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opérations. Ainsi finit par un funeste désastre cette association de brigands dont l'existence provoquoit depuis soixante ans la vengeance céleste,

On tenta néanmoins encore, et même avec quelque succès, de faire sortir des grains hors du royaume. Mais cette exportation fut bientôt arrêtée par le rétablissement des barrières sur les frontières, et par cette chaîne de gardes que le peuple avoit eu l'im prudence de rompre dans les premiers mo mens d'effervescence. Les moteurs des troubles et désordres sentirent la nécessité de changer alors de batterie, et employèrent tous leurs efforts à répandre de vaines terreurs, à égarer dans son cours une circulation qu'ils ne pouvoient empêcher, à altérer les denrées, à acheter à grand prix l'inaction des hommes chargés de les préparer; et telle fut leur habileté dans ces cruelles manoeuvres, qu'ils réussirent à occasionner une disette réelle au sein de l'abondance, et à faire ap

chât à le pénétrer, et remboursoit sur le champ ceux qui lui montroient quelque envie de connoftre le genre de ses placemens,

paroître

paroître le fantôme épouvantable de la famine aux yeux des malheureux parisiens que l'activité du comité des subsistances avoit ar rachés à sa fureur.

CHAPITRE IV.

Projet de guerre civile, de dissolution de l'Assemblée, d'enlèvement du roi à Metz. Confidence de M. d'Estaing à la reine. Insinuations mensongères sur les intentions des gardes-françoises. Manœuvres pour faire admettre le régiment de Flan dre. Son arrivée à Versailles. Arrogance des conspirateurs. Leurs mesures pour gros• sir le nombre de leurs partisans et assurer leur victoire.

été

conçu par

LA A terreur d'une guerre civile vint se mêler aux angoisses toujours croissantes de la faim. Un projet vaste et digne de ses auteurs, avoit les chefs de l'aristocratie. Il ne s'agissoit de rien moins que d'enlever le roi, de le transférer dans une place de guerre, où l'on auroit, en son nom, levé l'étendard de la révolte contre la nation, lancé des manifestes contre ses représentans, et rallié tous les anciens agens du despotisme, les ministres, les généraux, les parlemens, les autres cours souveraines et ces légions d'esclaves de

tous les ordres, également ligués contre le monarque qu'ils flattent et qu'ils volent, et contre le peuple qu'ils avilissent et qu'ils oppriment.

Une souscription fut ouverte secrètement pour le meurtre des bons citoyens. Des prêtres et des nobles s'empressèrent de porter leurs signatures à ce bureau de proscriptions. Des ambassadeurs étrangers ne rougirent pas d'al ler grossir la liste des conjurés, et des militaires distingués, d'anciens ministres du roi, de s'en déclarer les chefs. On résolut d'in yestir encore une fois d'une armée la capitale et Versailles, de dissoudre, les armes à la main, l'Assemblée Nationale, d'allumer dans tout l'empire le feu de la guerre civile, et d'ensevelir dans les flammes la constitution, les droits de l'homme, et jusqu'au nom de patrie et de citoyen. Tel étoit le plan des suppôts de la tyrannie. Mais Louis XVI, restaurateur de la liberté, ne pouvoit être leur complice. Il falloit donc préparer les hommes et les choses, et amener le prince par la force des circonstances, à se jeter lui-même entre les bras de ses ennemis.

La ville de Metz fut choisie pour le chef

lieu de l'entreprise et le centre des opérations. Sa nombreuse garnison, l'avantage de sa position sur les frontières et de ses imprenables remparts, le courage chevaleresque de son commandant et son attachement aux anciens principes, tout déterminoit en sa faveur la préférence des conjurés. Une échelle de troupes fut disposée sur la route ou très-à portée, et des enrôlemens secrets dans Paris et les provinces, augmentoient tous les jours les forces et l'audace de la ligue anti-patriotique.

Cependant ce bruit sourd qui précède et annonce l'orage, commençoit à se faire entendre. On connoissoit les violences auxquelles pouvoit se porter l'orgueil humilié, et l'on se mit à la recherche des conspirateurs, dont on découvrit peu-à-peu les trames criminelles. L'indignation saisit aussitôt les patriotes. Les uns se disposent à une juste et vigoureuse défense; d'autres effrayés des excès auxquels le ressentiment d'un nouvel attentat contre la liberté publique pourroit porter le patriotisme égaré, cherchent à les prévenir par les voies de la douceur et de la prudence. M. d'Estaing crut devoir prendre

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