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d'armée d'émigrés; le raffemblement d'Ettenheim, à quelques lieues de Strasbourg, mé-rite à peine qu'on en parle; d'eft la garde du cardinal de Rohan, que la peur lui a fait établir, & qu'il loge fous des tentes, faute de cafernes. Ces hommes font mal vêtus, mal difciplinés; ils ont Mirabeau le cadet à leur tête; fouvent ils ont fait à nos concitoyens des infultes que nous avons dénoncées au Miniftere. Le moyen de chaffer ces émigrés eft de réclamer auprès des Cercles du Rhin & de Souabe. D'ailleurs nous ne devons rien craindre les princes d'Allemagne le garderont bien de fournir des fecours. Quant aux grandes Puiffances, l'empereur & le roi de Pruffe, leurs intentions font changées depuis l'acceptation du roi : tous les politiques confiderent la caufe des émigrés comme tout-àfait défefpérée; on n'a pas même à craindre une médiation, qui feroit fans objet aujour d'hui ».

« Nos deux départemens du Rhin, a dit l'autre député, ont pour voifins l'électeur palatin, le margrave de Bade, l'évêque de Spire, l'évêque de Bafle, & le prince d'Ettenheim, c'est-à-dire, le cardinal de Rohan: ce dernier eft le feul qui ait fait des préparatifs ; fon armée, mal vêtue, mal payée, s'exerce avec des bâtons faute de fufils; elle eft compolée de déferteurs de toutes les Puiffances de P'Europe, & commence à fe débander, parce que les Ariftocrates commencent à manquer d'argent & de reffources. Voilà, Meffieurs, la premiere armée que l'on vous fait redouter. La feconde, campée autour du château de l'électeur de Mayence, près de Worms, pour chef M. le prince de Condé. Cette armée eft compofée de trois cens ci-devant gentils,

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kommes, d'autant de valets & de palfréniers ; elle manque d'armes ; fi elle s'avifoit de vou loir entrer dans le royaume, elle rencontré › roit la ville de Landau, où il y a deux régimens d'infanterie & un de cavalerie, & où commande le général Kellermann. Les dernie.. res lettres arrivées des royaumes du Nord annoncent les intentions les plus pacifiques. L'empereur a envoyé des ordres dans l'Autriche Antérieure pour empêcher tout enrôlement au compte des émigrés, & pour recommander, de vivre dans le meilleur voifinage avec les ! deux départemens du Rhin. Voilà, Meffieurs, les dangers de la patrie », (*)

Le contrafte des menaces des émigrans & de la nullité à laquelle les fuppofent réduits ceux qui tremblent qu'on ne leur ôre les moyens de nuire, eft digne de quelque attention. La vigilance eft le premier devoir des repréfen-> tans du Peuple; & comme ils font fans doute auffi éclairés que les amis de la liberté, plus on voudra leur infpirer une confiance aveugle, moins ils feront tentés de s'y livrer.

Plufieurs ont parlé fur la queftion. Quelquesuns ont foutenus que les émigrés n'ayant manifefté jusqu'à préfent aucune intention hoftile, il n'y avoit lieu à prononcer aucune peine: là où il n'y avoit pas de délir.

(*) L'auteur de la partie politique du Mercure de France et bien mieux informé fur les forces des émi grés que les députés des départemens du Rhin. « Par l'arrivée, dit-il, d'un grand nombre de nouveaux Gardes-du-Corps, if s'en trouve aujourd'hui 860 équipés à Coblence, où l'on a auffi réuni & formé les anciennes compagnies de Gendarmes, de Chevaux-Légers de la garde & de Moufquetaires. La légion, que commande le vicomte de Mirabeau toujours ftationnée à Ettenheim, eft de deux mille hommes cheilis, fort beaux & bien difciplinés »

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M. Thorillon, député de Paris, a demandé qu'on formât les émigrés de rentrer en France, qu'on féqueftrat les biens & qu'on fît le procès de ceux qui ne feroient pas rentrés à une époque déterminée. La difcuffion a été remife au 25.

Du 22 au foir.

De deux décrets qui ont été réndus dans cette féance, l'un ftatue que les officiers re-i tirés avec penfion, qui, par le vœu de leurs concitoyens, obtiendroient des places dans les bataillons de Gardes Nationaux Volontaires deftinés à la défenfe des frontieres, jouiront & de leurs penfions, & des traitemens attachés à leur grade dans ce fervice patriotique. On se rappelle que l'Afemblée Conftituante avoit défendu de cumuler une pension & un traitement; mais il étoit également important que les Gardes Nationales euffent des officiers expérimentés, & que ces officiers ne fuffent point punis de leur zele.

-L'autre décret_ordonne que le directoire du département du Cantal fiégera alternativement, pendant deux années confécutives, dans les villes de Saint-Flour & d'Aurillac. C'eft dans” cette derniere ville que le directoire va être transporté, afin que les adminiftrés, après! avoir effayé de ces deux villes, décident avec connoiffance de caufe, & puiffent, dans deux ans, émettre un vœu d'après lequel l'Affémblée Nationale prononcera.

Du 23

Deux pétitions préfentées par deux députations ont été renvoyées au comité militaire. L'une, préfentée par des citoyens de:' la fection du Théatre François & de quelques autres fections de Paris, demandoit qu'on n'éloignat pas de cette ville les ci-devant Gardes

Françoifes, fes libérateurs, fes défenfeurs fes amis. L'autre, préfentée par les Invalides, invitoit l'Affemblée à s'occuper de leur fort. La confervation de quelques congrégations religieufes, telles que celles des Oratoriens, des Sulpiciens, &c., a été une fource d'abus plus ou moins crians. Quelques-unes des victimes de ces abus fe font présentées aujourd'hui à l'Affemblée, & ont tourné fon attention vers ce point. Ce font des prêtres oratoriens, profeffeurs au college de Juilly, & déplacés de ce college par les fupérieurs de l'Ordre, que leur patriotifme avoit indifpofés. L'Affemblée a décrété que les Oratoriens en feignans ne feroient foumis, pour leurs déplacemens, qu'aux arrêtés des départemens. Elle a renvoyé à un comité la motion faite M. Fauchet, de fupprimer enfin toutes les congrégations ajournées.

Un adminiftrateur du diftri& de Nantua fuivant les traces des adminiftrateurs de l'ancien régime, s'étoit adjugé trois moulins nationaux. Le département de l'Ain a destitué l'administrateur; le roi a confirmé Parrêté par une proclamation qu'il a envoyée au Corps Légiflatif pour la ratifier. L'Affemblée l'a renvoyée au comité des penfions.

La queftion des mefures à prendre pour empêcher le fanatifme de produire des foulévemens dangereux doit occuper demain l'Affemblée Nationale. Ce fanatifme offre un I étrange fpectacle.

bien

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Des femmes qui daignoient à peine fe faire dire une meffe dans leur antichambre feroient une lieue à pied dans la boue, pour affifter au falut d'un prêtre non fermenté. On a vu le moment où les boudoirs étoient convertis en chapelles. Tel homme de qualité qui faifoit,

il y a deux ans, des chanfons fur la meffe parle aujourd'hui d'un ton de dévot de l'im portance des opinions religieufes. D'un autre côté, de faints fujets du pape, convaincus qu'une Vierge d'argent avoit pleuré, ont affaf. : finé un homme fur les marches de fon autel mais ils ont eu la précaution de le voler auparavant, fideles aux maximes du Saint Siege qui n'a jamais négligé l'argent des Hérétiques. Ĉes ridicules & abominables folies doiventelles nous infpirer des inquiétudes? Non fans doute. La fuperftition expirante fe déploie dans toute fa turpitude & dans toute fon horreur. Laiffons la faire. Que, fans influence fur les actes qui conftatent l'état des citoyens, que... · féparés par un mur d'airain, de tous les établiffemens d'inftruction publique, on laifle les prêtres à leurs propres forces: la raison en aura bientôt fait juftice.

Du 23 au foir.

On a continué à organifer les comités, & on a renvoyé à ceux déjà formés plufieurs pétitions dont on avoit lu la notice.

Au nombre des décrets deftinés à être portés à la fanction du roi, s'eft trouvé celui qui conferve aux officiers retirés du fervice, & & leur penfion, & leur traitement de Gardes Nationales. On a obfervé qu'il ne falloit pas reftreindre à la claffe des officiers un avantage auquel il étoit jufte de faire participer tous les François affez courageux pour le dévouerau falut de l'Empire. Par exemple, des cha→→ noines d'Angers fe font enrôlés pour aller aux frontieres, de tels hommes, difoit-on, mé- 5 ritent au moins autant que les guerriers de profeffion, de réunir au traitement qui leur fera payé pour leur fervice militaire, la penfion que l'Etat leur doit comme bénéficiers.

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