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les vignes non closes de la commune, lors même qu'elles seraient isolées. Il ne suffit pas, pour que la vigne soit réputée close, qu'elle soit entourée d'un fossé, si ce fossé n'a pas la dimension prescrite par l'article 6, section 4, titre 1er de la loi du 28 septembre-6 octobre 1791 2. Mais, si le juge de police constate qu'elle est séparée de la route par un fossé dépendant du domaine public et un talus qui en rendent l'accès impossible, il peut décider, par une appréciation de fait, qu'elle est en état de clôture, et que l'arrêté dès lors ne s'y applique pas 3.

2819. Si, dans une commune où l'usage du ban de vendanges est établi, ce ban n'a pas encore été publié au moment où des propriétaires ont vendangé, peut-on leur imputer la contravention? La Cour de cassation a jugé : « qu'il suffit que ce ban ait eu lieu chaque année dans une localité, pour qu'on soit tenu d'attendre sa publication et de l'observer. « Cette décision est exacte en principe; il ne faut pas supposer que l'oubli ou la négligence de l'autorité municipale pourrait compromettre toute la récolte d'une commune; car l'autorité municipale appartient presque toujours aux véritables intéressés à la publication régulière des bans de vendanges. Il n'est pas nécessaire, d'ailleurs, que le ban de vendanges soit notifié à chacun des propriétaires, ou même affiché; il suffit qu'il soit publié à son de trompe ou de caisse, ou suivant la forme usitée dans la commune 5. Et, comme les bans de vendanges sont temporaires de leur nature, ils sont obligatoires du jour de la publication 6.

2820. Au reste, l'autorité des bans a ses limites. En premier lieu, nous avons vu, d'après les termes de la loi de 1791, que ces bans ne peuvent être publiés que dans les communes où

1. Cass., 6 fév. 1858, Bull. n. 42; Devill. et Car., 58. 1. 132; J.P. 58. 868.

2. Cass., 24 janv. 1858, Bull. n. 19.

3. Cass., 22 mai 1855, Bull. n. 106.

4. Cass., 25 fév. 1836, Bull. n. 55; Devill. et Car., 36. 1. 523 ; J. P. 36. 1106.

5 et 6. Cass., 24 janv. 1858, Bull. n. 19.

leur usage est établi ; ce serait donc un excès de pouvoir que de prendre de tels arrêtés dans les pays non soumis jusqu'à présent à cet usage, et ces arrêtés ne seraient pas obligatoires; car l'art. 471, no 1, se réfère aux règlements, et les règlements ne peuvent être pris qu'en vertu de l'art. 1o, section 5, de la loi des 28 septembre-6 octobre 1791. Il a été reconnu toutefois que, même dans ces localités, le maire peut prendre des arrêtés pour défendre le grappillage 1. En second lieu, les maires doivent rester dans les bornes tracées par la loi. Ainsi la Cour de cassation a jugé : « que le droit donné par la loi rurale aux conseils municipaux de faire chaque année un règlement à l'égard du ban de vendanges ne comporte pas le droit d'interdire au propriétaire d'une vigne même non close l'entrée de cette vigne, un mois avant l'époque des vendanges, soit pour la visiter. soit pour y cueillir des fruits en maturité; qu'au contraire cette loi dispose que, sauf ce qui est relatif au ban des vendanges, chaque propriétaire est libre de faire sa récolte, de quelque nature qu'elle soit, et au moment qu'il lui convient ; qu'en supposant la coutume alléguée dans l'arrêté, elle ne peut prévaloir sur les dispositions du Code, ni sur celles de l'article 475 du Code pénal, dont le no 1er ne punit que la contravention aux bans des vendanges, et dont le no 9 n'interdit qu'à ceux qui ne sont pas propriétaires, usufruitiers, ni jouissant d'un terrain, l'entrée sur ce terrain, dans le temps où il est chargé de grains en tuyaux, de raisins ou autres fruits mûrs ou voisins de la maturité, ce qui laisse entiers le droit et les attributs du droit de propriété 2. »

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2821. « 2o Les aubergistes, hôteliers, logeurs ou loueurs de maisons garnies, qui auront négligé d'inscrire de suite et sans aucun blanc, sur un registre tenu régulièrement, les noms,

1. Cass., 24 avril 1858, Bull. n. 136; Devill. et Car., 58.1.495; J.P.58. 773; D.P.58.1.344.

2. Cass., 21 oct. 1841, Bull. n. 311; J.P.41.2.553; 24 fév. 1865, Bull.n. 108; Devill. et Car., 66. 1.88; J.P.66.193; D.P.65.1.496.

qualités, domicile habituel, dates d'entrée et de sortie de toutes personnes qui auraient couché ou passé une nuit dans leurs maisons; ceux d'entre eux qui auraient manqué de représenter ce registre aux époques déterminées par les règlements, ou lorsqu'ils en auraient été requis, aux maires, adjoints, officiers ou commissaires de police, ou aux citoyens commis à cet effet le tout sans préjudice des cas de responsabilité mentionnés en l'art. 73 du présent Code, relativement aux délits de ceux qui, ayant logé ou séjourné chez eux, n'auraient pas été régulièrement inscrits. »

:

La disposition qui termine ce paragraphe, et par laquelle il se réfère à l'article 73, relativement à la responsabilité des logeurs, en cas d'inscription non pas seulement irrégulière, comme le porte ce paragraphe, mais omise, suivant les termes de l'article 73, a été par nous précédemment examinée 1; nous n'avons donc plus à nous en occuper.

Les articles 5 et 6 du titre 1er de la loi des 19-22 juillet 1791 prescrivaient déjà les règles qui font l'objet du § 2 de l'article 475; ce paragraphe n'a fait que les reproduire.

L'art. 5 de la loi de 1791 commençait par ces mots : «< Dans les villes et dans les campagnes, les aubergistes, maîtres d'hôtels garnis et logeurs seront tenus, etc. » Lors de la discussion du Code pénal au Conseil d'Etat, M. Defermon dit : <«< que cette disposition n'était bonne que pour les villes, mais qu'elle ne convenait pas aux villages. Là les aubergistes ne tiennent pas de livres. Les gens qui couchent chez eux ne sont guère que des paysans qui se rendent au marché; pourquoi les exposer à être tracassés par la police ? » - M. Réal dit : «que la disposition était copiée de règlements en vigueur, et qui sont exécutés même dans les villages; qu'au reste, c'est précisément dans les villages que la police en éprouve les bons effets; que cependant elle ne les fait exécuter rigoureusement que là où il en est besoin 2. » Le paragraphe fut adopté sans amendement d'après ces observations; et toutefois ce paragraphe ne reproduit point les mots dans les villes

1. V. notre tome 1er, n. 385.

2. Locré, t, 31, p. 231.

et dans les campagnes, qui se trouvaient dans la loi de 1791; mais, par cela seul qu'il ne distingue point, on doit conclure. que sa disposition est générale et qu'elle s'applique dans tous les lieux.

2822. Les aubergistes, les hôteliers, les logeurs ou loueurs de maisons garnies sont seuls assujettis à son application. Le texte du paragraphe est positif à cet égard; et, comme il s'agit d'une disposition pénale, on doit nécessairement la restreindre aux cas qu'elle exprime. Ainsi la Cour de cassation a jugé que l'obligation imposée par ce paragraphe était restrictive, et qu'un arrêté municipal ne pouvait l'étendre à d'autres personnes que les aubergistes, hôteliers, logeurs ou loueurs de maisons garnies : « attendu qu'en autorisant l'autorité municipale à publier de nouveau les lois et les règlements de police, la deuxième partie de l'art. 46 de la loi du 19-22 juillet 1791 ne lui donne pas le droit d'ajouter à la disposition de ces lois et de l'étendre aux personnes qu'elles ne concernent point 1. »

2823. Mais que faut-il entendre par logeur ou loueur de maisons garnies? Cette expression comprend, dans la généralité de son acception, toutes les personnes qui font état de recevoir habituellement des étrangers dans leurs maisons 2. Ainsi, il faut distinguer les propriétaires qui disposent d'une partie de leurs maisons en louant des chambres garnies, et les personnes qui font métier ou profession de loger des étrangers pour un temps plus ou moins long, dont les maisons sont publiques et ouvertes à tout venant, et qui, enfin, sont patentables à raison de la profession qu'elles exercent. La disposition de la loi ne s'applique qu'à ces dernières. Cette interprétation, qui résulte du texte même de l'art. 475, se fortifie par le rapprochement de cet article avec la législation précédente. En effet, l'article 5 de la loi du 19-22 juillet 1791 et le no 2 de l'article 475 sont parfaitement identiques; or l'article 5 de la loi de 1791 ne concernait que les loueurs de profession, et non les propriétaires qui auraient loué

1. Cass., 14 déc. 1832, Devill. et Car., 33. 1. 197; J. P. 33. 3. 418. 2. Cass., 29 avril 1831, J. P. 23. 1527; Dall., v° Commune, n. 1192-1o.

des chambres garnies, puisque la contravention à la disposition de cet article 5, c'est-à-dire l'omission de tenir le registre qu'il prescrivait ou d'y inscrire régulièrement était punie, d'après l'article 6, du quart de leur droit de patente 1.

2824. Cette doctrine a été consacrée par la jurisprudence. Un arrêt déclare : « que l'art. 475, no 2, détermine les obligations des aubergistes, hôteliers, logeurs ou loueurs de maisons garnies; que le règlement municipal de Lorient applique ces dispositions à tous traiteurs, aubergistes, cabaretiers, cafetiers et autres, et à tous ceux qui tiennent des chambres garnies et qui logent des étrangers; que le fait de tenir des chambres garnies peut appartenir à des individus qui n'exércent pas la profession d'aubergistes, hôteliers ou loueurs de maisons garnies, et qu'ainsi l'arrêté municipal a assimilé un fait purement accidentel à une profession habituelle et déterminée ; qu'il a ajouté aux dispositions de la loi une disposition nouvelle qui dépassait la limite du pouvoir réglementaire conféré à l'autorité municipale ; que le propriétaire qui loue des chambres garnies ou non garnies dans la maison qui lui appartient, ne fait en cela ní acte de commerce ni profession de logeur 2. » Cet arrêt a fondé la jurisprudence 3. Il faut décider également avec un autre arrêt : « que les sages-femmes ne peuvent être assimilées aux aubergistes, hôteliers, logeurs ou loueurs de maisons garnies, ni être tenues des obligations imposées à ceux-ci par les lois et règlements qui les concernent; que la disposition de l'art. 475, no 2, est limitative; qu'une pareille assimilation serait d'ailleurs contraire au vou de l'art. 378, qui soumet les sages

1. Cass., 3 nov. 1827, Devill. et Ĉar. 8. 691; J. P. 21. 832.

2. Cass., 1er août 1845, Bull. n. 249; Devill. et Car., 45. 1. 838; J. P. 45. 2. 676; D. P. 46. 4. 36; 24 janv. 1863, Bull. n. 32; 5 avril 1866, Bull.

n. 93.

3. Cass.. 20 déc. 1849, Bull. n. 348; 3 juin 1853, Bull. n. 202; 13 août 1853, Bull. n. 407; 9 sept. 1853, Bull. n. 459; 4 juin 1858, Bull. n. 166; Devill. et Car., 58. 1. 630; J. P. 59. 332 ; D. P. 58. 5. 229; 30 nov. 1861, Bull. n. 263; Devill. et Car.. 62. 1. 335; J. P. 62. 944; D. P. 61. 5. 291. ** Adde Cass., 4 mars 1882; Bull. n. 64.

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