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DU

TRIBUNAL D'APPEL

DE BRUXELLES,

Avec quelques remarques sur des points
essentiels de jurisprudence et de pro-
cédure civile;

Par les Citoyens FOURNIER et J. TARTE,
Jurisconsultes, à Bruxelles.

TROISIÈME VOLUME.

Bruxelles, de l'Imprimerie

MMANUEL FLON,

rue de la Putterie. An 12.

4

DU

TRIBUNAL D'APPEL

DE BRUXELLES.

Les tribunaux sont-ils compétens pour prononcer sur la contestation, élevée entre le propriétaire d'une rente, qui en réclame les arrérages, et le débiteur, dont le nom avait été porté sur une liste d'émigrés, mais qui a été rétabli dans tous ses droits pas un arrété de radiation?

TELLE ELLE est la question que le tribunal d'appel séant Jugemen à Liége, a décidé dans l'espèce suivante :

Par acte notarié en date du 3 décembre 1774,

Charles - Grégoire Beauchamps avait constitué une rente annuelle et perpétuelle de quinze cents florins au profit des auteurs de J. J. D. Delheid, de J. L. Deneumostier, et d'A. Heusch.

du tribu

'nal d'ap pel séant Liége.

Cette rente avait été régulièrement payée jusqu' l'époque de l'émigration du débiteur.

Pendant ce temps, les biens de ce dernier avaient été séquestrés, et une partie en a été vendue.

Après sa radiation définitive, les propriétaires de la rente lui ont intenté une action pour l'obliger au payement de tous les arrérages qui se montaient à une somme d'environ douze mille cent cinquante francs.

Le débiteur proposa l'exception d'incompétence; il soutenait que la cause devait être renvoyée à l'autorité administrative.

Le premier juge rejeta cette exception, et ordonna de plaider le fond.

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En instance d'appel, la même exception fut proposée, et pour la fonder, l'on disait que tous les biens du débiteur de la rente n'avaient pas seulement été séquestrés, mais qu'ils avaient été confisqués et vendus au profit de la république, comme appartemans à un émigré français.

Que dès-lors tous ses créanciers hypothécaires étaient devenus créanciers de la république; qu'ils avaient été obligés de s'adresser au gouvernement pour faire liquider leurs créances, et pour en obtenir le payement.

Que ceux qui avaient négligé de se conformer à cette loi, avaient perdu leur droit, et qu'ils ne pouvaient poursuivre l'ancien débiteur,

Qu'à la vérité, une petite partie de ses biens n'avait pas été vendue, mais que la jouissance de cette petite portion venait seulement de lui être accordée; que, pendant les années écoulées, la république avait perçu tous les revenus de ses biens; que c'était à elle à payer les arrérages des rentes échus pendant ce temps-là, et que Charles-Grégoire Beauchamps ne pouvait être tenu de les acquitter.

Que cette contestation était évidemment l'objet d'une liquidation à faire entre les parties et la république; mais que cette opération ne pouvait être faite valablement que par l'autorité administrative, et qu'il s'ensuivait de là que les tribunaux n'étaient pas compétens.

Pour appuyer ce systême, l'on citait la loi du 21 fructidor an 3, celle du 13 brumaire an 6, celle dụ 28 pluviôse an 8. l'arrêté du 2 nivôse an 6, celui du 5 fructidor an 9 et autres, et l'on disait, qu'il résultait de là que toutes les questions relatives à l'émigration, soit qu'elles concernassent la personne de l'émigré, soit qu'elles eussent pour objet ses biens, ses créances ou ses dettes, soit qu'elles touchassent le séquestre desdits biens, ne pouvaient être sou mises qu'à l'autorité administratiye,

Que, dans la présente contestation, il s'agissait de savoir: 1° si, par la volonté du gouvernement, de prendre à lui toutes les dettes des émigrés, les créanciers de ceux-ci ne sont pas déchus de leurs droits et de leurs actions contre ces émigrés; lorsqu'ils ont négligé de faire liquider leurs créances? 2o Si ce

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