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qu'enfin il étoit à craindre que, files Noirs venoient à s'emparer des mornes, la guerre re devint interminable par l'impoffibilité de les y réduire.

M. Blanchelande rend compte enfuite des mefures qu'il a prifes pour calmer la rebellion ou s'oppofer à fes progrès; il a fait demander des fecours au gouverneur des poffeffions espagnoles voifines de Saint-Domingue.

Il a reçu 150 hommes des Américains; il attend un nombre confidérable d'armes & de munitions des Anglois de la Jamaïque. L'Affemblée Générale de Saint.Domingue a fourni plufieurs bataillons de Gardes Nationales, pour les joindre aux troupes de ligne & aux gens de couleur qui fe font réunis aux Blancs pour leur défense commune, & ont donné pour otages de leur fidélité leurs femmes & leurs enfans.

Ces premieres difpofitions font pourtant bien loin d'avoir rafluré le gouverneur de la colonie: car, indépendamment des vivres, des munitions de guerre de route efpece qu'il demande il s'attend à recevoir fix mille hom mes de troupes de ligne, & c'eft fur cette lettre que le pouvoir exécutif vient de joindre un renfort de troupes de ligne à celles dont le départ étoit déjà ordonne; mais comme il eft difficile de multiplier ces fortes d'envois fans des frais affez confidérables, le miniftre a préfenté à l'Affemblée un apperçu de lo millions 300,000 liv. pour les premieres dépenfes qu'alloient entraîner les affaires de la colonie.

La queftion fur les émigrés étoit à l'ordre du jour; peut-être avoit-on penfé que les nouvelles tranfmifes par le ministre sur Saint;

Domingue pourroient bien retarder de nou veau cette difcuffion; mais l'Affemblée, qui vouloit terminer cette importante affaire, a renvoyé à son comité tous les détails coloniaux fur Saint-Domingue, & on a paffé au rapport du comité législatif concernant les émi grans.

M. Ducaftel, chargé de préfenter ce rapport, a ramené la queftion à ce qu'elle devoit être. Après avoir fait fentir que l'émigration en elle-même n'étoit pas un crime, que dans les circonftances mêmes où nous nous trouvons elle eft un malheur plutôt qu'un délit, il a prouvé que les fimples émigrans, n'ayant point renoncé aux loix de l'Empire, ne devoient point être pourfuivis par les loix, mais que ceux qui fe raffembloient fur les frontieres, pour de là exciter le trouble & le défordre dans leur pays, étoient des citoyens rebelles, & qu'ils devoient fubir la peine des traîtres, la peine de mort.

A la fuite de ce difcours, qui a excité des applaudiffemens de tout ce qu'il y avoit de Patriotes dans l'Affemblée, il a propofé un décret conçu en plufieurs articles, qui embraffoit la queftion dans tous les points d'u tilité. Il a été adopté fauf rédaction.

Du 9.

A la lecture du procès-verbal fait par M. Briffot, il s'eft élévé des débats fur quelques articles du décret rendu hier contre le émigrans. Sams nous engager dans de légeres difcuffions fur un décret dont l'événement ne doit pas tarder à juftifier la fageffe, nous allons tranfcrire littéralement les articles tels qu'ils ont été définitivement rédigés après dif férens amendemens.

L'Affemblée Nationale confidérant que la tran

quillité & la fûreté du royaume lui commandent de prendre des mefures promptes & efficaces contre les François qui, malgré l'amniftie, ne ceffent de tramer contre la Conftitution, hors du royaume, & qu'il eft tems enfin de réprimer féverement ceux que l'indulgence n'a pu ramener aux devoirs & aux fentimens de citoyens libres, a déclaré qu'il y a urgence, & le décret d'urgence préalablement rendu, a décrété ce qui fuit »,

« ART. I. Les François raffemblés au delà des frontieres du royaume font, dès ce moment déclarés fufpects de conjuration contre la Fran

ce ».

<< II. Si, au premier Janvier prochain, ils font encore en état de raffemblement, ils feront déclarés coupables de conjuration; ils feront pourfuivis comme tels & punis de mort ».

« III. Quant aux princes françois & fonctionnaires publics, civils & militaires qui l'étoient à l'époque de leur fortie du royaume, leur abfence, à l'époque ci-deffus citée, les conftituera coupables du même crime de conjuration contre la patrie; ils feront punis de la peine portée dans le précédent article ».

«IV. Dans les 15 premiers jours du même mois de Janvier, la Haute Cour Nationale fera convoquée, s'il y a lieu ».

« V. Les revenus des conjurés condamnés par contumace feront, pendant leur vie, perçus au profit de la Nation, fans préjudice des droits des femmes, enfans & créanciers légitimes ».

a VI. Dès à préfent tous les revenus des princes françois abfens du royaume feront féqueftrés. Nul traitement, penfion ou revenu quelconque ne pourra être fait directement ou indirectement auxdits princes, leurs manda

taires ou délégués jufqu'à ce qu'il en ait été autrement décrété par l'Affemblée Nationale, fous peine de refponfabilité & de deux années de gêne contre les ordonnateurs & payeurs ».

« Aucuns paiemens de leurs traitemens & -penfions ne pourront pareillement, & fous les peines ci-deffus portées, être faits aux fonctionnaires publics civils & militaires, & penfionnaires de l'Etat, émigrés, fans préjudice de l'exécution du décret du 4 Janvier 1791 ». « VII. Toutes les diligences néceffaires pour la perception & le féqueftre décrétés par les deux articles précédens feront faites à la requête des procureurs généraux - fyndics de département, fur la pourfuite des procureursfyndics de chaque diftri&t où feront lefdits revenus & les deniers en provenans feront verfés dans les caiffes des receveurs de diftri&t, qui en demeureront comptables. Les procureursgénéraux - fyndics feront parvenir, tous les mois, au miniftre de l'intérieur, qui en rendra compie à l'Affemblée, l'état des diligences qui auront été faites pour l'exécution du préfent article ».

<< VIII. Tous fonctionnaires publics, abfens du royaume fans caufe légitime, avant l'amniftie prononcée par la loi du 15 Septembre 1791, font déchus de leurs places & traitemens, fans déroger à la loi du 18 Décembre >>.

IX. Tous fonctionnaires publics qui auront abandonné leurs poftes, feront privés de leurs places pour toujours » :

«Tous fonctionnaires publics, abfens du royaume fans caufe légitime, font auffi déchus de leurs places & traitemens & en outre des

droits de citoyen actif »,

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«X. Aucun fonctionnaire public ne pourra

fortir du royaume fans un congé du miniftre dans le département duquel il fera, fous les peines portées dans l'article IX ci-deffus ».

<< XI. Tout officier militaire, de quelque grade qu'il foit, qui abandonnera fes fonctions fans congé ou démiffion acceptée, fera réputé coupable de défertion, & puni comme le foldat déferteur ».

« Les miniftres font tenus de donner à l'Af femblée Nationale, tous les mois, la lifte des congés qu'ils auront expédiés ».

« Quant aux officiers-généraux, fous-officiers: & foldats, foit de ligne, foit des Gardes Nationales en garnison fur les frontieres, ils ne pourront les dépaffer, même momentanément, fous quelque pretexte que ce puiffe être, fans! encourir la peine portée par le préfent article ».

«XII. Conformément à la loi... il fera for! mé une Cour martiale dans chaque divifion militaire pour juger les délits militaires commis depuis l'amniftie. Les accufateurs publics pourfuivront en outre, comme coupables de vols, les perfonnes qui ont enlevé des effets ou des deniers appartenans aux régimens françois, Le miniftre fera tenu d'envoyer aux Cours mari tiales la lifte des officiers qui, depuis l'amniftie ont quitté leurs drapeaux fans avoir obtenu de permiffion ou de congé préalable ».

«XIII. Tout François qui, hors du royaume, em bauchera & enrôlera des individus, pour qu'ils serendent aux rassemblemens énoncés dans les art, I & II du préfent décret, fera puni de mort. La même peine aura lieu contre toute perfonne qui commettra le même crime ent France, conformément à la loi du »........

"

XIV. L'Affemblée Nationale charge fon comité diplomatique de lui proposer les mefures que le roi fera prié de prendre,

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