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7. Comme les ordres sacrés, et les fonctions qui en sont les suites, et surtout celles des pasteurs des âmes, qui doivent être la lumière du monde par leur doctrine, et le sel de la terre par la sainteté de leurs mœurs, demandent les qualités proportionnées à ce ministère, et qui ne peuvent s'acquérir que par une éducation et une étude propres à y former la jeunesse, les évêques sont obligés d'avoir dans leurs diocèses des seminaires pour cet usage, ainsi qu'il est réglé par le concile de Trente et par les ordonnances (1). Et la conséquecce des fonctions de ceux qui sont préposés à ces séminaires mérite qu'on en fasse ici la distinction.

Les archevêques et évêques en leur diocèses, vaqueront incessamment à établir les séminaires suivant le premier article de l'édit de Melun, pour faciliter l'exécution duquel en ce point, tous bénéfices excédant six cents livres en revenu, seront tenus d'y contribuer. (Qrd. de Louis XIII, tenue à Paris, en 1614. V. celle de Blois, art. 24.)

On voit par les dispositions du concile de Trente et de l'ordonnance, que l'usage des séminaires est pour l'éducation et l'instruction de la jeunesse à teneris annis, et pour en disposer quelques-uns aux ordres sacrés, dont le choix dépendra des qualités nécessaires pour s'acquitter dignement d'un ministère aussi saint. Il serait à souhaiter que les réglemens du concile de Trente fussent observés dans la dernière exactitude, on ne verrait pas tant de ministres inutiles à l'église, et même à charge au public.

[1. Il y aura dans chaque arrondissement métropolitain, et sous le nom de séminaire, une maison d'instruction pour ceux qui se destinent à l'état ecclésiastique. -On enseignera la morale, le dogme, l'histoire ecclésiastique et les maximes de l'église gallicane; on y donnera les règles de l'éloquence sacrée. - 3. Il y aura des examens ou exercices publics sur les différentes parties de l'enseignement. - 4. A l'avenir, on ne pourra être nommé évêque, vicaire-général, chanoine ou curé de première classe, sans avoir soutenu un exercice public et rapporté un certificat de capacité sur tous les objets énoncés en l'art. 2.-5. Pour toutes les autres places et fonctions ecclésiastiques, il suffira d'avoir soutenu un exercice public sur la morale et sur le dogme, et d'avoir obtenu sur ces objets un certificat de capacité. - 6. Les directeurs et professeurs seront nommés par le chef de l'état, sur les indications qui seront données par l'archevêque et les évêques suffragans. (Loi, 23 ventose an 12.) L'ordonnance du 16 juin 1828 dispose: art. 2. A dater de la même époque (1 octobre 1828), nul ne pourra être ou demeurer chargé soit de la direction, soit de l'enseignement, dans une des maisons d'éducation dépendantes de l'université, ou dans une des écoles ecclésiastiques secondaires, s'il n'a affirmé par écrit qu'il n'appartient à aucune congrégation religieuse non légalement établie en France.

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Une autre ordonnance du même jour 16 juin 1828, porte: art. 1 § 2. Toutefois, le nombre des élèves placés dans les écoles secondaires ecclésiastiques ne pourra excéder vingt mille. -2. Le nombre des

(1) Conc. Trid. sess. 23. c. 18 de reform. Conc. Trid. sess. 21. c. 1. 1. q. 1. c. 115. Ibid. sess. 23. de reform. cap. 16.

écoles et la désignation des communes où elles seront établies seront déterminés par nous d'après la demande des archevêques et évêques, et sur la proposition de notre ministre des affaires ecclésiastiques. 3. Aucun externe ne pourra être reçu dans lesdites écoles. Sont considérés comme externes les élèves n'étant pas logés et nourris dans l'établissement même. 4. Après l'âge de quatorze ans, tous les élèves admis depuis deux ans dans lesdites écoles seront tenus de porter un habit ecclésiastique.

6. Les supérieurs ou directeurs des écoles secondaires ecclésiastiques seront nommés par les archevêques et évêques et agréés par nous.

Les archevêques et évêques adresseront, avant le 1er octobre prochain, les noms des supérieurs ou directeurs actuellement en exercice, à notre ministre des affaires ecclésiastiques, à l'effet d'obtenir notre agrément. — 7. Il est créé dans les écoles secondaires ecclésiastiques huit mille demi-bourses à cent cinquante francs chacune.

8. Les écoles secondaires ecclésiastiques dans lesquelles les dispositions de la présente ordonnance et de notre ordonnance de ce jour ne seraient pas exécutées, cesseront d'être considérées comme telles, et rentreront sous le régime de l'université. ]

8. Les évèques ne pouvant pas exercer par eux-mêmes toutes les fonctions de leur ministère, ils nomment des vicaires généraux ou grands vicaires, à qui ils commettent celle de ces fonctions qui se peuvent exercer par d'autres que par eux, et ces vicaires généraux ou grands vicaires ont aussi dans l'église un rang distingué (1).

9. Comme les vicaires généraux ou grands vicaires des évêques exercent les fonctions de leur juridiction volontaire pour ce qui regarde le spirituel, et que les évêques ont une autre juridiction contentieuse entre toutes personnes ecclésiastiques et laïques, pour ce qui regarde le spirituel, comme la célébration du mariage et autres matières (Pr. 199, 200), et qu'ils ont aussi une juridiction pour le temporel, que les princes leur ont accordée en faveur des ecclésiastiques. Cette double juridiction contentieuse, ne pouvant et ne devant pas même être exercée par les évêques en personne, qui doivent leur ministère à leurs autres fonctions plus importantes, ils commettent pour cette juridiction des officiaux qui en sont les juges, et des vice- gérans qui jugent en l'absence des officiaux, et aussi des promoteurs qui exercent dans cette juridiction les fonctions qu'exercent les procureurs du roi et ceux des seigneurs dans les tribunaux laïcs (2). (Charte, 57, 62, s. i. 22, s.)

[Toutes les justices seigneuriales sont supprimées sans aucune indemnité, art. 4 du décret abolitif du régime féodal, août 1789. ]

10. La même considération qui a obligé les princes d'accorder à l'église une juridiction temporelle sur les ecclésiastiques, a fait que nos rois ont établi dans les parlemens et les présidiaux, des conseillers ecclésiastiques, qui soient dans les ordres sacres, (1) V. Tit. de offic. vic. in 6. (2) C. 2. de offic. vic. in 6.

et qu'on appelle conseillers clercs, ou conseillers d'église (Charte, 62, 65), pour veiller aux intérêts de l'église, dans les affaires où elle peut avoir intérêt. Et ceux qui remplissent ces charges, exercent les mêmes fonctions que les autres conseillers, à la réserve des procès criminels, où ils n'assistent point s'il s'agit de crimes punissables de peines corporelles. (« L'action pour l'application des peines n'appartient qu'aux fonctionnaires auxquels elle est confiée par la loi. C. d'inst., art. 1, §. 1. »)

11. La célébration de l'office divin dans les églises, n'étant pas moins nécessaire dans tous les lieux, que dans ceux où sont les sièges des évèchés, soit pour les prières publiques ou pour la consolation des fidèles, on célèbre cet office dans les paroisses où le nombre des ecclésiastiques peut y suffire, au moins les jours de fêtes. Et il y a aussi d'autres églises qu'on appelle collégiales, établies par des fondations, pour célébrer tous les jours l'office divin de toutes les heures (1).

12. Outre les distinctions d'ecclésiastiques qu'on vient d'expliquer dans les articles précédens, il y a dans l'église une infinité de communautés de divers ordres monastiques et autres possédant des biens, ou mendians, qu'on appelle réguliers, parce que chacun a sa règle propre, établie par son fondateur et la plupart sont religieux engagés par des vœux à l'observation de leur règle. (P. 291, 292, s.) Il y a aussi quelques ordres de communautés ecclésiastiques, qui, sans vœux et sans le nom de religieux, ont aussi leurs règles propres et des habits distingués de ceux des religieux, et de ceux des autres ecclésiastiques, et tous ces ordres et communautés ont leurs supérieurs, . généraux, et leurs fonctions différentes. (V. 18, q. 2, c. 25. )

[En résumé, dit un noble pair (2), les lois spéciales de Louis XV et de Louis XVI ont aboli en France la société de Jésus, des lois générales de 1789, 1792 et 1802 ont éteint et supprimé en France toutes les associations religieuses d'hommes ( « et généralement toutes les corpo«rations religieuses et congrégations séculières d'hommes et de femmes, « ecclésiastiques ou laïques. » Décret, 18 août 1792.) Un décret de 1804 et deux lois de 1817 et 1825 établissent en principe que de semblables établissemens ne peuvent se former de nouveau dans le royaume qu'avec une autorisation de la puissance publique; et aux termes de la loi du 24 mai 1825, cette autorisation doit être donnée par une loi. — Ce n'est pas la sévérité des lois que votre commission invoque, c'est le maintien de l'ordre légal. — Les tribunaux se sont déclarés incompétans : l'administration seule peut procurer l'exécution des lois,

« 1. La loi constitutionnelle du royaume ne reconnaîtra plus de vœux monastiques solennels de personnes de l'un ni de l'autre sexe : en conséquence, les ordres et congrégations réguliers dans lesquels on fait

(1) C. 22. de elect. et el. p. t. in 6. (2) Rapport de M. le comte Portalis, aujourd'hui premier président de la cour de cassation, sur la pétition de M. le comte de Montlosier, daus la séance de la chambre des pairs du 18 janvier 1827, renvoyée au président du conseil des ministres pour faire exécuter les lois.

de pareils vœux sont et demeurerout supprimés en France, sans qu'il puisse en être établi de semblables à l'avenir.» (Décret, 13-19 février 1790.) — « Néanmoins, portait l'art. 5 du décret du 23 messidor an 12, les agrégations sous les noms de sœurs de la charité, de sœurs hospitalières, de sœurs de Saint-Thomas, de sœurs de Saint-Charles et de sœurs Vatellotes, continueront d'exister, en conformité des arrêtés du 1er nivose an 9, 24 vendémiaire an 11, et des décisions du 28 prairial an 11 et 22 germinal an 12, à la charge par lesdites agrégations de présenter, sous le délai de six mois, leurs statuts et réglemens, pour être vus et vérifiés au conseil d'état.

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Un autre décret du 18 février 1809, dispose: art. Les congré gations ou maisons hospitalières de femmes, savoir: celles dont l'institution a pour but de desservir les hospices de l'état, d'y servir les infirmes, les malades et les enfans abandonnés, ou de porter aux pauvres des soins, des secours, des remèdes à domicile, seront placées sous la protection de Madame, notre très-chère et honorée mère. 2. Les statuts de chaque congrégation ou maison séparée seront approuvés par nous, et insérés au bulletin des lois, pour être reconnus T et avoir force d'institution publique. » Comme on le voit, il n'était point question de créer des congrégations vouées à l'enseignement et encore moins à la vie contemplative. Aussi, le conseil d'etat, dans ses avis des 6 février et 25 mars 1811, opine-t-il contre toutes les communautés qui n'ont pas pour but exclusif le soin des malades.

Malgré cette précaution du gouvernement impérial, nous avons aujourd'hui une loi du 2 janvier 1817, qui dispose: art. 1o. « Tout établissement ecclésiastique reconnu par la loi pourra accepter, avec l'autorisation du Roi, tous les biens meubles et immeubles, ou rentes, qui lui seront donnés par actes entre-vifs ou par actes de dernière volonté. 2. Tout établissement ecclésiastique reconnu par la loi pourra également, avec l'autorisation du Roi, acquérir des biens immeubles ou des rentes. - 3. Les immeubles ou rentes appartenant à un établissement ecclésiastique seront possédés à perpétuité par ledit établissement, et seront inaliénables, à moins que l'aliénation n'en soit autorisée par le Roi. »

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Quant à la loi du 24 mai 1825, on connaît assez quelles sont ses dispositions; cette loi porte: art. 4. Les établissemens dûment autorisés pourront, avec l'autorisation du Roi, 1° accepter les biens meubles et immeubles qui leur auraient été donnés par actes entre-vifs ou par actes de dernière volonté, à titre particulier seulement; 2° acquérir à titre onéreux des biens immeubles, ou des rentes; 3° aliéner les biens immeubles ou les rentes dont ils seraient propriétaires. — 5. Nulle sonne faisant partie d'un établissement autorisé ne pourra disposer, par actes entre vifs ou par testament, soit en faveur de cet établissement, soit au profit de l'un de ses membres, au-delà du quart de ses biens, à moins que le don on legs n'excède pas la somme de dix mille francs. Cette prohibition cessera d'avoir son effet relativement aux membres de l'établissement, si le légataire ou donataire était héritier en ligne directe de la testatrice ou donatrice. Le présent article ne recevra son exécution, pour les communautés déja autorisées, que six mois après la publication de la présente loi; et pour celles qui seraient autorisées à l'avenir, six mois après l'autorisation accordée. - 6. L'autorisation des congrégations religieuses de femmes ne pourra être révoquée que par une loi.

Laissons parler, sur la matière des deux lois qui précèdent, le Montesquieu de l'Italie (1). « Les nobles, dit-il, qui avaient concentré dans leurs mains toutes les propriétés, commencèrent à en disposer en faveur des prêtres et des moines. Les rois eux-mêmes donnèrent au clergé ce qu'ils avaient usurpé sur les peuples. Exempts de toutes les charges de la société, dispensés de toute espèce d'impôt, enrichis à l'envie par des donations et des offrandes, les gens d'église devinrent, pour ainsi dire, les seuls propriétaires de l'Europe.

« Après qu'on eût enfin dissipé les ténèbres de l'ignorance, les hommes s'aperçurent que parmi les dogmes de notre religion il n'y eut jamais celui d'enrichir ses ministres.

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Si les substitutions et les primogénitures sont contraires à la population, parce qu'elles restreignent le nombre des propriétaires, quel obstacle ne doit pas résulter de ce fatal désordre qui rend une partie des produits le patrimoine d'une seule famille ? Si les progrès de la population sont relatifs aux progrès de l'agriculture, comment celle-ci pourrat-elle jamais prospérer dans les mains d'un bénéficier qui n'a aucun intérêt de faire valoir un fonds qu'il ne doit transmettre à personne; de semer ou de planter pour une postérité qui ne sera pas la sienne? Comment l'agriculture pourra-t-elle jamais s'améliorer dans les mains d'un homme qui, loin d'employer une partie de son revenu à augmenter la valeur de sa terre, risquera plutôt de détériorer son bénéfice, afin d'accroître des revenus qui ne sont pour lui que viagers? Ces funestes effets de la grandeur excessive des domaines du clergé ont enfin été démontrés aux gouvernemens. Partout on s'est élevé contre ces abus. Plusieurs lois ont été rendues relativement à cet objet. On a défendu au clergé toutes les nouvelles acquisitions. Les testamens ont cessé d'être les mines du sacerdoce.

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Comment lorsque nous vivons sous le régime d'un gouvernement constitutionnel et représentatif, nos législateurs modernes ont-ils pu autoriser des établissemens de gens de main-morte, qui nuisent à la circulation et au développement de l'industrie agricole? Regrettons que le vote de nos députés soit secret. Les noms de ceux qui auraient voté pour ou contre une proposition quelconque étant connus par la voie de la presse, les citoyens sauraient comment on a compris leur mandat, et le vote public, mieux encore que la tribune, honorerait le caractère des représentans de la nation.

Ciceron dit que dans les comices on offrait au plus grand nombre des Romains le moyen d'un secret qui les mettait à couvert des reproches, en leur donnant le pouvoir de commettre des injustices terribles (lib. I, cap. 3, de legibus). Aujourd'hui on se plaint avec juste raison que les votes soient secrets dans un gouvernement représentatif. N'est-ce pas un défaut de liberté publique ? Pourquoi la vérité craindrait-elle de faire entendre sa voix? Au moins on connaîtrait les ambitieux qui n'aspirent à la députation que pour forger des fers au peuple, pour l'enchaîner par des lois dignes des premiers siècles. En adoptant ma proposition, il n'y aurait plus de force puissante agissant dans l'ombre; plus d'esprit d'intri gue pour s'emparer de l'assemblée; plus de main cachée pour fermer la bouche de la liberté et étouffer le cri de l'intérêt général. ]

(1) Filangieri, science de la législation, t. 2, ch. 5.

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