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Vous étiez parfaitement instruit de notre lettre au cardinal CAPRARA (1), pour lors archevêque de Milan, dans laquelle nous avions exposé les motifs puissans qui nous faisoient un devoir, dans l'état présent des choses, de refuser l'institution canonique aux évêques nommés par l'empereur. Vous n'ignoriez pas que non- seulement les circonstances sont les mêmes, mais qu'elles sont devenues et deviennent, de jour en jour, plus alarmantes par le souverain mépris qu'on affecte pour l'autorité de l'Eglise; puisqu'en Italie on a porté l'audace et la témérité jusqu'à détruire généralement toutes les communautés religieuses de l'un et de l'autre sexe, supprimer des paroisses, des évêchés, les réunir, les amalgamer, leur donner de nouvelles démarcations, sans en excepter les évêchés suburbicaires, et tout cela s'est fait en vertu de la seule autorité impériale et civile; (car nous ne parlons pas de ce qu'a éprouvé le clergé de l'Eglise romaine la mère et la maîtresse des autres églises, ni de tant d'autres attentats). Vous n'ignorez pas, avons nous dit, et vous connoissiez, dans le plus grand détail, tous ces événemens; et, d'après cela, nous n'aurions jamais cru que vous eussiez pu recevoir de l'empereur la nomination dont nous avons parlé, et que votre joie, en nous l'annoncant, fùt telle fùt telle que si c'étoit pour vous la chose la plus agréable et la plus conforme à vos vœux.

Est-ce donc ainsi qu'après avoir si courageusement et si éloquemment plaidé la cause de l'Eglise catholique dans les temps les plus orageux de la révolution

(1) Du 26 août 1809.

:

françoise, vous abandonnez cette même Eglise, aujourd'hui que vous êtes comblé de ses dignités et de ses bienfaits, et lié étroitement à elle par la religion du serment! Vous ne rougissez pas de prendre parti contre nous dans un procès que nous ne soutenons que pour défendre la dignité de l'Eglise ! Est-ce ainsi que vous faites assez peu de cas de notre autorité pour oser, en quelque sorte, par cet acte public, prononcer contre nous, à qui vous deviez obéissance et fidélité! Mais ce qui nous afflige encore davantage, c'est de voir qu'après avoir mendié près d'un chapitre l'administration d'un archevêché, vous vous soyez, de votre propre autorité, et sans nous consulter, chargé du gouvernement d'une autre église, bien loin d'imiter le bel exemple du cardinal Joseph FESCH, archevêque de Lyon, lequel ayant été nommé avant vous au même archevêché de Paris, a cru si sagement devoir absolument s'interdire toute administration spirituelle de cette église, malgré l'invitation du chapitre.

Nous ne rappelons pas qu'il est inoui dans les annales ecclésiastiques, qu'un prêtre nommé à un évêché quelconque ait été engagé par les vœux du chapitre à prendre le gouvernement du diocèse avant d'avoir reçu l'institution canonique; nous n'examinons pas (et personne ne sait mieux que vous ce qui en est) si le vicaire capitulaire élu avant vous a donné librement et de plein gré la démission de ses fonctions, et s'il n'a pas cédé aux menaces, à la crainte ou aux promesses, et par conséquent si votre élection a été libre, unanime et régulière : nous ne voulons pas non plus nous informer s'il y avoit dans le sein du chapitre quelqu'un en état de remplir des fonctions

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aussi importantes. Car enfin où veut-on en venir? On veut introduire dans l'Eglise un usage aussi nouveau que dangereux, au moyen duquel la puissance civile puisse insensiblement parvenir à n'établir, pour l'administration des siéges vacans, que des personnes qui lui seront entièrement vendues et qui ne voit évidemment que c'est non-seulement nuire à la liberté de l'Eglise, mais encore ouvrir la porte au schisme et aux élections invalides? Mais d'ailleurs, qui vous a dégagé de ce lien spirituel qui vous unit à l'église de Montefiascone ou qui est-ce qui vous a donné des dispenses pour être élu à un chapitre, et vous charger de l'administration d'un autre diocèse? QUITTEZ DONC SUR-LE-CHAMP CETTE ADMINISTRATION; NON-SEULEMENT NOUS VOUS L'ORDONNONS, mais nous vous en prions, nous vous en conjurons, pressés par la charité paternelle que nous avons pour vous, afin que nous ne soyons pas forcés de procéder malgré nous, et avec le plus grand regret, conformément aux statuts des SS. Canons et personne n'ignore les peines qu'ils prononcent contre ceux qui, préposés à une église, prennent en main le gouvernement d'une autre église, avant d'être dégagés des premiers liens. Nous espérons que vous vous rendrez volontiers à nos vœux, si vous faites bien attention au tort qu'un tel exemple de votre part feroit à l'Eglise et à la dignité dont vous êtes revêtu. Nous vous écrivons avec toute la liberté qu'exige notre ministère et si vous recevez notre lettre avec les mêmes sentimens qui l'ont dictée, vous verrez qu'elle est un témoignage éclatant de notre tendresse pour vous.

En attendant nous ne cesserons d'adresser au Dieu

bon, au Dieu Tout-puissant, de ferventes prières pour qu'il daigne appaiser, par une seule parole, les vents et les tempêtes déchaînés avec tant de fureur contre la barque de Pierre, et qu'il nous conduise enfin à ce rivage si désiré où nous pourrons librement exercer les fonctions de notre ministère. Nous vous donnons de tout notre cœur notre bénédiction apostolique.

Donné à Savone, le 5 novembre 1810, la onzième année de notre pontificat.

PIE VII PAPE.

NOUVELLES ECCLÉSIASTIQUES ET POLITIQUES.

Le dimanche 17 avril, à midi, MONSIEUR, accompagné des grands officiers de sa maison, M. le duc de Maillé, M. le comte d'Escars, M. le marquis de Chatenay, a traversé les appartemens du palais des Tuileries pour se rendre à la chapelle du château. La messe a été dite par un chapelain. M. l'abbé de Latil, aumônier du Prince, et qui lui est resté constamment attaché, lui a présenté son livre de prières et a reçu son chapeau. S. A. R. a entendu la messe à genoux. Elle y assiste également tous les jours de la semaine. C'est un usage que sa piété auroit rétabli, quand il n'auroit pas été conforme à la pratique de nos Rois. Louis XIV, dit le duc de Saint-Simon, ne manqua, dans sa vie, qu'une seule fois à la messe, un jour qu'il se trouvoit à l'armée.

Le même jour, après la messe, MONSIEUR est descendu dans la cour des Tuileries, suivi d'un nombreux étatmajor, pour passer en revue la première légion de la garde nationale de Paris. S. A. R. étoit à pied : elle a parcouru tous les rangs, adressant à chacun des paroles pleines de bonté et

de cette grâce inimitable qui charme tous les cours. Pendant la revue, citoyens et soldats, tous faisoient retentir l'air du cri françois de vive le Roi! vive MONSIEUR! S. A. s'étant ensuite placée devant le péristyle du palais, les troupes ont défilé, en donnant à ce bon Prince des signes d'une allégresse mêlée d'attendrissement. La musique militaire a joué l'air chéri de vive Henri IV! S. A. R. est rentrée dans ses appartemens pour y recevoir les félicitations des cours de justice.

Demain lundi, et jours suivans, les autres légions de la garde nationale auront aussi l'honneur de passer la revue du lieutenant-général du royaume.

S. A. R., depuis son arrivée, a reçu plusieurs corps et beaucoup de particuliers. Elle a parlé à chacun avec cette bonté qui la caractérise. Un peuple nombreux se rassemble souvent sous ses fenêtres. Le Prince s'est rendu plus d'une fois aux désirs qu'on témoignoit de le voir. Il a paru et a reçu des applaudissemens unanimes. Son air, sa grâce, ses paroles heureuses, sa gaieté frauche rappellent un digne fils de Henri IV.

S. A. R., informée de l'état de pénurie des hôpitaux, et des besoins qu'éprouvent un grand nombre de militaires blessés, a chargé M. le comte Matthieu de Montmorency, dont tout le monde connoît le zèle actif et la charité généreuse, de prendre des informations à cet égard, et de lui en faire son rapport.

MONSIEUR, lieutenant-général du royaume, a nommé membres du conseil d'Etat provisoire :

MM. de Talleyrand-Périgord;

- Le duc de Conegliano, maréchal de France; Le duc de Reggio, maréchal de France;

Le duc de Dalberg;

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