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COUR D'APPEL D'ORLÉANS.

Un exploit contenant acquiescement à une demande judiciaire doit-il, à peine de nullité, être signé par la partie? (Rés, nég.) A

RIFFAUT, C. BLANVILLAIN.

pas sur

Un sieur Riffaut, ancien notaire, avait, en l'an 7, formé une demande contre un sieur Blanvillain, en paiement d'une somme de.... pour frais et honoraires. Il ne suivit cette demande. Long-temps après, les héritiers du sieur Blanvillain, apprenant que Riffaut se proposait de reprendre sa procédure, et ayant intérêt à la faire déclarer non avenue, formèrent contre lui demande en péremption. Le sieur Riffaut vit qu'il n'avait rien à leur opposer; et, s'exécutant lui-même, il leur fit signifier son acquiescement à leur demande, avec des offres réelles pour les frais. Les héritiers Blanvillain prétendirent que l'acquiescement n'était pas régulier, parce que l'exploit qui le contenait n'était pas revêtu de la signature du sieur Riffaut.

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Le tribunal de Blois accueillit ce moyens mais le sicur Riffaut déféra ce jugement à la Cour royale d'Orléans, qui le réforma par ARRÊT rendu le 2 mai 1825, ainsi conçu

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« LA COUR, Considérant que les tribunaux ne peu-": vent accueillir d'autres nullités que celles textuellement prononcées par les lois; Considérant que l'acte d'acquiescement à une demande en péremption n'est assujetti à au-` cune formalité particulière; que, des termes dans lesquels est conçu l'art. 402 du C. de proc. civ., on ne peut induire que le défaut de la signature de la partie entraîne, en tel cas, la nullité de l'acte; Considérant que l'acquiesce→ ment signifié aux parties de Plasman, à la requête de Riffaut, par exploit de Loiseau, huissier, le 10 sept. 1821, est ́·d'ailleurs revêtu de toutes les formes voulues s pour la validité des exploits; MET l'appellation et ce dont est appel au néant; émendant, décharge l'appelant des condamna» ** tions contre lui prononcées; an principal, faisant droit

sans avoir égard aux fins et conclusions des parties de. Plasman, donne acte à Riffaut de son acquiescement à la péremption d'instance demandée par les parties de Plasman, et des offres réelles consignées en l'exploit susdate; déclare lesdites offres bonnes et valables, ordonne que les. parties de Plasman seront tenues d'en recevoir le montant, sinon autorise Riffaut à en effectuer la consignation dans les formes prescrites, et condamne lesdites parties de Plasman aux dépens.

COUR DE CASSATION: La donation, faite par contrat de mariage, d'une certaine somme, dont le donateur déclare se dessaisir dès ce moment, sur les plus clairs et apparens biens qu'il possède, et qui tɔutefois ne sera exigible qu'après son décès, constitue-t-elle ~ non une simple donation de biens à venir, mais une véritable donation entre vifs, passible du droit proportionnel? (Rés. áíf.) (1).

1

LA RÉGIE, C. PETIT DE BEAUVERGER.

Par le contrat de mariage du sieur Petit de Beauverger avec la demoiselle Mérothon, passé au mois de juin 1817, les père et mère du futur « ont fait donation entre vifs à leur fils d'une somme de 300,000 f., dont ils ont déclaré se dessaisir dès ce moment, sur les plus clairs et appáreus biens qu'ils possèdent, et qui toutefois ne sera ezigible qu'après le décès du survivant. Sur cette somme de : 300,000 f., 150,000 f. seulement seront productifs d'intérêts, à raison de 4 pour 100 par année, sans retenue. »

Le receveur de l'enregistrement a perçu un droit proportionnel de 70 c. et demi pour 100 sur les 300,000 f.,

Le sieur Petit de Beauverger a demandé la restitution des droits perçus. Il a soutenu qu'il ne s'agissait que d'une ⚫ donation à cause de mort, qui n'opérait aucun dessaisi sement de la part du donateur, puisque celui-ci pouvait priver le donataire de la chose en dissipant ses biens; que ce dernier n'avait pas même le droit de se ménager une ga(1) V.ce Journal, tome 1o de 1823, page 34.

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rantie, l'art. 1er de la loi du 3 sept. 1807 né permettant

pas

de prendre inscription en vertu d'une obligation non exigible; qu'enfin, il ne serait pas juste d'obliger un donataire à faire l'avance de droits d'enregistrement pour une libéralité qui, en définitive, pouvait se réduire à rien...

Un jugement du tribunal civil de la Seine, du 11 août 1820, avait accueilli cette prétention..

Mais, le 8 juillet 1822, ARRÊT de la Cour de cassation, section civile, M. Brisson président, M. Legonidec rapporteur, MM. Huart-Duparc et Nicod avocats, par lequel:

«LA COUR,—Sur les conclusions conformes de M. Joubert, avocat-général ; — Vu l'art. 4, §4, no rer, de la loi du 22 frim. an7; Attendu que les termes de la clause litigieuse sout précis et formels; qu'ils énoucent une donation entre vifs avec dessaisissement, dès ce moment, de la part des père et mère, sur les plus clairs et apparens biens qu'ils possèdent, et avec acceptation de la part du donataire; qu'il résulte de ces expressions que l'acte présente tous les caractères d'une véritable donation entre vifs, et non d'une donation à cause de mort; qu'il forme une transmission actuelle de la propriété et un droit effectif acquis au donataire, lequel droit ne saurait être détruit par la circonstance que l'exigibilité est suspendue jusqu'au décès du survivant, ou par le défaut de paienient d'intérêls ou de stipulation d'aucune sûreté ou garantie; que ce sont là des considérations distinctes et indépendantes de l'existence du droit; que l'avis du conseil d'Etat du 22 déc, 1809, relatif à des donations de biens présens et à venir,. et aux art. 1984, 1085, 1089 et 1090 du Code civil, est entièrement étranger à l'espèce, où il s'agit d'une véritable donation entre vifs et de l'art. 1081 du même Code; qu'il y avait donc ici lieu à l'application des art. 4, et 69, S4, noer, de la loi du 22 frim. an 7, et qu'en se refusant à la prononcer et en ordounant la restitution de la somme per çue en vertu desdits articles, le jugement attaqué a contrevenu aux dispositions ci-dessus rappelées; CASSE, ete. D

COUR DE CASSATION

La remise d'une dette, faite par le dépôt des titres et de la quittance dans les mains d'un tiers, pour être livrés au débiteur, en cas de décès du créancier, est-elle valable? (Rés. aff.)

LA DAME AUDOUIN, C. ARDANT-MARSAC.

Le sieur Hyacinthe Ardant était créancier du sjear ArdantMarsac son frère d'une somme de 18,000 f. pour le prix de la vente qu'il lui avait faite de tous ses droits héréditaires.

En juin 1815, Hyacinthe Ardant, qui était militaire, se rendit à l'armée réunie dans les plaines de Waterloo. Mais auparavant, il laissa entre les mains du sieur Duclos une quittance de la somme de 18,000 fr., qu'il chargea ce dernier de remettre, avec ses titres, au sieur Ardant- Marsac sou frère, dans le cas où il périrait dans les batailles qui allaient avoir lieu, Puis il écrivit à son frère une lettre, à la date des 6, 7 et 8 juin, dont voici deux fragmens ; « A propos de mourir, j'ai déjà songé à des arrangemens. Sije ne partais pas si précipitamment, le même courrier te porterait mes intentions, mais le premier, séjour serà employé à cette affaire. Sois bien persuadé que mon intention est. que personne ne te chagrine après ma mort : il y a vingt ans que j'ai les mêmes idées. « J'ai laissé entre les mains de M. Duclos, rue Grenelle-Saint-Honoré, à Paris, un reçu de la somme que tu me dois, ainsi que les contrats qui constatent que tu m'es redevable. Il a ton adresse, ou tu peux lui écrire. Tout cela te sera rendu, en cas d'accident. » Il est nécessaire de remarquer que cette lettre, tout entière de la main d'Hyacinthe Ardant, ne porte pourtant pas sa signature.

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Il paraît que Hyacinthe Ardant a eu le sort qu'il avait ̈· prévu, et qu'il est mort à Waterloo. Le sieur ArdantMarsac et sa sœur, ses présomptifs héritiers, se sont fait envoyer en possession provisoire de ses biens.

Question de savoir, entre eux, quel était le mérite de
Tome 67 et 3 de 1823.
Feuille 4.

Ja remise ou de la disposition conditionnelle faite par Hyacinthe Ardant en faveur de son frère.

Ce dernier s'en tint d'abord à la quittance confiée par son frère au sieur Duclos ; il ne fit pas connaître la lettre que nous avons rapportée.

Un jugement du ribunal civil de Limoges, du 9 août 1819, considérant cette quittance comme une libéralité déguisée, la déclara valable, en se fondant sur la jurisprudence bien constante de la Cour de cassation, et la doctrine des auteurs les plus estimés.

Il y eut appel. Ici le sieur Ardant-Marsac fit connaître la lettre des 6, 7 et 8 juin.

La cour ordonna préparatoirement son interrogatoire sur faits et articles. Il affirma dans cet interrogatoire qu'à peine eut-il reçu la lettre par laquelle son frère l'instruisait de ses intentions, qu'il lui écrivit pour lui faire connaître qu'il acceptait sa libéralité et pour lui en exprimer sa gratitude.

D'un autre côté, sa sœur,la dame Audoin, prit des conclusions tendantes à ce que la quittance fût déclarée nulle, en tant qu'elle serait considérée comme libéralité ou remise de la dette, déposée dans les mains d'un tiers pour n'avoir d'effet que dans le cas où le déposant viendrait à mourir.

Mais, par arrêt du 9 août 1821, la Cour royale de Limoges confirma le jugement de première instance: « Attendu qu'il est établi par les documens qu'ArdantMarsac a produits dans,sa comparution personnelle que ladite quittance ne devait produire son effet que dans le .cas où Hyacinthe viendrait à mourir; qu'il s'ensuit que cette quittance (laquelle a été fournie par ce dernier sans que la somme y énoncée ait été comptée) était un acte de pure libéralité de la part de Hyacinthe envers son frère, à qui il remettait conditionnellement sa dette, et que question du procès est de savoir si cet acte peut ou non Attendu produire son effet ; que la condition casuelle' que Hyacinthe, en partant pour l'armée, mettait à sa li

la

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