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ment d'hypothèque, que le dernier de ces articles autorise les tribunaux à ordonner, il s'en serait référé à l'effet général des jugeinens.

L'art. 2129 détermine comment l'hypothèque spéciale peut être constituée, et il ajoute : Les biens à venir ne peu vent pas être hypothéqués. Rien ne serait donc plus facile que d'éluder cette prohibition, si, pour obtenir cette hypothè que générale, et par conséquent sur les biens à venir, il suffisait de traduire le débitear devant les tribunaux sui l'exécution d'une obligation contenant hypothèque spéciale,

Dans le cas particulier, le jugement du 18 août 1818, qui fait toute la base de l'arrêt attaqué, a déclaré nulles les quittances que le débiteur opposait, et, sans y avoir égard, il a ordonné la continuation des poursuites. Mais il n'a rien ajouté au titre de la créance, qui était authentique et exécutoire; il n'a prononcé aucune condamnation nouvelle: il s'est borné à déclarer les poursuites légitimes. Un pareil jugement était done incapable de produire hypo thèque. L'arrêt attaqué a donc faussement appliqué l'art. 2123 du Code civil, et méconnu les principes consacrés, en matière de privilége et d'hypothèque, par les art. 2095, 2103, 2117 et 2129 du même Code, soit en convertissant une hypothèque conventionnelle en une hypothèque judi ciaire, et en attribuant par suite une hypothèque générale à un créancier qui n'avait qu'une hypothèque spéciale limitée, soit en faisant produire l'hypothèque à un jugement qui n'ajoutait rien à l'obligation primitive, et ne prononçait réellement aucune condamnation.

Du 29 avril 1825, ARRÊT de la Cour de cassation, section des requêtes, M. Lasaudade président d'âge, M. de Menerville rapporteur, Me Champion avocat, par lequel

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LA COUR,-Sur les conclusions de M. Cahier, avocat. général; - Attendu que le jugement du 18 août 1818, qui en reconnaissant l'existence de la créance dont s'agit a or-" donné que les poursuites commencées seraient continuées," porte en lui-même une condamnation qui, apx termes de

l'art. 2123 du Code civil, à créé l'hypothèque judiciaire qui résulte des jugemens, soit contradictoires, soit par défaut, définitifs ou provisoires, en faveur de celui qui les a obtenus; - REJETTE, etc. »

Observations. Il nous seruble que le demandeur a trop insisté sur la question de savoir si le créancier qui poursuit coutre son débiteur l'exécution d'an titre qui lui confère une hypothèque spéciale peut obtenir une hypothèque générale par l'effet du jugement qui prononce sur les entraves opposées à cette exécution. L'affirmative n'est pas susceptible de difficulté pour le cas où le jugement impose audébiteur quelque obligation nouvelle, ou prononce contre lui des condamnations. Car il impliquerait contradiction que celui qui a voulu des sûretés avant de contracter fût traité moins favorablement de la justice, quand il ré clame l'exécution du contrat, que celui qui a suivi la" foi du débiteur. Mais ici le point de difficulté consistait à savoir si un jugement qui, rejetant une exception opposée par le débiteur à l'exécution du titre, se borne à ordonner la continuation des poursuites, est véritablement attributif d'hypothèque. La raison de douter vient de ce que pareil jugement n'ajoute rien à l'obligation préexistante, et qu'en ordonnant simplement la continuation des poursuites, il semble ne prononcer aucune condamnation directe contre le débiteur, ni lui imposer aucune obligation nouvelle. La question, au surplus, se trouve tranchée par l'arrêt que nous venons de rapporter. La Cour régulatrice a considéré que le jugement du mois d'août 1818, par cela seul qu'il écartait l'exception du paiement que les mariés Dailly voulaient faire résulter des quittances produites dans la cause, portait une condamnation, de nature à produire l'hypothèque judiciaire. Et en effet, cette conséquence paraît juste ; car rejeter les titres que le débiteur oppose en preuve de sa libération, et ordonner qu'il sera tenu de payer, c'est bien prononcer contre lui une véritable condamnation.

Tome 67 et 3 de 1823.

B.

Feuille 2°.

COUR DE CASSATION.

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Ya-t-il substitution prohibée dans la disposition par laquelle un donateur stipule le droit de retour pour lui et pour un tiers, dans le cas où le donataire viendrait à mourir sans postérité ? (Rés. nég.)

Ne doit-on voir, au contraire, dans une pareille clause, qu'une stipulation de retour faite hors des termes dans lesquels elle est permise par la loi, et qui doit seulement être réputée non écrite sans que cette nullité influe sur la donation ellemême ? (Rés. aff.)

SAINT-ARROMAN, C. LES FRÈRES SAINT-ARROMAN.

Nous avons rapporté, t. 1o de 1821, p.241, un arrêt de la Cour royale de Toulouse, du 10 août 1820, quijuge ces ques tions en sens inverse. On s'est pourvu en cassation contre cet arrêt, et c'est le résultat de ce pourvoi que nous allons faire connaître.

Commençons par rappeler que, par le contrat de mariage du sieur Symphorien Saint-Arroman, en date du 7 janv. 1,806, son père lui a fait une donation du quart de ses biens présens et à venir, avec la clause suivante : « Réservant, ledit sieur Saint-Arroman père, le droit de retour dudit quart donné, tant en sa faveur qu'en celle du sieur Paul Saint- Arroman, son autre fils, au cas que le futur n'ait point d'enfans ou que ceux-ci décèdent dans leur minorité; »

-Que, le sieur Saint-Arroman père étant décédé, le sieur Symphorien a demandé à prélever le quart de la succession, en vertu de la donation portée en son contrat de ma riage; mais que les autres enfans ont demandé la nullité de cette donation, comme renfermant une substitution prohibée en faveur du sieur Paul Saint-Arroman, second fils du donateur; - Enfin, que cette nullité, rejetée en première instance, fut accueillie sur l'appel par l'arrêt cité plus haut, rendu par la Cour royale de Toulouse, par les

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motifs que le retour stipulé au profit d'un tiers forme une substitution prohibée, puisqu'il ne peut recueillir qu'en second ordre ; que le premier donataire doit lui conserver `et rendre; que d'ailleurs la stipulation dont il s'agit n'était pas limitée au seul cas de survie du donateur, puisqu'elle ne l'excluait point: d'où l'on devait admettre que le premier donataire devait d'abord recueillir, et que ce n'était que de sa main que le second gratifié pouvait recueillir; que c'était donc un véritable ordre successif qui avait été établi, et partant qu'il y avait substitution prohibée.

C'est contre cet arrêt que le sieur Symphorien SaintArroman s'est pourvu en cassation.

Me Naylies, avocat du demandeur, a commencé par éta blir que le retour et le fideicommis sont essentiellement dif férens. Le retour, tel qu'il a toujours existé, a pour objet de faire retourner les biens donnés, soit après la mort du donataire, soit après celle de ses enfans, au donateur, et quelquefois, du moins dans l'ancienne jurisprudence, à ses héritiers, et même à des étrangers. Le fideicommis, au contraire, ne faisait jamais remonter les biens substitués vers leur source; ils partaient du grevé au premier appelé, et de celui-ci à un autre successivement, tant que les degrés de la substitution n'étaient pas épuisés, ou qu'elle n'était pas éteinte par la défaillance des appelés. Le substituant ne pouvait pas se gratifier et se substituer lui-même ; ses héritiers, s'ils n'étaient pas compris dans la vocation, ne pouvaient recueillir les biens substitués qu'en qualité de plus proches parens et héritiers du dernier appelé, quand la substitution avait parcouru tous ses degrés. Il faut donc bien se garder d'étendre et d'appliquer au retour les lois et les règles du fideicommis : il y a entre eux plutôt antinomie qu'analogie.

Cela posé, le Code civil n'admet le retour conventionnel qu'en faveur du donateur. L'art. 951 porte que ce droit ne peut être stipulé qu'au profit du donateur seul. Le droit de retour étant ainsi limité au donateur, la stipulation

qui peut en être faite au profit de toute autre personne est censée, non avenue et nulle. C'est la conséquence nécessaire de la disposition restrictive de l'article précité. Tel est d'ailleurs le vœu précis de l'art. goo, ainsi conçu: Dans toute disposition entre vifs ou testamentaire, les conditions impossibles, celles qui seront contraires aux lois et aux bonnes mœurs, seront réputées non écrites. »

Il s'ensuit qu'après avoir stipulé pour lui le retour du quart de ses biens, qu'il donne à son fils aîné, le sieur Saint-Arroman père n'aurait pu valablement étendre le bénéfice de la stipulation à son autre fils, Paul Saint-Arroman. Cette extension, si toutefois elle a été faite, est réputée non écrite; elle ne pourra produire d'effet, si le ́ donataire et ses descendans meurent avant Paul SaintArroman. Mais la donation faite au profit du sieur Symphorien Saint-Arroman reste intacte; car, d'une part, en disant, en général, que toute disposition entre vifs ou testamentaire, contraire aux lois, est réputée non écrite, ¡ le Code civil n'ajoute pas que sa disposition principale, Jaquelle celle-là pourra accessoirement se rattacher, sera également nulle; et d'une autre part, en disant que le retour ne pourra être stipulé qu'au profit du donateur seul, le Code n'ajoute pas non plus que la nullité de la stipulation du retour en faveur de toute autre personne viciera la donation et la rendra nulle. Utile per inutile non vitiatur. La validité de la disposition principale, c'est-àdire de la donation, est absolument indépendante du retour que le donateur se réserve dans le cas prévu, et à plus forte raison de la stipulation de ce droit en faveur d'un tiers. Cette clause ne peut même imposer au donataire aucune obligation envers le tiers, puisqu'elle est réputée. non écrite et nulle.

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Et comment le législateur aurait-il entendu faire résulter la nullité de la donation, de la stipulation du retour, en faveur d'un tiers qu'il proscrivait? Il n'a eu en vae, il ne s'est proposé, en limitant ce droit au seul donateur, par

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