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des offices municipaux, il est nécessaire d'en prononcer par amendement le remboursement.

M. Target. Leur suppression et leur remboursement forment partie des arrêtés du 4 août.

M. Bouche n'adopte que la dernière partie de l'article commençant par ces mots : et cependant les officiers, etc.

M. de Turckeim. Je suis chargé par la ville de Strasbourg de demander la conservation des municipalités.

M. Lavie. Tous les habitants de cette ville réclament au contraire la suppression d'un régime vicieux, qui n'était utile qu'aux régiments.

M. l'abbé d'Eymar. La ville de Colmar m'a spécialement ordonné de demander pour elle la conservation de ce même régime.

M. Rewbell. Le préopinant a sans doute été trompé je lui ai fait passer un mémoire de la municipalité de Colmar, dont les officiers avaient transigé et cédé leurs droits à la bourgeoisie. Cette municipalité veut revenir sur la transaction; ce sont des particuliers qui réclament, et non les citoyens en général.

M. l'abbé d'Eymar. Que du moins l'Assemblée, avant de s'occuper du travail qui lui est présenté, se fasse rendre compte des capitulations des villes et des provinces, et qu'elie nomme un comité à cet effet.

M. le marquis d'Estourmel. Dans la plupart des provinces belgiques, des fonctions judiciaires sont attribuées aux municipalités. Je demande un article, ou du moins une explication sur les juridictions municipales.

M. Target. Cette demande est prématurée ; nous ne nous occupons pas aujourd'hui des fonctions des municipalités...

M. Lanjuinais. Les arrêtés du 4 août portent la suppression de la vénalité des offices de municipalité; ils conservent l'exercice au titulaire jusqu'au remboursement, et l'article aujourd'hui proposé, jusqu'au remplacement. Je demande qu'on m'explique cette contrariété.

M. Target. On lit dans les arrêtés du 4 août : « jusqu'à ce qu'il soit pourvu aux moyens d'opérer le remboursement ». Le comité des finances s'occupe de ces moyens. Le défaut d'argent ne doit pas nous faire périr par le désordre

L'Assemblée décide qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur les amendements.

Elle décrète l'article premier.

Les articles 2, 3, 4, 5 et 6 sont décrétés unanimement et sans discussion, comme il suit :

ᎪᎡᎢ. 2.

Les officiers et membres des municipalités actuelles seront remplacés par voie d'élection.

ART. 3.

Tous les citoyens actifs de chaque ville, bourg, paroisse ou communauté pourront concourir å l'élection des membres du corps municipal.

ART. 4.

Le chef de tout corps municipal portera le nom de maire.

ART. 5.

Les citoyens actifs se réuniront en une seule assemblée dans les communautés où il y a moins de quatre mille habitants, en deux assemblées dans les communautés de quatre mille à huit mille habitants; en trois, dans celles de huit mille à douze mille, et ainsi de suite.

ART. 6.

Les assemblées ne pourront se former par métiers, professions ou corporations, mais par quartiers ou arrondissements.

M. Target donne lecture de l'article 7, ainsi conçu :

Les assemblées des citoyens actifs seront convoqués par le maire. La séance sera ouverte en présence d'un citoyen nommé à cet effet par le corps municipal. L'assemblée procédera, avant d'aller au scrutin, à la nomination d'un président et d'un secrétaire. Pour cette nomination il ne faudra qu'une simple majorité relative de suffrages en un seul scrutin.

M. Rhedon demande l'explication des mots : «La séance sera ouverte en présence d'un citoyen nommé à cet effet par le corps municipal ».

M. Démeunier. Le corps municipal, dans une ville un peu considérable, ne sera pas assez nombreux pour envoyer un de ses membres à chaque élection; il nommera le citoyen dont il s'agit, et dont les fonctions seront bornées à indiquer l'objet de la convocation. Pour répondre aux vues du préopinant, on peut donner cette explication dans l'article même.

Quelques explications sont échangées entre MM. Lofficial, Lavenue et de Montlosier.

M. Target. Ne déshonorez pas votre constitution par des détails qui n'appartiennent qu'à des réglements particuliers; ne l'exposez pas à varier en quelques points par les événements. De simples instructions doivent renfermer ces détails.

L'article 7, légèrement modifié par le comité de constitution, est ensuite adopté en ces termes :

ART. 7.

Les assemblées des citoyens actifs seront convoquées par le corps municipal huit jours à l'avance. La séance sera ouverte en présence d'un citoyen chargé par le corps municipal d'expliquer l'objet de la convocation. L'Assemblée procèdera d'abord à la nomination d'un président et d'un secrétaire. Pour cette nomination, il ne faudra qu'une simple pluralité relative de suffrages et un seul scrutin.

On lit l'article 8:

« Les nominations des membres de l'Assemblée municipale se feront par la voie du scrutin de liste. »

M. Defermon. Le scrutin de liste serait favorable à l'intrigue.

M. le duc de la Rochefoucauld. Le scrutin de liste est contraire aux intrigants. Les calculateurs ont reconnu qu'en rédigeant une liste du

double du nombre des personnes à nommer, c'est un moyen sûr d'appeler toujours à l'élection celui que ses vertus et ses talents ont le plus fait connaître. J'adopte donc le scrutin par liste, mais je demande que cette liste soit double.

M. Ramel-Nogaret. Il sera impossible dans les campagnes de donner les suffrages par la voie de scrutin. Le plus grand nombre des paysans ne sait ni lire ni écrire; il est obligé de se confier à des gens qui n'abusent que trop souvent de son ignorance. J'en ai fait l'expérience lors de l'élection des membres de cette Assemblée.

M. Mougins de Roquefort. Je demande qu'il soit établi dans les campagnes, lors des élections, des scrutateurs de confiance, qui écriraient les

noms.

Toutes les méthodes de scrutin sont nécessairement vicieuses; il faut se contenter d'une perfection relative, et la chercher dans la comparaison des inconvénients et des avantages. Vous êtes condamnés sur cette matière à des moyens imparfaits; si vous adoptez le scrutin individuel avec la majorité absolue, il arrivera souvent que vous ne pourrez pas obtenir cette majorité au premier, ni au deuxième scrutin; il faudra bien finir; et au troisième, vous serez forcés de vous contenter de la pluralité simple. Mais, alors même, il aura fallu se résigner à une lenteur excessive. Le moyen proposé par le comité sera bien plus expéditif, il offre de grands avantages. Ajoutez-y la liste double; il ne présente presque plus d'inconvénients. C'est par oubli que nous ne l'avons pas proposé; nous adoptons avec empressement l'amendement de M. le duc de la Rochefoucauld. Dans la liste double, on trouve place pour l'attachement, pour la parenté, pour la prévention, et le tour des lumières et des talents pourra toujours venir.

Je réponds à l'observation relative aux habitants de la campagne, qu'ils sont obligés, pour des affaires auxquelles ils attachent encore plus d'importance, de se confier au curé ou au notaire du village. C'est par ces personnes de confiance qu'ils feront rédiger leur liste. Au surplus, on pourvoira par des règlements particuliers aux moyens de diminuer cet inconvénient.

L'amendement de M. le duc de la Rochefoucauld est adopté.

M. Defermon propose le scrutin individuel, et veut faire considérer cette proposition comme un amendement.

M. le Président se dispose à la mettre aux voix en cette qualité.

M. le baron de Menou. Le scrutin individuel est absolument le contraire du scrutin de liste; et si l'on prétend que c'est un amendement à l'article, il faut prétendre en même temps que oui est l'amendement de non.

M. le comte de Crillon. En adoptant le scrutin individuel, il serait possible qu'un homme qui réunirait tous les suffrages ne fùt pas nommé, à moins que l'on obligeât les votants å numéroter leurs noms.

M. Blin. Si l'on délibère sur le scrutin individuel et qu'il soit admis, que deviendra la motion?...

La priorité est accordée à l'article du comité, sur la motion de M. Defermon.

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En conséquence, chaque section de l'Assemblée générale des citoyens actifs fera parvenir à la maison commune, on maison de ville, le recensement de son scrutin particulier, contenant la mention du nombre de suffrages que chaque citoyen nommé aura réunis en sa faveur; et le résultat général de tous ces recensements sera formé dans la maison commune.

L'article onzième a été lu; mais l'heure se trouvant avancée, et l'Assemblée le jugeant susceptible de discussion, l'ordre du jour du matin a été fermé, et l'on a passé aux affaires de deux heures.

M. le Président. Un de MM. les secrétaires va donner lecture d'un mémoire envoyé par la commune de Metz et de pièces concernant le parlement de cette ville:

A Monsieur le président de l'Assemblée nationale.

Monsieur le président,

Je suis chargé de la part de la chambre des vacations de vous adresser son arrêté de ce jour, qui est l'expression du respect que le parlement de Metz ne cessera d'avoir pour les décrets de l'Assemblée nationale.

Je vous prie de vouloir bien le présenter à l'auguste Assomblée que vous présidez.

Je suis avec respect, monsieur le président, votre très-humble et très-obéissant serviteur. Signé DE CHAZELLES, conseiller.

A Metz, le 21 novembre 1789.

Extrait des registres du parlement de Metz.

Ce jour, la chambre des vacations continuant sa délibération sur l'arrêt du Conseil d'Etat du Roi, du 15 du courant, qui casse l'arrêté du parlement du 12 du même mois, elle aurait reconnu avec douleur qu'une démarche dictée par le zèle le plus pur aurait pu faire soupçonner le parlement de manquer au respect qu'il doit à son Roi, et dont il est également pénétré pour les décrets de l'Assemblée nationale;

Qu'effrayée des bruits fâcheux qui se sont répandus dans les provinces, son zèle ne lui a pas permis de les apprécier; qu'elle reconnaît avec satisfaction la liberté et l'union qui règnent autour du trône et dans l'Assemblée nationale;

En conséquence, a arrêté que l'expression de ses sentiments serait mise sous les yeux de Sa

Majesté et de l'Assemblée nationale, et que le présent arrêté serait envoyé à M. le garde des Sceaux pour être mis sous les yeux du Roi, et à M. le président de l'Assemblée nationale, pour lui en être fait part.

Fait en parlement, à Metz, chambre des vacations, le 21 novembre 1789.

Collationné, Signé; GUINET.

A Nosseigneurs de l'Assemblée nationale.

Le comité municipal, à lui joints les députés des corps, compagnies, communautés, corporations et paroisses représentant la commune de Metz, pénétré du plus profond respect pour les décrets de l'Assemblée nationale, désapprouvant les principes qui ont égaré un moment le parlement, mais vivement touché de son empressement à réparer son erreur, a été saisi d'une douleur profonde en apprenant les dispositions rigoureuses de votre décret du 17 envers ce tribunal.

Cette cour donna souvent des preuves de son zèle pour le peuple; elle consacra la première les principes de la répartition proportionnée des impôts, et son courage à les soutenir attira sur ses membres les coups du despotisme. Elle a rendu la justice avec équité et bonté; elle a respecté les droits des citoyens, elle leur a été chère et respectable. Peu avant l'arrêté du parlement du 12 novembre, des bruits alarmants circulaient dans la cité; ils émanaient de la capitale, ils étaient dans des écrits publics.

L'erreur du parlement de Metz est d'avoir pu les accréditer, tandis qu'il devait les détruire; mais il n'a point résisté à l'autorité de l'Assemblée nationale et du Roi; sa conduite doit dissiper le soupçon qu'il ait eu l'intention de préparer l'occasion d'y résister.

L'arrêté du 12 n'a point été envoyé dans les bailliages; il n'a pas été publié ni affiché; il n'a pas été répandu; la commune de Metz n'en a eu des notions précises que par l'arrêt du Conseil qui l'a cassé.

Dès le 17 novembre, la chambre des vacations a enregistré sans réserve tous les décrets sanctionnés qui lui ont été adressés: la loi martiale, les lois touchant la justice criminelle et le rétablissement des impôts; elle les a fait afficher et adresser sur-le-champ au comité municipal; elle a enregistré de même l'arrêt du Conseil du 15, qui casse l'arrêté du parlement son arrêté du 21, et la délibération du parlement de ce jour, dont la copie est ci-jointe, ne laisseront aucun doute sur la soumission de cette compagnie à l'Assemblée nationale et au Roi.

Le parlement a donc prévenu les suites fàcheuses que pouvait avoir son imprudence: cependant, Nosseigneurs, il est l'objet de votre sévérité; ce transport d'un parlement en corps à quatre-vingts lieues l'exposerait aux insultes, aux huées des peuples, peut-être à de plus grands dangers; cette humiliation désespérante, comparée à l'antique respect dont jouissait cette compagnie est, comme l'a dit un de ses membres dans votre auguste Assemblée, un arrêt de mort.

Cette mort frapperait des citoyens, dont les uns ont protesté, dont les autres n'ont suspendu leurs protestations contre l'arrêté du 12 qué dans la persuasion qu'ils devaient un secret inviolable aux délibérations de leur compagnie.

Cette mort en frapperait plusieurs qui sont membres du comité municipal de Metz, dont le patriotisme a été hautement professé, unis de cœur et de sentiment avec la commune qui garantit leur loyauté.

Les événements postérieurs à l'arrêté écartent les motifs qui ont pu déterminer l'Assemblée nationale à décréter une nouvelle chambre des vacations, la chambre actuelle ayant enregistré toutes les lois sans refus ni retard.

La commune de Metz vous supplie, Nosseigneurs, d'épargner une peine rigoureuse à un tribunal qui doit conserver de la dignité, et qui est nécessaire au maintien de l'ordre public, et d'accepter comme une satisfaction de cette compagnie le dévouement absolu que ses députés admis dans l'assemblée de la commune viennent loi." de professer à l'Assemblée nationale, au Roi et la

Fait à Metz, le 23 novembre 1789,

Singé L'HUILLIER, etc. Collationné.
Signé : FENOUIL, Secrétaire.

Metz, le 23 novembre 1789.

Monsieur le président,

Le comité municipal de la commune de Metz a l'honneur de vous adresser un mémoire en faveur du parlement de Metz, qu'il vous prie de soumettre à la décision de l'Assemblée nationale. Il se permet de vous observer que l'envoi de ce mémoire, ayant été unanimement délibéré le 22, le parlement, qui en a été instruit, a envoyé le 23 deux députés de l'assemblée générale de la commune; ils y ont déposé dans un discours touchant et convenable aux circonstances, les témoignages les plus marqués de la soumission du parlement à l'Assemblée nationale, et de sa réunion de cœur et d'opinion à la commune. Nous joignons à ce mémoire l'arrêté de la chambre des vacations du 21, la délibération en date du 23 des autres membres du parlement qui ont été présents à l'arrêté du 12. Ces membres se sont expliqués en cette forme, croyant ne devoir pas s'assembler en corps. Nous supplions l'Assemblée nationale d'accepter ces satisfactions. Si l'ordre du jour ne permettait pas l'examen prompt de notre mémoire, nous prions l'Assemblée nationale d'accorder une surséance au départ des magistrats, que nous ne verrons pas, sans un vif regret, exposés aux humiliations qui peuvent les

menacer.

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« Décrète que déférant au vou des citoyens de Metz, elle dispense de se rendre à la barre de l'Assemblée, les membres du parlement de Metz qui avaient pris l'arrêté du 12 novembre;

«Ordonne que l'adresse de la municipalité et des communes de Metz, et l'arrêté du parlement, seront imprimées à la suite du procès-verbal;

« Ordonne, en outre, que le président se retirera par devers Sa Majesté pour lui présenter le présent décret et la prier de lui accorder sa sanction. »

M. le duc de la Rochefoucauld. Les opérations de l'Assemblée nationale ont excité la reconnaissance de tous les Français et l'admiration des étrangers; c'est un hommage étranger que j'ai l'honneur de vous présenter.

La société qui se rassemble à Londres pour célébrer l'anniversaire de la révolution de 1688 a cru devoir offrir à l'Assemblée nationale de France un hommage pur, qu'aucune prévention de nation à nation n'a pu empêcher. Cette société est présidée par lord Stanhope; elle a pour secrétaire le docteur Price; tous les deux sont célèbres par leurs lumières dans les sciences, et par leur zèle pour les libertés publiques; elle est composée de trois cents membres aussi distingués par leurs talents que par leur naissance.

Cette société, dégagée de toute prévention nationale et se réjouissant de tous les triomphes que la liberté et la justice remportent en France sur le pouvoir arbitraire, présente à l'Assemblée nationale ses félicitations et le plaisir qu'elle ressent en voyant que bientôt les deux premières nations participeront en commun aux bienfaits de la liberté civile et religieuse. Elle espère, et c'est l'objet de tous ses vœux, que l'influence du glorieux exemple donné par la France aux aufres nations concourra puissamment à rendre le inonde entier heureux et libre.

On avait déjà, selon l'usage, fait circuler plusieurs toasts patriotiques, lorsque le docteur Price, si avantageusement connu par des écrits aussi lumineux que pleins d'énergie en faveur de l'indépendance de l'Amérique, proposa une motion qui fut adoptée à l'unanimité.

Il a été résolu unanimement que copie de ladite résolution serait signée par le président au nom de la société, et envoyée à l'Assemblée nationale de France..

Copie d'une lettre de lord Stanhope à M. le duc de la Rochefoucauld.

Du 6 novembre 1789.

C'est avec une grande satisfaction que j'ai l'honneur de vous envoyer deux résolutions unanimes d'une assemblée très-nombreuse et trèsrespectable, de la société établie en Angleterre, pour célébrer la fameuse révolution de 1688. Ces motions ont été reçues avec l'approbation la plus marquée, et des acclamations réitérées. Oserai-je vous prier, de la part de l'assemblée, de présenter ces résolutions à l'Assemblée nationale de France? Je vous prie de me croire avec le plus grand respect et sincère attachement,

Monsieur le duc,

Votre très-humble, etc.

Signé : Stanhope.

Extrait d'un billet du docteur Price à M. le duc de la Rochefoucauld.

Stackent, près Londres, le 9 novembre 1789. L'adresse de félicitations à l'Assemblée nationale de France qui se trouve ci-jointe, ayant été proposée par le docteur Price, il espère que le duc de la Rochefoucauld ne trouvera pas mauvais qu'il l'accompagne de quelques lignes, pour l'informer qu'elle a été adoptée, avec une ardeur que l'on peut difficilement exprimer, par une assemblée composée du comte de Stanhope, du lord-maire de Londres, de plusieurs membres du parlement d'Angleterre, et de plus de 300 personnes de distinction réunies, à l'occasion de l'anniversaire de la révolution anglaise, pour célébrer cet événement. Si les expressions de leur admiration, si les souhaits de prospérité qu'ils prient le duc de la Rochefoucauld de présenter pouvaient paraître une témérité de leur part, ils espèrent que l'Assemblée nationale de France voudra bien excuser cette démarche, comme l'effet d'une effusion de zèle dans la cause générale de la liberté publique, qu'aucunes considérations d'inconvenance n'ont pu retenir. Les représentants de la France travaillent pour le monde autant que pour eux, et le monde entier est intéressé à leur succès.

To the national Assembly of France.

The Society for commemorating the revolution in Great Britain, disdaining national partialities, and rejoicing in every triumph of liberty and justice over arbitrary power, offer to the national Assembly of France their congratulations on the revolution in that country, and on the prospect it gives, to the two first kingdoms in the world, of a common participation in the blessings of civil and religious liberty. They cannot help adding their ardent wishes for an happy settlement of so important a revolution, and at the same time expressing the particular satisfaction with which they reflect on the tendency of the glorious example given in France, to encourage other nations to assert the unalienable rights of mankind, and thereby to introduce a general reformation in the governments of Europe, and to make the world free and happy.

Resolved that the said resolution be signed by the chairman in the name of this meeting, and that it be by him transmitted to the national Assembly in France.

The two foregoing resolutions passed unanimously.

By order of the meeting.

Signed: SANTHOPE, chairman of the meeting. London, november 4th. 1789.

Traduction de la lettre de lord Stanhope, écrite, au nom d'une société de Londres, à l'Assemblée nationale.

La société réunie pour célébrer la révolution de la Grande-Bretagne, dédaignant toutes les préventions nationales, et se réjouissant de tous les triomphes que la liberté et la justice remportent sur le pouvoir arbitraire, présente, à l'Assemblée nationale de France ses félicitations sur la révo

lution opérée dans ce royaume, et sur la perspective qu'elle ouvre aux deux premiers empires du moude, de participer en commun aux bienfaits de la liberté civile et religieuse. La société ne peut s'empêcher d'unir ses vœux ardents pour l'heureux et complet succès d'une révolution si importante, et en même temps d'exprimer la satisfaction qu'elle éprouve en réfléchissant sur l'influence du glorieux exemple donné en France pour encourager les autres nations à assurer les droits inaliénables de l'humanité, à amener une réforme générale dans les gouvernements de l'Europe, et à rendre le monde entier heureux et libre.

Arrête que la présente déclaration sera signée par le président, au nom de la société, et adressée par lui à l'Assemblée nationale de France. Les deux résolutions ci-dessus ont passé à l'unanimité.

Par ordre de l'assemblée.

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M. de Cazalès propose la motion qui suit: « L'Assemblée nationale charge son comité de constitution de lui présenter le projet d'une loi qui définisse avec une scrupuleuse attention tout ce qui sera réputé crime de lèse-nation;

De déclarer que les écrits, que les paroles ne pourront être la matière d'un crime de lèsenation à moins qu'ils ne soient liés à une action, qu'ils ne l'aient préparée, accompagnée ou suivie;

« Dé déclarer enfin que nul crime autre que ceux expressément nommés par la loi ne pourra être qualifié du crime de lèse-nation. »>

M. Target. Le comité est déjà chargé de cette mission. Il vous aurait présenté son travail depuis quelque temps, si des objets du moment ne l'avaient empêché de le terminer. Je demande, d'après cette observation, que la motion du préopinant soit ajournée.

L'ajournement est ordonné.

M. le comte de Mirabeau. J'eus l'honneur de vous exposer, le 5 du courant, que votre décret sur les nouvelles formes de l'instruction criminelle n'était point encore en vigueur dans Marseille, et qu'une foule de citoyens pouvaient devenir à chaque instant les victimes d'une procédure suspecte sous mille rapports.

Je vous dénonçais que le 27 octobre, temps auquel votre décret aurait dû être exécuté, le prévôt de Marseille avait rendu un jugement suivant les anciennes formes que vous avez proscrites.

Vous ordonnâtes, Messieurs, qu'il serait provisoirement sursis à l'exécution de tout jugement en dernier ressort, rendu dans la forme ancienne postérieurement à l'époque où votre décret aurait dû être exécuté, et que tout tribunal qui dans trois jours ne l'aurait pas inscrit sur ses registres, qui 1re SÉRIE, T. X.

dans la huitaine ne l'aurait pas fait publier, serait poursuivi comme coupable de forfaiture.

Le décret ne décidait pas un objet très-important pour les accusés: il annonçait implicitement que le jugement rendu le 27 octobre était nul; mais il ne prononçait pas cette nullité d'une manière expresse; il n'ordonnait pas de faire juger une seconde fois la même question par d'autres juges, et, comme il s'agissait de la récusation du procureur du Roi et de l'assesseur du prévôt, le sort des accusés restait évidemment compromis. J'ai gardé quelque temps le silence, parce que j'attendais que le comité des rapports, qui a reçu une infinité de mémoires sur cet objet, vous les fit connaître ; mais cette affaire à entièrement changé de face par deux nouvelles circonstances, dont l'une m'était inconnue le 5 du courant, et dont l'autre était impossible à prévoir.

La première, c'est que le prévôt de Marseille, loin de traiter les accusés avec cette humanité que sollicitent vos nouvelles lois, les a fait enfermer dans une prison d'Etat; ils avaient été resserrés jusqu'ici dans une citadelle; ils ne sont plus aujourd'hui sous la sauvegarde de la loi, mais dans les anciens cachots du despotisme,

La seconde, c'est que bien loin d'exécuter vos décrets, le prévôt a écrit à MM. les députés de la ville de Marseille qu'il était impossible de rendre la procédure publique. S'il faut l'en croire, des témoins qui n'ont déposé que sous la foi du serment ne consentiront pas que leurs dépositions soient connues. Si la procédure devient publique dans le fort, le peuple s'en emparera; si le prévôt se rend dans le palais de la sénéchaussée, il aura des dangers à courir, même pour sa vie.

J'ai ouï dire que le prévôt avait exposé les mêmes motifs dans un mémoire qu'il a adressé à l'Assemblée nationale; je ne sais si ce mémoire existe, mais je puis assurer que la lettre à MM. les députés de Marseille est certaine.

Si le mémoire dont je parle a été envoyé, je demande qu'il soit sur-le-champ communiqué à l'Assemblée, parce qu'une affaire aussi grave ne peut souffrir aucun délai.

La lettre suffit pour m'autoriser à vous demander s'il est possible de laisser une procédure entre les mains d'un juge qui ne croit point à la sagesse de votre décret, qui refuse de l'exécuter, qui allègue pour s'en défendre les plus frivoles prétextes,qui craint de ne pouvoir soustraire les prisonniers aux réclamations d'une ville entière s'il ne les précipite dans des prisons d'Etat, qui ne peut exercer ses fonctions que dans un fort, qui craint encore que ce fort ne soit enlevé, qui a admis des témoins tellement suspects qu'il n'ose espérer qu'il veuillent rendre leurs dépositions publiques, qui a choisi deux juges tellement odieux qu'il ne peut répondre même de leur vie si la procédure se fait dans le palais de justice.

Necroyez pas, Messieurs, que je veuille inculper directement le prévôt. C'est un militaire digne de l'estime de ses concitoyens; mais il est excusable d'ignorer les formes de l'instruction criminelle, et il les ignore. Forcé de choisir un assesseur et un procureur du Roi, forcé de confier à d'autres qu'à lui-même les fils tortueux d'une procédure compliquée, le choix qu'il a fait a rendu ses bonnes intentions inutiles, et sa probité personnelle ne peut plus rassurer contre les plus coupables er

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