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confrère. J'ai fait passer le Prospectus de cette ouvrage à Monsieur votre frère qui s'est chargé de le joindre au petit abbrégé de l'Histoire de l'Abbaïe du Bec dont j'ai eu l'honneur de vous parler dans ma lettre du 20o d'août dernier. Ce Prospectus embrasse beaucoup d'objets et présente une Histoire complète et d'une exécution très longue et tout à la fois assez difficile, comme vous en jugerez vous-même. Vous verrez que ce n'est pas uniquement une Histoire ecclésiastique de la Province comme vous l'a annoncé Monsieur de Bréquigny, mais une Histoire générale. L'auteur est véritablement scavant, ami du travail, et tout à fait propre à l'exécution de ce dessein. Mais je crois que l'entreprise est trop considérable pour qu'un homme seul puisse se flater de la mener à sa fin dans le trop court espace de sa vie. Il falloit lui donner certain nombre de coadjuteurs qui répandus dans les différens endroits de la Province, etc., se seroient occupés à faire les dépouillements nécessaires et à ramasser ainsi des matériaux, tandis qu'il auroit tenu la plume. Dès qu'il en paroîtra un volume, j'aurai l'honneur de vous le faire passer et les autres successivement; mais je crois que ce n'est pas besogne prête encore. Vous recevrez avant ce tems-là un abbrégé assez étendu de l'Abbaïe de Jumièges dans lequel je fais entrer ce qui s'est passé de plus remarquable dans les royaumes de France et d'Angleterre, la Normandie, etc., depuis la fin du cinquième siècle jusqu'à nos jours. La date de la présente m'avertit que l'année 1764 va finir. Je ne crois pas pouvoir commencer la suivante sous de plus heureux auspices qu'en vous la souhaitant à vous-même des plus heureuses. Tel est, Monsieur, l'objet de mes vœux pour vous, étant plus que je ne le puis dire, très respectueusement, Monsieur, Votre très humble et très obéissant serviteur

Dom BOURGET.

Au Bec ce 17 Xbre 1764.

A Monsieur, Monsieur le Docteur Coltée du Carrel à Doctors Commons à Londres, Angleterre.

XXIV

LETTRE DE D. BOURGET A ANDRÉ DUCAREL

Collection de l'auteur.

A quoi tient-il donc, Monsieur, que je reçoive de vos chères nouvelles et réponses aux lettres que j'ai eu l'honneur de vous écrire?

La première en datte du 8 mars dernier, ensemble mon compliment d'actions de grâce pour le bienfait inestimable de ma réception dans l'infiniment respectable Société des Antiquaires de Londres. La seconde en datte du 10 avril suivant avec mes réflexions sur quelques ouvrages nouveaux comme l'Éducation de Jean-Jacques Rousseau, etc., la Tolérance, par Voltaire, à l'occasion de l'infortuné père Calas que la barbare superstition a fait périr sur l'échafaud. La troisième dattée du 15 May ne contenoit, autant que je m'en souviens, qu'une légère description de ma nouvelle solitude et un court exposé des raisons qui m'ont porté à me rendre aux instances que l'on m'a faites pour m'engager à me mettre à la tête du gouvernement temporel de l'Abbaye de SaintEvroult où j'ai fait élection de domicile, il y a à peu près trois mois. Votre silence est inquiétant et m'a fait faire les plus sérieuses réflexions. L'air que je respire n'est pas exempt de cette espèce d'inquisition que nous reprochons avec beaucoup de justice à quelques nations voisines, et j'ai tout lieu de craindre que mes lettres interceptées, la furieuse superstition n'y trouve des prétextes suffisants pour me punir d'avoir osé dire vrai. Car dans notre bon païs, il est dangereux de penser tout haut et plus encore de l'écrire. Jusqu'à ce jour, je n'ai remarqué aucun changement dans les manières de ceux qui m'approchent, et c'est une raison de plus pour moi d'être tranquille. Je ne confierai la présente à qui que ce soit, et je monte à cheval à l'instant pour la porter à la poste moi-même, afin de scavoir à quoi je dois attribuer votre silence. Je m'étois flatté, Monsieur, qu'à Londres comme en France, etc., on donnoit à ceux qu'on décoroit du glorieux titre d'associé ou de membre honoraire des lettres d'aggregation, etc., mais il paroit que non, et cela me surprend. S'il ne faut que de l'argent pour retirer ces sortes d'expeditions, elles me sont trop honorables, Monsieur, pour ne pas faire tout ce qui convient pour me les procurer. Faites-moi je vous prie, la grâce de me marquer la somme qu'il convient payer, et j'aurai l'honneur de vous la faire compter à bref jour. J'ai celui d'être en attendant votre réponse, dans les sentiments les plus distingués de respect et de considération, Monsieur, Votre très humble et très obéissant serviteur

F. D. BOURGET.

A l'Abbaïe de Saint-Evroult en Normandie, par Noyers-Ménard. A Noyers-Ménard ce 1er Juin 1765, France.

A Monsieur, Monsieur le Docteur André Coltée du Carel, à Doctor Commons, Londres, Angleterre.

XXV

INSCRIPTION DU TOMBEAU D'HERLUIN

D. Bourget, The History of the royal Abbey of Bec, p. 17; André Ducarel, Antiquités anglo-normandes, p. 168.

HIC JACET

PRIMUS HUJUSCE MONASTERII CONDITOR ET ABBAS

VENERABILIS HERLUINUS,

PRIMARIAE INTER NORMANNOS NOBILITATIS,

PATRE ANSGOTO, MATRE HELOIDE, IN PAGO BRIONENSI NATUS ;
INTER ARMORUM STREPITUS SUMMA CUM LAUDE,

INTER AULAE ILLECEBRAS SUMMA CUM INTEGRITATE VERSATUS,
ABJECTO MILITIAE SAECULARIS PALUDAMENTO,

CHRISTO DEINCEPS MILITATURUS,

AB HEBERTO, LEXOVIENSI EPISCOPO, HABITU MONASTICO

INDUITUR;

ET UT CHRISTI HABERET HEREDITATEM
BONORUM SUORUM CHRISTUM INSTITUIT HEREDEM.

QUOS AGROS QUONDAM POSSEDERAT DIVES

HOS COLUIT PAUPER, COLUIT ET JEJUNUS

UT CIBUS FIERET PAUPERUM

ET LABORANTIS SUDOR ET FAMES JEJUNANTIS;
LABORES DIURNOS NOCTURNIS LEVABAT PRECIBUS.

UT CUM VIRTUTUM STUDIIS STUDIA LITTERARUM CONJUNGERET
LITTERAS QUADRAGENARIUS DISCERE NON ERUBUIT:
ET BECCENSI MONASTERIO LITTERARIUM APERUIT GYMNASIUM;
IN QUO PATERNAE PIETATIS ALUMNOS ET HAEREDES,
ECCLESIARUM PRAESULES CANDIDATOS

LANFRANCUM, ANSELMUM,

PLURIMOSQUE ALIOS SUI SIMILES DISCIPULOS

AD OMNE VIRTUTIS OFFICIUM SUIS INFORMABAT EXEMPLIS,
ABBAS VIRTUTI SIMILLIMUS,

QUI PLENUS OPERIBUS BONIS

MORTEM OBIIT VII. CAL. SEPT. AN. D. M.LXXVIII.
AET. LXXXIII.

PATRI DE SE OPTIME MERITO

AETERNUM HOC PIETATIS MONUMENTUM P.P.
MONACHI BECCENSES CONGREGATIONIS S. MAURI

ANNO D.M.D.CC.XIV.

XXVI

INSCRIPTION FUNÉRAIRE DE LA DUCHESSE DE BRANCAS
Eglise de Saint-André du Bec-Hellouin.

ICI REPOSE LE COEUR DE TRÈS HAUTE ET TRÈS
PUISSANTE DAME, MADAME MARIE de Brancas,
EPOUSE DE TRÈS HAUT ET TRÈS PUISSANT SEIGNEUR
MONSEIGNEUR LOUIS DE BRANCAS, DUC
DE VILLARS PAIR DE FRANCE;

AU MILIEU D'une cour L'EXEMPLE NE L'A PAS
SÉDUITE.

SES MOEURS ONT ÉTÉ RESPECTÉES DE LA
MÉDISANCE MÊME QUI ÉPARGNE SI PEU LA

VERTU.

LE CHOIX QU'ELLE A FAIT POUR SON COEUR DE
CE LIEU SAINT, MONTRE ASSÉS QUE DANS LE
SÉJOUR MÊME DES VANITÉS ELLE LES A
TOUJOURS MÉPRISÉES.

CHRESTIENS, PUISQU'ELLE A GLORIFIÉ DIEU AUX
YEUX DES PÉCheurs, priés qu'IL LA COURONNE

DANS LA COMPAGNIE DES SAINTS.

CETTE ILLUSTRE DAME EST MORTE A PARIS

LE XXVII. AOUST, L'AN DE J.-C. MDCCXXXI, AGÉE

DE LXXVII ANS ET XI MOIS.

XXVII

INSCRIPTION FUNÉRAIRE DU DUC DE BRANCAS
Eglise de Saint-André du Bec-Hellouin.

CY GIT LE COEUR

DE TRÈS HAUT ET TRÈS ILLUSTRE

MONSEIGNEUR LOUIS ANTOINE

DUC DE BRANCAS ET DE VILLARS,

PAIR DE FRANCE, CHEVALIER DES

ORDRES DU ROI ET DU ROYAL

ORDRE DE SAINT JANVIER.
DÉCÉDÉ EN SON HÔTEL A PARIS

LE 29 FÉVRIER 1760,

AGÉ DE 78 ANS.

XXVIII

LETTRE DE D. CH.-ANTOINE BLANCHARD A MANOURY L'AINÉ LIBRAIRE A CAEN

Collection de l'auteur.

Monsieur et féal ami

Vous n'êtes sûrement pas content de ma négligence à répondre à l'honneur de la vôtre, mais ne vous fâchez point; je pouvois attendre encore plus de huit jours sans que vous pussiez m'accuser de manquer à l'usage de répondre dans le mois. Ma nièce dans deux lettres consécutives m'avoit fait espérer la vôtre qui, datée du 18 avril, ne m'est parvenue que le 29. Ainsi, comme vous voyez, j'ai encore de la marge, mais je n'en profite pas, me reprochant moi-même d'avoir tant tardé. Je vais vous en dire la raison.

Un moine-curé s'est avisé de faire, en faveur de son sentiment, un petit ouvrage de 20 et quelques pages. J'ai voulu le refuter; mon ouvrage en auroit bien contenu près de 60 ; je voulois vous l'envoyer pour le faire imprimer, si vous le jugiez à propos. Un voyage que j'ai fait à Rouen, forcément, a fait avorter mon projet. Je fus chez Vallée, libraire, rue de l'Ecole, prendre le Bref du Pape et quelques autres brochures; en jasant, il me dit qu'il faisoit imprimer un petit ouvrage de 48 pages contre un de mes confrères curé (de Bonneville la Louvet, à 6 lieues d'ici). La chose est plaisante; j'en fais un aussi contre lui. Oh bien, j'attendrai que le vôtre soit imprimé, et puis après l'avoir lu, je verrai ce que j'aurai à faire. Vallée m'avoit promis de me le faire passer; il n'en a rien fait. Comme l'auteur que j'ai aussi rencontré le même jour en allant à la messe à Bellefont, a bien à se plaindre du curé intrus de Bonneville, je ne doute pas qu'il ne l'ait bien mieux drappé que je n'aurois fait. Je me contentois de lui prouver qu'il n'étoit qu'un ignorant. A mon retour, j'ai montré mon travail à un de mes confrères très instruit en matière théologique; il m'en retranchoit ce qui me plaisoit le plus ; il vouloit que je changeasse bien des choses, il ne pensoit pas comme moi sur d'autres. Toute réflexion faite, je me suis déterminé à ne me pas faire imprimer. D'ailleurs ces matières-là ont été si souvent traitées qu'on ne peut plus guère dire rien de neuf. Tout ce qui me fait peine, c'est de n'avoir pas vu quelque ouvrage sur le serment proprement dit : par exemple, après avoir défini le serment, avoir prouvé par l'Hist. sacrée et profane jusqu'à quel point il est inviolable, l'horreur que l'on doit avoir d'un parjure, etc., faire toucher au doigt que, sans en excepter notre bon R., la 1re affaire et celle-ci, presque

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