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no 6, fondé sur des motifs d'ordre et d'intérêt public, doit recevoir son application dans toute l'étendue du territoire et n'admet aucune restriction 1. »

§ VII.

2774. 7° « Ceux qui auront laissé dans les rues, chemins, places, lieux publics, ou dans les champs, des coutres de charrue, pinces, barres, barreaux ou autres machines, ou instruments ou armes dont puissent abuser les voleurs et autres malfaiteurs. >>

Cette disposition a été puisée dans une ancienne ordonnance du 22 mars 1777, portant: « Le roi a ordonné et ordonne à tous les laboureurs, fermiers et cultivateurs ayant des charrues, d'en retirer le soir les coutres et de les enfermer chez eux, à peine de telle amende qui sera arbitrée; leur enjoint sous pareille peine d'y faire mettre leurs noms, afin qu'on puisse en reconnaître les propriétaires. »

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Quelques membres du Conseil d'Etat, lors de la discussion du Code pénal, exprimaient la crainte que cette disposition ne fût étendue arbitrairement, et voulurent en restreindre les termes. Voici le texte de cette discussion: « M. Defermon dit qu'à moins d'obliger les cultivateurs à rentrer chaque soir leurs charrues, on ne peut les punir parce que quelqu'un vient en détacher les coutres. M. Réal dit que l'article n'a rien d'équivoque, et que la police en connaît bien l'utilité. M. Treilhard dit que ce règlement a existé dans tous les temps. Il ne s'agit pas d'une charrue qu'on vient briser, mais de coutres, barres, pinces, en un mot des choses qui peuvent devenir des instruments dans la main des malfaiteurs. M. Defermon voudrait qu'on bornât la disposition aux instruments de fer. C'est la rendre trop vague que de l'étendre aux barreaux, machines et autres instruments; autrement il serait à craindre qu'on ne l'appliquât aux propriétaires d'échalas ou de bûches laissées dans les champs ou dans la rue, car les malfaiteurs peuvent abuser de ces choses. - M. Berlier

1. Cass.. 30 mars 1861, Bull. n. 69.

dit qu'il partage les craintes que les expressions trop générales de ce numéro ont inspirées; il désirerait que la disposition ne s'appliquât qu'aux machines et aux instruments de fer. — M. Réal dit qu'on ne fait que répéter ici des expressions qui existent de temps immémorial, et dont l'exécution n'a jamais eu les inconvénients que M. Defermon prévoit. L'article a été adopté sans amendement 1. »

Il résulte de cette discussion que le § 7 ne doit être appliqué qu'avec une certaine réserve; la précaution qu'il consacre est une mesure de police et de sûreté publique; la loi a voulu retirer des mains des malfaiteurs des instruments dont ils auraient pu se servir pour accomplir leurs méfaits: on ne doit donc appliquer la disposition qu'aux instruments et aux machines qui seraient de nature à servir à la perpétration des délits et des crimes, et que la prudence commandait dès lors de ne pas laisser exposés à la foi publique 2.

2775. Le § 7 punit encore la négligence des cultivateurs et des ouvriers qui ont fourni à leur insu des armes pour commettre des méfaits. Il suit de là, d'abord, que cette disposition n'est applicable qu'autant que ces instruments ont été laissés dans les champs ou sur la voie publique, et qu'il y a eu faute dans cet abandon; une autre conséquence est que cette disposition cesserait d'être applicable, si les propriétaires de ces instruments les avaient laissés à dessein à la disposition des malfaiteurs : cette connivence serait un acte de complicité. Il a été reconnu que le § 7 s'applique aux échelles

1. Locré, t. 31, p. 229.

2. Cass., 20 mars 1858, Bull. n. 104.

** Cependant la Cour suprême a jugé, par son arrêt du 10 nov. 1876; Bull. n. 215 « que le législateur a voulu proscrire et punir tout abandon d'instruments (dans l'espèce des échelles) dont peuvent abuser des malfaiteurs, non-seulement sur la voie publique ou dans les lieux publics, mais encore dans une cour ouverte à tout venant et non placée, la nuit, sous une surveillance spéciale; et que cette contravention ne saurait être excusée sous le prétexte qu'on ne pourrait imposer à un maçon l'obligation de retirer chaque nuit des lieux où il travaille les engins mêmes, tels que les échelles, qui lui sont journellement nécessaires.-V. dans le même sens Cass. 27 janv. 1877; Bull. n. 32, — 26 août 1880; Bull. n. 171.

laissées sur la voie publique1; aux coutres de charrue, quelle que soit leur forme 2.; aux barres de fer déposées par un serrurier, quel que soit leur poids 3.

§ VIII.

2776. « 8° Ceux qui auront négligé d'écheniller dans les campagnes ou jardins où ce soin est prescrit par la loi ou les règlements. >>

Cette disposition a pour but d'ajouter une sanction pénale à la loi du 26 ventôse an IV sur l'échenillage. Cette loi enjoint à tout propriétaire, usufruitier, régisseur, fermier, colon ou locataire, d'écheniller ou faire écheniller tous les ans, avant le 1er ventôse (le 20 février), les arbres, arbustes, haies ou buissons situés sur ses propriétés. L'art. 7 de la même loi charge les agents municipaux, dans le cas où les propriétaires et fermiers auraient négligé de faire écheniller à cette époque, de le faire faire à leurs dépens. L'exécutoire des dépens leur est délivré par le juge de paix, sur les quittances des ouvriers, contre les propriétaires et fermiers, sans que ce paiement puisse les dispenser de l'amende. L'obligation de l'échenillage est ordinairement rappelée chaque année par les maires dans les campagnes; mais la contravention n'en existerait pas moins, quoiqu'il n'y eût pas eu d'arrêté 4. Elle consiste uniquement dans le fait d'avoir négligé l'échenillage et ne peut être excusée par le défaut d'un avertissement 5.

Cette disposition ne s'applique pas aux bois ; mais elle s'applique aux arbres fruitiers, lors même qu'ils sont plantés les uns près des autres 7.

1. Cass., 29 sept. 1843, Bull. n. 17. 2. Cass., 17 janv. 1845, Bull. n. 45. 3. Cass., 14 janv. 1859, Bull. n. 22.

** V. page 372, n. 2.

4. Cass., 4 juin 1857, n. 217; Dall., vo Voirie par terre, ne 1008-2o, 1011.

5. Cass., 17 juill. 1863, Bull. n. 200.

6. Cass., 19 juill. 1851, Bull. n. 298.

7. Cass., 3 déc. 1858, Bull. n. 296; Dall., vo Voierie par terre, n. 2326,

§ IX.

2777. «9° Ceux qui, sans autre circonstance prévue par les lois, auront cueilli et mangé sur le lieu même des fruits appartenant à autrui. »

Cette disposition semble se confondre avec le § 15 de l'article 475, qui punit ceux qui dérobent, sans aucune des circonstances prévues en l'art. 378, des récoltes ou autres productions utiles de la terre qui, avant d'être soustraites, n'étaient pas encore détachées du sol.

Il y a toutefois entre ces deux paragraphes ces différences que l'art. 471 ne s'applique qu'aux fruits, tandis que l'art. 475 s'étend à toutes les productions utiles de la terre, et que l'article 471 ne prévoit que le fait de cueillir et de manger sur le lieu, tandis que l'art. 475 prévoit le vol, c'est-à-dire la soustraction, l'enlèvement hors du lieu.

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La contravention qui fait l'objet du § 9 de l'article 471 est le premier et le plus faible degré du délit de maraudage la loi a supposé que le dommage devait être minime et à peine appréciable; la peine est la moindre des peines de police.

Si les fruits cueillis sont mangés sur le lieu même par plusieurs personnes, l'infraction ne change point de nature 1; mais, s'ils sont enlevés à l'aide de paniers, de sacs, de voitures ou d'animaux de charge, ou si cet enlèvement a lieu pendant la nuit, l'art. 471 n'est plus applicable: le fait prend le caractère d'un délit, et il rentre dans les termes du § 5 de l'art. 388.

§ X.

2778. « 10° Ceux qui, sans autre circonstance, auront glané, râtelé ou grappillé dans les champs non encore

1. Cass., 17 déc. 1857, Bull. n. 404.

entièrement dépouillés et vidés de leurs récoltes, ou avant le moment du lever ou après celui du coucher du soleil. »

Le glanage est un usage qui remonte aux temps les plus anciens. Il était consacré dans nos plus vieilles coutumes, et un édit de Henri II du 2 novembre 1554 dut le limiter << aux gens vieux et débilités de membres, aux petits enfants ou autres personnes qui n'ont pouvoir ni force de scier (de travailler à la moisson), après toutefois que le seigneur ou laboureur aura pris et enlevé les gerbes et ceux à qui appartiennent lesdites denrées, soit gens d'église ou personnes laïques, auront enlevé leurs dimes ou champarts, et non plus tôt ou autrement. »

L'art. 2 du titre 1er de la loi des 28 septembre-6 octobre 1791 ne donne également aux propriétaires de biens ruraux le droit d'user de leurs propriétés à leur gré, que sous les modifications que les lois ont apportées à l'exercice de ce droit. Et l'une de ces modifications a été le maintien du glanage, du râtelage ou du grappillage, dans les champs ouverts, en faveur des habitants des lieux où l'usage en était reçu. L'art. 24 du titre 2 de la loi des 28 septembre-6 octobre 1791 est ainsi conçu : « Les glaneurs, les râteleurs et les grappilleurs, dans les lieux où les usages de glaner, de râteler ou de grappiller sont reçus, n'entreront dans les champs, prés et vignes récoltés et ouverts, qu'après l'enlèvement entier des fruits en cas de contravention, les produits du glanage, du râtelage ou du grapillage seront confisqués, et, suivant les circonstances, il pourra y avoir lieu à la détention de police municipale. Le glanage, le râtelage et le grappillage sont interdits dans tout enclos rural. » L'art. 22 ajoute : « Dans les lieux de parcours ou de vaine pâture, comme dans ceux où ces usages ne sont point établis, les pâtres et les bergers ne pourront mener leurs troupeaux d'aucune espèce dans les champs moissonnés et ouverts, que deux jours après la récolte entière, sous peine d'une amende de la valeur d'une journée de travail; l'amende sera double si les bestiaux d'autrui ont pénétré dans un enclos rural. >>

2779. Cette dernière disposition a eu pour objet de maintenir le glanage, le râtelage et le grappillage, non-seulement

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