présentèrent devant sa majesté, et lui firent le salut avec une assurance également noble et modeste. De là le roi marcha vers l'église cathédrale au milieu d'une double haie des troupes de la garnison. Les rues, qui de ce côté-là sont droites et spacieuses, étaient sablées, jonchées de verdure, et tapissées, à droite et à gauche, des plus belles tapisseries, que les habitants de tout état avaient fournies à l'envi. « Sa majesté, étant arrivée devant le principal portail de l'église cathédrale, descendit du carrosse, et fut reçue par M. le cardinal de Rohan, qui était à la tête de tout son clergé, avec M. le cardinal de Soubise, son coadjuteur, et M. l'évêque d'Uranople, son suffragant. Son éminence fit au roi un très-beau discours, après lequel sa majesté fut conduite jusqu'au pied du maître-autel à un prie-Dieu couvert d'un tapis de soie et de velours, où M. le prince Camille de Rohan Guémené, fils de M. le prince de Montauban, et chanoine domicellaire de cette cathédrale, présenta le carreau à sa majesté. Le roi, après avoir fait sa prière, se rendit à pied au palais épiscopal, où il avait choisi son logement. ༥ <<< Les petits cent-suisses se trouvèrent rangés en haie dans la cour : les troupes bourgeoises, qui fermaient le cortége, suivirent jusqu'à l'entrée, et passèrent en revue devant sa majesté, qui se mit aux fenêtres pour les voir défiler. Tous les corps furent ensuite admis à complimenter sa majesté. » Les fêtes qui suivirent l'arrivée du roi furent toutes de la plus grande magnificence. « Le 10 octobre le roi partit au son de toutes les cloches de la ville et au bruit de toute l'artillerie des remparts, laissant tous les cœurs pénétrés de la joie d'avoir vu et du regret de perdre sitôt ce monarque bien aimé 1. » CCCCXCII. SIÉGE DE FRIBOURG. -11 OCTOBRE 1744. LE ROI ARRIVE AU CAMP DEVANT FRIBOURG. Tableau du temps, par LENFANT. Le maréchal de Coigny, ayant passé le Rhin, donna ordre au duc d'Harcourt de se porter sur le vieux Brisach, tandis qu'il marchait avec le reste de ses troupes vers Fribourg en Brisgau. Arrivé devant cette ville depuis le 19 septembre, il l'avait fait investir, lorsque le roi, arrivé de Strasbourg, prit le commandement de l'armée. Le siége de Fribourg fut long et pénible, surtout à cause de l'abondance des eaux de la Treisam, qu'il fallait arrêter et détourner. Les assiégés, qui avaient reçu des secours, se défendirent avec courage et opiniâtreté; ils tentèrent plusieurs sorties. << Le maréchal de Coigny rendait compte au roi tous les jours du progrès des travaux, et en recevait les ordres les eaux devenues basses, on sut profiter ha : 1 Extrait de l'ouvrage intitulé: Représentation des fêtes données par la ville de Strasbourg pour l'arrivée et pendant le séjour de sa majesté en cette ville. bilement de cette heureuse circonstance; on fit passer de l'autre côté de la rivière des canons, des pierriers et des mortiers pour répondre et pour imposer à ceux des assiégés; d'autres batteries furent établies contre les faces du bastion du Roi, contre celle de la demi-lune et contre chaque flanc 1. » CCCCXCIII.' SIÉGE DE FRIBOURG. 17 AU 18 OCTOBRE 1744. Déjà les travaux étaient arrivés à peu de distance du chemin couvert; on crut pouvoir l'attaquer : une nuit obscure (du 17 au 18 octobre) favorisait ce projet; mais il survint une pluie si considérable qu'on ne put s'occuper, même le jour suivant, que de perfectionner les ouvrages. «Le 29 octobre le roi, visitant les travaux pour reconnaître les ouvrages de la tranchée et le progrès des batteries qui battaient en brèche, s'aperçut que les descentes du fossé de la gauche étaient fort avancées, en sorte qu'il décida que celles de la droite qui avaient été abandonnées seraient reprises, et que le travail des mines qui avait été dérangé serait réparé. Les ordres du roi ponctuellement exécutés, les batteries furent établies sur le chemin couvert. A peine eurent-elles 1 Histoire des conquêtes de Louis XV, par Dumortous, p. 20. commencé à battre en brèche, que le feu des ennemis redoubla, et qu'ils démasquèrent une nouvelle batterie qui fit un feu continuel sur celles des Français et sur leurs ouvrages. Les nouvelles forces des assiégés n'empêchèrent pas l'artillerie du chemin couvert de faire deux brèches au bastion du Roi, ni plusieurs compagnies de grenadiers d'y monter et de s'y loger1. » CCCCXCIV. PRISE DE LA VILLE ET DES CHATEAUX DE FRIBOURG. 5 ET 25 NOVEMBRE 1744. Gouache par VAN BLAREMBERG. La ville se rendit enfin le 5 novembre; on signa le 6 les articles de la capitulation dans la tente même du roi. Les châteaux furent livrés ensuite le 25 novembre, et la garnison resta prisonnière de guerre. Après la prise de Fribourg le roi quitta l'armée pour retourner à Paris. CCCCXCV. SIÉGE DE TOURNAY. INVESTISSEMENT DE LA PLACE; CAMP DE LA RIVE DROITE DE L'ESCAUT. Tableau du temps, par IGNACE PArrogel. 1 Histoire des conquêtes de Louis XV, par Dumortous, p. 20. CCCCXCVI. SIÉGE DE TOURNAY. INVESTISSEMENT DE LA PLACE; CAMP DE LA RIVE GAUCHE DE L'ESCAUT. « L'empereur Charles VII mourut à Munich le 20 janvier 1745; la France n'ayant agi que pour les intérêts de ce prince, il y avait lieu de croire que les puissances belligérantes se prêteraient aux propositions de paix de sa majesté très-chrétienne. Elles furent sans effet, et ce monarque dut continuer la guerre avec plus de vigueur qu'auparavant. « Le roi ayant déclaré qu'il irait en Flandre avec M. le dauphin, le maréchal de Saxe fut nommé pour commander sous ses ordres. La campagne devait s'ouvrir par le siége de Tournay. Le chevalier d'Espagnac, aidemaréchal général des logis de l'armée, avait été envoyé secrètement à Condé pour examiner l'emplacement des premiers camps que les troupes devaient prendre entre Maubeuge et la Haisne. Il devait aussi s'assurer des |