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HISTORIQUES

DU PALAIS

DE VERSAILLES.

PEINTURE.

PREMIÈRE PARTIE.

CCCCLXVII.

PHILIPPE, DUC D'ORLÉANS, VA RECEVOIR AU PARLEMENT LE TITRE DE RÉGENT DU ROYAUME.—2 SEPTEMBRE 1715.

er

ALAUX.

Louis XIV était mort le 1 septembre 1715. A la manière calme et solennelle dont il avait vu sa fin approcher, on avait pu croire qu'il avait voulu faire de la mort le dernier des actes de représentation royale qui remplirent son grand règne.

« Aussitôt, raconte M. Lemontey, l'historien de la

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régence, tous les grands du royaume entrent dans la chambre du duc d'Orléans, et le saluent du nom de régent. Une partie d'entre eux le presse d'en accepter le titre, de le notifier au parlement, et de saisir, sans autre formalité, les rênes du pouvoir. Philippe sourit au zèle de ces nouveaux d'Épernon; mais, ayant peine à reconnaître, dans la courtoisie de quelques habitués du château de Versailles, le pavois du champ de mars et le droit des guerriers de Clovis, il ordonne sagement de convoquer le parlement, et entraîne le cortège aux pieds de l'enfant Louis XV.

«Tout se prépare, ou plutôt tout était prêt pour la séance du lendemain. Les gardes françaises et les gardes suisses environnent le palais. Villeroy, de Guiche, Contades, Reynolds et Saint-Hilaire dirigent, en faveur du duc d'Orléans, toutes les mesures que Louis XIV a prescrites contre lui. D'Aguesseau et Joly de Fleury ont composé les harangues. L'ambassadeur d'Angleterre étale dans une tribune l'apparence d'un crédit qu'il n'a pas. La grand'salle et les vestibules sont inondés d'une foule d'officiers déguisés, de militaires réformés, et de ces aventuriers dont les grandes villes sont le rendezvous. La plupart portent des armes cachées sous leurs habits, mais sans aucun dessein arrêté. Tous obéissent à cette curiosité française qui aime à saisir les événements dans leur source, à la vanité de jouer un rôle dans toutes les affaires, ou, peut-être, au plaisir puéril de figurer une scène de la Fronde.

1 Lord Stairs.

« Le parlement, impatient de sentir sa liberté, s'était rassemblé dès la pointe du jour..... Philippe put reconnaître, à son entrée dans la grand'chambre, tout l'ascendant de son parti. Le premier président de Mesmes, son ennemi, fut obligé lui-même de le haranguer avec soumission. » Le prince n'en éprouva pas moins un grand trouble quand ce fut à lui de prendre la parole: l'autorité de Louis XIV était si imposante encore, même dans la lettre morte de son testament! Le discours du duc d'Orléans était habilement composé: il supposa au feu roi des dispositions contraires à celles que le testament renfermait; puis «il promit un gouvernement sage, économe, réparateur, et toujours éclairé par les remontrances du parlement, etc. A ces derniers mots, tous les cœurs tressaillirent de joie. Aussi, quand il proposa de prononcer, séparément et en premier lieu, sur le droit que sa naissance et les lois du royaume lui donnaient à la régence, un empressement sans frein dépouilla l'assemblée de la gravité d'un corps délibérant. Le testament fut apporté; un conseiller nommé Dreux le lut d'une voix basse et rapide, et personne ne daigna l'écouter. Les têtes bouillantes des enquêtes ne souffrirent même pas qu'on recueillit les voix dans la forme accoutumée, et une impétueuse acclamation nomma le duc d'Orléans régent, en vertu de sa naissance et des lois du royaume1. »

1 Histoire de la Régence, par Lemontey, ch. 1, p. 32-35.

CCCCLXVIII.

LIT DE JUSTICE DE LOUIS XV. 12 SEPTEMBRE 1715.

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DUMÉNIL.

Le duc d'Orléans s'empressa de faire confirmer par la royauté, dans son plus solennel appareil, l'arrêt du parlement qui venait de détruire le testament de Louis XIV. Il fut décidé que le jeune roi1, âgé seulement alors de cinq ans, se rendrait au Palais pour y tenir un lit de justice où serait enregistré l'acte qui conférait la régence à son oncle le duc d'Orléans. Cette cérémonie, fixée d'abord au 7 septembre, n'eut lieu que le 12, par suite d'une indisposition qui alarma un moment la cour, et le régent plus que tout le monde, pour l'enfance débile de Louis XV.

Le parlement était assemblé dans la salle de la grand'chambre lorsque le roi arriva : Louis XV, accompagné du régent et des princes du sang, fut reçu au bas des degrés de la Sainte-Chapelle par la députation, ayant à sa tête le premier président, et conduit jusqu'au trône, qui se trouvait dans un angle de la salle. Le premier chambellan, comme grand écuyer, le porta depuis le carrosse jusqu'à la porte de la grand'chambre, où le duc de Tresme le prit et le mit sur son trône. Le roi

1 Louis XV était fils du duc de Bourgogne, fils aîné du grand dauphin, et par conséquent arrière-petit-fils de Louis XIV. Il était né en

1710.

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