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de lui, puifqu'ils font les ennemis d'une Conftititution qu'il a juré de maintenir, ces ci devant princes auxquels la nation généreufe a pardonné leurs écarts, & qu'elle a dotés fi magnifiquement. Parmi ces chefs se trouve un prince qui a fait couler le fang françois, & auquel on fait paffer encore des traitemens. Les tyrans font bien plus habiles à maintenir le defpotifme que les nations à conferver leur liberté. Ils puniffent les chefs d'une rebellion, & pardonnent à la tourbe des rebelles. Puniffez les chefs, & la révolte s'éteindra. Les Anglois, au fiecle dernier, ordonnerent aux princes étrangers de chaffer de leurs Etats les ennemis de leur liberté.... Nos ennemis font dans la famille du roi. Le roi d'un peuple libre n'a point de famille; fa premiere famille est le Peuple entier. Mazarin, ce prêtre aftucieux, qui n'avoit pour appui qu'une femme aveuglée, eut affez de pouvoir pour faire jetter dans les fers les princes de Condé & de Conti: une nation libre & puiffante auroitelle moins de pouvoir, défefpéreroit-elle de réduire à l'obéiffance un homme dont on ne connoît que le dénuement de moyens, & la réputation honteufe de courtifan ?...... Le néant eft là: il attend la Nobleffe ou la Constitution..... Choififfez. Ce décret va vous juger : tout milieu est un parjure : vous avez juré la Conftitution ou la mort ».

M. Briffot, après avoir invoqué les principes de la liberté en faveur des émigrans que l'inquiétude ou la féduction ont fait fortir du royaume, a préfenté fucceffivement le tableau des difpofitions & des moyens des Puiflances de l'Europe, en ces termes:

«< A Vienne, notre ambaffadeur exilé, les biens nationaux mis en féqueftre. A Florence

à Naples, mêmes difpofitions. L'Espagne infulte au Peuple François en appeliant fon roi fouverain. Les fentimens des Cours de Sardaigne & de Portugal ne font plus équivoques. En Suede, ce roi que nous foudoyions jadis, enthoufafte des prérogatives royales a donné un afyle & des emplois à l'Arnold François. L'Etat de Berne a défendu aux foldats fuiffes d'affifter aux fociétés patriotiques a proferit cet air célebre qui propagera jufques dans les derniers tems l'hiftoire de la Révolution. A Venife, l'amiral Emo outrage le pavillon national; jufqu'à ces petits princes d'Allemagne, dont l'infolence égale la foibleffe; jufqu'à Geneve cet atome de répu blique, dont tous les Confeils retentiffent de libelles contre la France; enfin, jusqu'à cet évêque de Liege, jufqu'à ce prêtre fanguinaire ; n'a-t-il pas eu l'infolence de refufer notre ambaffadeur, fous prétexte qu'il appar tenoit à une fociété célebre dans les faftes de la Révolution? L'Angleterre ne doit pas être moins fufpecte: la tragédie de Birmingham n'eft que l'effet du fanatifme prefbytérien & des manœuvres miniftérielles ».

«Telles étoient, il y a quelques mois, les difpofitions des Puiffances étrangeres ; font-el les changées aujourd'hui ? Non. Pourquoi les efcadres fuédoifes & ruffes reftent-elles ar mées ? Pourquoi cette entrevue à Pilnitz? Estil vrai qu'on y ait conjuré la ruine de la Conftitution Françoise? Eft-il vrai que le roi de Pruffe , comme électeur de Brandebourg, ait fait fignifier une déclaration contre nous à la Diete de Ratisbonne? Eft-il vrai qu'il doit fe tenir un congrès à Aix-la-Chapelle ; que l'empereur, en reconnoiffant le pavillon françois, protege cependant les rebelles; que le

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roi de Pruffe, en arrêtant la réduction de fon armée, ne la réduife ceperdant pas....; que les cordons fuiffe, farde, efpagnol, fe renforcent journellement ?.... Il faut venger vo tre gloire, cu vous condamner à une honte éternelle.... Il s'ouvre deux partis aux Puiffances étrangeres ou elles rendront hommage à la Conftitution, ou elles refuferont de la reconnoître; & dans le fecond cas, ou elles feront intervenir une médiation armée. Dans le premier, la tranquillité pourra renaî re; mais l'hiftoire nous apprend qu'il ne faut ja mais compter fur la foi des rois. Les rois ne veulent que fufciter des embarras à leurs voi. fins fans s'embarraffer de leur bonheur. Dans le fecond, attaquez vous mêmes. Le mot de la liberté précédera vos armées, & fera pour vos ennemis la tête de Médufe. Quels moyens ont-ils, vos ennemis ? L'empereur eft ruiné par de longues guerres. Le fucceffeur du grand Frederic ne peut continuer fes relations avec Léopold, s'il entend les intérêts, & s'il veut être honnête homme. Quant à la Ruffie, à peine fubjugue-t-on des efclaves à 15co lieues; on ne fubjugue point des hommes libres à cette diftance. Le roi de Sardaigne, avec un petit revenu de 25 millions, ne peut qu'avec peine entretenir une petite armée de foldats mécontens. Que les defpotes fcachent que la vengeance d'un peuple libre eft lente, mais qu'elle frappe fûrement ».

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Voici le projet de M. Briffot. 1o. Tous les émigrans feront tenus de revenir dans un mois. 2°. Dans le cas où ils ne viendroient pas, leurs biens feront foumis à la triple taxe. 3°. Les fonctionnaires feront déclarés déchus de toutes fonctions, les ci-devant princes déchus de leurs droits éventuels à la cou

ronne, de leur traitement & les paiemens qui leur feroient faits feront confidérés comme trahison envers la patrie. 4°. Si les cidevant princes commettoient ou faifoient commettre quelqu'acte d'hoftilité, ils feroient pourfuivis criminellement pardevant la Haute Cour Nationale. 5. On ne pourra plus fortir du royaume fans être muni de paffe-port de la municipalité, ou du miniftre des affaires étrangeres. 6. Défendu d'en porter armes,

mu

nitions, poudres, falpêtres. 7o. Si les Puiffances renouvellent les projets hoftiles, on avilera à les forcer de renoncer à ces projets, d'après le rapport du ministre, ajourné au 1er. Novembre prochain.

On a demandé par acclamation l'impreffion de ce difcours.

M. Dumas a prononcé un difcours rempli de grands mouvemens. Il perchoit à la dou& fe contentoit d'établir à Metz, à LilJe, à Strasbourg, des Cours Nationales, pour juger les officiers déferreurs.

ceur,

L'Affemblée a auffi ordonné l'impreffion de fon difcours.

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POUVOIR EXÉCUTIF.

Le roi a fait expédier la lettre circulaire fuivante aux commandans de tous les ports du royaume.

Paris, de 30 dobre 1992.

« Je fuis informés Monfieur, que les émigrations fe multiplient tous les jours dans le Corps de la marine, & je ne puis pas différer plus longtems de vous faire connoître combien j'en fuis vivement affecté ».

« Comment fe peut i que des officiers d'un Corps dont la gloire m'a toujours été fi chere, & qui m'ont donné dans tous les tems les preuves les plus fignalées de leur attachement

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& de leur zele pour le fervice de l'Etat, fe foient laiffés égarer au point de perdre de vue ce qu'ils doivent à la patrie, ce qu'ils doivent à mon affection, ce qu'ils fe doivent à eux-mêmes » ?

« Ce parti extrême eût paru moins étonnant il y a quelques mois, quand l'anarchie fembloit être à fon comble, & qu'on n'en appercevoit pas le terme ».

«Mais aujourd'hui que la majeure & la plus faine partie de la Nation veut le retour de l'ordre & de la foumiffion aux loix, feroit-il poffible que de généreux & fideles marins fongeaffent à fe féparer de leur roi »?

« Dites bien à ces braves officiers que j'ef time, que j'aime, & qui l'ont fi bien mérité, que l'honneur & la patrie les appellent. Affurez-les que leur retour, que je defire pardeffus tout, & auquel je reconnoîtrai tous les bons françois, tous mes vrais amis, leur rendra pour jamais toute ma bienveillance ».

On ne peut plus fe diffimuler que l'exécution exacte & paisible de la Constitution est aujourd'hui le moyen le plus für d'apprécier fes avantages, & de connoître ce qui peut manquer à fa perfection ».

« Quel eft donc votre devoir à tous ? De refter fidelement à votre pofte, de coopérer avec moi, avec franchife & loyauté, à affurer l'exécution des loix que la Nation penfe devoir faire fon bonheur, de donner fans ceffe de nouvelles preuves de votre amour pour la patrie, de votre dévouement à fon fervice ».

« C'est ainsi que fe font illuftrés vos peres & que vous vous êtes diftingués vous-mêmes ; voilà les exemples que vous devez laiffer à vos enfans, & les fouvenirs ineffaçables qui conftitueront votre véritable gloire ».

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