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dans cette catégorie les dommages causés à des volailles. Dans l'espèce où cette décision a été rendue, la poursuite était fondée sur la mort donnée volontairement à des volailles appartenant à autrui. L'arrêt a distingué le sens des différents articles qui pouvaient s'appliquer à ce fait, en déclarant : «< que l'art. 452, ne parlant que de quadrupèdes, qu'il désigne d'une manière spéciale, et de poissons, est nécessairement limitatif et non pas simplement démonstratif; qu'il ne saurait être étendu au cas d'empoisonnement de ces espèces d'oiseaux que l'on élève dans les basses-cours; que les oiseaux de basse-cour sont appelés oiseaux domestiques, et sont ainsi nécessairement compris sous cette dénomination générique de l'art. 454, mais que la disposition de cet article n'est pas générale et absolue ; qu'il ne suffit pas, pour que la peine qu'il prononce soit applicable, que l'animal domestique ait été tué sans nécessité, qu'il faut encore qu'il l'ait été dans un lieu dont celui à qui cet animal appartient est propriétaire; locataire, colon ou fermier; que, dès lors, le prévenu n'était pas plus coupable du délit de l'art. 454 que de celui de l'article 452; que le fait ne pouvait se rattacher qu'à l'art. 479, no 1, relatif au dommage causé volontairement aux propriétés mobilières d'autrui, hors les cas prévus par les divers articles du Code pénal, au nombre desquels se trouvent les articles 452 et 454 ; que ce dommage, quoique volontaire, est mis par la loi dans la classe des contraventions, et non dans celle des délits, puisqu'il n'est puni que d'une peine de police 1. »

2858. Cette disposition a encore été appliquée; - au fait d'avoir tué, même sur son propre terrain, un chien apparte

1. Cass., 17 août 1822, Bull. n. 111; Devill. et Car., 7.126; 28 juill. 1855. Bull. n. 269; Devill. et Car., 55.1.862; J. P. 56.2.400; D. P. 55.1.361.

** V. aussi Cass., 16 janv. 1875; Bull. n. 22: arrêt décidant en même temps que la faculté accordée par l'art. 12 de la loi du 28 septembre6 oct. 1791 au propriétaire ou fermier de tuer les volailles d'autrui sur son terrain, au moment où elles y font du dégât, est une exception qui ne peut être admise qu'en cas de dégât actuel et effectif.

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nant à autrui ; - au fait d'avoir mutilé un chien de chasse appartenant à autrui 2.

Toutefois, lorsque les animaux domestiques ont été tués sur le terrain d'autrui, il y a lieu d'examiner s'il n'y causaient pas quelque dommage et si ce dommage ne donnait pas au propriétaire du terrain le droit de les tuer. Dans une première espèce, cinq poules avaient été tuées sur le terrain d'autrui. Le tribunal de police relaxa le prévenu des fins de la plainte, en constatant que ces poules s'introduisaient habituellement sur le terrain de celui-ci, et causaient du dommage à ses récoltes, que le propriétaire de ces volailles avait été averti, et que c'est sur le lieu et au moment que se produisait le dommage, qu'elles avaient trouvé la mort. La Cour de cassation a rejeté le pourvoi : « attendu que, dans ces circonstances, le fait reproché au prévenu n'était passible d'aucune peine, puisque, aux termes de l'article 12 de la loi du 28 septembre-6 octobre 1791, il est loisible à tout propriétaire de tuer, sur le lieu et au moment du dégât, les volailles qui causent du dommage à ses récoltes 3. » Dans d'autres espèces, il a été également reconnu que le no 1 de l'article 479 ne s'appliquait pas au fait de tuer un chien qui est surpris sur le terrain d'autrui brisant et mangeant les œufs dans un poulailler, ou étranglant plusieurs lapins 5.

1. Cass., 4 nov. 1848, Bull. n. 262; 19 avril 1866, Bull. n. 113; Devill. et Car., 67.1.96; J.P. 67.192 D.P.66.1.415. -**Il en est de même du fait d'avoir volontairement tué sur la voie publique un chien appartenant à autrui (Cass., 25 janv. 1873; Bull. n. 25).

2. Cass., 18 août 1853, Bull. n. 509; Devill. et Car., 53.1. 799; J. P. 54.2.270; D. P. 53.1. 263.

3. Cass., 7 mai 1868, Bull. n. 124; Devill. et Car., 69. 1. 186; J. P. 69. 439.

4. Cass., 17 nov. 1865, Bull. n. 199; Devill. et Car., 66. 1. 272; J. P. 66. 675; D. P. 66. 1. 93.

5. Cass., 17 déc. 1864, Bull, n. 293; Devill. et Car., 65. 1. 392; J. P. 65. 999.

TOME VI.

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§§ II, III et IV.- Mauvais traitements envers les animaux.

2859. « 2o Ceux qui auront occasionné la mort ou la blessure des animaux ou bestiaux appartenant à autrui par l'effet de la divigation des fous ou furieux, ou d'animaux malfaisants ou féroces, ou par la rapidité, la mauvaise direction ou le chargement excessif des voitures, chevaux, bêtes de trait, de charge ou de monture.

<«<3° Ceux qui auront occasionné les mêmes dommages par l'emploi ou l'usage d'armes sans précaution ou avec maladresse, ou par le jet de pierres ou autres corps durs.

<«< 4o Ceux qui auront occasionné les mêmes accidents par la vétusté, la dégradation, le défaut de réparation ou d'entretien des maisons ou édifices, ou par l'encombrement ou l'excavation ou telles autres œuvres, dans ou près les rues, chemins, places ou voies publiques, sans les précautions ou signaux ordonnés ou d'usage. »>

Ces trois paragraphes ont un objet commun : la répression de la mort ou des blessures causées involontairement aux animaux ou bestiaux appartenant à autrui.

Si la mort a été causée volontairement à des chevaux, bestiaux, etc., ce fait constitue le délit prévu par l'art. 453 du Code pénal; si de simples blessures ont été portées volontairement à des bestiaux ou animaux domestiques, ce fait rentre dans les termes de l'article 30 du titre 2 de la loi du 28 septembre-6 octobre 1791, qui n'a point été abrogé. L'article 479, dans ses nos 2, 3 et 4, ne s'applique donc qu'aux blessures faites et à la mort causée involonlairement aux animaux ou bestiaux d'autrui 2.

Mais il faut que cette mort ou ces blessures soient le ré

1. Cass., 4 avril 1863, Bull. n. 107; Devill. et Car., 63. 1. 510; J. P. 64. 204.

2. Cass., 5 fév. 1818, Bull. n. 16; Devill. et Car., 5. 417; et conf. Cass., 7 oct. 1847, Bull. n. 253; 4 avril 1863, Bull. n. 107; Devill. et Car., 63. 1. 510; J. P. 64, 204; D. P. 63. 1. 324.

sultat de quelqu'une des circonstances mentionnées dans les §§ 2, 3 et 4. Nous avons déjà examiné ces circonstances dans les §§ 4 et 5 de l'art. 471, 4, 7 et 8 de l'art. 475; elles étaient alors appréciées comme causes occasionnelles d'accidents pour les personnes, elles le sont ici comme causes d'accidents pour les animaux. Ce sont les mêmes fautes, les mêmes actes d'imprudence, d'inattention; la responsabilité de l'agent dérive de la même source, son objet seul diffère.

Il est essentiel que la cause de l'accident soit constatée; c'est un élément nécessaire de la contravention. Si la mort ou les blessures avaient une autre cause que les actes d'imprudence ou de maladresse énumérés par les §§ 2, 3 et 4, ces dispositions deviendraient inapplicables 1. Le fait, s'il était involontaire, ne pourrait donner lieu qu'à une action civile.

Les actes mentionnés par le § 3 supposent une faute plus grave que les autres, une maladresse qui approche davantage de la volonté. L'article 480 a autorisé, en conséquence, le tribunal de police à prononcer, selon les circonstances, la peine de l'emprisonnement pendant cinq jours au plus « contre ceux qui auront occasionné la mort ou la blessure des animaux ou bestiaux appartenant à autrui, dans les cas prévus par le n° 3 de l'art. 479. »

2860. Nous devons placer ici la loi du 2 juillet 1850 sur les mauvais traitements envers les animaux domestiques. Cette loi est ainsi conçue : « Seront punis d'une amende de 5 à 15 fr., et pourront l'être de 1 à 5 jours de prison, ceux qui auront exercé publiquement et abusivement de mauvais traitements envers les animaux domestiques. La peine de la prison sera toujours appliquée en cas de récidive. L'art. 483 du Code pénal sera toujours applicable. »

Cette loi, éminemment civilisatrice, puisqu'elle tend, en supprimant des traitements barbares, à adoucir les mœurs, a pour objet de protéger tous les animaux utiles ou agréables à l'homme contre l'abus qu'il en fait, contre les souffrances inutiles qu'il leur impose, contre les innombrables cruautés

1. * * Cass., 14 janv. 1875; Bull. n. 14.

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468 THÉORIE DU CODE PÉNAL, ART. 479, Nos 2, 3 ET 4.

dont ils sont l'objet. Le mot abusivement indique l'excès qu'il commet dans l'exercice de son pouvoir. S'il a le droit de corriger le chien ou le cheval vicieux ou indompté, il ne lui est pas permis de lui faire endurer des souffrances atroces et qui ne sont pas nécessaires. La loi ne punit cependant que les mauvais traitements exercés publiquement la morale publique est blessée par le spectacle révoltant d'actes de brutalité pratiqués sur un pauvre animal; c'est ce spectacle, qui indigne les témoins ou les corrompt, que la loi n'a pas voulu laisser impuni. Nous avons défini ce qu'on doit entendre par animaux domestiques (voy. n° 2389): la loi comprend tous les animaux privés qui vivent sous le toit de l'homme et sous sa protection, les oiseaux aussi bien que les quadrupèdes. Les animaux sauvages, s'ils sont réduits à la condition d'animaux domestiques, jouissent du même privilége.

2861. Que faut-il entendre par mauvais traitements? La Cour de cassation a appliqué cette qualification: au fait de blesser un chien par le jet d'un râteau 1; au fait de transporter des animaux entassés dans une voiture et ayant les pieds liés ensemble 2; - au fait de les avoir placés dans cette voiture de manière à leur occasionner des souffrances pendant le temps du parcours 3; au fait de les soumettre à un travail qui a amené la réouverture d'anciennes blessures; au fait de leur occasionner une souffrance par une charge excessive 5.

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On peut ajouter à ces actes : les coups violents et toutes autres voies de fait qui, sans nécessité, font souffrir l'animal; l'exigence abusive soit d'une marche ou exercice quelcon

1. Cass., 9 jnill. 1853; Bull. n. 353; Devill. et Car., 54. 1. 67; J. P. 54. 1302.

2. Cass., 22 août 1857, Bull. n. 320; Devill. et Car., 58. 1. 89; J. P. 58. 652. D. P. 57. 1. 415; 15 janv. 1857, Bull. n. 29.

3. Mêmes arrêts, et Cass., 13 août 1858, Bull. n. 231; Devill. et Car., 58. 1. 844; J. P. 59. 691; D. P. 58. 5. 17. 18.

4. Cass., 17 nov. 1859, Bull. n. 250; Devill. et Car., 60. 1. 393; J. P. 60. 928.

5. Cass., 10 nov. 1860, Bull. n. 232; D. P. 62. 5. 18.

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