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graver les dispositions peu favorables que la première avoit fait naître. On s'éleva avec force contre cette réponse du roi; on soutint que ces arrêtés avoient été présentés à la promulgation et non au consentement royal, qu'ils renfermoient plus de principes que de loix, et que le consentement du pouvoir exécutif n'étoit pas nécessaire pour consacrer des principes; que le roi et l'Assemblée étoient d'accord sur ceux-ci; que les réflexions de sa majesté ne portoient que sur des détails de législation auxquels l'Assemblée auroit sans doute tous les égards qui leur étoient dus, lorsqu'elle s'occuperoit de la rédaction des décrets en loix. En vain MM. Goupil et Lally demandoient qu'il fût nommé un comité de soixante membres pour examiner la réponse du roi, et qu'il fût sursis à toute délibération ultérieure sur cet objet jusqu'au rapport des commissaires; l'Assemblée vivement frappée des inconvéniens qui pourroient résulter de discussions entre la puissance armée et le corps pacifique des législateurs, arrêta sur la motion de M. Chapelier, vivement appuyée par MM. de Mirabeau et de la Rochefou cault, que M. le président se rendroit auprès

du roi pour le supplier d'ordonner incessam ment la promulgation des arrêtés du 4 Août et jours suivans, assurant à sa majesté que l'Assemblée Nationale prendroit dans la plus grande et la plus respectueuse considération les réflexions et observations que le roi a bien youlu lui communiquer.

Le prince se rendit au vœu des représentans, et leur envoya la sanction pure et simple qu'ils demandoient.

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CHAPITRE II.

Détermination du pouvoir judiciaire. Nou veaux attentats des ennemis de la constitution. Cessation du paiement des subsides. Détresse du trésor public. Dons patriotiques. Contribution du quart proposée par le ministre des Finances. Indécision de l'Assemblée à ce sujet. Victoire éclatante remportée par l'éloquence. Développement du plan de M. Necker. Conciliation du vœu des peuples avec le besoin de l'état.

L'ASSEMBLÉE Nationale avançoit à grands pas dans la carrière. Dans moins de huit jours elle avoit proclamé autant de vérités et de principes politiques, que les docteurs de la superstition et les ministres de la tyrannic en avoient proscrits ou obscurcis depuis plus de dix siècles. Elle avoit rendu aux loix cette suprématie que le despotisme avoit usurpée sur elles, annobli le sceptre lui-même en le soumettant à leur empire, et consacré l'autorité royale en la faisant découler de sa source primitive. Elle avoit défini la nature et posé

à les bornes des divers pouvoirs, assigné leur origine et réglé leur distribution dans l'Etat ;; reconnu l'inviolabilité de la personne du roi, l'indivisibilité du trône; fixé l'hérédité de la couronne ; restitué à la nation la puissance législative qu'elle devoit exercer par ses re présentans; conféré au monarque le pouvoir exécutif suprême; et assuré la liberté personnelle, en établissant l'indépendance du pou voir judiciaire et en décrétant que dans aucun cas, il ne pourroit être exercé par le roi, ni par le corps législatif. Mais que la justice seroit administrée au nom du roi par les seuls tribunaux établis par là loi, suivant les prin cipes de la constitution, et selon les formes déterminées par la loi.

Au milieu de ces grandes et importantes dis cussions, elle se livra encore à plusieurs dispositions de bienpublic; et forcée par des circons tances impérieuses à réunir à ses fonctions lé gislatives, celles des corps administratifs et judiciaires, on la voyoit constamment occupée à suppléer au silence des tribunaux, à réprimer les entreprises sans cesse renaissantes des ennemis que la patrie recéloit dans son sein, leurs attentats contre les vrais amis dep.

loix et de la constitution, et leurs efforts continuels pour accabler la France sous les ruines de l'ancien gouvernement, en excitant les troupes à l'insubordination, les peuples à la révolte, et en épuisant le principe de vie du corps politique par la cessation subite et concertée du paiement des subsides..

La fraude se faisoit par-tout à main armée, les contrebandiers venoient impudemment vendre du sel jusques sur les places de Vere sailles; et malgré la détresse du trésor public, l'Assemblée, sur la réquisition du ministrę des finances lui-même, se vit forcée de réduire à plus de moitié un impôt depuis longtems voué à la proscription, qu'elle étoit, il est vrai, résolue d'anéantir, mais dont la. perception offroit encore une ressource précieuse dans l'effrayante pénurie des finances et le discrédit plus effrayant encore où une première opération mal combinée, et les perfides insinuations de l'aristocratie avoient plongé l'Etat.

L'emprunt de quatre-vingts millions, malgré les avantages qu'il offroit aux prêteurs n'avoit pas eu un succès plus heureux que le premier. Le numéraire avoit disparu avec la

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