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deux sectes, dont l'une défendait bêtement le clergé et le despotisme. La plus puissante et la plus illustre était celle qui fut connue sous le nom d'Encyclopédistes. Elle ren-' fermait quelques hommes estimables et un plus grand nombre de charlatans ambitieux. Plusieurs de ses chefs étaient devenus des

personnages considérables dans l'État : quiconque ignorerait son influence et sa politique n'aurait pas une idée complète de la préface de notre révolution. Cette secte, en matière de politique, restera toujours au-dessous des droits du peuple; en matière de morale, elle alla beaucoup au delà de la destruction des préjugés religieux. Ses coryphées déclamaient quelquefois contre le despotisme et ils étaient pensionnés par les despotes; ils faisaient tantôt des livres contre la cour et tantôt des dédicaces aux rois, des discours pour les courtisans et des madrigaux pour les courtisanes; ils étaient fiers dans leurs écrits et rampants dans les antichambres. Cette secte propagea avec beau

coup de zèle l'opinion du matérialisme, qui prévalut parmi les grands et parmi les beaux esprits.

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Entre tous ces philosophes que Robespierre accusait d'être restés au-dessous des droits du peuple, en matière politique, il est juste de disculper Rousseau, qui définit la royauté une commission révocable, et de rendre à Diderot la responsabilité qui lui revient dans l'établissement de l'athéisme, comme condition de la liberté pour peuple, car c'est à lui qu'appartient cette maxime philosophique :

le

« L'athéisme est le seul système qui puisse conduire l'homme à la liberté.

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Sans aucun doute, Robespierre avait mal lu les philosophes auxquels il reprochait d'être restés au-dessous des droits du peuple', ou bien peut-être en leur accordant

1. « La souveraineté, n'étant autre chose que l'exercice de la volonté générale, ne peut s'aliéner. Si le peuple promet seulement d'obéir, 1 se dis

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la propagation de l'athéisme, voulait-il se réserver l'honneur des autres moyens révo lutionnaires dont il n'était en réalité que le metteur en œuvre. Il faisait tort à Diderot, auteur de l'accusation portée contre la propriété d'être la cause de tous les maux qui affligent l'humanité et de la proposition du partage des terres, dont il l'accompagne immédiatement. Il méconnaissait également le génie politique et l'instinct révolutionnaire de Rousseau, qui établit dogmatiquement la souveraineté du peuple et l'impossibilité de concilier la royauté et la liberté.

Ces injustices de Robespierre sont maintenant avérées, et nous reconnaissons volontiers que sa rude tyrannie a vécu de plagiats qu'il avait intérêt à dissimuler; nous le reconnaissons même d'autant plus volontiers que cette reconnaissance rend, pour

sout par cet acte; il perd sa qualité de peuple. A l'instant qu'il y a un maître, il n'y a plus de souverain, et dès lors le corps politique est détruit, » (J. J. Rousseau, Contrat social, livre II, chap. 1.)

l'instruction de l'avenir comme pour l'instruction du présent, aux Césars de la Terreur ce qui appartient aux Césars de la Terreur 1.

Les plus mauvais Jacobins de cette époque de sang ne parlaient que de leur philosophie, et se vantaient de leur généalogie philoso

1. « La vraie monarchie n'est qu'une constitution imaginée pour corrompre les mœurs des peuples et pour les asservir, ainsi que les Romains le firent des Spartiates et des Bretons en leur imposant un roi ou un despote.» (Helvétius, de l'Homme, tome II, note sur la section ix.)

« Si l'autorité des rois vient de Dieu, c'est comme les maladies et les fléaux du genre humain, » (J. J. Rousseau, Émile, tome IV.)

« Les rois sont des bêtes féroces qui dévorent les nations.» (Raynal, Histoire philosophique et politique, tome IV, livre XIX.)

<< S'il nous faut absolument des rois, au moins faut-il nous souvenir qu'un roi ne doit être autre chose que le premier commis de sa nation. » (Hel vétius, de l'Homme.)

« Qu'est-ce donc que cet imbécile troupeau qu'on appelle nation? peuples lâches, imbécile troupeau! vous vous contentez de gémir quand vous devriez rugir! Peuples lâches, stupides! puisque là conti

phique, Le 10 frimaire an 11, Isabeau, Chaudron-Rousseau, Beaudot et Tallien adressaient le rapport suivant au ministre de l'intérieur :

« Cette nuit plus de deux cents gros négociants ont été arrêtés, les scellés mis sur leurs papiers, et la commission militaire ne va pas tarder à en faire justice. .»

nuité de l'oppression ne vous donne aucune énergie ; puisque vous êtes par millions, et que vous souffrez qu'une douzaine d'enfants (appelés rois), armés de petits bâtons (appelés sceptres), vous mènent à leur gré; obéissez, marchez, sans nous importuner de vos plaintes; et sachez du moins être malheureux, si vous ne savez pas être libres. » (Hist. polit. et philosoph. de Raynal.)

« Peu importe que les hommes soient vicieux, c'est assez s'ils sont éclairés. » (Helvétius, de l'Esprit, discours IX, chap. vi.)

« Les enfants ne doivent pas plus de reconnaissance à leur père pour le bienfait de la naissance, que pour le champagne qu'il a bu, ou pour les menuets qu'il a bien voulu danser. » (Toussaint, les Mœurs, partie III, art. 4.)

Toussaint, qui admettait Dieu et l'âme, fut surnommé par la secte encyclopédiste philosophe capucin!

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