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2699. Examen du sixième paragraphe : cas où le maximum d'une peine afflictive est prononcé.

2700. Quand il résulte de la déclaration du jury que le fait n'a plus que le caractère d'un délit, quel est l'effet de la déclaration des circonstances atténuantes par le jury?

2 III.

Application à la matière correctionnelle.

2701. Dispositions de l'art. 463 relatives aux peines correctionnelles. 2702. Modification apportée par la loi du 13 mai 1863 aux trois derniers paragraphes de l'art. 463; ses motifs.

2703. Observations critiques et appréciation de cette modification. 2704. Décret du 27 novembre 1870 qui a rétabli le texte de l'art. 463. 2705. Ces dispositions sont restrictives et ne s'appliquent qu'aux peines portées par le Code pénal.

2706. Dans quels cas elles ont été étendues aux lois spéciales. 2707. Quelles sont les lois spéciales qui se réfèrent à l'art. 463? 2708. Ne s'appliquent-elles qu'à l'emprisonnement et à l'amende? S'étendent-elles à la confiscation spéciale?

2709. S'étendent-elles à la peine accessoire de la surveillance?

2710. Elles s'appliquent même en cas de récidive.

2711. Elles s'appliquent même aux cas où le Code prescrit de prononcer le maximum de la peine.

2712. En cas de substitution de l'amende à l'emprisonnement, quel doit être le taux de cette amende?

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2681. Notre ancienne législation avait laissé, en général, la distribution des peines à l'arbitraire du juge, qui, suivant les circonstances et l'exigence des cas, appliquait les châtiments qu'il jugeait en rapport avec la gravité des faits. Les abus d'un tel système, qui substitue la volonté du juge aux règles générales de la loi, frappèrent l'Assemblée constituante; et, par une sorte de réaction, au lieu de donner de sages limites à un pouvoir excessif, elle le renferma dans un cercle de fer. Aux peines arbitraires succédèrent les peines fixes. Les tribunaux perdirent la faculté, non-seulement de choisir les châtiments, mais même de les modifier et de les graduer; les peines n'eurent plus ni minimum ni maximum;

elles s'appliquèrent, uniformes et invariables, à tous les faits compris dans la même incrimination; tous les degrés qui séparent les actions, toutes les nuances qui les distinguent étaient éffacés. Tel était le principe qui formait la base du Code de 1791.

Ce principe était fécond en inconvénients. Les faits qui constituent des crimes sont susceptibles de modifications infinies, et cette égalité des peines produisait les plus odieuses inégalités. Il fallait que le juge appliquât à des faits qui n'avaient ni la même valeur morale, ni les mêmes résultats matériels, une peine inflexible dans son uniformité, ou que cette rigueur, par son injustice même, enfantât l'impunité. Le besoin d'une nouvelle réforme de la législation se fit donc promptement sentir.

2682. On trouve l'expression de cet esprit nouveau dans l'article 646 du Code du 3 brumaire an IV, dans la loi du 25 frimaire an VIII et dans celle du 7 pluviôse an IX. Enfin les rédacteurs du Code de 1810 attribuèrent aux juges une certaine latitude dans la fixation des peines. En déterminant un maximun et un minimum, ils permirent de graduer le châtiment entre ces deux limites; l'art. 463 autorisa même les tribunaux correctionnels, en matière de simple délit, si le préjudice n'excédait pas 25 francs et si les circonstances paraissaient atténuantes, à réduire l'emprisonnement et l'amende au niveau des peines de simple police.

Le législateur avait même songé, dès cette époque, à étendre la disposition de l'art. 463 aux faits qualifiés crimes par la loi; on lit en effet dans l'exposé des motifs du Code. présenté au Corps législatif par M. Faure : « Une disposition qui termine la partie du Code dont nous nous occupons en ce moment porte que, si le préjudice n'excède pas 25 fr., et que les circonstances paraissent atténuantes, les juges sont autorisés à réduire l'emprisonnement et l'amende même jusqu'au minimum des peines de police; au moyen de cette précaution, la conscience du juge sera rassurée, et la peine sera proportionnée au délit. Il n'était pas possible d'établir une règle semblable à l'égard des crimes. Tout crime emporte peine afflictive ou infamante, mais tout crime n'em

porte pas la même espèce de peine; tandis qu'en matière correctionnelle, la peine est toujours soit l'emprisonnement, soit l'amende, soit l'un et l'autre ensemble. Cela posé, la réduction des peines de police correctionnelle ne frappe que sur la quotité de l'amende et sur la durée de l'emprisonnement; au contraire, les peines établies pour les crimes étant de différentes espèces, il faudrait, lorsqu'un crime serait atténué par quelque circonstance qui porterait le juge à considérer la peine comme trop rigoureuse quant à son espèce, il faudrait que le juge fût autorisé à changer l'espèce de peine et à descendre du degré fixé par la loi à un degré inférieur; par exemple, à prononcer la réclusion au lieu des travaux forcés à temps, ou bien de substituer le carcan à la réclusion; ce changement, cette substitution ne serait pas une réduction de peine proprement dite, elle serait une véritable commutation de peine. Or le droit de commutation de peine est placé par la constitution dans les attributions du souverain; il fait partie du droit de faire grâce. C'est au souverain seul qu'il appartient de décider, en matière de crime, si telle circonstance vérifiée au procès est assez atténuante pour justifier une commutation. La seule exception laissée au pouvoir judiciaire est dans le cas d'excuse; encore faut-il que le fait allégué pour excuse soit admis comme tel par la loi, avant qu'on puisse descendre, en cas de preuves, à une peine inférieure. Il résulte de ces observations qu'en fait de peine afflictive ou infamante, le juge doit se renfermer dans les limites que la loi lui a tracées ; qu'il ne peut dire que le fait est excusable que lorsque la loi a prévu formellement les circonstances sur lesquelles l'excuse est fondée. et que toute application d'une peine inférieure à celle tracée par la loi est un acte de clémence qui ne peut émaner que du prince, unique source de toutes les grâces 1. »>

Ainsi il est certain que le législateur, au moment même de la rédaction du Code, avait pensé à étendre aux matières criminelles la faculté d'atténuation qu'il appliquait aux matières correctionnelles; et en effet les mêmes motifs sollicitaient

1. Locré, t. 31, p. 164 et 165.

dans les deux cas la même application; dès qu'on reconnaissait que les faits qualifiés délits pouvaient être accompagnés de circonstances atténuantes, il était évident que les mêmes atténuations devaient exister à l'égard des crimes; il était donc contradictoire d'en tenir compte en matière correctionnelle, et d'en faire abstraction en matière criminelle; c'était déclarer qu'en ce qui concerne les délits, la peine serait proportionnée à la faute, et qu'en ce qui concerne les crimes, la proportion n'aurait jamais lieu. Un seul scrupule a retenu le législateur: il lui a paru que substituer une peine à une autre, que changer la nature des peines, c'était les commuer, et que cette commutation ne pouvait appartenir, comme la grâce, qu'au chef de l'Etat. Cette objection repose sur une méprise évidente. Le juge qui substitue une peine à une autre peine ne fait point acte de clémence, il apprécie le vrai caractère du fait, il applique une peine qui est en rapport avec ce caractère; il n'empiète point sur les droits du chef de l'Etat, puisque la grâce ne peut intervenir qu'après le jugement: il ne sort point de sa mission, puisqu'il doit rendre justice, et que la justice, en matière pénale, suppose une peine proportionnée à la nature et aux circonstances du crime. On aurait pu opposer, avec plus de raison peut-être, que la puissance du juge doit se borner, en toute matière, à mesurer la peine déterminée par la loi dans les limites qu'elle a fixées, mais qu'il ne doit pas en changer la nature, parce que le législateur seul est placé assez haut pour assumer la responsabilité du genre de la peine, pour en apprécier la portée et la convenance, Mais cette objection, qui diffère entièrement de celle qu'alléguait l'exposé des motifs, ne fut point alors présentée.

2683. L'application du principe des circonstances atténuantes aux faits qualifiés crimes par la loi, après avoir été écartée en 1810, a été reprise et adoptée en 1832.

Cette disposition a un double but:

De tempérer, par une règle générale, les pénalités trop rigoureuses et quelquefois excessives du Code;

De tenir compte de certaines circonstances du fait, de certaines nuances de la culpabilité que le Code n'a pas

prévues, et qui cependant, pour que le châtiment soit juste, doivent entrer dans l'appréciation de la moralité de l'agent.

Il est nécessaire d'insister sur ces deux motifs, qui renferment tout l'esprit de la loi.

Nous avons précédemment constaté, en appréciant le caractère de la réforme opérée en 1832, que cette réforme avait été essentiellement incomplète; que le législateur n'avait voulu, à cette époque, suivant ses propres expressions, que pourvoir au plus pressé 1; que, frappé surtout de l'exagération des peines portées par le Code, son seul but avait été d'en abaisser le minimum, afin d'en assurer l'application, et de rétablir ainsi un rapport plus exact entre les délits et les peines 2.

Deux voies s'offraient pour opérer cette atténuation. La première était de reprendre chaque incrimination du Code, d'en diviser les degrés et les nuances, de multiplier les classifications des délits et d'abaisser en même temps le minimum de chaque peine, afin de laisser aux juges une plus grande latitude dans leur application, Cette voie d'amélioration, plus laborieuse sans doute, était assurément la plus sûre, celle qui devait conduire à la plus saine application des principes du droit pénal, à la distribution la plus exacte de la justice.

2684. La seconde voie consistait simplement à établir, sans entreprendre la réforme du Code pénal, et par une seule disposition qui devait réagir sur toutes les autres, une faculté générale d'abaisser le minimum de toutes les peines. Ce dernier moyen était le plus facile; c'est celui auquel le législateur s'est arrêté.

Ainsi, après avoir proclamé l'excessive élévation des peines, le législateur ajoutait, dans l'exposé des motifs de la loi du 28 avril 1832: « Il fallait trouver un moyen d'étendre à toutes les matières la possibilité d'adoucir les rigueurs de la loi autrement que par une minutieuse révision des moindres détails. Pour atteindre ce but, le projet de loi a introduit dans les

1. Expression de l'exposé des motifs. 2. V. notre tome 1er, n. 13 et 14.

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