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«Le général Custine, instruit, dans son camp de Landau, du mouvement du comte d'Erbach, se porta aussitôt sur Spire. Le colonel Winckelmann voulut d'abord se mettre en bataille en avant de la ville. Bientôt sa petite troupe, écrasée par une artillerie supérieure, et sur le point d'être tournée, se dirigea vers le Rhin, où se trouvaient les embarcations nécessaires à son transport; mais les bateliers, qu'on n'avait pas eu la précaution de surveiller, s'étant enfuis sur la rive droite avec leurs barques, le colonel, enveloppé, se vit dans la dure nécessité de mettre bas les armes avec deux mille sept cents hommes. L'armée française s'empara, les jours suivants, de Worms et de Frankenthal 1. »

DLXXXV.

LEVÉE DU SIÉGE DE LILLE. 8 OCTOBRE 1792.

En quittant la Flandre pour se porter rapidement à la rencontre de l'armée du duc de Brunswick, qui entrait en France par la Lorraine, le général Dumouriez avait ramassé tout ce qu'il avait trouvé de troupes disponibles; il n'avait laissé que de faibles garnisons dans les places de la frontière du Nord, dont il avait donné le commandement au général Moreton de Chabrillant. Cette belle et riche frontière restait ainsi exposée aux attaques de l'armée autrichienne, réunie dans les Pays

'Histoire des guerres de la révolution, par Jomini, t. II, p. 150.

Bas, sous les ordres du duc Albert de Saxe-Teschen. Ce prince, après s'être emparé successivement des postes de Lannoy, Roubaix, Turcoing, et d'une grande partie du pays intermédiaire entre Douai, Valenciennes et Lille, se porta rapidement sur cette dernière place, et en forma l'investissement, le 23 septembre 1792.

« Cette ville commerçante, industrieuse, peuplée de soixante mille âmes, située sur la Deule, près du confluent de la Lys, dans une contrée riche et fertile, est la place d'armes la plus importante de toute la frontière du Nord. Son enceinte, de quatorze bastions, est entourée de la Deule, qui ajoute à sa force. La citadelle passe pour le chef-d'œuvre de Vauban1.»

Le général Duhoux avait pris le commandement de Lille. Sous ses ordres était le maréchal de camp Ruault, et parmi les officiers chargés de la défense de la place, se trouvait le capitaine du génie Marescot, destiné plus tard à prendre un rang si élevé dans son arme. Cependant le duc Albert, qui, à la tête de quinze mille hommes, ne pouvait prétendre à s'emparer d'une place restée imprenable pour de grands capitaines et de puissantes armées, songea à la réduire en lui faisant subir les horreurs d'un bombardement. Il établit, sur le seul point de la ville qu'il pût aborder, une batterie d'obusiers, et commença à y faire le feu le plus redoutable.

<< Pendant sept jours et sept nuits le bombardement continua avec une effroyable activité : l'incendie se

1 Histoire des guerres de la révolution, par Jomini, t. II, p. 169.

propagea; près de deux cents maisons furent brûlées, et plus de mille criblées par les projectiles; un grand nombre d'habitants, cherchant dans les caves un abri contre la bombe, y trouvèrent la mort, et furent ensevelis sous les ruines. Toutes ces calamités n'amenèrent pourtant pas la soumission à laquelle le duc Albert s'était attendu; au contraire elles animèrent d'une nouvelle ardeur depuis l'enfant jusqu'au vieillard. La garnison rivalisa avec les bourgeois; partout on travailla pour arrêter les ravages du feu et répondre en même temps à celui des Autrichiens1. »

L'héroïque résistance des Lillois vainquit enfin la cruelle obstination du duc Albert. Les moyens de destruction commençaient à lui manquer, et en même temps le général Labourdonnaye, arrivant de Soissons, et Beurnonville, revenant de la Champagne, marchaient à sa rencontre. Il se décida donc, le 8 au matin, à abandonner les murs de Lille, laissant derrière lui, avec le souvenir de ses inutiles cruautés, un nouvel aliment à cet ardent patriotisme qui enflammait alors la France pour la défense de son territoire.

1 Histoire des guerres de la révolution, par Jomini, t. II, p. 173-174,

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La bataille de Valmy ayant changé la face des affaires, et le roi de Prusse s'étant décidé, quelques jours après, à commencer sa retraite, les généraux en chef Dumouriez et Kellermann partagèrent l'armée française en plusieurs corps pour se mettre à sa poursuite. Bientôt après, lorsque l'armée prussienne eut évacué la Champagne et repassé ceux des défilés de l'Argonne qui étaient tombés en son pouvoir, Dumouriez, prévoyant que l'armée autrichienne, sous les ordres du général Clerfayt, allait se porter sur les Pays-Bas autrichiens pour en disputer aux Français la conquête, détacha trente mille hommes, qui partirent à marches forcées du Chêne-Populeux pour Valenciennes, en deux colonnes, la première sous les ordres du lieutenant général Beurnonville, et la seconde sous ceux du lieutenant général duc de Chartres. Pendant que ce mouvement s'exécutait, le général Dumouriez se rendit à Paris pour y concerter avec le gouvernement ses opérations ultérieures, tandis que le général Kellermann, renforcé par les corps des généraux Valence et Arthur Dillon, était chargé de suivre l'armée du duc de Brunswick dans sa retraite, et de la contraindre à évacuer le ter

ritoire français : ce qui fut heureusement et habilement terminé le 20 octobre 1792.

Le général Dillon, débouchant par les Islettes et par Clermont en Argonne, arriva devant Verdun lorsque l'armée ennemie commençait à passer la Meuse, et que son arrière-garde entrait dans la ville. Il se porta aussitôt en avant avec neuf escadrons, cinq bataillons, six pièces de douze et quatre de huit, fit mettre ses pièces en batterie sur le mont Saint-Barthélemy, qui domine la citadelle, et somma alors le commandant de livrer la place, en lui envoyant son aide de camp suivi d'un trompette.

On suspendit les hostilités; la place fut remise, à la condition qu'il serait accordé trois jours à l'armée prussienne pour achever d'évacuer la place et de faire transporter les malades sur des voitures du pays. Le 14 octobre le général Dillon entra dans la ville à la tête de ses troupes, et en reprit possession pour la France.

DLXXXVII,

LEVÉE DU SIÉGE DE THIONVILLE. 16 OCTOBRE 1792.

En même temps que le roi de Prusse, au début de la campagne, s'était emparé de Verdun, le général autrichien Clerfayt avait bombardé et pris Longwy, et le prince de Hohenlohe-Kirchberg était allé mettre le siége devant Thionville. « On avait espéré, dit Jomini',

1 Histoire des guerres de la révolution, t. II, p. 117.

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