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commandait à Loano la droite, toute composée de troupes autrichiennes; la gauche, sous les ordres du marquis de Colli, formée de Piémontais, était du côté du Tanaro, et le général d'Argenteau se trouvait au centre avec les troupes allemandes, les régiments italiens au service de l'Autriche, et quelques bataillons piémontais.

La position de Borghetto offrait à l'armée française de grands avantages pour prendre l'offensive, et il y avait nécessité pour le général de Wins, qui pouvait être inquiété dans Loano, de s'en emparer. Le 17 septembre il renforça le comte d'Argenteau de deux mille hommes d'élite, et lui ordonna d'établir une batterie de six bouches à feu pour protéger l'attaque qui devait avoir lieu le lendemain au point du jour, et commencer sur le point de Succarello. On se battit avec acharnement, et déjà les Autrichiens espéraient la victoire, «<lorsque le général Sejean ordonna à l'adjudant général SaintHilaire de sortir du camp des Deux-Frères et de marcher avec les éclaireurs et les grenadiers sur le flanc gauche de l'ennemi. Un brouillard fort épais couvrit ce mouvement, en assura la réussite, et les impériaux furent repoussés jusque dans les redoutes de Sam

bucco 1. >>

1 Histoire des guerres de la révolution, par Jomini, t. VII, p. 300.

DCXLVII.

BATAILLE DE LOANO. 23 ET 24 NOVEMBRE 1795.

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BELLANGE.

La paix conclue avec l'Espagne avait permis d'envoyer à l'armée des Alpes une portion des troupes employées jusque-là sur la frontière des Pyrénées. Les nouveaux bataillons arrivèrent vers les premiers jours d'octobre, et à la même époque le général Kellermann, appelé à un autre commandement, remit à Schérer celui de l'armée d'Italie. L'avantage remporté à Succarello promettait de nouveaux succès: Schérer se mit en mesure de les obtenir. La grande quantité de neige qui était tombée dans les montagnes ayant forcé les avant-postes des deux armées à se retirer dans les vallées, il dut renoncer à attaquer les positions que les Piémontais occupaient dans les montagnes, et, lorsque l'ennemi croyait les troupes françaises à la veille d'entrer dans leurs cantonnements, Schérer songeait, rapporte Jomini, à accabler les Autrichiens dans la rivière de Gênes. Ayant ordonné d'attaquer l'ennemi dans sa position de Loano le 23 novembre, il arrêta les dispositions suivantes :

« La division Augereau, à la droite, fut chargée de se porter entre Loano et le Monte-Carmelo, et de faire effort particulièrement de ce côté; la tâche de Masséna, au centre, consistait à enlever les hauteurs de

Roccabarbène et de Monte-Lingo avec les divisions Laharpe et Charlet, tandis qu'à la gauche Serrurier, avec sept mille hommes, tiendrait en échec le corps de Colli dans le camp de San-Bernardo et de la Planetta, jusqu'au moment où Masséna, maître des sommités de l'Apennin, pourrait, en lui envoyant du renfort, le mettre en état de prendre l'offensive à son tour, et de forcer le passage des gorges de Garessio. «Un brick et neuf chaloupes canonnières prirent poste sur la plage, entre Borghetto et la Pietra, pour inquiéter le flanc gauche de l'ennemi, et l'attaque commença au signal de deux fusées lancées du mont SaintEsprit. >>

Ce fut Augereau qui, avec vigueur, mais sans précipitation, commença l'attaque. Il enleva les trois mamelons qui formaient les avant-postes autrichiens, malgré l'héroïque résistance du général Roccavina. Pendant ce temps Masséna, avec sa vigueur et son audace accoutumées, franchissait les crêtes de l'Apennin, et faisait attaquer les flancs d'Argenteau par les généraux Laharpe et Charlet. Le premier repoussa de Malsabocco les régiments italiens de Belgiojoso et de Caprara, et fit un grand carnage de deux bataillons piémontais qui voulurent lui résister; l'autre enleva aux impériaux Banco et toute l'artillerie qui le garnissait. Ces deux opérations terminées, Masséna réunit ses troupes, et marcha en toute diligence sur Bardinetto, où Argenteau avait rallié ses forces, et l'attaqua de front et sur les flancs. Le combat devint opiniâtre; Charlet tomba blessé à mort;

mais Masséna décida la victoire en chargeant à propos à la tête de la réserve. Les impériaux, battus, se retirèrent de peur d'être enfoncés. A peine aperçut-il leur mouvement rétrograde, qu'il envoya le général Cervoni avec trois bataillons, par des sentiers très-difficiles, s'emparer des hauteurs de Settepani et de Melogno, tandis qu'il harcèlerait leurs derrières. Mais ces précautions devinrent inutiles, Argenteau s'étant retiré dans le plus grand désordre à Murialto, derrière la Bormida. >>

Malgré la fatigue de ses troupes Masséna poussa alors l'adjudant général Joubert avec quinze cents hommes sur les hauteurs de San-Pantaleone, se disposant à le suivre avec le gros de ses forces.

<< Schérer, instruit des brillants succès de Masséna et de l'arrivée de Joubert sur ces hauteurs, se mit au point du jour à la poursuite des Autrichiens. Augereau remonta l'Apennin avec deux de ses brigades, tandis que l'autre longea la côte. De son côté Masséna, prévoyant que la retraite des impériaux allait s'opérer par la gorge de San-Giacomo, donna l'ordre à Joubert de s'en emparer avec ses meilleurs marcheurs, et se disposa à le suivre avec le reste de son avant-garde 1. »

Un orage de vent et de neige empêcha la poursuite d'être aussi redoutable à l'ennemi qu'elle pouvait l'être. Cependant plusieurs milliers de morts qu'il laissa sur le champ de bataille, cinq mille prisonniers, quarante pièces de canon, et des magasins immenses 1 Histoire des guerres de la révolution, par Jomini, t. VII, p. 307-317.

furent le fruit de cette victoire. Elle jeta l'épouvante en Italie, et prêta quelque force au gouvernement du Directoire, qui venait de succéder à celui de la Convention nationale.

FIN DU TROISIÈME VOLUME.

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