Page images
PDF
EPUB

peuvent, dans les besoins de l'État, être vendus et aliénés à titre perpétuel et incommutable, en vertu d'un décret spécial des représentants de la nation sanctionné par le roi.

ART. 2. Les propriétés foncières du prince qui parvient au trône, et celles qu'il acquiert pendant son règne, à quelque titre que ce soit, sous la seule exception comprise en l'article suivant, sont, de plein droit, unies et incorporées aux domaines de la Couronne, et l'effet de cette réunion est perpétuel et irrévocable.

ART. 3. Les acquisitions faites par le roi à titre singulier et non en vertu des droits de la Couronne sont et demeurent, pendant son règne, à sa libre disposition; et, ledit temps passé, elles se réunissent de plein droit et à l'instant même au domaine de la Couronne.

20. Décret concernant l'aliénation des domaines nationaux, leur vente aux municipalités et leur revente aux particuliers. Du 14 mai-17 mai et 25 juillet 1790 (1).

L'Assemblée nationale, considérant qu'il est important de répondre à l'empressement que lui témoignent les municipalités et tous les citoyens pour l'exécution de ses décrets des 19 décembre 1789 et 17 mars 1790, sur la vente des domaines nationaux, et de remplir en même temps les deux objets qu'elle s'est proposés dans cette opération, le bon ordre des finances et l'accroissement heureux, surtout parmi les habitants des campagnes, du nombre des propriétaires, par les facilités qu'elle donnera pour acquérir ces biens, tant en les divisant qu'en accordant aux acquéreurs des délais suffisants pour s'acquitter, et en dégageant toutes les transactions auxquelles ces ventes et reventes pourront donner lieu des entraves gênantes et dispendieuses qui pourraient en retarder l'activité, a décrété et décrète ce qui suit :

TITRE PREMIER.

DES VENTES AUX MUNICIPALITÉS.

ART. 1". Les municipalités qui voudront acquérir seront tenues d'adresser leurs demandes au Comité établi par l'Assemblée nationale pour l'aliénation des domaines nationaux. Ces demandes seront faites en vertu d'une délibération du conseil général de la commune.

ART. 2. Les particuliers qui voudront acquérir directement des domaines nationaux pourront faire leurs offres au Comité, qui les renverra aux administrations ou directoires de département, pour en constater la véritable

(1) Ce décret fut sanctionné par des lettres patentes du 17 mai, lesquelles furent corrigées par d'autres lettres patentes du 25 juillet 1790.

valeur et les mettre en vente, conformément au règlement qui sera incessamment donné à cet effet.

ART. 3. Le prix capital des objets portés dans les demandes sera fixé d'après le revenu net effectif ou arbitré, mais à des deniers différents, selon l'espèce de biens actuellement en vente qui, à cet effet, sont rangés en quatre classes:

Première classe. Les biens ruraux consistant en terres labourables, prés, vignes, pâtis, marais salants, et les bois, les bâtiments et autres objets attachés aux fermes ou métairies et qui servent à leur exploitation.

Deuxième classe. Les rentes et prestations en nature de toute espèce et les droits casuels auxquels sont sujets les biens grevés de ces rentes ou prestations.

Troisième classe. Les rentes et prestations en argent, et les droits casuels dont sont chargés les biens sur lesquels ces rentes et prestations sont dues.

La quatrième sera formée de toutes les autres espèces de biens à l'exception des bois non compris dans la première classe, sur lesquels il sera statué par une loi particulière.

ART. 4. L'estimation du revenu des trois premières classes de biens sera fixée d'après les baux à ferme existants, passés ou reconnus par devant notaires et certifiés véritables par le serment des fermiers devant le directoire du district; et, à défaut de bail de cette nature, elle sera faite d'après un rapport d'experts, sous l'inspection du même directoire, déduction faite de toutes impositions dues à raison de la propriété".

Les municipalités seront obligées d'offrir, pour prix capital des biens des trois premières classes, dont elles voudront faire l'acquisition, un certain nombre de fois le revenu net, d'après les proportions suivantes :

Pour les biens de la première classe, vingt deux fois le revenu net;
Pour ceux de la deuxième, vingt fois;

Pour ceux de la troisième, quinze fois.

Le prix des biens de la quatrième classe sera fixé d'après une estimation. ART. 5. Les municipalités déposeront dans la Caisse de l'Extraordinaire, immédiatement après leur acquisition, quinze obligations payables d'année en année, et montant ensemble aux trois quarts du prix convenu.

Elles pourront rapprocher le terme desdits payements, mais elles seront tenues d'acquitter une obligation chaque année.

Les fermages des biens vendus auxdites municipalités, les rentes, loyers et le prix des bois qu'elles auront le droit d'exploiter, seront versés dans la Caisse de l'Extraordinaire ou du district, à concurrence des intérêts par elle dus.

(1) Voir ci-après, p. 334 et suiv., les modèles relatifs aux déclarations des fermiers, aux évaluations d'après les baux, aux nominations d'experts et aux estimations.

ART. 6. Les obligations des municipalités porteront intérêt à 5 p. 100, sans retenue, et cet intérêt sera versé, ainsi que les capitaux, dans la Caisse de l'Extraordinaire.

ART. 7. Les biens vendus seront francs de toutes rentes, redevances ou prestations foncières, comme aussi de tous droits de mutation, tels que quint et requint, lods et ventes, reliefs, et généralement de tous les droits seigneuriaux ou fonciers, soit fixes, soit casuels, qui ont été déclarés rachetables par les décrets du 4 août 1789 et 15 mars 1790, la Nation demeurant chargée du rachat desdits droits, suivant les règles prescrites, dans les cas déterminés par le décret du 3 de ce mois; le rachat sera fait des premiers deniers provenant des reventes.

ART. 8. Seront pareillement lesdits biens affranchis de toutes dettes, rentes constituées et hypothèques, conformément aux décrets des 10, 14 et 15 avril 1790").

Dans le cas où il serait formé des oppositions, elles sont, dès à présent, déclarées nulles et comme non avenues, sans qu'il soit besoin que les acquéreurs obtiennent de jugement.

ART. 9. Les baux à ferme ou à loyer desdits biens qui ont été faits légitimement et qui auront une date certaine et authentique, antérieure au 2 novembre 1789, seront exécutés selon leur forme et teneur, sans que les acquéreurs puissent expulser les fermiers, même sous l'offre des indemnités de droit et d'usage.

ART. 10. Les municipalités revendront à des particuliers et compteront de clerc à maître avec la Nation du produit de ces reventes.

ART. 11. Les municipalités seront chargées de tous les frais relatifs aux estimations, ventes, subrogations et reventes. Il leur sera alloué et fait raison, par le receveur de l'Extraordinaire, du seizième du prix capital des reventes qui seront faites aux particuliers, à mesure et à proportion des sommes payées par les acquéreurs.

ART. 12. Si, pour compléter le payement des obligations aux époques fixées, quelques municipalités avaient besoin de recourir à des emprunts, elles y seront autorisées par l'Assemblée nationale ou par les législatures qui en régleront les conditions.

ART. 13. Les payements à faire par les municipalités ou par les acquéreurs à leur décharge ne seront reçus à la Caisse de l'Extraordinaire qu'en espèces ou en assignats.

ART. 14. La somme totale des ventes qui seront faites aux municipalités en vertu du présent décret ne pourra excéder la somme de 400 millions, l'Assemblée nationale se réservant de prescrire les règles qui seront observées pour les ventes ultérieures qui pourraient avoir lieu.

(1) C'est une erreur; il faut lire : décrets des 16 et 17 avril, formant le décret du 17 avril (ci-dessus n° 17); cf. l'article 2.

TITRE II.

DE

LA PRÉFÉRENCE RÉSERVÉE AUX MUNICIPALITÉS
SUR LES BIENS SITUÉS SUR LEUR TERRITOIRE.

ART. 1". Toute municipalité pourra se faire subroger, pour les biens situés dans son territoire, à la municipalité qui les aurait acquis; mais cette faculté n'arrêtera pas l'activité des reventes à des acquéreurs particuliers, dans les délais et les formes prescrites ci-après. Les municipalités snbrogées jouiront cependant du bénéfice de cette subrogation lorsqu'elle se trouvera consommée avant l'adjudication définitive.

ART. 2. Toutes les terres et dépendances d'un corps de ferme seront censées appartenir au territoire dans lequel sera situé le principal bâtiment servant à son exploitation.

Une pièce de terre non dépendante d'un corps de ferme, et qui s'étendra sur le territoire de plusieurs municipalités, sera censée appartenir à celui qui en comprendra la plus grande partie.

ART. 3. Pour éviter toute ventilation entre les municipalités, la subrogation devra comprendre la totalité des objets qui auront été réunis dans une seule et même estimation.

ART. 4. Les municipalités qui auront acquis hors de leur territoire seront tenues de le notifier aux municipalités dans le territoire desquelles les biens sont situés, et de retirer de chacune un certificat de cette notification, qui sera envoyé au Comité.

Les municipalités ainsi averties auront un mois, à dater du jour de la notification, pour former leurs demandes en subrogation; et, le mois expiré, elles n'y seront plus admises.

ART. 5. La demande en subrogation faite par délibération du conseil général de la commune requérante, contenant la désignation de l'objet, sera adressée au Comité, et notifiée à la municipalité qui aurait précédemment acquis.

ART. 6. Lorsque la demande en subrogation aura été admise par l'Assemblée nationale, la municipalité subrogée déposera dans la Caisse de l'Extraordinaire : 1' des obligations pour les trois quarts du prix de l'estimation des biens qui lui sont cédés; 2° la soumission de rembourser, à la municipalité sur laquelle elle exercera la subrogation, la part proportionnelle des frais relatifs à la première acquisition, lesquels, en cas de difficultés, seront réglés par le Corps législatif ou les commissaires par lui nommés.

ART. 7. Le receveur de l'Extraordinaire prendra pour comptant les obligations de la municipalité subrogée, et donnera décharge d'autant à la municipalité évincée par la subrogation.

ART. 8. Les municipalités admises à la subrogation seront tenues de remplir les conditions énoncées par l'article 6, dans le délai de deux mois pour celles qui ne sont pas à plus de cinquante lieues de la municipalité évincée;

De deux mois et demi pour celles qui sont distantes depuis cinquante jusqu'à cent lieues ;

Et de trois mois pour les autres.

Le tout à compter du jour de la notification prescrite par l'article 4. Ces délais expirés, elles seront déchues de la subrogation.

ART. 9. Toutes les municipalités qui, dans le délai d'un mois à dater de la publication du présent décret, se seront fait subroger, pour les fonds situés dans leurs territoires, aux municipalités qui auraient fait des sou missions antérieures, jouiront de la totalité du bénéfice porté par l'article 11 du titre I".

ART. 10. Les municipalités qui se seront fait subroger après le délai cidessus jouiront pareillement dudit bénéfice; mais il en sera distrait un quart au profit de la municipalité qui, après avoir fait la soumission la première, se trouvera évincée par la subrogation, pourvu qu'elle ait consommé l'acquisition dans le mois qui suivra cette soumission.

ART. 11. L'acquisition sera censée consommée lorsqu'après l'estimation des biens, faite dans la forme prescrite par l'article 4 du titre I", les offres auront été acceptées par le Corps législatif.

TITRE III.

DES REVENTES AUX PARTICULIERS (1)

ART. 1. Dans les quinze jours qui suivront l'acquisition, les municipalités seront tenues de faire afficher aux lieux accoutumés de leur territoire, à ceux des territoires où sont situés les biens et des villes chefs-lieux de districts de leur département, un état imprimé et détaillé de tous les biens qu'elles auront acquis, avec énonciation du prix de l'estimation de chaque objet, et d'en déposer des exemplaires aux hôtels de ville desdits lieux, pour que chacun puisse en prendre communication ou copie, sans frais.

ART. 2. Aussitôt qu'il sera fait une offre au moins égale au prix de l'estimation, pour totalité ou partie des biens vendus à une municipalité, elle sera tenue de l'annoncer par des affiches dans tous les lieux où l'état des biens aura été ou dû être envoyé, et indiquer le lieu, le jour et l'heure auxquels les enchères seront reçues.

(1) Voir ci-après, p. 332 et suiv., les modèles relatifs aux opérations de la vente aux particuliers.

« PreviousContinue »