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« chère sœur; le peu d'habitude que j'ai de << cette manière d'écrire, m'obligeant à estre « fort laconique, je vous laisse deviner com« bien je suis sensible aux marques de votre amitié; mais en même temps combien je

« suis affligé de voir que vous différiez de

«

jour en jour à me prouver votre confiance, « surtout quand les circonstances sont si « pressantes. Je mérite peut-estre moins de « réticence de votre part; mais ce dont je suis certain, c'est que votre intérêt exige«roit que je fusse mieux instruit.

<< Tout porte.à me prouver que vous avez « un plan, je crois même connoître à fond a les détails de ce qu'on vous propose et « les personnes qu'on emploie. Eh! ma « sœur, le roi se défie-t-il de moi? Je n'a-. joute qu'un mot sur cet article : il peut

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a estre permis de se servir de ses propres

« ennemis pour sortir de captivité; mais on

a

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doit se refuser à tout marché, à toute

« convention avec les scélérats, et surtout

a on doit bien calculer si les vrais serviteurs,

«< les vrais amis surtout, pourront consentir << aux conditions qu'on auroit acceptées. « Au nom de tout ce qui vous est cher, « souvenez-vous de ce peu de mots, et « croiez que je suis bien instruit.

« Vous paroissez vous plaindre de mon « silence et de l'ignorance où vous este de « mes projets; mes reproches seroient mieux « fondés que les vôtres, mais je sais ce que « dois à mon roi, et je me regarderois « comme coupable si, sans l'en instruire, j'avois changé mes vues et mes projets;

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« au surplus je ne crains pas de répéter ce

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que je regarde comme ma profession

de foi je vivrai et mourrai, s'il le faut,

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trône et

« pour défendre les droits de l'autel et du pour rendre au roi sa liberté et «< sa juste autorité. La déclaration du 23 juin, <«< ou la tenue des cahiers, sont des bases « dont je ne m'écarterai jamais. J'employe<< rai tous les moyens qui sont en mon pou« voir pour décider enfin nos alliés à nous « secourir avec des forces assez imposantes

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pour attérer nos ennemis et pour préve«nir tous les projets criminels. Je combi

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"

nerai les ressources de l'intérieur avec

les appuis du dehors et mes efforts et mes « soins se porteront également d'un bout du « roiaume à l'autre, et je préparerai toutes « les provinces suivant leurs moyens, à seconder une explosion générale. J'arrêterai,

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de

« Je contiendrai tout éclat factice, mais je que seconderai avec autant d'ardeur dévouement les entreprises qui me paroî

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« tront assez solides pour en imposer à nos << ennemis et pour me donner la juste es

"

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pérance d'un vrai succès; enfin je servirai

également mon roi et ma patrie en agis

« sant avec prudence, suite et fermeté.

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« Voici la partie de la lettre que vous ne connoissiez pas, ma chère sœur. Je vous embrasse. Quand revenez-vous?

MARIE-ANTOINETTE. »

ous avions hâte de nous débarrasser de toutes les accusations

qui ne s'attaquent point aux mœurs de la reine Marie-Antoinette, pour ne plus rencontrer devant nous que l'inconcevable calomnie qui lui impute une conduite légère. Cette calomnie procède tantôt par des citations de faits, auxquels les noms propres ne font pas défaut, tan

1. « La faveur de Mme d'Ossun, la préférence que la reine lui témoignait, mécontentèrent vivement la société de Mme de Polignac. Cela se conçoit jusqu'à un certain point: mais ce qui ne se concevra pas si facilement, c'est que l'humeur de cette société soit allée jusqu'à répandre sur la reine une atroce calomnie. On y parlait avec malignité de ce que la reine aimait

tôt par de vagues insinuations, dont elle puise l'origine dans des moitiés de phrases, détournées de leur véritable sens. Les noms propres nous les avons cités, mais nulle

part

à danser des écossaises avec un jeune lord Strathavon, aux petits bals chez Mme d'Ossun. Un habitué du salon Polignac, et qui devait avant tout une profonde reconnaissance et les plus respectueux égards à la reine, fit contre elle un couplet très-méchant, et ce couplet, fondé sur un infâme mensonge, alla circuler dans Paris.

<< Il faut le reconnaître, l'infortunée Marie-Antoinette a trouvé de bien dangereux ennemis parmi ceux qui auraient dû être ses serviteurs les plus dévoués et les plus reconnaissants. Ils ont été d'autant plus dangereux que ce sont eux qui ont livré à la malignité publique d'odieuses calomnies, qui sont retombées si cruellement sur la tête de cette malheureuse princesse dès le début de la révolution française. Et c'est dans les méchancetés et les mensonges répandus de 1785 à 1788 par la cour contre la reine, qu'il faut aller chercher les prétextes des accusations du tribunal révolutionnaire, en 1793, contre la reine. » (Notice du comte de La Marck sur la reine Marie-Antoinette, tirée de la Correspondance entre le comte de Mirabeau et le comte de La Marck, etc., etc., recueillie par M. Ad. de Bacourt, tome I, p. 60, 61.)

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