cette affaire; «M. le comte de Maurepas me l'a écrit... A présent, je suis accablé des « demandes de tous les artistes prétendants et de tous les protecteurs. Je << ne puis répondre, parce qu'il faut que je sois investi ministériellement

abandonnait encore à l'abbaye, tant qu'elles subsisteraient, les loyers des maisons expropriées pour former une place devant la nouvelle église et pratiquer les rues jugées nécessaires (1). Enfin, en vertu de lettres patentes du 6 juin 1784, un emprunt de quatre millions se concluait au nom de Louis XVI, emprunt « gradué sur dix années à raison de quatre cent mille livres par an, » et « dont les deniers ne pourraient être appliqués, sous quelque prétexte que ce fût, qu'aux dépenses des constructions nécessaires. pour achever l'exécution des plans de Sainte-Geneviève... (2). » On le voit, la basilique devra véritablement son existence à la munificence royale.

Dès 1757, on commença les fouilles. L'emplacement choisi était la grande cour de l'abbaye. En plusieurs endroits, on s'aperçut que le sol ne se composait que de terres rapportées. On creusa toujours; et cent cinquantǝ puits dont quelques-uns avaient jusqu'à quatre-vingts pieds de profondeur, furent mis à découvert (3). On les remplit par de solides travaux de maçonnerie. Tout cela avait pris deux années, et occasionné de bien grandes dépenses.

« Sur toute la superficie de ce fond bien nivelé et battu,

« de la part du roi,... afin que je puisse donner des ordres et régler l'administration à établir, examiner celle qui existe, confirmer les insa pecteurs, nommer le chef, régler les traitements...» (Arch. nat., série « O1, cart. 1704.)

(1) De 1759 à 1774, ces loyers formèrent la somme de cent huit mille neuf cent quatre-vingt-une livres.

Les autres ressources étrangères étaient les aumônes et les matériaux provenant des maisons expropriées qu'on démolissait. (Ibid.)

(2) Arch. nat., série S, cart. 3637.

(3) Ces puits ont dû être creusés par les potiers qui, du temps des Romains, occupaient la montagne. Les àtres de four propres à la cuisson de ces sortes d'objets et découverts en même temps ne permettent pas de doute à ce sujet, Cette industrie était même développée en cet endroit, car, à une époque assez récente, les travaux qu'on exécuta aux jardins du Luxembourg, firent apparaître, avec d'autres puits, des restes de poteries, mélanges dont la composition attestait, à la fois, la grossièreté et la finesse de l'art. (Voir M. Cocheris, dans son édit. de l'abbé Lebeuf, tom. II, p.p. 615 et 117.)

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