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corps fera traîné fur la claie; mais que l'on ordonne feulement qu'il fera privé de fépulture en terre fainte.

51. Sauve-garde. Celui qui eft menacé en fa perfonne ou en fes biens demande au Juge Royal qu'il le mette fous la protection du Roi. S'il y a enfreinte, c'eft fans contredit un cas Royal; mais il eft de la prudence du Juge de ne l'accorder qu'après avoir entendu au moins un témoin fans reproche, qui dépofe des menaces: le jugement eft fignifié à l'accufé, & s'il menaçoit de nouveau le plaignant, ce feroit une défobéiflance ou rebellion aux défenfes du Juge Royal, qui, au moyen de la fauve-garde qu'il auroit accordée, connoîtroit de l'affaire; quant même les injures menaces, ou voies de fait, ne feroient pas de fa compétence.

Le Juge doit faire grande attention à la qualité du plaignant & à celle de l'accufé. Une perfonne vile pourroit faire injure à une perfonne qualifiée en demandant contr'elle fans fujet preffant une fauve-garde; c'eft ce qui rend néceffaire une information fommaire & préalable. Il faut encore, fuivant Chopin, tome 1, liv. 1, article LXXVIII, que le Juge fixe un temps pour cette fauve-garde, parce qu'elle ne doit pas durer toujours, & il ne faut pas, dit cet Auteur, l'accorder légérement fi l'on ne fait preuve d'une jufte crainte on n'a cependant pas coutume de fixer un temps, il fembleroit qu'après un temps expiré, il feroit permiş

à l'accufé de récidiver.

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Coquille, fur la Coutume de Nivernois, titre I, article XV, dit qu'anciennement l'infraction de fauvegarde étoit la peine de la hart; mais que cette peine a été tempérée, & qu'à préfent elle eft corporelle ou pécuniaire, à l'arbitrage du Juge: il ajoute que la fauve-garde ne doit pas être accordée au jufticiable contre fon Seigneur & autres perfonnes auxquelles on doit honneur & refpect, finon qu'il y eût information précédente portant preuve de menaces à redouter. Le même Auteur dans fes inftitutes, chap. des droits de Juftice, p. 16, dit que prefque toutes les Coutumes font d'accord que l'affurement n'est pas enfreint par injures verbales, mais feulement par voies de fait ; il auroit dû ajouter par menaces de voies de fait, car c'eft le principal fujet pour lequel il s'accorde.

Il n'appartient pas à un Juge de Seigneur, de fe fervir du terme de fauve-garde, qui ne convient qu'aux Officiers Royaux des Bailliages, & aux Cours. Les Juges des Seigneurs doivent fe fervir du mot affurement, comme qui diroit sûreté de Juftice, donnée au plaignant pour fa perfonne & fes biens, contre les menaces de l'accufé auquel on défend d'infulter le plaignant, directement ou indirectement. La Coutume de Troies, article CXXV, eft du nombre de celles dont on a parlé; car elle prononce la peine de la hart, c'est-à-dire, de la corde, contre ceux qui enfreignent l'affurement accordé fur ferment feulement du plaignant.

L'article X de l'Edit de Crémieu, attribue aux Baillis & Sénéchaux, privativement aux autres Juges, la connoiffance de toute infraction de fauve-garde, Les Arrêts des Réglements y font conformes, & entr'autres

DE LA COMPÉTENCE.

DE LA COMPÉTENCE.

ceux de Laval de 1553, d'Angers de 1611, & de Montdidier de 1659: ce dernier qui fe trouve dans les Loix criminelles, tome 2, p. 193, porte que les Officiers du Bailliage connoîtront des infractions de fauve-garde ou affurement du Roi ou des Seigneurs, à l'exclufion des Officiers de la Prévôté Royale & autres: ce qui prouve que les Prévôts Royaux & les Juges des Seigneurs peuvent donner des affurements; mais que s'ils font enfreints, la connoiffance de l'infraction appartient aux Lieutenants Criminels & cela eft conforme à l'article X de l'Edit de Crémieux, dont on vient de parler; il attribue aux Baillis & Sénéchaux la connoiffance de toute infraction de fauve-garde, fans distinction. Imbert, dans fa pratique criminelle, chap. 6, n. 4, p. 599, dit auffi que la connoiffance de fauvegarde enfreinte, appartient au Juge Royal, quoique celui qu'il a pris en fa fauve-garde ne foit pas de fa Jurifdiction, ainfi qu'il a été jugé pour les Officiers de Verdun, contre les Officiers de Bard, le 2 Mars 1335, & fuivant l'Ordonnance de François I de 1536, & Arrêts de 1262 & 1341.

Il faut que les menaces aient été faites depuis peu de temps pour être recevable à demander une fauve-garde, ou affurement, parce que fans cela on préfumeroit qu'il n'y auroit plus de danger. Ce qui réfulte de l'article VIII du titre XXIV de l'Ordonnance de 1667, qui veut que le Juge foit récufable, s'il a menacé la partie depuis fix mois.

Legrand, fur la Coutume de Troies, tit. VII, article CXXV, partie 2, p. 137, dit que les affurements des Eccléfiaftiques fe font en Cour Laïque, quand l'un eft Laïc: mais qu'entre deux Clercs, ils fe font en Cour d'Eglife; fuivant deux Arrêts de 1276 & 1278, rapportés par M. Pithou fur le même article, & à la forme des Coutumes qui en parlent comme celle de Troies; mais que cela n'a pas lieu aux Coutumes qui n'en parlent pas, & que le Juge Séculier ne peut être que le Juge Royal, feul en droit de donner dans ce cas, affurement & fauve-garde, fuivant l'opinion de Dargentré, fur l'article CLXV de la Coutume de Bretagne : ce qui eft fondé fur ce que les Seigneurs ne peuvent connoître des caufes des Eccléfiaftiques, ainfi qu'il fera prouvé fur l'article XIII de ce titre,

n. II.

Enfin, Coquille, loco citato, dit que l'affurement peut être donné au plaignant, non feulement pour fa perfonne & fes biens; mais encore pour fa famille & fes domeftiques. Voyez le Réglement de 1659, pour Chaumont en Baffigni, rapporté fur l'article précédent, n. 40, & à la fin de ce Code.

52. Faux. Le faux eft un crime qui fe commet non feulement dans les actes de Justice & de Notaires, mais encore dans les actes fous fignature privée. Il y a une infinité de manieres de faire un faux.

Ce crime étant un cas Royal, les Juges des Seigneurs n'en peuvent connoître lorfqu'il eft intenté par action principale: & lorfqu'il eft incident à un Procès Civil, tous Juges en peuvent connoître à la forme de

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l'article XX de ce titre; & fuivant l'Edit de Novembre 1554, copié fur l'article I ci-devant, n. 18: mais il faut à la forme de cet Edit & d'une infinité de Réglements rendus en conféquence, que le Procès Civil ne puiffe être jugé fans l'inftance de faux; car fi elle en peut être féparée, il n'y a que le Juge Royal qui en puiffe connoître, & même fi un incident de faux furvenoit dans une inftance civile, pendante dans un Bailliage ou dans une Chancellerie de Bourgogne, il faudroit fuivant l'article XXII de l'Ordonnance du mois de Juillet 1737, qu'elle fût portée en la Chambre Criminelle; c'est-à-dire, au Lieutenant Criminel, dans les cas énoncés par cet article XXII; de même qu'à la Cour, un faux incident doit être porté à la Tournelle, fuivant le même article XXII; & même quoique le faux naille incidemment dans un Procès Civil d'une Juftice fubalterne, la partie plaignante peut furfeoir à la pourfuite de fon Procès Civil, & intenter pardevant le Lieutenant Criminel une inftance en faux principal, de même que lorfque dans un Procès Civil pour partage de fucceffion, l'une des parties veut fe pourvoir en fpoliation d'hoirie; il lui eft permis de fufpendre l'action en partage pour préfenter Requête & informer pour fpoliation; & en faire une inftance criminelle, féparée du Civil, ainfi qu'il fera expliqué fur l'article I du titre VII, n. 5.

La preuve que le faux principal eft un cas Royal, réfulte clairement de la difpofition de l'article XX de ce titre qui ne permet aux Juges fubalternes de connoître que du faux incident; ce qui eft une exclufion de la connoiffance du faux principal; & même l'Ordonnance par cet article XX, fe fert du terme, pourront connoître; c'eft une fimple faculté qui prouve que l'on peut porter pardevant d'autres Juges, même le faux incident dont ils n'ont droit de connoître que lorfque les parties veulent bien fe pourvoir pardevant eux pour l'inftruction d'un faux incident à un Procès Civil dont ils font faifis, ce qui prouve encore la maxime dont on vient de parler, qui eft, que l'on peut fufpendre la pourfuite d'un Procès Civil, pendant dans une Juftice Civile, pour former une inftance en faux principal pardevant le Juge Royal: les parties ont le droit de refter dans la Juftice où le Procès principal eft pendant, ou de fe pourvoir au Juge Royal pour en faire une infcription de faux principal.

Bornier, fur cet article XI, aux mots & autres cas, rapporte l'Arrêt de Réglement pour Angers du 23 Mai 1667, qui attribue au Lieutenant Criminel la connoiffance du crime de faux, privativement au Prévôt Royal d'Angers. L'Arrêt de Réglement rendu par le Parlement de Dijon le 14 Août 1572, entre les Officiers du Bailliage Royal, & ceux du Bailliage du Comté du Charolois, rapporté au nombre 35 de cet article, porte expreffément que les Officiers du Bailliage Royal connoîtront des crimes de faux, prétendus avoir été commis par Notaires, Sergents & Greffiers Royaux on autres accufés d'avoir falfifié les obligations, contrats, exploits, & autres actes; ce qui doit avoir lieu, à plus forte raison contre des Juges de fimples Seigneuries qui n'ont pas les droits & prérogatives

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DE LA COMPÉTENCE.

DE LA COMPÉTENCE.

du Bailliage Comtal du Charolois, comme il a été expliqué, ibidem. Il
paroît inutile de rapporter tous les Réglements qui le décident de même,
puifque cet article XI attribue aux Lieutenants Criminels la correction des
Officiers, ce qui comprend fans réplique le faux, puifque le plus fouvent
on ne peut pourfuivre ce crime qu'il n'y ait quelque Notaire, Greffier,
Sergent ou autre Officier impliqué dans ce crime : & que d'ailleurs, l'article
XX ci-après ne permet aux Juges des Seigneurs ou Prévôts Royaux de
connoître du faux que lorfqu'il eft incident pardevant eux, encore par le
terme de
pourront, dont il fe fert, laiffe-t-il aux parties la faculté
de porter le faux incident au Lieutenant Criminel, qui à plus forte raifon
eft feul compétent pour connoître du faux principal dont la connoiflance
eft tacitement interdite à tous autres Juges par le même article XX.

Malgré toutes ces autorités, les Juges fubalternes ne laissent pas fouvent de connoître du crime de faux, même principal; parce que fuivant l'article XVI de ce titre, & l'article XXI de la Déclaration du 5 Février 1731 ils peuvent informer, décréter, & interroger tous accufés des cas Royaux; mais ils font obligés d'en avertir inceffamment les Baillis & Sénéchaux, ce qu'ils ne font pas exactement: c'eft pour cela qu'ils jugent quelquefois le faux principal, lorfqu'il n'y a pas de revendication de la part des Officiers de Bailliages.

Quant aux peines, l'Edit de Juin 1550, articles XVI & XVII, porte que ceux qui auront commis quelques fauffetés dans leurs lettres ou dans l'impétration des bénéfices, en feront déchus, & déclarés incapables d'en poffeder. Voyez Brodeau, lettre R, fom. 48. L'article XII de l'Ordonnance de 1737, titre du faux incident, veut auffi qu'en matiere bénéficiale celui qui a fait ou fait faire une fauffeté, ou même s'il l'a connue, foit déchu du bénéfice. L'Edit de Mars 1680 porte que l'Ordonnance de Mars 1531 fera exécutée, & que tous Juges, Greffiers, Miniftres de Justice, Police, Finance, tant des Cours que des Officialités & des Justices des Seigneurs, des Chancelleries, Chambres des Comptes, Bureau des Finances Hôtels de Ville; & généralement toutes perfonnes faifant fonctions publiques, par offices, commiffions ou fubdélégations & emplois, feront punies de mort, telle que les Juges l'arbitreront fuivant l'exigence des cas; & qu'à l'égard de ceux qui n'étant Officiers, & qui n'ayant aucune fonction ou miniftere public, ou emploi, auront commis quelque fauffeté, ou qui étant Officiers, en auront commis hors les fonctions de leurs offices, commiffions ou emplois ; les Juges pourront les condamner à telles peines qu'ils jugeront à propos, même de mort, fuivant l'exigence des cas, & qualité des crimes; & que tous ceux qui auront falfifié des lettres de la grande Chancellerie, ou de celles établies près les Parlements, imité, contrefait, appliqué ou fuppofé les grands ou petits fceaux, foit qu'ils foient Officiers, Miniftres ou Commis des Chancelleries ou non, feront punis de mort,

Par une Déclaration du Roi du 4 Mars 1720, il eft porté que ceux qui auront falfifié, imité, ou altéré les papiers royaux, c'est-à-dire, les papiers timbrés, feront punis de mort.

Les Préfidiaux peuvent connoître du faux incident, argument tiré de Particle XX de ce titre; mais ce ne peut être qu'à la charge de l'appel, à moins que les accufés par leur qualité ne foient fujets au dernier reffort. Voyez la Déclaration du Roi citée au n. 47, au mot usure, fur cet art. XI.

53. Faux poids, fauffe mesure. Ceux qui vendent à faux poids ou à fausse mefure de deffein prémédité, doivent être punis de la peine du banniffement, ou amende honorable, ou du blâme, & toujours avec quelques aumônes à caufe du vol fait au public; le tout fuivant la nature de la denrée, le profit, le temps de difette, ou celui pendant lequel a duré le faux, & autres circonstances. Voyez la loi. Hodie 32, D. de lege Cornelia de falfis, & Papon, livre 6, titre I, Arrêt 7. Rien n'eft plus néceffaire dans la fociété que la fidélité à l'égard des mefures & des poids ; c'est pourquoi ceux qui les falfifient ou qui en emploient de faux, font punis févérement. Ceux qui corrompent leurs marchandises comme les Cabaretiers qui falfifient le vin en y mettant des denrées nuifibles, font dans le cas du crime de faux, puniffable à l'arbitrage du Juge.

Par Arrêt du Parlement de Paris du 28 Septembre 1715, un meunier fut banni pour trois ans pour s'être fervi d'une mefure plus grande que l'étalon. Voyez un autre Arrêt de 1716, fur l'article XII de ce titre, n. 18, à la fin. Ce crime est un cas ordinaire, qui n'est pas du nombre des cas

royaux.

54. Faux témoin. Un témoin qui par féduction, fubornation, ou inimitié dépofe faux, ou déguife la vérité, ou la fupprime, doit fubir la même peine qui auroit été impofée à l'accufé s'il avoit été coupable; c'eft le feul cas où la loi du talion ait lieu en France. Celui qui feroit convaincu d'avoir fuborné le témoin, feroit auffi condamné à la même peine, quand même il offriroit de ne fe pas fervir de la dépofition fausse. L'Edit de Mars 1531, prononce la peine de mort contre tous faux témoins. Sa Majesté ayant été informée que cet Edit n'avoit pas été registré au Parlement de Befançon, en rendit un au mois de Novembre 1709, qui porte que fuivant celui de 1531, tous ceux qui feront convaincus d'avoir paffé de faux contrats, & d'avoir porté faux témoignage en Juftice, feront punis de mort, telle que les Juges l'arbitreront. D'Olive dans fes Actions Forenfes, partie 3, action 6, dit que ceux qui par des fauffes dépofitions dérobent aux Juges la vraie connoiffance du fait, rompent la foi de la fociété civile, violent la religion du ferment, oppriment l'innocent, & s'oppofent à l'autorité des loix. La loi des douze tables , pour réprimer un crime auffi énorme, & qui entraîne tant de maux avec lui, vouloit que le faux témoin fût précipité du haut de la roche Tarpeyene, ce qui femble avoir été fuivi par nos Ordonnances; puifqu'elles veulent que ce crime foit puni de mort, fans distinction du civil & du criminel. Il eft cependant vrai que cette rigueur n'eft pas toujours gardée; on ne condamne fouvent les faux témoins qu'aux Galeres ou à l'amende honorable, ou au banniffement; on a égard à la modicité

DE LA

COMPÉTENCE.

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