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qui peuvent être perfonnellement admis. Cette propofition a été décrétée. D'autres membres avoient demandé la question préalable. N'ayant pu fe faire entendre de M. le président avant la mife aux voix, ils ont réclamé, & un d'eux a même demandé la parole contre lui. Les tribunes ont applaudi; il s'eft alors élevé un grand bruit; beaucoup de voix ont demandé que l'Affemblée fe formât en comité géné ral, ce qui, d'après l'acte conftitutionnel, entaîne l'ex clufion des tribunes. Il faut le vœu de cinquante membres pour que l'Affemblée foit obligée de fubir cette transformation ; mais heureufement il a été impoffible de le compléter.

Le tumulte s'eft appaifé enfin fans qu'on ait eu befoin de recourir à ce moyen violent, & l'Affemblée s'eft divifée en bureaux pour élire les membres du comité diplomatique.

Il feroit difficile fans doute de forcer des citoyens pour qui la troifieme année de leur liberté n'eft pas encore révolue, à garder un filence rigoureux lorfqu'on traite devant eux. leurs intérêts les plus chers. Qu'ils applaudif fent ou qu'ils fifflent les difcours des députés, qu'ils donnent des marques d'affentiment ou de défapprobation aux décrets qu'ils entendent prononcer: il ne peut en réfulter aucun inconvénient. Il y auroit dans les repréfentans d'une grande nation une vanité trop puérile à folliciter ces applaudiffemens, une lâcheté trop grande à craindre ces murmures. Souvenons-nous que les orateurs d'Athenes & de Rome, palant à un grand peuple qui n'étoit pas feulement le fpectateur, mais le juge de leurs difcours, fçavoient réfifter à fa volonté, & fouvent même l'entraîner en fens

contraire par la force de leur raifon ou le preftige de leur éloquence.

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L'ordre du jour, auquel l'Affemblée avoit paffé, a été interrompu par l'admiffion de quelques citoyennes de la paroiffe Saint-Sulpice qui fe plaignent des mariages & même des baptêmes clandeftins qu'on fe permet de faire fur leur territoire. M. le préfident leur a répondu que la nature les avoit formées pour la con folation de l'homme, & en conféquence, il les a exhortées à ne point fe meter des affaires publiques. On avouera cependant que, comme les loix obligent les femmes pour le moins autant que les hommes, il feroit un peu dur d'interdire à la moitié du genre humain le droit de fe plaindre ou de la tyrannie de ces loix ou de leur inexécution.

Dans les différens difcours fur la question des émigrés, les opinans ont paru convenir que ces émigrés ne conquerroient pas la France; que cependant il y avoit un milieu entre la crainte d'être conquis & une fécurité entie→ re; que des hommes qui inenaçoient leur pays, y fomentoient la défertion, recevoient avec honneur les officiers qui avoient volé la caiffe de leur régiment, alloient dans toutes les Cours folliciter contre leur patrie, &, malgré leur prétendue dignité de prince, y mendier de honteufes aumônes, qui enfin favorifoient les fabriques de faux affignats, ne pouvoient pas être traités abfolument comme des citoyens paifibles qui profiteroient du droit que la nature a donné à tous les hommes de changer de domicile & de patrie.

C'est d'après ces principes que tous ont propofé des décrets plus ou moins féveres l'Affemblée a ordonné l'impreffion des opi nions de MM. Condorcet, Vergniaud & Paf

toret.

M. Condorcet avoit obfervé, dans la fienne, que toute mefure, tant à l'égard des émi· grés qu'envers les Puiffançes étrangeres, feroit abfolument inutile tant que les opinions des envoyés de France dans les Cours de l'Europe, l'obstination du minifire à y conferver les mêmes agens, ou à les remplacer par des hommes qui (à l'exception du miniftre de Gênes & de celui que l'évêque de Liege a eu l'infolence de refufer) font connus pour des ennemis publics de la liberté & de l'égalité, y maintiendroient l'idée que le Gouvernement François fe permet d'avoir une double doctrine.

M. le préfident de l'Aflemblée Nationale à lu la lifte des membres qui compofent le comité diplomatique. On y a vu avec plaifir le nom de M. Koch, un des hommes les plus inftruits dans la diplomatie, qui, d'ailleurs, y a apporté toute la philofophie dont elle eft fufceptible, & M. Briffo, qui, depuis le commencement de la Révolution a fi bien prouvé qu'il étoit également impoffible de l'endormir, de l'intimider ou de le gagner.

Du 25 au foir.

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Parmi la grande quantité d'adreffes dont la lecture a abforbé la féance, il s'en trouvoit beaucoup des curés conftitutionnels qui fe plaignent des vexations qu'ils ont à effuyer dans l'exercice de leurs fonctions, & qui annoncent qu'ils fe verront forcés de les abandonner, fi l'Affemblée ne s'empreffe de venir à leur fecours. « Nous éprouvons, difentils, des perfécutions de tous les genres. Dans l'églife même, & fur les marches des autels, nous fommes infultés, menacés lorfque nous en fortons pour rentrer dans nos maifons, nous fommes poursuivis par le peuple, par

les femmes & les enfans: les uns nous jettent des pierres; les autres nous donnent les noms les plus odieux, tels que frippons, intrus', hérétiques », &c. Ces adreffes ont excité dans l'Affemblée des mouvemens d'indignation >

& elles ont été renvoyées au comité des pétitions.

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On a renvoyé au même comité les plaintes d'une députation des citoyens de Paris tre la négligence que la municipalité & le département de Paris apportent, fuivant elle, dans l'administration des fubfiftances. La dé, putation a reçu les honneurs de la féance. L'élection des membres de différens comités a terminé la féance.

Du 26.

M. Merlin, député du département de la Mofelle, a dir que le directoire de ce département avoit caffé la nomination d'un grand nombre de curés faite les 26 & 27 Septembre, par les électeurs du district de Thionville. Ce jugement eft en partie motivé fúr ce que les anciens curés n'avoient pas donné leur démiffion. Le directoire avoit oublié que, d'abes la loi, la non preftation de ferment fuffifoit pour que la cure fût cenfée vacante. Plufieurs voix ont crié qu'il falloit renvoyer au pouvoir exécutif; mais M. Ramond leur a prouvé que leur zele les égaroit; il a fu un article qui interdic expreffément au chef de ce pouvoir & aux agens nommés par lui la connoifiance de tout ce qui à rapport aux élections. En conféquence, l'Arfemblée a chargé le comité des pétitions de lui préfenter un rapport de cette affaire, & décrété provifoirement que les curés nommés par les électeurs du diftri&t de Thionville continueroient leurs fonctions. Elle a déclaré en même tems, que, d'après l'acte conftitutionnel,

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ce décret auroit force de loi fans être affujetri à la fanction..

On a paffé enfuite à l'ordre du jour.

M. Ducos a foutenu & développé les principes de la liberté religieufe. « Il ne faut jamais, a-t-il dit, faire ce que l'ennemi defire. Ne perfécutez point vos prêtres famatiques : car tout ce qu'ils veulent, c'est d'être perféCures. Lis fe fouviennent que c'eft par la perfécution qu'ils font parvenus à fe rendre les maîtres du monde, & ils efperent qu'elle les replacera au rang dont ils font déchus. Il faut éviter furtout que le Peuple puiffe croire que dans les mesures de rigueur qui feroient employées, on puniffe des prêtres, & non pas feulement des citoyens rebelles. Donnons-lui la plus grande facilité poffible de fuivre le culte qui lui plaft; qu'il jouiffe dans le fait, de la fiberté de religion que la loi conftitutionnelle lui affure car it croira qu'on ne lui a pas laiffé cette liberté, fi les moyens que la loi lui indique font hors de fa portée ». Ces idées font fimples & vraies; elles ont été préfentées avec fimplicité, avec nobleffe.

M. Fauchet, évêque du Calvados a pro pofé enfuite que les prêtres qui refuferoient de prêter le ferment eccléfiaftique & de fe faire infcrire pour être élus comme curés ou vicaires, fuffent privés du traitement ou de la penfion que la loi leur a donné. Ceux qui auroient rempli ces conditions conleveroient la moitié de ce traitement, avec les appointe mens de la nouvelle place qu'ils pourroient obtenir. I a foutenu que cette difpofition n'étoit pas contraire à l'article II du titre V de l'acte conftitutionnel. On y lit: Le traitement des minifires du culte catholique confervés, élus ou nommés en vertu des décrets de l'Af

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