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de la branche aînée', fit la seconde branche, qui finit à sa dixième génération".

Jean d'Hornes fut chef de la troisième et dernière branche, et portoit le nom de seigneur de Baucignies3. Il étoit second fils de Philippe seigneur de Gaesbeek*, arrière petit-fils de Thierry, chef de la seconde branche. Eugène-Maximilien, sa cinquième génération directe, fut fait prince d'Horn". Son fils unique, Philippe-Emmanuel, prince d'Horn, eut les charges, les emplois et les distinctions les plus considérables, civiles et militaires, sous Charles II, roi d'Espagne, dont il reconnut le testament, servit de lieutenant général aux siéges de Brisach sous Mgr le duc de Bourgogne, de Landau sous le maréchal de Tallard, se distingua fort sous le même à la bataille de Spire, puis sous le maréchal de Villeroy, fut blessé de sept coups et prisonnier à la bataille de Ramillies. D'Antoinette, fille du prince de Ligne, chevalier de la Toison d'or et grand d'Espagne, il a laissé deux fils: Maximilien-Emmanuel, qui a suivi la révolution des Pays-Bas, où tous ses biens sont situés, où il porte le nom de prince d'Horn', et

1. Ce Thierry était fils de Guillaume VII de Hornes et cadet de Guillaume VIII, trisaïeul du comte Jean II.

2. Appelée originairement de Houtquerque (Oudekerke) et de Gaesbeek, elle finit en 1709 par la mort de Philippe-Maximilien, comte de Horn, lieutenant général au service de France.

3. Ce nom est en interligne au-dessus de Gaësbeck, biffé. Cette seigneurie était venue aux Hornes dès le treizième siècle par une alliance avec Jeanne de Louvain, dame de Baucignies.

4. Gaesbeek (Saint-Simon écrit Gaësbeck) est dans le Brabant, canton actuel de Lennick-Saint-Quentin. Ce Philippe, grand chambellan du duc de Bourgogne, mourut en 1488.

5. Eugène-Maximilien épousa une Croy-Solre morte en 1704.

6. Saint-Simon copie l'article du Moréri.

7. Ce mariage eut lieu en 1694. Henri-Louis-Ernest, prince de Ligne, grand d'Espagne, gouverneur du Limbourg, et chevalier de la Toison d'or en 1687, mourut le 8 février 1702.

8. Avant prince, il a biffé C. d'. Ce Maximilien-Emmanuel était né le 31 août 1695.

Antoine-Joseph', portant le nom de comte d'Horn, dont il s'agit ici, et qui n'étoit encore que capitaine réformé dans les troupes autrichiennes, moins par sa jeunesse que par être fort mauvais sujet, et fort embarrassant pour sa mère et pour son frère. Ils apprirent tant de choses fâcheuses de sa conduite à Paris depuis le peu de temps qu'il y étoit arrivé, qu'ils y envoyèrent un gentilhomme de confiance avec de l'argent pour y payer ses dettes, lui persuader de s'en retourner en Flandres, et, s'il n'en pouvoit venir à bout, implorer l'autorité du Régent, à qui ils avoient l'honneur d'appartenir par Madame, pour leur être renvoyé3. Le malheur voulut que ce gentilhomme arriva le lendemain qu'il eut commis le crime qui va être raconté.

du comte d'Horn

à Paris.

Le comte d'Horn alla le vendredi de la Passion, 22 mars, Catastrophe* dans la rue Quincampoix, voulant, disoit-il, acheter pour* cent mille écus d'actions, et y donna pour cela rendezvous à un agioteur dans un cabaret. L'agioteur s'y trouva avec son portefeuille et des actions, et le comte

1. Les mots Ant. Joseph ont été ajoutés dans un blanc laissé à cet effet. La Chenaye des Bois l'appelle Philippe-Joseph-Maximilien.

2. La parenté avec Madame était très éloignée; mais il est exact que dans les trente-deux quartiers de son pennon généalogique figurait l'écusson de Horn.

3. Renvoyé est en interligne au-dessus d'arrivé, biffé.

4. Les mots achepter p' remplacent en interligne emprunter, biffé. 5. Sur l'affaire du comte de Horn, voyez Dangeau, tome XVIII, p. 255-257; le Journal de Buvat, tome II, p. 59-61, avec la curieuse relation provenant de Gueullette qu'Émile Campardon a donnée en appendice, p. 503-510; celui de Barbier, édition Charpentier, tome I, p. 32-34; la Correspondance de Madame, recueil Jæglé, tome III, p. 70 et suivantes; les Correspondants de Balleroy, tome II, P. 141152; les Mémoires de Duclos, édition Michaud et Poujoulat, p. 563 et suivantes; la Gazette d'Amsterdam, nos xXVII et XXVIII; les Souvenirs de la marquise de Créquy, tome II, p. 29-54, qui, malgré leur nulle valeur historique, fournissent sur cet événement des renseignements qui peuvent être réels, et contiennent dans les pièces justificatives du tome IX, p. 159-166, deux pièces diplomatiques dont l'au

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d'Horn accompagné, lui dit-il, de deux de ses amis. Un moment après, ils se jetèrent tous trois sur ce malheureux agioteur; le comte d'Horn lui donna plusieurs coups de poignard, et prit son portefeuille; un de ses deux prétendus amis, qui étoit Piémontois, nommé Mille', voyant que l'agioteur n'étoit pas mort, acheva de le tuer. Au bruit qu'ils firent, les gens du cabaret accoururent, non assez prestement pour ne pas trouver le meurtre fait, mais assez tôt pour se rendre maître des assassins et les arrêter. Parmi ce bagarre, l'autre coupe-jarret se sauva; mais le comte d'Horn et Mille ne purent s'échapper. Les gens du cabaret envoyèrent chercher la justice, aux officiers de laquelle ils les remirent, qui les conduisirent à la Conciergerie. Cet horrible crime, commis ainsi en plein jour, fit aussitôt grand bruit, et aussitôt plusieurs personnes considérables, parents de cette illustre maison, allèrent crier miséricorde à M. le duc d'Orléans, qui évita tant qu'il put de leur parler, et qui, avec raison, ordonna qu'il en fût fait bonne et prompte justice. Enfin les parents percèrent jusqu'au Régent; ils tâchèrent de faire passer le comte d'Horn pour fou, disant même qu'il avoit un oncle enfermé, et demandèrent qu'il fût enfermé

thenticité semble incontestable. Dom H. Leclercq a parlé de cette affaire Histoire de la Régence, tome II, p. 520-521.

1. Laurent de Mille, capitaine réformé au régiment de BréhenneAllemand.

2. Nous avons déjà vu (tomes VII, p. 350, et XVIII, p. 126) que Saint-Simon fait bagarre du masculin.

3. Il se faisait appeler d'Étampe ou du Terne; mais il semble que son vrai nom était Lestang et qu'il était fils d'un banquier de Lille. On croit qu'il se sauva aux Indes hollandaises, où, sous le nom de Grandpré, il vécut jusqu'en 1764 : voyez le récit de Gueullette dans le Journal de Buvat, tome II, p. 504-505 et 510. L'expression de coupe-jarret pour signifier brigand et assassin de profession existait déjà au moyen âge.

4. Il y a dans les Souvenirs de la marquise de Créquy, tome II, p. 38-43, le texte d'une supplique présentée au Régent par les parents du comte et spécifiant que plusieurs de ses ascendants ont été ou sont

aux Petites-Maisons', ou chez les Pères de la Charité à Charenton, chez qui on met aussi des fous; mais la réponse fut qu'on ne pouvoit se défaire trop tôt des fous qui portent la folie jusqu'à la fureur. Éconduits de leur demande, ils représentèrent quelle infamie ce seroit que l'instruction du procès, et ses suites pour une maison illustre, qui appartenoit à tout ce qu'il y avoit de plus grand, et à presque tous les souverains de l'Europe. Mais M. le duc d'Orléans leur répondit que l'infamie étoit dans le crime et non dans le supplice3. Ils le pressèrent sur l'honneur que cette maison avoit de lui appartenir à luimême. « Hé bien! Messieurs, leur dit-il, fort bien; j'en partagerai la honte avec vous. » Le procès n'étoit ni long ni difficile. Law et l'abbé Dubois, si intéressés à la sûreté

encore atteints d'aliénation mentale et que lui-mème a été temporairement malade d'une affection du même genre. Cette pièce qui est signée par plus de cinquante parents ou alliés de la maison de Horn paraît apocryphe.

1. Cet hospice, fondé en 1557 par la ville de Paris, dans la rue de Sèvres, à la place d'un ancien hôpital établi en 1497 pour les vénériens, occupait l'emplacement du square actuel du Bon-Marché. On y recevait les infirmes, les femmes épileptiques et les fous. Son nom venait de ce qu'il se composait presque entièrement d'un ensemble de petites maisons basses entourant les diverses cours.

2. Les Pères, ou plutôt Frères de la Charité avaient été fondés vers 1540 en Espagne par saint Jean-de-Dieu; ils ne s'introduisirent en France qu'en 1601, époque à laquelle Marie de Médicis leur donna, au coin de la rue Saint-Père et de la rue du Colombier (Jacob), un terrain sur lequel ils bâtirent le grand hôpital de la Charité. Leur maison de Charenton avait été fondée en 1645 par le contrôleur des guerres Sébastien Leblanc; elle était spécialisée dans le traitement des maladies mentales, et dépendait du roi. Un président du Parlement, délégué royal, la visitait régulièrement, et les procès-verbaux de ces visites, depuis 1717 jusqu'en 1789, sont encore conservés aujourd'hui aux Archives nationales, carton X2B 1335.

3. Duclos (Mémoires, p. 594) prétend que le Régent cita même à cette occasion le vers de Thomas Corneille dans Le comte d'Essex (acte IV, scène III):

Le crime fait la honte, et non pas l'échafaud.

des agioteurs, sans laquelle le papier tomboit tout court et sans ressource, prirent fait et cause auprès de M. le duc d'Orléans, pour le rendre inexorable, et lui, pour éviter la persécution qu'il essuyoit sans cesse pour faire grâce, eux dans la crainte qu'il ne s'y laissât enfin aller, n'oublièrent rien pour presser le Parlement de juger1. [Add. SS. 1655] L'affaire alloit grand train, et n'alloit à rien moins qu'à la roue. Les parents, hors d'espoir de sauver le criminel, ne pensèrent plus qu'à obtenir une commutation de peine. Quelques-uns d'eux me vinrent trouver, pour m'engager de les y servir, quoique je n'aie point de parenté avec la maison d'Horn. Ils m'expliquèrent que la roue mettroit au désespoir toute cette maison, et tout ce qui tenoit à elle

1. Quoi qu'en dise Saint-Simon, ce ne fut pas le Parlement qui jugea le procès, mais la chambre criminelle du Châtelet, présidée par le lieutenant criminel; Gueullette le dit formellement, et la teneur de l'arrêt qu'il donne lui avait été fournie par Brussel, l'un des greffiers criminel du Châtelet. D'autre part, il n'y a pas trace du procès dans les arrêts de la Tournelle au Parlement. On devrait donc retrouver les pièces dans les archives du Châtelet. Or, les arrêts criminels y manquent pour toute l'année 1720, et il ne reste plus trace de l'information du crime dans les papiers des commissaires Aubert et Regnard, qui en furent chargés. Cela pourrait donner à penser que ces disparitions ne sont pas accidentelles. Mais nous avons cependant une preuve formelle du jugement : le greffier criminel tenait un répertoire alphabétique des personnes jugées par la chambre criminelle; celui qui se rapporte aux années 1716 à 1725 existe encore aux Archives nationales sous la cote Y 10617. Or on y trouve à la lettre D, au mois de mars 1720, les noms De Hornes Antoine et De Mille Laurent. La preuve est péremptoire.

2. Le supplice de la roue consistait à attacher le condamné par les quatre membres sur deux morceaux de bois en forme de croix de SaintAndré. Le bourreau, avec une barre de fer, lui brisait les bras, les jambes et la poitrine. On l'attachait ensuite sur une roue de carrosse suspendue à un poteau; on ramenait les jambes et les bras brisés derrière le dos et on tournait la face du supplicié vers le ciel, pour qu'il expirât dans cet état dans une agonie parfois longue. La plupart du temps, les juges ordonnaient que le condamné serait étranglé avant d'être fixé à la roue. C'est un édit de Henri II de juillet 1547 qui avait appliqué ce supplice aux assassins.

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