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Si prospère en France, la congrégation captivait l'admiration de l'étranger.

Les chanoines réguliers de Sainte-Croix et de SaintGeorge d'Augsbourg mandaient au P. Blanchart que la traduction en latin du Directoire du P. Faure était entre leurs mains à tous, que, pour bien rétablir la discipline canonique parmi eux, les Constitutions de la congrégation leur seraient d'un grand secours. Ils ajoutaient : « Que le « Dieu très bon, très grand conserve dans sa vigueur la Congrégation de France, ce splendide ornement de « l'ordre canonique. Si nous pouvions obtenir au moins du « supérieur général, par un acte authentique, une participation des bonnes œuvres qui s'y font, des jeûnes qui s'y pratiquent... nous nous estimerions assurément les << plus heureux du monde (1). »

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(1) Gall., tom. VII, col. 804, où se lit le texte latin. Ces voeux furent réalisés. Des lettres d'association furent expédiées en Allemagne. Une condition imposée aux chanoines d'outre-Rhin était de célébrer chaque année la fête de sainte Geneviève, et, ensuite, au premier jour libre, de chanter un service pour les défunts de la congrégation.

Une association spirituelle analogue se forma entre la congrégation et l'Oratoire.

On renouvela celle qui datait de si haut, entre Sainte-Geneviève et SaintGermain des Prés.

(Ibid., col. 803, 804.)

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Un supérieur, précédemment général, de la congrégation de Sainte-Croix de Coimbre, disait, de son côté : « La Congrégation de Sainte-Geneviève tient le premier rang « dans notre ordre canonique et, par la parfaite obser<< vance de la vie régulière, elle ne cesse d'exhaler un << suave parfum. Que le Seigneur accorde à cette sainte « congrégation de chanoines de demeurer toujours dans « sa religieuse et rigoureuse observance, afin que nous ayons un modèle à imiter!... (1) »

Un évêque se faisait, à Rome, l'interprète des sentiments de l'illustre général de la congrégation de Windesheim, autrefois si florissante en Hollande et en Allemagne et à laquelle avait appartenu le célèbre Thomas à Kempis. « Le P. Pierre de Saint-Trudon, disait le prélat, est si « désireux de réformation, qu'il voudrait, se dépouillant « du généralat, marcher le premier, à la tête de ses cha<«<noines, pour aller chercher la discipline de Sainte-Gene« viève; car il aimerait mieux vivre en simple religieux << dans un ordre parfaitement réformé que d'être général « dans un autre un peu en décadence (2). »

Des actes venaient à l'appui des paroles. Le Val des Écoliers de Liège ne se contentait pas de l'affiliation que nous avons fait connaître il entrait pleinement dans la congrégation, en se donnant à elle sans autres conditions. que celles-là mêmes qu'on stipulait en France (3). Si l'abbaye de Géronsart n'imita pas absolument le Val, au moins implora-t-elle l'assistance du même ordre dans la personne d'un religieux qui vint remettre en vigueur la

(1) Gall., tom. VII, col. 804, où se lit le texte latin. (2) Gall., ibid., col. 805, où texte latin.

(3) Le concordat fut signé en janvier 1667, ratifié aussitôt à Paris et, quelques mois après, à Rome. L'abbé se réservait trois mille livres de rente et les religieux six cents. Après la mort de l'abbé, le supérieur serait triennal et nommé conformément aux constitutions de la congrégation. A celle-ci étaient cédés les lieux réguliers, ainsi que l'administration spirituelle et temporelle. Les anciens devaient se retirer dans une autre partie du monastère. (Ms. 185, p.p. 631 et suiv.)

vie canonique

la prière fut entendue, et le succès si complet que l'abbé et les religieux prirent l'« habit et les pratiques de la congrégation (1).

La dignité et les pouvoirs du P. Blanchart lui furent continués en 1670 et 1673, si grande était la confiance, bien méritée du reste, qu'il inspirait! Mais la mort vint le frapper au milieu de son neuvième généralat, le 13 février 1675.

Esprit aussi élevé, plus brillant peut-être, cœur aussi large, aussi dévoué que le P. Boulart, il exerça, avec une âme non moins pénétrée des graves devoirs de la vie religieuse, et grâce à une longue administration, une action des plus salutairement efficaces sur les heureuses destinées de la congrégation. Comme le P. Boulart, avant de remettre son âme à Dieu, il bénit les membres présents de la nombreuse famille en leur adressant ses derniers conseils, ses suprêmes exhortations. « Je vous quitte, ajoutat-il, mais j'espère que je demeurerai toujours avec << vous (2). »

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Quelques-unes de ses maximes ont été conservées. Elles se rapportent à l'amour de Dieu et à la sagesse. Le P. Blanchart n'a écrit les premières « qu'après avoir trempé sa plume dans son cœur » (3). Les secondes ont été extraites des écrits et des lettres du vénérable supérieur. Transcrivons quelques mots de celles-ci et de celles-là. Elles feront connaître, à la fois, le saint, le penseur et même un peu l'écrivain.

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D'abord, sur l'amour de Dieu :

« N'ayant qu'un cœur et un cœur si petit, on se doit employer absolument à aimer Dieu infiniment aimable.

(1) Ceci s'accomplissait en 1669. (Même ms., p. 762-763.)

(2) Ms. fr. H. 30, in-fol., lequel ms. est le second volume de la Vie inédite du P. Blanchard par Le Royer, chanoine de Sainte-Geneviève. Cette Vie est dédiée au P. Polinier, supérieur général. La dédicace porte la date de 1713.

(3) Ibid.

α

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« La grande science sans amour de Dieu est une grande ignorance, et l'ignorance avec un grand amour est une grande science.

« Il est bon d'aimer ses parents, mais il est beaucoup << meilleur d'aimer Dieu.

« Les blessures de l'amour divin sont désirables, parce qu'elles donnent la santé et la vie.

« Un jour bien employé pour acquérir l'amour de Dieu « vaut mieux qu'un million d'années pour acquérir toute << la terre.

<< Le lit du cœur est trop étroit pour y contenir Dieu et << la créature; Dieu est trop jaloux pour souffrir un cor« rival.

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<< Tous les moments de la vie sont précieux devant Dieu,

quand ils sont employés pour l'amour de Dieu.

« Le plus grand des miracles est un

<< aimant.

« Le vrai trésor du cœur, c'est la charité.

cœur bien

« Le véritable amour de Dieu est la mesure de toute vertu.

<< La charité est l'élément du cœur; c'est le bon air qui « fait vivre l'âme chrétienne et religieuse.

« La véritable joie ne se trouve que dans le sein virginal « de la vertu.

« La jouissance de mille mondes ne peut causer jamais << tant de paix qu'en donne une conscience qui a la charité « pour règle.

« Un cœur d'enfant envers Dieu n'estime et ne recherche " que sa volonté.

«Dieu ne se plaît que dans les cœurs abaissés par l'humilité, innocents par la simplicité, étendus par la «< charité.

« Une âme religieuse doit être tellement morte à elle<< même et au monde que si son esprit était déjà dans le

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Les maximes de sagesse ont particulièrement trait aux supérieurs des communautés religieuses.

«La charge de supérieur est l'art des arts: elle suppose << un homme tout d'amour, parce qu'un supérieur est une image de Dieu et porte spécialement le caractère de la << Divinité qui est la charité.

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« Un supérieur... doit se faire craindre et aimer d'une « crainte et d'un amour filial; lorsqu'il se sert de lancette, << il doit se servir de coton avant et après.

<< Les religieux font le peuple de Dieu. David le compa<< rait à un mouton qui demande à être conduit par dou<< ceur : le bâton le fait fuir, l'herbe l'attire.

<< Saint Bernard a gouverné en priant, saint Pierre en << pleurant, saint Paul en exhortant, Moïse, le plus doux << des hommes, en suppliant.

« Le supérieur doux est un arbre de vie en religion et en fait le paradis.

« La trop grande rigueur est une marque de faiblesse.

« Un supérieur dans les répréhensions mêmes doit prendre le parti de la douceur: il doit se souvenir qu'il « est père; il ne doit reprendre qu'avec amour.

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La modération veut qu'on ne fasse pas d'une mouche « un éléphant.

« Les faibles sont des malades qu'il faut remuer douce<< ment.

« Qui dit un supérieur dit un homme accompli en tout... << Il doit avoir les perfections de tous ses inférieurs, comme << l'âme possède et renferme en soi éminemment les per«<fections des âmes et des formes inférieures.

« Le supérieur n'est supérieur que pour les faibles, il << n'est médecin que pour les malades, il n'est chef que « pour conduire courageusement.

«La patience est la voie de la victoire et de la couronne. << Il ne faut se proposer que des croix dans la conduite « des âmes.

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