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Dénombrement étant faite au feigneur, où en fon abfence à fes officiers ; & le vaffal, ou fon ;; procureur en ayant demandé acte au notaire dont il fera affifté, & en préfence de témoins, fi le feigneur ou fes officiers le reçoivent fans contredits ni proteftations, le Dénombrement fera tenu pour reçu. S'il y a confeftation fur quelques articles, le vaffal qui ne voudra pas le réformer, fe pourvoira en juftice pour faire décider la difficulté. Mais fi le feigneur ou fes officiers font feulement des proteftations générales que le Dénombrement ne pourra nuire ni préjudicier au feigneur, comme c'est l'ordinaire, en ce cas, je tiens que l'action pour le blâme doit durer trente ans comme toutes les autres. C'est le fentiment de d'Argentré, par rapport aux coutumes qui n'ont point de difpofitions contraires, & nous en avons quelques-unes qui l'ont déterminé de la forte. C'eft affez la règle que je crois qu'il faut fuivre en Bourgogne.

Voici un cas qui peut fe rencontrer fréquemment dans la pratique. Les anciens aveux d'une feigneurie en portent le cens à trente livres ; cependant le vaffal n'en prefcrit que quinze, & tel eft l'ufage depuis long-temps. En conféquence il ne reporte que cette dernière fomme dans le Dénombrement qu'il préfente à fon feigneur. Celui-ci peut-il exiger que ce cens foit reporté dans les derniers aveux à la fomme énoncée dans les anciens? S'il ne le fait pas, il court rifque de voir le fief mouvant de lui s'anéantir par des diminutions progreffives. D'un autre côté, le vaffal dira qu'il n'a jamais eu connoiffance que ce droit fût de trente livres ; qu'il ne l'a jamais perçu à cette quotité; qu'il eft dans l'impoffibilité

de

de défigner quels font let héritages grevés. Ce vaffal eft peut-être un tiers acquéreur; comment pourroit-il rendre compte de ce qui s'eft paffé avant l'époque de fon acquifition? Ce droit, d'ailleurs, a pu fe prefcrire, a pu fe perdre fans qu'il y ait ni faute ni dol de la part des propriétaires du fief fervant. Dumoulin examine certe queftion fur l'article 44 de l'ancienne coutume de Paris, & la manière dont il la décide met également à couvert l'intérêt du feigneur & celui du vassal. Le vaffal, dit-il, répétera effectivement les trente livres tels qu'ils font dans les anciens aveux; mais il ajoutera qu'il ne jouit que de la moitié. Et à l'égard de cette moitié feulement, il fera tenu d'indiquer les héritages qui en font chargés.

Les Dénombremens font ordinairement terminés par cette claufe : fauf notre droit & celui

d'autrui.

Quel est l'effet de cette reftriction? Dumoulin, loco citato, tient qu'elle n'en produit aucun, lorfqu'elle eft vague, indéterminée, & qu'elle n'eft point appliquée à un objet fixe & certain; parce qu'une claufe générale ne peut ni déroger, ni ajouter aux difpofitions précises d'un acte.

Cette décifion de Dumoulin eft vivement combattue par d'Argentré. Molinocus nullius momenti effe putat ; ego contra, non minimi, &c. fur l'article 324 de Bretagne. Legrand pense de même, fur l'article 30 de la coutume de Troyes. M. le préfident Bouhier s'eft rangé de leur parti. En cela, dit-il, l'opinion de Dumoulin a été abandonnée par tous les interprêtes des coutumes: non qu'ils doutent que pour les chofes Tome XVIII.

E

nettement exprimées dans le Dénombrement, & dont le vaffal a toujours été en poffeffion, cet acte ne faffe pleine foi entre le feigneur & le vaffal: mais ils tiennent que fi ce dernier y avoit compris quelques droits qui fuffent du domaine du feigneur dominant, ou qui lui ou qui lui appartinffent à quelqu'autre titre ; ou s'il y avoit quelques omiffions de fes droits, ou fi le vaffal y avoit quelques qualités qui ne fuffent pas bien avérées, la claufe fauf notre droit, appofée à l'acte d'approbation du Dénombrement, feroit utile au feigneur féodal. Sur la coutume de Bourgogne, chapitre 44, n. 62.

Nous ne devons pas quitter cette matiere fans dire un mot d'une queftion très intéreffante. Celle de favoir auxquels des anciens ou des nouveaux Dénombremens il faut fe fixer lorfque ces actes fe contrarient. M. d'Agueffeau a traité cette question tome 2 de fes oeuvres, pag. 254. Voici comme il l'a décide. Nous avons, dit-il, fur ce point deux maximes générales : l'une veut que dans le doute, on ait recours aux plus anciens titres, comme le fondement & l'original des titres fuivans; l'autre établit que les titres poftérieurs dérogent aux titres précédens, auxquels on peut dire qu'ils fervent d'interprêtes.

Une attention médiocre fuffit pour faire voir qu'en cette matière, comme dans prefque toutes celles de jurifprudence, toute règle générale eft dangereufe.

Lorsque le titre le plus ancien eft auffi le plus clair, on ne doit pas douter que ce ne foit fur ce modéle qu'il faut réformer tous les autres titres, fur-tout en matière féodale, où les titres font toujours d'autant plus respectables, qu'ils

approchent plus près de la fource, c'eft-à-dire de la premiere inveftiture.

Mais lorsque le titre le plus ancien n'eft pas clair; lorfque l'on y trouve des omiffions confidérables, lorfqu'il faut fuppléer à ces omiffions par des argumens qui argumens qui ne forment que des conjectures, & qui font naître un doute & ne le réfolvent pas, pourroit-on foutenir qu'un titre poftérieur, dans lequel on trouve une clarté & une évidence entière, ne doit pas l'emporter fur le premier, dont il devient en ce cas le véritable & le feul fidèle interprête ?

En un mot, toutes chofes égales, l'antiquité doit être respectée & préférée à la nouveauté ; mais entre la priorité qui eft pour le premier titre, & la clarté qui eft pour le fecond, ce feroit fermer les yeux à la lumière, & vouloir demeurer toujours dans l'obícurité, que de rejeter un titre quoique clair & décifif, parce qu'il eft plus récent, pour s'attacher à un titre douteux & équivoque, parce qu'il eft plus an

cien.

Voyez Dumoulin dans fon commentaire fur l'ancienne coutume de Paris; d'Argentré, fur celle de Bretagne; Coquille, infiitutions au droit françois; le traité des fiefs de Poquet de Livonière ; celui de Billecoq; celui d'Archer; celui de Guiot; M le préfident Bouhier, fur la coutume de Bourgogne; Legrand, fur celle de Troyes; Brodeau ; Dupleffis; Ferrière, fur les articles 9, 10 & 11 de la coutume de Paris; le recueil des édits, arrêts & réglemens fur le domaine, &c. Voyez auffi les articles AVEU, FIEF, VASSAL, SEIGNEUR, &c. (Cet article de M. H... ..., avocat au parlement).

DÉNONCIATEUR. C'eft celui qui fait en juftice la déclaration fecrete du crime de quelqu'un.

Il y a parmi nous deux fortes de Dénonciateurs, les uns volontaires, les autres forcés: les premiers font ceux qui fe portent volontairement à faire une dénonciation fans y être obligés par état ni par aucune loi : les Dénonciateurs forcés font ceux qui par état font obligés de dénoncer les délits dont ils ont connoiffance; tels font les fergens foreftiers, les meffiers & autres prépofés femblables, qui prêtent même ferment à cet effet. Il y a auffi certains cas où la loi oblige tous ceux qui ont connoiffance d'un crime à le dénoncer, comme en fait de crime de lèze majefté humaine au premier chef, ce qui comprend toutes les confpirations faites contre le roi ou contre l'état. Celui qui auroit connoiffance de ces fortes de crimes, & ne les dénonceroit pas, feroit puniffable aux termes des ordonnances.

Il y a néanmoins certaines perfonnes qui ne font pas obligées d'en dénoncer d'autres, comme le mari & la femme, l'un à l'égard de l'autre ; le père à l'égard de fon fils, & le fils à l'égard de fon père.

la

On ne doit recevoir aucune dénonciation de part des personnes notées d'infamie, c'est-àdire, que le ministère public ne doit point affeoir une procédure fur une telle dénonciation, il peut feulement la regarder comme un mémoire, & s'informer d'ailleurs des faits qu'elle contient.

L'ordonnance criminelle veut que les procureurs du roi & ceux des feigneurs, aient un

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