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« Ce siége fut récompensé par le bâton de maréchal de France, que le roi donna au comte de Lowendal1. »

DXXXVI.

COMBAT DU VAISSEAU L'INTRÉPIDE CONTRE PLUSIEURS VAISSEAUX ANGLAIS. - 17 OCTOBRE 1747.

GILBERT (d'après un tableau du temps).— 1835.

Pendant que les armes de la France triomphaient ainsi sur le continent, elles étaient moins heureuses sur mer. Les flottes réunies de la Hollande et de l'Angleterre avaient presque détruit la marine française, tristement déchue depuis les dernières années de Louis XIV. C'étaient des particuliers, de simples armateurs, qui seuls relevaient alors l'honneur du pavillon national; et tandis que les escadres anglaises, sous les amiraux Anson et Hawke, dominaient sans contestation dans l'Atlantique, deux hommes, à force de talent et de courage, étaient parvenus à maintenir la supériorité de la France dans les mers de l'Inde. La prise de Madras, capitale des possessions anglaises, en 1746, immortalisa le nom de Labourdonnais, et Dupleix ne se signala pas moins, la même année, par sa belle défense de Pondichéry. Trop heureux si une basse jalousie n'eût point souillé sa gloire!

Il faut citer aussi, parmi les faits glorieux qui vinrent rompre alors la triste continuité de nos revers mari1 Campagnes de Louis XV, p. 69.

times, l'action hardie du commandant du vaisseau l'Intrépide.

Une escadre de huit bâtiments de l'état, sortie de l'île d'Aix, escortait deux cent cinquante vaisseaux marchands. Le 17 octobre 1747, à la hauteur du cap Finistère, elle rencontra une flotte anglaise composée de vingt-trois vaisseaux, et commandée par l'amiral Hawke. « Le chef d'escadre, rapporte l'auteur des Campagnes de Louis XV, manœuvra pour favoriser la fuite des navires marchands; mais leur mauvaise disposition, leur marche inégale, leur trouble à l'aspect d'une flotte supérieure à celle qui les défendait, en laissèrent une partie à la portée des Anglais. Ils furent enveloppés; l'escadre s'avança pour les dégager, et le combat commença. Les vaisseaux de guerre s'y virent bientôt investis euxmêmes, tellement que chacun d'eux en combattait plusieurs d'une force supérieure. Il leur était impossible de se porter un mutuel secours. Le Neptune, le Monarque, le Fougueux, le Sévère, ne se rendirent que lorsqu'ils furent entièrement désemparés. Le Tonnant, que montait M. l'Étenduère, commandant de l'escadre, avait successivement essuyé le feu de toute la ligne anglaise; plusieurs fois il s'était vu au milieu de trois ou quatre vaisseaux qu'il avait repoussés; mais, après la réduction des quatre vaisseaux français, tous les efforts de l'amiral Hawke se réunirent contre lui. Ses mancuvres furent hachées, ses voiles criblées; son mât de perroquet de fougue tomba; la chute de son artimon paraissait inévitable; il allait se rendre ou périr, lorsque

M. de Vaudreuil, qui commandait l'Intrépide, traversa la flotte anglaise et vint le secourir. Le Terrible et le Trident veulent suivre cet exemple, mais il leur est funeste, et ils sont forcés de se rendre. L'Intrépide et le Tonnant restent donc exposés seuls à tout le feu de l'artillerie d'une flotte entière. Déjà cinq vaisseaux anglais désemparés sont contraints de se retirer; d'autres reviennent à la charge, puis s'éloignent aussi pour réparer leur dommage. Tandis qu'ils se préparent à un nouveau combat, M. de l'Étenduère fait fausse route, leur échappe à la faveur des ténèbres, et le Tonnant rentre dans Brest, remorqué par l'Intrépide 1. »

DXXXVII.

SIÉGE DE MAESTRICHT. —7 MAI 1748.

Gouache par VAN Blaremberg.

Après la prise de Berg-op-Zoom, qui avait frappé de consternation les Provinces-Unies, Louis XV offrit encore la paix aux alliés. Ils s'obstinèrent à la refuser, et il fallut la leur imposer par les armes. « La paix est dans Maëstricht, » dit le maréchal de Saxe; et le siége de cette ville fut décidé.

C'était une grave et difficile opération que de venir assiéger une place aussi forte et aussi puissamment défendue, en face d'une armée de quatre-vingt mille en1 Campagnes de Louis XV. p. 79.

nemis. Tout l'effort du génie du maréchal de Saxe fut de tromper sur ses intentions le duc de Cumberland, qui de la Haye observait ses mouvements. Il envoya son lieutenant, le maréchal de Lowendal, opérer dans le Luxembourg, pour se rabattre ensuite sur Maëstricht par la rive droite de la Meuse, tandis que lui-même faisait semblant de se porter sur Breda, et, revenant brusquement sur la rive gauche du fleuve, investissait de ce côté la ville qu'il voulait assiéger. Cette savante manœuvre réussit à souhait : le 9 avril le maréchal de Saxe était sous les murs de Maëstricht, et Lowendal y arriva quatre jours après.

Aussitôt les travaux du siége commencèrent, et ils furent poussés avec la plus grande activité. Dans la nuit du 15 au 16 la tranchée fut ouverte, et les deux maréchaux encouragèrent cette opération de leur présence. Elle était nécessaire aux troupes, qui avaient à subir à la fois le feu de l'ennemi et les rigueurs d'une saison contraire. Enfin, malgré la résistance courageuse des assiégés et leurs fréquentes sorties, malgré les menaces du duc de Cumberland, qui vint se présenter devant les lignes françaises sans oser les assaillir, les travaux furent poussés avec une telle vigueur, que le 4 mai au matin le maréchal de Saxe ordonna pour la nuit l'attaque du chemin couvert.

« Mais à midi le lord Sackville, aide de camp du duc de Cumberland, arriva à l'abbaye d'Hochten avec une lettre de ce prince, où il donnait avis au maréchal de Saxe que les préliminaires de paix venaient d'être

signés à Aix-la-Chapelle; il lui proposait en même temps de lui céder Maëstricht, s'il voulait accorder à la garnison les honneurs de la guerre.

«Le baron d'Aylwa, gouverneur de Maëstricht, ne jugea pas que la lettre du duc de Cumberland fût une autorité suffisante pour lui faire rendre une place qui lui avait été confiée par les États-Généraux : il demanda un délai de quarante-huit heures, pour envoyer à Breda savoir les intentions du prince d'Orange. Le général major comte de Wied en étant revenu avec les ordres au baron d'Aylwa de remettre Maëstricht, le drapeau fut arboré, et la capitulation fut signée le 7 : elle portait que la garnison sortirait avec les honneurs de la guerre, et sans chariots couverts; mais que, par considération particulière pour le baron d'Aylwa, commandant de la place, et pour le baron de Marshal, commandant des Autrichiens, ils pourraient emmener, l'un et l'autre, quatre pièces de canon et deux mortiers 1.»

Le lendemain les hostilités furent suspendues, et la paix, signée le 18 octobre à Aix-la-Chapelle, fut publiée à Paris le 12 février de l'année suivante.

'Histoire du maréchal de Saxe, par le baron d'Espagnac, t. II,

, p. 478.

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