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assemblage informe de vices et d'activité, de erimes et de talents, il offrira un jour au scalpel de l'histoire ?

Nous nous sentons accablés en envisageant cette multitude de matériaux qu'une seule semaine a accumulés sur notre table. Chaque jour, chaque heure est venue ajouter à leur masse. Dans le Nord et dans le Sud, au centre comme aux extrémités, on voit partout un tableau d'opérations également animé, un mouvement d'opinion aussi prononcé contre la tyrannie, quoique divisé sur le mode de restauration.

Nous croyons de notre devoir de faire connaître, avant tout, les rapports officiels des militaires anglais employés à la suite des deux grandes armées alliées, et les dépêches de notre Lord Wellington, toujours invaincu, toujours victorieux. Les proclamations des Ailiés appelleront ensuite notre attention, puisque ce sont elles qui fixent l'opinion sur les intentions des souverains coalisés, et nous ferons admirer la libéralité de principes, la générosité de sentiments qui y dominent, et dont une partie de la nation française était pourtant bien peu digne.

Les Bourbons viendront ensuite. On verra tous les cœurs les réclamer, en dépit des clameurs des restes de la secte constitutionnelle qui a recouvré dans ces derniers moments un reste de chaleur qui ne tardera pas à s'éteindre. Ils auront beau accepter les Bourbons par grâce spéciale et, comme ils le disent, faute de mieux. La cocarde blanche qu'ils arborent à regret sur des fronts flétris, ne s'alliera jamais avec le bonnet rouge.

Les décrets très-provisoires du Sénat de Buonaparté qui se dit la nation française, formeront la clôture du tableau.

Et toutes ces heureuses circonstances ont été connues à Londres dans la sainte semaine qui précede la Résurrection!

Solvitur acris hyems gráta vice veris etALEXANDRI.

RAPPORTS OFFICIELS.

SUPPLÉMENT A LA GAZETTE DE LONDRES.

Bureau des Affaires Etrangeres, le 2 Avril 1814.

Les dépêches, dont suivent des copies et extraits, ont été reçues aujourd'hui à ce bureau.

Bar-sur-Aube, le 22 Mars, 1814.

Milord,

J'ai l'honneur d'envoyer ci-joint pour l'instruction de Votre Seigneurie, un rapport additionnel daté de Laon, le 16 de ce mois, que j'ai reçu hier au soir du colonel Lowe; ainsi qu'une lettre de mon aide-de-camp le capitaine Harris par laquelle il rend compte de l'affaire du général St. Priest à Rheims, le 13 de ce mois.

J'ai l'honneur, etc.

(Signé)

Au vicomte Castlereagh.

C. STEWART, lieut.-gén.

Lettre du Colonel Lowe à l'Honorable Sir C. Stewart, datée du Quartier-Général de l'Armée combinée sous le Maréchal Blucher, Laon, le 10 Mars, 1814.

Monsieur,

Il n'est rien survenu d'important à cette armée depuis les batailles du 9 et du 10, à l'exception des affaires de Rheims. Les rapports du capitaine Harris, votre aide-de-camp, qui était avec le général comte de St. Priest lorsque la ville a été prise et perdue, rendent inutile que j'entre dans aucun détail sur ces événen ents. La perte de la ville a causé quelques inconvénients, ayant suspendu notre communication avec la grande armée, dont nous ne connaissons pas exactement la position ou les mouvements actuels; mais je suppose, le

gros de l'armée ennemie, et Buonaparté lui-même étant dans ces environs, qu'elle continue de s'avancer vers Paris.

Cette armée-ci a occupé pendant quelques jours une ligne qui s'étend de Chauny à Corbeny et Craonne, ayant des corps avancés vers Soissons, principalement pour tirer des vivres et fourages des derrieres et du flanc droit. A présent elle se concentre de nouveau.

Buonaparté, suivant les rapports des déserteurs et d'au tres avis, est à Rheims, et il a sa garde avec lui Le quartier-général du maréchal Blucher est toujours ici.

Rapport du Capitaine Harris, daté de Laon, le 14 Mars 1814.

Monsieur,

Le corps du lieutenant-général comte de St. Priest est resté durant la nuit du 12 dans la ville de Rheims. Hier entre 10 et 11 heures du matin, il fut rapporté que les avantpostes sur la route de Soissons, avaient été attaqués et obligés de se retirer, et que l'ennemi s'avançait en force de ce côté. Les troupes quitterent la ville sur-le-champ et prirent position sur le terrain élevé, de chaque côté de la chaussée qui conduit à Soissons, environ à un quart de mille de Rheims, et de forts détachements de cavalerie, artillerie et infanterie furent postés en avant. On vit venir l'ennemi en fortes masses d'infanterie avec une nombreuse artillerie; et il les rangea sur deux lignes, lorsqu'il fut environ à un mille et demi de la position des Alliés; les avant-gardes des deux armées furent immédiatement engagées, et pendant plusieurs heures il y eut une canonnade et des escarmouches continuelles dans la plaine entre les deux positions; durant ce temps-là l'ennemi ne fit d'autre mouvement que d'étendre sa ligne sur les deux flancs; il semblait attendre l'arrivée de l'infanterie, qui n'avait pas encore paru. Vers 4 heures les colonnes de cavalerie s'avancerent avec l'artillerie, une vive canonnade commença, et il fut fait une attaque très-vigoureuse sur deux bataillons russes qui s'étaient portés en avant: la fermeté de ces troupes la fit échouer: l'ennemi fut repoussé, et il souffrit grandement par le feu de l'infanterie, qui se retira sans perte sur la position. L'ennemi fit avancer une ligne d'artillerie, couverte par ses colonnes de cavalerie; il y eut une terrible canonnade de part et d'autre. Les troupes alliées furent long-temps exposées au feu meurtrier d'une artillerie très-supérieure, mais elles se maintinrent fermement sur

leur terrain. On vit que l'ennemi portait vers sa droite une forte colonne de cavalerie. Dans ce moment le comte de St. Priest (qui avait été constamment dans les situations les plus exposées, donnant un brillant exemple à ses troupes,) fut renversé de son cheval par un boulet de canon, et on fut obligé de l'emporter du champ de bataille. Une telle perte dans un moment aussi critique était singulierement malheureuse; dans le court espace de temps qui s'écoula avant qu'il fût remplacé dans son commandement, l'ennemi fit ses plus grands efforts. La brigade de cavalerie russe du général Emanuel qui soutenait l'infanterie sur la gauche, fut attaquée par une forte masse de cavalerie; ces troupes firent la plus belle résistance possible; mais elles furent accablées par un nombre quadruple du leur et souffrirent beaucoup. L'ennemi pressa en même temps le centre et la droite, et il en résulta inévitablement que tout le corps se retira à travers la ville de Rheims Une pareille retraite devant un ennemi si supérieur en cavalerie, ne pouvait pas être effectuée sans perte, mais cette perte a été beaucoup moins forte qu'on ne pouvait s'y attendre. Les colonnes se sont retirées par la route de Bery-au-Bac. L'entrée de Rheims fut défendue pendant deux heures par un petit détachement d'infanterie, et l'ennemi ne fût maître de la ville qu'à dix heures; cependant il avait fait passer sa cavalerie sur la droite de la ville et elle s'était avancée sur la route de Bery-au-Bac. Par ce mouvement la retraite d'une petite colonne par cette route fut coupée, et elle fut obligée de se retirer par la route de Neufchâtel. Tout le corps a rejoint ce matin l'armée du maréchal Blucher dans le voisinage de Laon. Je ne peux pas dire exactement quelle a été la perte des Alliés dans l'affaire d'hier; mais j'apprends qu'elle n'excede pas 2000 hommes. Sept canons prussiens et un russe ont été laissés dans la possession de l'ennemi. Les canons pris le 12 à Rheims, ont été conduits à Châlons, avant que les troupes françaises eussent repris la ville. La perte de l'ennemi en tués et blessés ne peut qu'avoir été très-considérable. On dit que Buonaparté a été lui-même présent durant toute la journée.

J'ai l'honneur, etc.

(Signé)

T. N. HARRIS, aide-de-camp.

Lettre de Lord Burghersh.

Milord,

Arcis, le 18 Mars, 1814.

En conséquence des succès obtenus par l'armée du maréchal Blucher près de Laon, le prince Schwartzenberg porta son quartier-général à Pont-sur-Seine, et dans la vue de prendre l'offensive, il ordonna aux 4e, 5e et 6e corps de passer la Seine et d'essayer de s'établir à Villeneuve, Provins et Bray, pendant que le 3e corps s'établirait à Sens. Mais avant que ces mouvements fussent entierement exécutés, on reçut la nouvelle de la défaite d'une partie du corps du général St. Priest, le 14, et de l'occupation de Rheims par l'ennemi. Le prince Schwartzenberg se détermina à suspendre le mouvement qu'il avait commencé; il reporta son quartiergénéral ici le 15, et rassembla son armée à portée. Le 5e corps occupa la ville d'Arcis; son avant-garde fut placée à Mailly et Sommesous. Le 6e corps prit position entre St. Ferrail et Mont le Potier. Le 4e corps alla à Nogent, ses partis détachés occupant Mariot et Sordun, sur la route de Provins et Bray. Le 3e corps était entre Villeneuve et Troyes.-Les détails de l'affaire du général St. Priest n'ont pas encore été reçus; cet officier a été grievement blessé; il s'est retiré vers Bery-au-Bac, et l'on croit qu'il a formé sa jonction avec le général d'Yorck. Par sa retraite, Rheims a été ouvert aux Français, qui l'ont occupé immédiatement. De là ils se sont portés sur Châlons et Epernay, dont ils se sont emparés le 16; les petites garnisons qui occupaient ces villes se sont retirées à leur approche. L'ennemi n'a fait hier aucun mouvement en avant, mais aujourd'hui le général Keiseroff a rapporté que Buonaparté était hier au soir à Epernay, et qu'il s'avance vers la Fere-Champenoise. Ayant prévu ce mouvement et étant déterminé à marcher sur Châlons dans tous les cas, pour soutenir le mouvement du maréchal Blucher, le prince de Schwartzenberg avait ordonné hier aux différents corps de son armée de prendre une position, les gardes et réserves entre Donnement et Dommartin; le 5e corps entre Rammercy et Arcis; le 6e corps entre Arcis et Charny; le 4e corps formant la gauche à Mery le 3e entre Nogent et Pont-sur-Seine--Le général Bianchi a été attaqué le 11 près de Mâcon, par deux divisions de. E

VOL. XLV.

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