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peres, leurs époux arrachés de leurs Bras. Ils difoient que peut-être les avoit-on épargnés, que peut-être les trouveroit-on encore emprifonnés dans le palais; mais, hélas ! l'efpéfance étoit vaine, tous ont été égorgés.

*Près de 50 perfonnes ont été tuées; mais les cruautés de l'exécution furpaffent tout ce qu'on peut imaginer: les pefes ont été égorgés fur les fils, les meres fur leurs filles, & 12 femmes ont été éventrées. Toutes ces victimes ont été hachées, tronquées & jettées dans un trou appellé Glaciere, qui a été muré.

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Cet amas de corruption exhaloit une odeur infecte. Les pierres ont été ôtées, & ce spectacle d'horreur a fait une telle impreffion qu'il a été indifpenfable de faire arrêter toutes les perfonnes revêtues de l'autorité à l'époque du maffacre. Les fieurs Tournal, Jourdan & le jeune Le'cuyer ont été mis en état d'arreftation. Jourdan a été arrêté à une lieue de la ville par un détachement de dragons. Le jeune Lefcuyer, âgé de 16 ans, a malacré à lui feul 7 prifoniers. De 53 perfonnes, 6 feulement ont été fauvées; le reste a été tué. On n'a pu fçavoir le nombre de ceux qui ont été fufillés indiftinctement; leurs corps ont été jettés dans la riviere. It refte conftant que so perfonnes ont été arrêtées & tuées de fang-froid le dimanche, que le lundi on en a pendu deux qui reftoient en prifon. Un curé, âgé de 78 ans, pere du Peuple qu'il foulageoit par fes aumônes, a été égorgé. Jufqu'aux cloches des églifes, tout a été pillé; on en a arrêté deux bateaux fur le Rhône.

Les commiffaires, après cet affreux tableau représentent combien eft pénible la fonction qu'ils rempliffent, & la juftice qu'il y auroit

a ne pas prendre une opinion fur leur compre

fans les avoir entendus.

Un fentiment d'horreur a regné dans l'Affemblée pendant cette douloureufe lecture: le fecrétaire, M.Le Montey,qui l'avoit commencée, a été forcé de l'interrompre, ne pouvant retenir fes larmes; M. Ifnard la achevée à fa place. Puiffe au moins ce récit déchirant rappeller à tous les François combien de calamités & de crimes la guerre civile furtout traîne après elle, & à quel point l'anarchie, qui la prépare, doit être redoutée de ceux qui aiment la paix & refpectent tes faintes loix de l'humanité!

Demain le comité de légiflation fera un rapport fur les mefures à prendre pour faire pu nir les coupables, & prévenir le retour de malheurs auffi cruels.

On a lu enfuite plufieurs lettres de M. Blanchelande, datées des 14, 16, 25 & 26 Septembre. Elles annoncent que l'efpoir & le courage renaiffent à Saint-Domingue; que les Negres ont été battus dams plufieurs combats &efcarmouches. M. Blanchelande fe plaint des bataillons d'Artois & de Normandie.« Ib feroit plus aifé, dit-il, de commander 100 mille hommes de l'ancienne armée que 2 mille hommes de troupes patriotiques ». L'Affemblée. Coloniale a fait une proclamation qui a été portée aux révoltés par les dragons, dont 5 ont été tués. Dans une expédition à l'habitation d'Agoult, le général a perdu un officier, & a tué 150 Negres. Dans une autre expédition, 30 à 40 Negres ont perdu la vie, ainsi qu'un de leurs principaux chefs cette perte a paru les intimider, & le général a l'efpéd rance d'obtenir des fuccès plus décififs. Op

accufe le décret du 15 Mai d'être la caufe de tous les maux.

Ces lettres ont été renvoyées au comité après avoir été écoutées en filence. Quelques voix feulement fe font élevées quand on accufé le décret du 15 Mai de ces malheurs pour dire, ce qu'on ne peut nier fans mans quer de bonne toi, qu'ils partent d'une autre fource que le tems découvrira peut-être.

L'ordre du jour, interrompu à deux reprises par les lectures que nous venons d'analyser étoit la fuite du décret fur les prêtres non affermentés. Les artic es fuivans ont été dé. crétés pour faire fuite au premier, adopté hier.

« ART. II. A l'expiration du délai fixé pour la preftation du ferment civique, chaque municipalité fera parvenir au département, par la voie du district, un tableau des eccléfiafti. ques domiciliés dans fon territoire, en diftinguant ceux qui auront refufé le ferment ».

«III. Les prêtres qui ont prêté le ferment porté au décret du 27 Novembre 1790, font difpenfés d'en faire un nouveau ».

au

«IV. Quant aux autres eccléfiaftiques cun d'eux ne pourra déformais toucher, réclamer ni obtenir de penfion ou traitement fur le tréfor public, qu'en représentant la preuve de la preftation du ferment civique, conformément à l'article I ci- deffus. Les tréforiers receveurs ou payeurs qui au ront fait des paiemens contre la teneur du préfent décret, feront condamnés à en reftituer le montant, & privés de leur état ».

Du 28.

Le comité colonial a annoncé que toutes les pieces qu'il avoit examinées ne pouvoient rien faire ajouter aux mefures prifes par le roi & approuvées par l'Affemblée. Les députés

des colonies apporteront d'ailleurs des lumieres nouvel es, qui aideront à concilier les contraditions qui regnent encore entre les différentes relations.

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Ce qui eft le plus remarquable dans le compte rendu par le rapporteur, eft un concordat paffé entre les Blancs & les gens de couleur de la partie du nord. Un parti penfera fans doute que la raifon, la philofophie, auroient dû enlever à la néceffité l'honneur de dicter ce traité. Un autre le regardera, de la part des Blancs • comme un engagement fallacieux foufcrit par la crainte, & que la force anéantira. Ce concordat réunit les Blancs & les gens de couleur pour faire cause commune contre les révoltés. Il obige les Blancs, par ferment, à ne pas s'oppofer, à protéger même l'exécution du décret du 15 Mai, à protetter contre tout changement à cet égard. Il rend les gens de couleur éligibles aux affemblées coloniales, déclare infame l'arrêt rendu contre le Sr. Ogé & autres, & rend la preffe libre. Il ne faut pas imiter le pédagogue qui grondoit l'enfant tombé dans l'eau; mais quel jour peut jetter fur les événemens le feul article du concordat? La preffe fera libre: elle ne l'étoit donc pas; & fi elle ne l'étoit pas, qu'on juge par ce feul point du régime de nos colonies. Mais attendons des lumieres pour connoître les caufes de nos m.ux, & nè les aggravons pas en nous les reprochant mutuellement, au lieu d'y remédier.

La difcuffion fur les troubles religieux ayant été reprife , les quatre articles fuivans ont

été décrétés.

« ART. V. Outre la déchéance de tout traitement, les eccléfiaftiques qui auront refufé de prêter le ferment civique, ou qui le ré

tra&teront après l'avoir prêté, feront réputés fufpects de révolte contre la loi, & de mauvailes intentions contre la patrie, &, comme tels, plus particulierement foumis & recommandés à la furveillance de toutes les autorités conftituées ».

« VI. En conféquence, tout eccléfiaftique ayant refufé de prêter le ferment civique qui fe trouvera dans une Commune où il furviendra des troubles dont les opinions religieufes feront la caufe ou le prétexte, pourra être éloigné provifoirement du lieu de fon domicile ordinaire, en vertu d'un arrêté du directoire de département, fur l'avis de celui du district, fans préjudice de la dénonciation aux tribunaux fuivant la gravité des circonftan

ces »

« VII. En cas de défobéiffance à l'arrêté du directoire de département, les contrevenans feront pourfuivis dans les tribunaux, & punis d'un emprisonnement dont le terme ne pourra excéder un an ».

« VIII. Tout eccléfiaftique qui fera convaincu d'avoir troublé l'ordre public par fes difcours, fes écrits ou fes actions, fera puni de deux années de détention »>.

Du 19.

Les miniftres font tenus de préfenter, à Pouverture de chaque feffion, un état des dépenfes & des travaux à faire dans leur département, de rendre compte de l'emploi des formes qui y étoient deftinées cette obli: gation, qui leur eft impofée par la Conftitution, eft un des moyens de prévenir la diffipation des deniers deftinés à chaque partie de la dépenfe publique.4

M. Cambon a fait un rapport fur le mode & époque de l'exécution de cette loi.

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