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un immeuble dans fes biens, pour une créance mobilière; il peut cependant avec une créance mobilière, acquérir une rente conftituée, parce que la prohibition de Dénaturer n'eft point un empêchement pour lui d'acquérir une créance de meilleure nature que celle qu'il avoit aupa

ravant.

On dénature fes biens propres lorsqu'on les vend pour les convertir en mobilier ou en acquêts immeubles. Ceux qui font fans néceffité ces fortes de changemens dans la maladie de laquelle ils décedent, font aifément préfumés le faire pour favorifer des perfonnes prohibées ou pour rendre le fort de quelques-uns de leurs héritiers plus favorable que celui des autres. Voyez ce que nous avons dit à ce fujet à l'article AVANTAGE. (Article de M. DAREAU, avocat au parlement, &c.)

DÉNEGATION. C'est le refus que l'on fait de convenir d'une promeffe, d'une action, d'une obligation, &c.

La Dénégation, qui eft l'oppofé de la confeffion, fuppofe une interpellation faite à celui qui dénie. Lorfque celui-ci perfifte dans fes Dénégations c'eft à la partie qui articule des faits, des promeffes & des obligations, à les prouver fuivant la maxime, ei qui dicit incumbit onus probandi.Voyez les articles AVEU, CONFESSION, DÉCLARATION, INTERROGATOIRE, &c. (Article de M. DAREAU, avocat au parlement, &c.)

DENI. Terme de palais qui fe dit du refus d'une chofe due.

On diftingue deux fortes de Déni; savoir, le Déni de justice, & le Déni de renvoi.

Le Déni de juftice eft un refus que fait un

juge de rendre la juftice quand elle lui est demandée.

Ne pas rendre la juftice quand elle eft due, c'eft en quelque façon commettre une injuftice; c'eft du moins trahir un de fes devoirs les plus effentiels; c'eft manquer à fes concitoyens, & tromper la bonne foi du fouverain qui fe repofe fur fes juges de l'exercice de la portion la plus noble de fon autorité, qui eft celle de la juftice.

L'article premier du titre 25 de l'ordonnance de 1667, enjoint à tous les juges, fans exception même des officiaux, de procéder fans retardement au jugement des caufes, des inftances & des procès qui font en état de recevoir leur décifion, à peine de répondre en leur nom des dépens, dommages & intérêts des parties.

L'article fuivant porte, que « fi les juges » dont il y a appel, refusent ou font négligens » de juger la caufe, inftance ou procès qui fera » en etat, ils feront fommés de le faire ; & il eft ajouté: Commandons à tous huiffiers & » fergens qui en feront requis, de leur faire les » fommations néceffaires, à peine d'interdiction » de leur charge ».

Si l'ordonnance ne parle ici que des juges dont il y a appel, il ne faut pas en conclure que les juges en dernier reffort foient plus autorifés que les autres à dénier la justice; mais au lieu de fommations, on doit porter plainte de leur refus à M. le chancelier; & fi après qu'il a donné des ordres, ils ne font pas plus empreffés qu'auparavant à rendre la juftice qu'on leur demande, on peut fe pourvoir au confeil. Un arrêt de la cour des aides du 18 juillet 1691,

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rapporté au journal des audiences, a jugé qu'une prife à partie incidente à une matière dont les élus avoient connu en dernier reffort, ne pouvoit être portée à la cour fouveraine du reffort, mais qu'il falloit fe pourvoir au confeil privé; & il y a même raifon pour en dire autant d'un fimple Déni de jufttice.

Les fommations dont parle l'ordonnance doivent être faites aux juges à leur domicile ou au greffe de leur juridiction, en parlant au greffier ou au commis du greffe. Ces fommations pour être honnêtes, doivent être faites en forme de requifition (*).

...

(*) Formule d'une fommation pour obtenir un jugement. L'an.... à la requête de Pierre Lagrange, laboureur demeurant. . . . je.... huiffier royal. me fuis tranfporté au greffe civil de la fénéchauffée de. Me. Fran...tenu par çois Dumoulin, un des commis à l'exercice dudit greffe, où étant & parlant audit Me. Dumoulin, je lui ai enjoint de faire favoir à M. Desfontaines, confeiller en ladite fénéchauffée, qu'il a depuis longtemps à fon rapport une inftance d'entre le requérant & le fieur Déforme au fujet d'une demande en payement de lods & ventes, & de lui déclarer, qu'attendu que cette affaire eft en état de recevoir fa décifion, le requérant le fupplie de vouloir bien la rapporter inceffamment, finon qu'il fera obligé malgré lui de prendre les voies de droit que lui indique l'ordonnance, an fujet de quoi il fait toutes les réferves néceffaires, même de prife à partie s'il y a lieu; & afin que ledit Me. Dumoulin n'en laille prétendre caufe d'ignorance à M. Desfontaines, je lui ai délivré copie du préfent acte pour être communiqué à M. le confeiller en la manière accoutumée.

D'après cette formule, on voit dans quel efprit peuvent étre faits d'autres actes de ce genre fuivant les circonstances qui peuvent fe préfenter.

Quand il s'agit de la feconde fommation, on s'explique

Une feule fommation ne fuffit pas ; il en fauts deux. Elles doivent être faites de huitaine en huitaine pour les juges reffortiffans nûment aux cours fouveraines, & de trois en trois jours pour les autres fiéges.

Si dans un temps raifonnable, après la dernière fommation, comme de huitaine, ou tout au plus de quinzaine, fuivant la nature de l'af-> faire & le plus ou moins de célérité qu'elle exige, le juge n'a point eu d'égard aux requifitions à lui faites, la partie peut alors appeler comme de Déni de juftice (*), & cet appel fe porte devant le juge fupérieur de celui qui a fait refus de fatisfaire aux fommations de juger (**). Quand l'appel a été fignifié à la partie

ainsi : je lui ai enjoint de faire favoir pour la feconde & dernière fois à.... &c.

On peut auffi pour une caufe qui doit être jugée à l'audience, faire fommation de la juger ou de la placer au rôle à fon tour lorfqu'il paroît que les placets qu'on a pu donner à cet effet ont été inutiles. C'eft à celui qui préfide à l'audience d'avoir égard à cette fommation, parce qu'il eft feul dans le cas d'être pris à partie.

(*) On peut encore fi l'on veut prendre en même-tems le juge à partie pour les dommages-intérêts, mais voyez à ce fujet l'article PRISE A PARTIE.

(**) Obfervez que cet appel ne feroit point fondé, fi le juge avoit de bonnes raifons pour différer le jugement qu'on lui demande. Le procureur du roi d'Aurillac avoit rendu plainte contre des notaires & des eccléfiaftiques pour fait de fimonie. Deux notaires & quelques eccléfiaftiques avoient été décrétés; & il y avoit un conflit entre l'official de l'abbé d'Aurillac & celui de l'évêque de S. Flour, pour favoir lequel des deux connoîtroit de l'affaire qu'ils avoient l'un & l'autre revendiquée. Les notaires prétendant que cette revendication leur étoit étrangère firent faire deux fommations au lieutenant criminel de juger: la réponse de ce ma

adverse, elle ne peut plus de fon côté pourfuivre devant le juge duquel on a appelé; on peut même dénoncer l'appel à ce même juge lorfqu'on a lieu de craindre que par humeur il ne veuille alors rendre un jugement qu'on lui avoit auparavant demandé en vain.

Les officiaux métropolitains ne peuvent re-: cevoir aucun appel de Déni de juftice des officiaux leurs fuffragans; les parties en ce cas, doivent fe pourvoir aux parlemens par la voie. d'appel comme d'abus, parce qu'effectivement c'eft de la part de ces officiaux, abufer de leur juridiction, que de refufer aux parties la juftice qu'ils leur doivent. La chofe a été ainfi jugée par le parlement de Normandie au mois de mars 1533, & par le parlement de Paris au mois de juillet 1701.

Le Déni de juftice peut avoir lieu non-feulement lorsque le juge refufe de décider, mais encore lorfqu'il refufe de prêter fon ministère pour dreffer des procès-verbaux, appofer des fcellés, &c. Dans les cas qui requièrent célérité, il n'eft pas néceffaire de deux fommations; une feule fuffit; & fi le juge refufe d'y fatisfaire, on peut requérir fur le champ

giftrat fut» qu'il y avoit une revendication des eccléfiafti»ques co-accufés par deux officiaux différens, que dès-lors il ne pourroit continuer l'inftruction que quand il auroit été ftatué avec quel official il devoit inftruire ».

Cette réponse fut prife par les notaires pour un refus; en conféquence ils interjetèrent appel comme de Déni de juftice; mais par l'arrêt qui intervint le 14 mars 1731 au parlement de Paris, le refus du lieutenant criminel fut jugé régulier. Cet arrêt eft cité dans la collection de jurifprudence.

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