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» Mais l'argent l'emporta sur la parole, et la cor»ruption sur le courage. Nos efforts furent inu>> tiles : une chambre sans mission replâtra une >> charte et improvisa un roi; il aurait fallu du >>> sang pour dissoudre cet ouvrage. La société pré>> féra avoir recours au véhicule de l'influence et à >> celui de la persuasion. Le pouvoir, qui débutait >> alors dans la carrière de la déception, fabriqua » une émeute de poltrons dirigée par des stipen» diaires, et la société, ayant horreur de la guerre » civile, voulut bien faire, ce jour-là, abnégation » de sa force; elle se réfugia dans une enceinte >> inaccessible au public, avec lequel elle communi» qua, plus tard, par l'intermédiaire de la presse. >> Ce que la société voulait alors, vous pensez bien » qu'elle le veut davantage aujourd'hui.

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Copie d'une lettre écrite par MM. Flocon et Lhéritier, insérée dans la Tribune du 25 mars 1832.

DEUX FAITS DE LA RÉVOLUTION DE 1830.

AU RÉDACTEUR DE LA TRIBUNE.

<< Monsieur,

>>> Nous vous prions de vouloir bien accueillir >> dans votre journal la réponse suivante aux as» sertions émises samedi dernier par M. de Lameth

» à la tribune de la chambre des députés.

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>> M. Charles de Lameth, grand conteur d'his>>toires, a rappelé, on ne sait trop à quel propos, >> plusieurs faits qui jusque alors n'avaient pas eu >> l'occasion de se produire au grand jour, mais aux>>> quels se rattache pourtant un certain intérêt, >> ne fût-ce que par la date de l'époque à laquelle >> ils se sont passés.

>>> Ces faits une fois soulevés, il importe qu'ils >> soient rétablis dans leur intégrité, car il est aisé » de voir qu'ils se lient intimement à la phase la >> plus critique et la plus désastreuse de la révolu>>tion de juillet. M. Charles de Lameth les a pré>> sentés comme il lui convenait : nous allons les >> présenter à notre tour comme ils se sont passés.

>>> Le combat des trois jours avait cessé, l'armée » de Charles X était en fuite. Les troupes qu'il fai» sait venir à marches forcées de divers points sur >> Paris s'imprégnaient dans leur route de l'esprit » de la population; elles déclaraient faire cause >> commune avec la nation. La royauté était ren>> versée; l'opprobre d'un joug imposé pendant >> quinze ans par l'étranger se lavait dans le sang » des martyrs des barricades: le 29 juillet avait » vengé Waterloo.

>> Tout-à-coup le bruit se répand que des hom» mes qui n'avaient voulu s'associer en aucune >> façon au mouvement populaire lorsqu'il s'agis>> sait de lui donner l'impulsion, ni s'y mêler lors

>> que l'issue était encore douteuse, que des hom>> mes qui s'étaient séparés d'un petit nombre de >> leurs courageux collègues pour s'y tenir à l'écart » pendant la crise, se ravisant tout-à-coup, se rap>> pellent ou plutôt s'imaginent qu'ils sont les re» présentans de la nation, investis du droit de la » guider au milieu des événemens; ils veulent, dit>> on, au nom d'une constitution abolie par le fait » d'un mandat empreint de fraude, car, de l'aveu >> même des membres d'alors, si on avait révisé >> toutes les élections, on n'en eût pas trouvé trente » de valables..... (expressions de Labbey de Pom» pières), ils veulent s'arroger le droit de consti>> tuer la nation française et de lui octroyer une » charte.

>> Au premier bruit de cette tentative que nous » regardions comme usurpatrice et criminelle, les >> soldats de juillet s'émurent; quelques-uns encore >> n'avaient pas déposé les armes. Ils se rendent au >> lieu où ces hommes étaient rassemblés; l'un d'eux, » celui que M. Charles de Lameth a signalé comme » le plus jeune, laisse son fusil à l'un de ses amis >> et pénètre dans l'enceinte.

>> Le premier qu'il rencontre est M. de Lameth: << Vous, monsieur, dit le jeune homme vous, qui » avez vu des révolutions, vous savez que la nation » ne perd jamais ses droits, et sans doute vous ne » vous regardez plus comme député. » M. de La

>> meth tourna le dos sans répondre; il allait, à ce » qu'il a dit, chercher un caporal et quatre hom» mes pour mettre le jeune homme en lieu de sû>> reté; mais il ignorait que le jeune homme avait >> derrière lui cinquante de ces amis de la vérité >> qui se sont fait décimer dans les trois jours, et qui >> réclament l'honneur d'avoir les premiers crié aux >> armes en présence des gendarmes de Charles X.

>> Le jeune homme s'adressa ensuite à M. Duris» Dufresne, qui lui dit : « Nous n'avons pas de » mandat, nous le prenons dans la nécessité et sous »notre responsabilité. »

>> On voit que, dès cette époque, l'illégalité de la >> chambre des députés était sentie, l'absence du » mandat était reconnue et avouée; et si depuis >> un éloquent logicien a présenté cette vérité dans >> tout son éclat, le bon sens du peuple l'avait devi» née avant lui, et les actes l'avaient scellée.

>> Nous passons à une autre série de faits, dans >> laquelle M. de Lameth a trouvé l'art d'envelopper >> Benjamin Constant.

Que Benjamin Constant ait regardé la session >> des députés de 1830 comme une usurpation >>> manifeste, et leurs actes comme attentatoires à la >> souveraineté du peuple, dans cette opinion il » n'est rien qui ne soit en parfait accord avec les >> principes politiques qu'il avait antérieurement » professés; qu'ensuite il ait vu avec douleur la

» tourbe aristocratique des élus à 1,000 fr. de con>>>tribution s'arroger, de leur autorité privée, le » droit de n'accorder au reste de la nation que la ≫ dose de liberté conciliable avec le maintien des » priviléges qu'ils tenaient de la Charte octroyée, » là encore il n'est rien que de très-naturel. Si » même Benjamin Constant avait désiré que quel» que événement ramenât à l'accomplissement de >> leurs devoirs de citoyens ces hommes profondé>>ment égarés par leur égoïsme et par leur aversion » pour toute égalité réelle, il n'y aurait pas lieu » d'en être surpris: mais que, par de sourdes me»> nées, il ait ameuté contre eux cette jeunesse qui >>> n'appréciait pas moins son talent que son patrio>>tisme, tandis qu'ostensiblement il leur aurait » offert la sauve-garde de son immense popularité; >> en dépit de M. de Lameth, voilà ce que la ca>> lomnie ne saurait accréditer.

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» Non, Benjamin Constant ne fut point l'insti» gateur du mouvement dirigé le 4 août contre les » députés sans mandat! Quand il se répandit que >> trois cents individus, dont on avait souffert la >> réunion au palais Bourbon, s'arrogeaient le pou» voir de donner à la nation une constitution que >> la nation ne pouvait tenir que d'elle-même ; quand » on sut qu'ils avaient l'exorbitante prétention de » rendre définitive une œuvre qui ne devait au >> plus être que provisoire, il n'y eut qu'un senti

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