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SECONDE DIVISION.

Le comité comprend dans son tableau des objets étrangers au trésor public.

Telles sont les pensions assignées sur les revenus appartenant à l'ordre de Saint-Louis, à l'ordre du Saint-Esprit, à l'ordre de SaintLazare, aux Économats, à l'École militaire; dépenses qui, réunies, se montent à environ deux millions cinq cent mille livres.

Tel est encore le revenu de l'ordre de Malte en France, objet qui, dans le tableau des grâces pécuniaires, formé par le comité, compose un article d'environ quatre millions trois cent mille livres.

J'entends fort bien pourquoi le comité des pensions, occupé de donner une idée générale des grâces pécuniaires, a compris dans son tableau les pensions accordées sur les revenus de l'ordre de Saint-Louis, de Saint-Lazare et du Saint-Esprit, sur les fonds des Économats et de l'École militaire; mais ces revenus, à l'époque du 1er mai 1789, étant absolument distincts de ceux de l'état, je n'ai dû ni les comprendre dans les revenus publics, ni ranger par conséquent au nombre des dépenses les pensions assignées sur ces mêmes revenus.

Quant aux bénéfices dont les commandeurs et les chevaliers de Malte jouissent en France,

je n'aurois pu les réunir aux charges de l'état, sans mettre en crédit le revenu de ces mêmes bénéfices; mais jusqu'à présent ces revenus ont été considérés comme la propriété de l'ordre de Malte. Or, comme on n'a jamais compris dans l'état de ses finances la fortune d'autrui, j'aurois eu tort, je le crois, de placer dans le compte des revenus et des dépenses de l'état, les propriétés de l'ordre de Malte, et le produit des bénéfices entre lesquels ces propriétés sont réparties; ou si j'eusse pris ce parti, il eût fallu suivre la même disposition à l'égard des revenus et des bénéfices du clergé du royaume, et alors le tableau des finances du trésor public auroit plus ressemblé à un système, qu'à l'exposé d'un compte réel.

Les articles divers dont j'ai donné l'indication, soit d'une manière précise, soit d'une manière générale, composent, à cinq millions près, la différence observée entre la somme des pensions, selon le compte de mai 1789, et la dépense des grâces pécuniaires, selon le tableau du comité: ces cinq millions proviennent du parti qu'a pris le comité de passer les pensions dans son tableau selon leur capital, avant les réductions ordonnées au mois d'octobre 1787; cependant, depuis cette époque, les pensions se montent bien réellement à cinq millions de moins qu'auparavant ; et par

ce juste motif, lorsque dans le compte de mai 1789, j'ai mis les pensions en dépense pour la somme de vingt-neuf millions neuf cent cinquante-quatre mille livres; j'ai porté en recette les dixièmes imposés sur ces pensions pour la somme de quatre millions huit cent quatre-vingt-neuf mille livres; et c'est balance faite des deux articles, que la dépense des pensions ne se monte qu'à environ vingt-cinq millions dans le compte de mai 1789.

C'en est assez, je crois, pour l'éclaircissement des doutes qu'on a pu concevoir; c'en est assez pour démontrer que le tableau des grâces pécuniaires, formé par le comité des pensions, n'est ni la preuve ni l'indice d'aucune omission dans le compte général des 'dépenses de l'état. Seulement on ne doit point négliger d'observer à cette occasion, que les comptes en général, dont on parle toujours comme d'une chose soumise aux calculs les plus simples et les plus indisputables, deviennent cependant, selon la manière dont ils sont présentés, intitulés, divisés, contredits, la matière la plus susceptible de malentendus et de confusion; et comme ils sont encore, par leur nature, dénués des idées morales qui, dans les questions de simple raisonnement, servent de guide ordinaire à l'attention, on ne

peut pas, en s'en occupant, être ramené constamment près de la vérité par le seul secours réflexion.

de sa propre

MÉMOIRE adressé à l'assemblée nationale, le 17 août 1790, par le premier ministre des finances.

GRATIFICATIONS PÉCUNIAIRES.

MESSIEURS, le roi est informé qu'une infinité de particuliers vivent dans une cruelle incertitude, en attendant la détermination qui sera prise à l'égard des grâces dont ils jouissent sur le trésor de l'état, et S. M. ne voulant pas prolonger cette situation pénible, en introduisant de nouvelles discussions, s'est déterminée à sanctionner le décret général que vous lui avez présenté, relatif aux pensions; elle croit cependant que plusieurs dispositions de cette loi exigeroient une modification de votre part; et conformément aux intentions de S. M., je vais vous donner connoissance des réflexions qui ont fixé son at

tention.

S. M. est sensiblement affectée des privations auxquelles un grand nombre de citoyens vont être soumis par l'effet de vos règlemens; mais elle voit tout ce qu'exigent les circonstances, et, pleine de confiance dans vos mo

tifs, elle a jugé convenable de s'en remettre

à votre sagesse.

Cependant elle vous engage à considérer que la règle de vingt-cinq et trente ans de service, pour avoir droit à une pension, devient sévère quand elle est rétroactive. Les mêmes dispositions ne paroissent pas applicables au passé et à l'avenir: on se prépare à son sort quand on le connoît à l'avance, et quand on est encore le maître de choisir sa route; mais lorsque la vie est avancée, lorsque la stabilité d'une récompense modique a été la condition d'un établissement, d'un mariage, du genre d'éducation, de ses enfans, la destruction totale de cette récompense en raison d'une loi nouvelle, cette destruction qui vous fait décheoir d'un état paisible pour tomber, avec ce qu'on aime le plus, dans une grande détresse, devient un genre de malheur digne de toute l'attention de ceux qui sont les représentans des intérêts et des sentimens de la communauté nationale.

Vous avez été occupés, messieurs, de ces considérations, lorsque vous avez décrété une distribution de deux millions de pensions, divisées en petites parties depuis cent cinquante livres jusqu'à mille francs; mais S. M. a remarqué que vous n'aviez soumis cette distribution à aucune règle; et quoique le co

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