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se faire constituer prisonnier, armer en sa faveur tous les ennemis du genre humain, nécessiter entre les Français et ces mangeurs, d'hommes une capitulation dans laquelle on auroit rappelé son mé, moire et la séance du 23 juin; enfin, d'un côté, il eût abdiqué la royauté constitutionnelle, pour reconquérir un sceptre de fer; et de l'autre, il se fût servi de cette même royauté, de cette sacrilége inviolabilité pour mettre tout à feu et à sang, pour porter le fer et la flamme au sein de soa pays. Ouvrons l'histoire des tyrans, et qu'on en eite un seul qui ait tracé des projets aussi détestables que le dernier des rois de France.

Chaque jour, chaque séance il arrive à l'assemblée nationale de nouvelles preuves de la déloyauté, de sa perfidie; mais ce que personne ne dit, une observation que personne n'a faite, c'est qu'ea effet, dans la nuit du 20 au 21 juin, il y eut à Paris un enlévement qui est un grand crime dans le systême monarchique de l'assemblée nationale; cet enlévement est colui de la personne de l'héritier présomptif du trône; les auteurs sont Louis et sa digne compagne Antoinette de Hasbourg. Et ce fait est si grave, aux termes de la constitution, si attentatoire à l'ordre établi par l'assemblée, que même en abdiquant, même en ne faisant aucune protestation, le ci devant roi, se seroit exposé à une grande peine pour avoir enlevé ce dépôt à l'état le fils d'un roi, qui a sanctionné la loi de l'hérédité, ne lui appartient plus, il est à l'état. Oa aura beau dire que lo dauphin n'est pas moins son fils, que la nature lui a dicté la loi de l'emmener, qu'on ne peut le punir d'avoir été père: les organes de la loi lui répondront toujours qu'il étoit roi, qu'il avoit formellement consenti à porter ce nom, et qu'en acceptant ce caractère il avoit de fait et nécessairement renoncé aux droits d'être père, d'être homme. Les rois ne sont que des rois ; un bourreau

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qui voudroit être sensible, qui refuseroit d'égorger son semblable, seroit déchu de sa place.

Il ne reste plus qu'une objection aux partisans du crime de Louis XVI: il n'avoit pas, disent-ils, sanctionné les décrets qui déterminent sa résidence: or les décrets n'ont force de loi qu'après la sanction; conséquemment il est faux de dire qu'il ait contrevenu aux loix en se retirant, soit chez l'étranger, soit dans un coin du royaume. La réponse est facile tous les décrets qui le regardent, lui, individuellement, ne sont, en aucune manière, sujets à la sanction, mais purement et simplement à l'acceptation or les décrets dont il s'agit ont été acceptés, ou ne l'ont pas été; s'ils ont été acceptés, l'objection est nulle; s'ils ne l'ont pas été, Louis n'est pas, n'a jamais été roi, parce qu'il n'a pu l'être qu'à ces conditions, et, aujourd'hui qu'il a protesté, il est trop tard pour accepter: on sait qu'il est un fourbe.

Il est donc clairement démontré que Louis XVI et déchu de la couronne; qu'il a commis une foule de crimes de lèse nation, que non-seulement il n'est pas un honnête homme, mais qu'il n'est pas même un rei excusable: le glaive de la loi est suspendu sur sa tête; il ne reste plus qu'à examner si la politique exige que nous le tenions encore quelques momens suspendu. Qu'avons nous dit, la politique? Nous ne la conhoissons plus ce monstre des cours; justice, vérité, voila nos dieux. Or il est de vérité que Louis a fui; qu'il a protesté contre la constitution; qu'il étoit attendu à Orval, abbaye du Luxembourg et non à Montmédi; qu'il a défendu à ses ministres de signer aucun acte en son nom, jusqu'à ce qu'ils eussent reçu des ordres ultérieurs, qu'il a enjoint au garde du sceau de l'état de le lui renvoyer quand il en seroit requis de sa part: et il est de justice, 1°. de le déclarer déchu de la couronne, parce qu'il a lui même expressément dit en partant qu'il ne consentoit pas à la porter aux clauses de la cons

titution; il ́a rompu le contrat, il a voulu être un ryran, il a prouvé que les peuples libres ne pouvoient avoir des rois. 29. Comme il ne s'est pas borné à rompre le pacte qu'il avoit juré en face de l'Eternel et d'une grande nation, le 14 juillet dernier; qu'il a appelé à la sédition, qu'il a compromis la sureté de l'état, il est également de la justice qu'il soit puni de ses forfaits.

Pour ce qui est de la politique, nous n'avons qu'une seule chose à dire à l'assemblée nationale. Nous aurons la guerre.

Nous l'aurons si Louis souille encore une fois le trône.

Nous l'aurons s'il est détrôné.

Nous l'aurons si la loi exerce sur lui sa vengeance.

Nous l'aurons si nous conservons la monarchie. Nous l'aurons si nous établissons un conseil de régence.

Nous l'aurons si nous nous constituons en république.

Mais au premier cas, le chef de l'armée sera notre plus mortel ennemi; au second, ce même ennemiconservera un parti nombreux; au troisième, sa décolation ou son emprisonnement perpétuel ne purge pas encore la France du germe de la tyrannie; le petit louveteau sera élevé aux frais de l'état pour venger un jour la mort de son pere; au quatrième, nous serons vaincus, parce qu'une monarchie, telle qu'on a voulu l'établir en France, ne peut se soutenir que par un accord de probité entre les représentans du peuple et le chef du pouvoir exécutif, et que la probité est incompatible avec nos prérogatives royales: un monarque, tel que l'avoit décrété la nouvelle constitution de France, ne pouvoit être qu'un homme nul, ou un tyran; au cinquième, le conseil de régence n'aura ni assez d'activité, mi assez de volonté, parce qu'il n'agira qu'en sous-ordre; ou s'il a de l'activité, il y aura tout à craindre que ce ne soit pour sus

citer des factions; au sixième et dernier cas, nous vaincroas, parce que nous serons libres, dé gagés de toute entrave; il ne nous faut qu'un seul chef du pouvoir exécutif, mais un chef à temps, un chef impuissant par lui même, qui n'ait d'autorité que celle de la loi. Il est temps, il est plus que temps de frapper un granp coup; que la tête de Louis tombe; ou bien qu'ou la dédaigne, elle est assez méprisable: que le trône et tous les pompeux ́hochots de la royauté soient livrés aux flammes; que l'assemblée nationale de la monarchie fasse place au sénat de la république; que celui-ci adresse un manifeste à tous les tyrans de l'Europe; qu'il invite tous les peuples à la liberté ; qu'à la premièra hostilité d'immenses légions de nos nouveaux républicains aillent exterminer tous les despotes, et planter le drapeau de la liberté jusque dans le fond de la Germanie: nous serons libres alors, nous préviendrons la guerre qu'on veut apporter chez nous, et la France aura la gloire, inconnue jusqu'à ce jour, d'avo r, non pas conquis l'Europe à la France, mais conquis l'univers à la liberté, en le purgant des rois, empereurs et tyrans de toute espèce.

Lettre de Bouillé à l'assemblée nationale.

Dans la séance de jeudi 3o, M. Noailles fit leo ture d'une lettre signée Bouillé, datée de Luxembourg, du 26 juin, et adressée au président de l'assemblée nationale. Cette longue épitre est un tissu de bravades et d'injures grossières; on nous y menace du manifeste des souverains ligués, de l'invasion d'une armée étrangère, de ne laisser pierrn sur pierre à Paris, etc.

Que cet écrit soit authentique ( plusieurs membres de l'assemblée nationale ont assuré he point reconnoître la signature de Bouillé) ou qu'il sot controuvé, ce qui est bien plus probable, il y a deux choses essentielles à remarquer. La première, No. 103.

D bis

L

c'est le soin qu'on y prend de disculper Louis XVI, en disant Le roi n'a pas fait les ordres qu'il a donnés, c'est moi seul qui ai tout ordonné. Comment concilier cette déclaration de Bouillé avec celle de Louis, qui, le mardi 28, fait venir exprès trois commissaires de l'assemblée nationale pour déclarer qu'il avoit donné des ordres à M. de Bouillé à l'effet d'assurer son voyage à Montmédi. N'y a-t-il pas là une contradiction manifeste? Voici le mot de l'énigme.

Dans l'amnistie générale que Louis semble demander pour tous ceux qui ont favorisé son évasion, Bouillé avoit été oublié; on n'étoit pas en core sûr qu'il fût en pays étranger, et en cas qu'il 'fût arrêté, il falloit lui ménager un faux-fuyant, en déclarant qu'il n'avoit agi que d'après les ordres du roi; c'est ce qua fait Louis. Mais aujourd'hui que Bouillé est dans le Luxembourg et hors de l'atteinte de loix; aujourd'hui que la France entière demande justice de l'attentat de Louis XVI, et qu'elle dé igne ses complices, on veut nous faire prendre le change sur la vérité des faits; on s'embarrasse peu du démenti formel donné à la déclaration du 28; on veut nous effrayer par des menaces extravagantes, et charger le seul Bouillé de l'iniquité des grands coupables. Mais personne ne sera dupe de cette ruse; le peuple français vengera les crimes qui ont été commis, et si Bouillé se présente avec une armée ennemie, dix mille bras seroat levés pour aller le poignarder dans sa teute.... Sa tête exposée sur les remparts d'une de nos places de guerre, apprendra aux tyrans et aux conspirateurs ce qu'il en coûte pour attaquer une nation libre qui a juré de ne prendre les armes que pour sa défense.

Ce qui doit davantage nous mettre en garde contre la prétendue lettre de Bouillé, c'est la manière adroite dont on y fait mention de son digne cousin la Fayette. C'est une chose neuve que de voir le soi-disant général parisien taxé d'être chef d'une faction républicaine. Citoyens! ne vous y

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