Page images
PDF
EPUB

Les billets-à-ordre, disait Portales, sont aujourd'hui d'un usage aussi fréquent dans le commerce les lettres-de-change; pour les magistrats ils ont les mêmes effets.

que

Depuis long-temps ces deux contrats n'ont plus d'autre différence que celle de la dénomination; aussi plusieurs banquiers et négocians de la ville de Gand n'ont-ils pas hésité d'attester que, quant aux intérêts des billets-à-ordre, ils s'acquittaient sans difficulté dès la date du protet, comme en fait de lettres ou billets-de-change.

Il s'agissait en premier lieu de savoir si Portales avait prouvé l'usage, et subsidiairement si, indépendamment de l'usage non justifié, les billets-à-ordre devaient être assimilés aux lettres-de-change.

Attendu que Portales n'a produit aucun jugement, et que l'attestation qu'il rapporte de quelques négocians de la ville de Gand, ne peut être considérée comme un acte authentique, vu qu'elle n'est d'ailleurs revêtue d'aucune forme probante, qu'ainsi il n'a pas rempli le vœu de l'interlocutoire: vu l'article 7 du titre 6. de l'ordonnance de commerce de 1673, ainsi conçu:

[ocr errors]

L'intérêt du principal et du change sera dû, du jour << du protêt, encore qu'il n'ait été demandé en justice.»>

Et attendu que cet article s'applique aux lettres-dechange, et ne comprend pas les billets-à-ordre, lesquels en conséquence restent dans les termes du droit

commun;

La cour confirme.

Prononcé le 22 Prairial an XI. Troisième section.
Plaidant MM. Pins et Audoor.

PEREMPTION d'instance; Requéte civile.

L'instance sur laquelle est intervenu un jugement en dernier ressort, mais annullé par voie de requête civile, est-elle sujette à péremption à défaut de poursuite pendant trois ans, depuis l'arrêt qui a remis les parties au même état où elles étaient avant le jugement annullé ?

Nous avons rapporté, dans notre avant-dernier cahier, un arrêt par lequel il a été décidé que l'appel non-relevé ne tombe point en péremption. La question s'est reproduite en dernier lieu, mais dans des circonstances et par des points de vue différens.

LEPOIVRE avait formé demande au tribunal du ci-devant district d'Ath, contre Pollard; mais par jugement du 27 brumaire an IV, la demande fut éconduite.

Sur l'appel interjeté par Lepoivre, le tribunal civil du département du Nord réforma la sentence du premier juge ainsi, jugement en dernier ressort, sous la date du 14 floréal an V.

Pollard se pourvoit en requête civile, dont la connaissance est dévolue au tribunal civil du département du Pas-de-Calais : ses moyens sont accueillis; et par jugement du 12 fructidor an VI, le tribunal du Pas-deCalais annulle celui du tribunal du Nord, en remettant les parties au mème état où elles étaient auparavant.

Plus de trois ans s'étaient écoulés sans aucune poursuite, depuis le jugement rendu par la demande en requête civile. Lepoivre pensa qu'il avait un moyen do

se débarrasser des soins de cette affaire, en la faisant déclarer périmée. Tel était l'objet d'une demande soumise à la cour, où les parties trouvaient leurs juges naturels sur la suite de l'appel porté au tribunal du Nord,

Pollard prétendait, que l'état de la cause n'était pas passible de péremption, parce que le jugement rendu par la demande en requête civile, n'avait laissé subsister que l'appel or, l'appel non relevé ne tombe point en pére mption; il citait, en faveur de son système, l'arrêt de la première section de la cour, du 16 frimaire an XII. Nous l'avons rapporté à l'avant-dernier cahier.

:

Le vrai point de difficulté se réduisait à la question de savoir si, par le jugement du tribunal du Pas-de-Calais, toute la procédure sur l'appel avait été anéantie; car s'il ne restait plus rien de l'instance devant le juge dont la décision avait été annullée, la péremption ne pouvait pas être acquise.

Pollard trouvait des moyens de défense, dans les dispositions de la loi du 14 février 1791. Il est certain que, d'après elle, disait-il, il fallait ensuite du jugement du Pas-de-Calais procéder aux exclusions, et porter l'affaire devant un autre tribunal celui du Nord: donc ce dernier tribunal se trouvait entièrement désaisi. Donc, il n'existait plus d'instance liée sur l'appel.

que

Or, une fois que la cause a été mise dans un état tel que la péremption ne pouvait s'acquérir, la cessation de l'obstacle ne suffit pas pour lui rendre une existence qu'elle avait perdue par l'effet de la législation qui avait lieu au point où il s'agissait d'en reprendre les poursuites: c'est le temps où la chose pouvait commencer qu'il faut suivre, et non les événemens postérieurs.

Lepoivre fondait la péremption sur les articles 22 et 33, titre 35, de l'ordonnance de 1667. D'après les dispositions de ces articles, lorsque les moyens de requete civile sont admis, les parties sont remises au pareil état qu'elles étaient avant l'arrêt attaqué par la voie de la requete civile. La loi n'annulle que l'arrét, et non la procédure sur l'appel. Pourquoi vouloir plus que la loi?

Suivant l'article 22, le procès principal doit se juger en la meme chambre où aura été rendu l'arret contre lequel avait été obtenue sa requête civile. C'est virtuellement dire que le procès principal y est resté pendant et indécis jusqu'à la décision sur la requête civile, et la loi ne pouvait s'exprimer autrement sans se contredire, puisqu'il n'y a que l'arrêt qui soit retracté, et que les parties remises au mème état, se retrouvent naturellement pardevant la chambre où elles ont laissé l'instance principale avant l'arrêt.

Le méme article veut donc aussi que, l'affaire retourne à la connaissance du tribunal, dont l'arrét a été anuullé.

La législation, appropriée à l'organisation des tribunaux, qui a précédé celle de l'an VIII, avait dérogé circonstanciellement à la règle établie par l'ordonnance; mais cette législation est devenue incompatible avec lordre judiciaire actuel. Aussi a-t-elle expiré à la création des cours d'appel, et depuis lors on s'est conformé à l'ordonnance.

Depuis l'installation des cours d'appel, Pollard a donc pu et du reprendre les erremens de l'instance principale devant celle de Bruxelles, qui remplace, à l'égard des parties, le tribunal civil du département du

Nord. S'il a négligé de le faire pendant plus de trois ans qu'il en a eu la faculté, il a laissé périmer l'instance, aux termes de l'article 15 de l'ordonnance de 1563, dite de Roussillon. Or, il y a un intervalle de plus de trois ans depuis l'installation de la cour, jusqu'au moment où la demande en péremption a été intentée.

On objecte l'arrêt rendu à la première section de cette cour, le 16 frimaire dernier; mais l'espèce est totalement différente. Là, il n'y avait jamais eu d'instance introduite sur l'appel, qui était resté dans les termes d'une simple protestation contre la sentence du premier juge, tandis que dans cette cause non-seulement il y avait eu déclaration d'appel, mais qu'il avait été relevé et instruit au point qu'un jugement définitif l'avait terminé contre les parties.

La péremption est-elle acquise?

Attendu que l'appel, dont s'agit, a été relevé, et a donné lieu à une instance liée entre les parties, au tribunal civil du département du Nord;

Attendu que le tribunal civil du département du Pasde-Calais, en prononçant sur la requête civile, n'a annullé que le jugement, et qu'ainsi l'instance sur le principal est restée dans l'état où elle était avant le jugement annullé;

Attendu qu'il a été libre à Pollard de reprendre ladite instance principale ;

Attendu qu'il est reconnu au procès, que la même instance est restée impoursuivie depuis le 12 fructidor an VI;

« PreviousContinue »