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pour conftant que la Compagnie employera dans l'efpace de fix années fes fonds à acheter des grains, & les fera rentrer auffi une fois, par la vente de ces mêmes grains.

Les fonds de la Compagnie doivent être très-confidérables, puifqu'il lui faudra acheter à peu près 50 millions de feptiers en froment ou feigle, & pour 27 millions de feptiers en légumes, avoine, ou bled de Turquie. Ces derniers grains ne vont pas au pair avec le bled, quoique le prix de l'avoine fuive ordinairement celui du bled, attendu que la mesure en eft double; mais auffi comme le prix des autres n'est jamais égal à celui du froment, il y aura une espece de compenfation dans tous ces prix; de forte que j'évalue en général tous les grains d'une nature inférieure à celle du feigle & du froment, à un tiers moins que celle du froment; je ne compterai même qu'une feule claffe de ces bieds, & je réduirai les prix de la campagne à celui que j'ai fixé pour Paris. En partant de cette obfervation, j'arbitrerai le prix général du feptier de froment, à 15 livres que la Compagnie fera obligée de l'acheter, & à 10 livres celui de tous les autres grains & légumes inférieurs au froment & au feigle; ces fuppofitions que tout le monde fent être affez conformes aux proportions & au rapport ordinaire, qu'il y a entre toutes les différentes fortes de grains que l'on recueille dans les Provinces, & dont les peuples font leur nourriture, ferviront à nous donner une idée générale des fonds que la Compagnie fera obligée d'avoir, & quel fera fon profit dans l'efpace de fix

années.

1. 54 millions de feptiers de bled, à 15 livres le feptier, font

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2. 27 millions de feptiers de bled commun ou légumes, à o livres le feptier

810,000,000 1.

270,000,000 1.

1080 millions.

Total, un milliard, quatre-vingt millions feulement pour l'achat de tous les grains du Royaume, pour une année abondante. Or, comme on a fuppofé que dans l'efpace de fix années il y aura un bénéfice d'un tiers, ce gain montera à 360 millions qui reviendront à la Compagnie, pour l'indemnifer des pertes qu'elle auroit faites par le défaut de récolte. De plus, cette même Compagnie, dans la partie de fes membres qui vendront les grains, recevra dans les années d'abondance un milliard quatrevingt millions de plus qu'elle n'auroit reçu par le commerce ordinaire des Denrées. Quelle différence pour l'avantage & l'aifance qui en rejailliront fur tout le commerce de l'Etat en général! Mais fi la Compagnie a tous les fix ans un profit de 360 millions, ce fera 60 millions qui lui reviendront chaque année, & qui feront repartis entre fes membres, de la maniere que nous l'allons faire voir. J'entrevois ici l'inquiétude de nos

lecteurs. Le moyen, dira-t-on, de faire trouver à la Compagnie des fonds fi confidérables, fur-tout fans en payer un fol d'intérêt; mais cet article ne fera traité qu'après le détail des réglemens fur le partage des profits. Toutes ces différentes emplettes & ventes des grains fe feront dans chaque fubdélégation du Royaume; ce feront les habitans de chaque diftrict, poffefleurs de grands fonds, qui, comme nous l'avons déjà dit, auront le foin de cette manutention, & en tiendront des regiftres les plus fcrupuleux, afin que toutes les femaines on puiffe faire part aux bureaux de chaque généralité, des ventes, des achats, en un mot, de toutes les différentes opérations que la Compagnie aura faites; ces états feront envoyés enfuite au bureau général, qui les rendra publics dans des annonces; de même qu'on fait connoître au public le taux des actions de la Compagnie des Indes, il en fera de même pour notre Compagnie d'Agriculture: le partage fe fera de la maniere fuivante. Après qu'on aura prélevé tous les frais, les appointemens des commis, & autres petites dépenfes que je faurai remplacer, comme on le verra, la Compagnie du diftrict fe réfervera la moitié du profit pour elle, & la partagera entre tous les membres fuivant la proportion des fonds de leurs actions, & de l'intérêt qu'ils auront dans le diftrict. Ce premier partage fera appellé du nom de primes; l'autre moitié du profit fera mife en dépôt dans la caiffe commune à l'Etat, laquelle fera entre les mains des quatre préfidens, du contrôleur & de l'inspecteur, qui en auront chacun une clef différente; l'état de cette fomme fera envoyé au bureau de la généralité, & le bureau ouvrira tous ces états par ordre, avec le tableau du fonds des actions de chaque diftrict, conforme à l'évaluation des biens en fonds de terre compris dans la fubdélégation. Toutes les généralités du Royaume feront la même opération; ainfi le bureau général de Paris aura une connoiffance parfaite des produits de cette Compagnie, qui, comme on le verra par la fuite, feront bien plus confidérables que celui dont nous parlons actuellement & qui réfulte des magafins à grains. L'idée de ces magafins nous fervira donc pour les autres. Le bureau général ne fera de toutes ces fommes mifes en dépôt, qu'une feule mafle commune fur laquelle feront prélevés d'abord deux cinquiemes pour le Roi, ainfi que tous les appointemens qui feront attribués aux magiftrats, officiers & commis des bureaux de chaque généralité du Royaume, & même du bureau général de Paris. Sur les trois autres cinquiemes, le bureau général faifant droit fur les représentations particulieres des agens de chaque généralité, en deftinera la portion qu'il jugera néceffaire & utile pour l'amélioration, & les augmentations qu'il fera à propos de faire dans quelques fubdélégations, afin de favorifer davantage l'agriculture ou le commerce; & enfin, ce qui reftera après toutes les fouftractions, fera réparti entre toutes les généralités, au marc la livre, fuivant le montant des actions de ces mêmes généralités. Les généralités travailleront à faire la répartition de ces fommes

entre tous les diftricts de leur dépendance; & enfin chaque diftrict difperfera la portion qui lui fera avenue, en raifon des actions particulieres, & la diftribuera à chacun de fes membres, au prorata de l'intérêt qu'il aura dans la Compagnie. On nommera ce fecond partage, fecondes; l'argent qui reviendra à chaque membre, fera pris dans le dépôt, en préfence de tous les principaux magiftrats affemblés, & le reftant fera envoyé au tréforier de la généralité, afin que ce bureau, après avoir retenu fes droits, renvoie le reste au bureau général, qui mettra la part du Roi au tréfor Royal. Les appointemens & revenus des charges fe diftribueront à chaque magiftrat & officier; & les fommes qui feront deftinées pour les travaux communs de cette Compagnie, feront dépofées entre les mains d'un tréforier particulier, qui les délivrera, quand il lui fera ordonné, pour le paiement de ces travaux. Ainfi, par le partage des fecondes, il y aura une liaison d'intérêt entre toutes les fubdélégations particulieres du Royaume, ce qui les unira fous un même chef dans la perfonne du Roi, & fous la direction du bureau général.

Réglement de police fur les grains & le pain.

Nous avons propofé ci-deffus le projet de mettre en magasin les grains

fuperflus des années abondantes, afin de fervir au peuple dans les temps de difette. La Compagnie d'agriculture fera chargée du foin de ces magafins. Il n'y aura de fa part aucun monopole à craindre, dès que les prix d'achat & de vente feront fixés par un réglement fait au bureau général, dans les pays & les villes de provinces où les grains ne font communs que par le commerce; il y aura des magafins proportionnés à la quantité des habitans pour y faire provifion de grains, & on ajoutera au prix du bled la dépenfe que coûtera leur tranfport dans les marchés ou magafins de ces endroits. Cette voiture ne fera pas fort coûteufe, comme on va le voir car la Compagnie de chaque diftri&t, qui fera obligé de faire fes emplettes de grains dans les diftricts voifins où il y aura eu des récoltes abondantes, enverra fes commis, ou établira des gens préposés pour les recevoir à la portée de quelque port de riviere, où il y aura des entrepôts destinés à raffembler les grains, à mefure que les fermiers & cultivateurs les apporteront pour les vendre. Il n'y aura en effet guere de diftrict où il ne fe trouve quelque petite riviere ou canal de navigation on les fera voiturer par le moyen des bateaux que la Compagnie aura en commun, généralité par généralité, & les bateaux de chaque généralité ferviront à tranfporter les Denrées dans les pays où la Compagnie aura befoin de les envoyer; & comme on fuppofe que la navigation des tivieres & des canaux fera générale dans tous les pays, on préférera cette voie à celles des voitures par terre, quand il y aura un trajet un peu long à faire car alors ce fera un objet peu confidérable, quand même,

par

par les détours qu'il faudra faire, on auroit cinquante à foixante lieues de trajet de plus à parcourir.

Les grandes villes parlementaires, les capitales des provinces & des ports de mer n'auront point de magafins particuliers, comme les autres villes moins confidérables. Il faudra toujours laiffer dans ces endroits la liberté aux marchands de faire le commerce des grains, s'ils le jugent à propos, pour leur compte particulier; mais quand les grains feront rares dans la ville, & que le commerce ordinaire ne pourra pas les laiffer au prix porté par les réglemens, le bureau de la généralité qui aura un état de tous les magafins de fon reffort, ainfi que de tous les habitans, donnera fes ordres, afin que les fubdélégations qui feront les mieux fournies en grains, en détachent chacune de leurs magafins une certaine quantité pour les villes & ports de mer, qui foit proportionnée à la consommation journaliere de la ville qui en demande, & à la quantité qu'il y en aura par magafin, de maniere que les grains foient pris un peu fur chaque diftri&t, qu'il n'y ait pas plus de fourniture à proportion faite pour un pays que pour un autre, & que les peuples ne rifquent pas d'en manquer. La fubdélégation de cette ville, ou port de mer, fera chargée de cette commisfion; c'est à elle qu'on adreffera les grains; & il y aura dans plufieurs endroits, fi la ville eft grande, de petits magafins où l'on mettra le bled en vente pour tout le public, à l'exception des marchands qui n'en acheteront pas de la compagnie. La taxe de ces bleds fera la même que nous avons dit, favoir 20 livres le feptier du bled ordinaire, & 25 livres 13 fols + deniers le bled d'élite on ajoutera feulement au prix les frais de voiture & celui du second magasin; il ne fera fait aucun profit fur la vente, autre que celui dont nous avons parlé; mais pour faciliter ce tranfport des Denrées, la compagnie de chaque diftri&t qui fera obligée de faire une fourniture ou un envoi aux villes qui auront ordre de tirer fur elle, pourra faire convertir les grains en farine, & paffer ces farines pour n'envoyer aux villes que la plus fine fleur, confervant les gruaux & le fon pour les gens de la campagne, fi les paysans n'aiment mieux l'acheter en nature pour l'apprêter chez eux.

Dans le temps que la compagnie aura fes greniers ouverts & fes grains en vente, elle tiendra à la portée du magafin une fabrique de pain, où elle aura un entrepreneur général qui s'engagera de fournir à deux fols la livre le pain fin de place; la compagnie lui livrera des bleds du magafin, à mesure que le boulanger en demandera. Ce boulanger fera foumis à la police ordinaire des magiftrats, ainfi qu'à celle de la compagnie, qui veillera à ce que le pain foit bien conditionné. Indépendamment de la vente du pain, la compagnie livrera fes grains à tous ceux qui voudront, les acheter, pourvu qu'ils foient habitans du diftrict de la fubdélégation; mais elle n'en fournira à aucun étranger, fans un ordre émané du bureau principal de la généralité. Comme il y aura des magafins par Tome XV. Fff

tout le Royaume, le peuple aura également par-tout les mêmes commodités; ainfi il feroit fort inutile qu'il y eût d'autres que la compagnie qui vouluffent faire alors le trafic des grains, ce ne feroit que dans le cas du commerce étranger; par exemple, fi le grain étoit rare dans quelque Royaume voisin, que quelques marchands particuliers pourroient l'entreprendre; mais comme, même dans ce cas, il pourroit devenir très-préjudiciable à l'Etat que l'on y employât les grains en magafin, ou, pour mieux m'exprimer, les grains de la referve, la compagnie ne le permettroit pas alors; elle feroit arrêter & confifquer à fon profit les grains qui fortiroient de fon district, fans en avoir obtenu fa permiffion; cependant cette loi n'auroit lieu que dans les temps où les bleds de réserve feroient en vente car s'ils n'y étoient pas, & que le grain valût moins de 20 livres le feptier de bled ordinaire, tout particulier, fujet, ou autre, auroit la faculté libre de faire le commerce des grains indifféremment dans tout le Royaume, & même chez l'étranger, attendu que ce feroit alors une preuve évidente que l'Etat feroit fuffifamment pourvu de cette Denrée, en fuppofant encore que les magafins en réferve de la compagnie fuffent pleins ou à peu de chofe près; j'ai dit les magasins en réserve, pour les diftinguer d'avec d'autres magafins particuliers, qui feront dépendans de la compagnie du diftrict pour y ramaffer les grains fuperflus, après que les magalins en réserve feroient pleins. Ces feconds magafins, comme il a été dit précédemment, n'entreront point dans les détails de la compagnie générale du Royaume. La compagnie du diftri& feul en auroit l'adminiftration, pour les vendre lorfqu'elle le jugeroit à propos, & dans tous les lieux où elle voudroit, foit au dedans, foit au dehors du Royaume. Elle ne pourroit cependant vendre ces grains qu'une livre par feptier moins que les grains du magasin en réserve, parce que ce feroit leur nuire & autorifer la compagnie à faire quelque monopole, au lieu qu'en les obligeant de vendre ces grains à un prix un peu plus bas que les grains de réserve, ils ne peuvent plus nuire au public; d'ailleurs la liberté que les autres marchands & les autres fubdélégations auroient d'apporter pour vendre au marché toute forte de grains à des prix libres, ainsi que d'en acheter, ôteroit toute ombre de foupçon, & ne laifferoit aucun moyen de faire un commerce de grain qui fût défavantageux pour l'Etat : car dès que la compagnie ne pourra vendre les grains des magasins particuliers de fon diftrict, qu'à raifon de 20 fols moins par feptier, que le prix taxé de 20 livres, & qu'au contraire il fera permis aux étrangers de les vendre au prix qu'ils voudront, il eft évident que quand la compagnie mettra en vente les grains de fes magafins de réserve, afin que le public ait toujours la liberté du choix pour acheter au prix qui lui conviendra le mieux, alors les grains étrangers ne pourront porter aucun préjudice à ceux du diftri&, parce que le magafin aura certainement la vogue, au cas que les marchands voulussent vendre leurs grains au-deffus du prix

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