ARCHIDUCHÉ D'AUTRICHE. L'archiduché d'Autriche, la province qui donne son nom à toute la monarchie, est borné, à l'est, par la Bavière; au nord, par la Bohême et la Moravie; à l'est et au sud-est, par la Hongrie; au sud, par le duché de Styrie. Čette contrée, qui a près de deux mille lieues en superficie, est également partagée du sud au nord par l'Ens qui, après avoir pris sa source non loin de Radstadt, court de l'ouest à l'est, presque sur une ligne droite, à travers les montagnes, et tourne tout à coup au nord pour se jeter dans le Danube. La partie de l'archiduché à l'ouest de l'Ens prend le nom de Haute Autriche; la partie à l'est, celui de Basse Autriche. Les montagnes du midi de la Bohême et les Alpes noriques forment une belle et large vallée, au fond de laquelle coule de l'ouest à l'est le Danube, ce roi des fleuves de l'Europe. Parfois ces montagnes se prolongent jusqu'aux bords du fleuve, qui alors gronde en perçant des masses énormes de rochers couvertes de forêts antiques, au-dessus desquelles on voit s'élever encore çà et là un ermitage, une vieille abbaye, ou la tour abandonnée et croulante d'un vieux château féodal. Lorsque le Danube entre en Autriche, à quelques lieues de Passau, il creuse son lit à travers les rochers. A droite et à gauche sont des montagnes, dont quelques-unes semblent perpendiculaires au fleuve, et au milieu du courant des masses granitiques où se brisent ses vagues, et dont Pune, le Jochstein, porte une chapelle surmontée d'une croix, et marque la limite entre les possessions autrichiennes et bavaroises (*). Cette simple chapelle, placée dans ce lieu pittoresque pour fixer la frontière des deux Etats, n'annonce point ces longues et sanglantes inimitiés qui faisaient dire à (*) Cette chapelle, qui fixait d'une manière si pittoresque les limites des deux pays, se trouve, depuis la paix de Vienne, à quelque distance de la frontière, qui a été reculée jusqu'au delà de Engelhartzel. l'empereur Maximilien que si l'on faisait bouillir ensemble du sang bavarois et du sang autrichien, on les verrait bientôt sauter dehors, l'un à droite, l'autre à gauche. COURS DU DANUBE. Les villes les plus importantes que le Danube rencontre sont Lintz, Stevereck, Ens, près de l'embouchure de la rivière du même nom; Grein, que domine un vieux château; Ips, Pochlarn, Durrestein, Tulln,Vienne, Haimbourg. A Grein, se trouve le célèbre passage du Strudel. Les montagnes se rapprochant du Danube baignent leur pied dans le fleuve, et le pressent entre elles de manière à rendre sa course plus impétueuse (*). Si l'on descend une demi-lieue au-dessous de Grein, on se trouve tout à coup transporté au milieu d'une nature sauvage et terrible. Le fleuve gronde sourdement dans le lointain, et se resserre encore entre des rochers groupés d'une manière effrayante, le long de ses rives, comme s'il voulait réunir toutes ses forces pour franchir ou emporter les obstacles qu'il va trouver au Strudel. Cette gorge étroite et obscure, qu'on appelle le Strudel, et dont le passage est encore dangereux malgré les travaux qu'on y a exécutés en 1778, est un canal formé par les montagnes du rivage et l'ile de Werder, longue de quatre cents toises et large de deux cents. A la tête de l'île, les rochers qui en forment la base se relèvent menacants pour faire tête au fleuve qui vient se briser contre cette muraille indestructible; à droite sont des bas-fonds qui rendent la navigation impossible; à gauche le Strudel. Ce passage, large de quatre-vingt-dix toises, est encore partagé par des rochers fleur d'eau en trois parties, dont la plus voisine de l'ile est seule praticable; encore (*) Le cours du Danube est presque partout très-rapide. La distance de Lintz à Vienne, qui est de soixante lieues, se parcourt aisément en un jour et demi ou deux jours au plus. faut-il beaucoup d'adresse pour naviguer dans cet étroit canal tout bordé d'écueils. Le Strudel passé, tout n'est point fini pour le pilote: deux cents pas au-dessous de Werder le Danube rencontre une nouvelle barre de rochers qui le force de tourner à l'est. Ici la colère du fleuve tourmenté par tant d'obstacles devient terrible. Les eaux tourbillonnent sur elles-mêmes avec violence, puis lancent le bateau avec une effrayante rapidité hors de ce dangereux passage. A quelque distance au-dessous du Wirbel (c'est le nom de ce dernier tournant), l'on voit encore aujourd'hui les ruines d'une ancienne forteresse. La position est bien choisie. Le maître du manoir dut plus d'une fois hériter du navigateur imprudent dont le navire s'était brisé contre les rochers du Strudel. Les châteaux du Rhin descendent quelquefois dans le fleuve, et semblent encore, comme au bon temps du moyen âge, demander rançon à tous ceux qui passent. Les seigneurs des bords du Danube n'avaient point tant de frais à faire, ils se placaient au-dessous de quelque pas difficile, laissaient faire le fleuve, et n'avaient que la peine de ramasser les bris. Tous ces châteaux sont aujourd'hui en ruine, et n'ont plus d'intérêt que pour le voyageur qui les visite avec curiosité et interroge leur histoire souvent si dramatique. Celui de Durrestein, que l'on rencontre en suivant le cours du Danube, aurait bien des choses à raconter si l'on en croyait les vieilles traditions. C'est lui, dit-on, qui servit de prison à Richard Coeur de Lion, lorsque ce roi d'Angleterre tomba entre les mains de l'archiduc d'Autriche, dont il avait par mépris jeté l'étendard dans la boue des fossés de Saint-Jean d'Acre. Plus loin est celui d'Agstein, construit sur un immense rocher qui s'avance comme une arche à demi-ruinée au-dessus du fleuve. Les anciens seigneurs de ce domaine furent longtemps puissants; leur juridiction s'étendait jusqu'en Bohême et jusqu'au Markfeld. `C'étaient presque des princes; mais leur cruauté les perdit. Profitant de l'abaissement des empereurs de la maison de Hohenstaufen, ils se livrèrent à tous les excès, firent révolter contre eux leurs vassaux, et se vengèrent en pillant impitoyablement tous ceux qui passaient à leur portée. Dans une tour dont la vue dominait tout le cours du fleuve, veillait, jour et nuit, un homme d'Agstein, qui sonnait du cor sitôt qu'un bâtiment paraissait. Alors bien heureux qui échappait! car le maître descendait avec ses hommes d'armes et emmenait tout au château, marchands et marchandises. Il se trompa cependant une fois : il croyait ne piller que des manants; mais sous le pont étaient des chevaliers du duc d'Autriche, qui conduisirent à Vienne le seigneur d'Agstein. Une funeste destinée semblait attachée à la possession de ce domaine; étant passé dans les mains d'une autre famille, il continua d'être l'effroi de la contrée, et les nouveaux maîtres ne furent bientôt connus que sous le nom terrible de Schreckenwald. Ceuxci ne se contentaient point de piller. les marchands; l'un d'eux se plaisait à les suspendre en l'air, où ils devenaient tout vivants la proie des corbeaux, ou bien il les envoyait derrière son jardin de roses (Rosengarten), fermait sur eux une porte de fer, et les laissait, sur la pointe d'un immense rocher perpendiculaire, choisir leur genre de mort, la faim ou un saut de deux cents pieds. Heureusement pour les marchands, une des victimes de ce terrible châtelain échappa comme par miracle. C'était un noble homme qui avait un bon lignage; il conta son aventure, rassembla quelques chevaliers, et s'empara par surprise du seigneur d'Agstein, qui paya de sa tête ses cruautés. Cependant ce manoir restait toujours la terreur de la contrée; mais un comte de Stharemberg, profitant de l'absence du seigneur, occupé à une expédition lointaine, s'empara par surprise de son repaire, et le château d'Agstein resta enclavé dans les possessions de cette famille. Il reste aujourd'hui peu de chose de ce château. Pour arriver jusqu'aux ruines, il faut presque trois heures de marche, par un étroit sentier, le long des précipices et des rochers que les vagues du Danube battent sans cesse. Avant de parvenir à la partie principale, l'on rencontre successivement trois enceintes assises sur des rochers, dont quelques-uns se relèvent dans la première cour, et soutenaient jadis une tour isolée, où pouvaient se retirer, par des souterrains, les troupes chargées de garder le mur et la porte extérieurs. Cette tour défendait les approches du second mur, qui domine toute la première enceinte, et dont il fallait s'emparer pour pénétrer dans la troisième cour. Là se trouvaient un grand nombre de salles et de caves servant au besoin les de prison. Maîtres des trois cours, assiégeants ne l'étaient pas encore du château véritable, qui, placé sur la pointe des derniers rochers, ne communiquait avec les ouvrages extérieurs que par un souterrain taillé dans le roc et facile à défendre. Une telle forteresse ne pouvait être enlevée que par surprise ou par famine. On conçoit difficilement aujourd'hui comment des hommes riches et puissants pouvaient s'enfermer dans un si triste séjour; et cependant toute l'Europe, au moyen âge, était hérissée de pareils châteaux: alors l'homme s'emprisonnait lui-même volontairement; il croyait n'avoir jamais assez de murailles pour se défendre et n'osait même s'aventurer à quelques pas de son pont-levis, s'il ne s'était couvert de cette autre muraille de fer, de ces armures qui émoussaient les lances et brisaient les haches d'armes. C'est qu'alors tous les liens de la société étaient rompus; c'est que tous se craignaient, et que, comme aux anciens temps de Rome, le voyageur et l'étranger étaient regardés comme ennemis (hospes synonyme d'hostis). Plaignons ces temps où régnait la force brutale; mais rappelons-nous toutefois, pour la grande cause du progrès de l'humanité, que derrière ces épaisses murailles s'est reformée la famille, que la femme y a repris son rang, que senti sa force et sa l'homme y dignité. A quelques lieues de Vienne se trouvent, sur les bords du Danube, les ruines du château de Greiffenstein, construit en 1136. Ce n'est plus qu'une longue tour solitaire, d'où personne ne descend plus que le voyageur qui va voir encore ses portes en fer et l'entrée de ses immenses souterrains. Là s'est passée, sans doute, plus d'une tragique histoire, mais le souvenir s'en est perdu (*). (*) Les gens du pays racontent cependant qu'il y a bien longtemps le château de Greiffenstein avait un seigneur du nom de Rheinhart. C'était un rude maître, à la parole brève, à la main prompte, dur pour ses vassaux et pour sa douce fille, la belle Ételina. Ételina avait dix-sept ans; tous les barons d'alentour vinrent bientôt, quittant cuirasses et hauberts, offrir leurs fiefs et leurs couronnes à la noble damoiselle du manoir de Greiffenstein; mais ce fut en vain. Ételina avait donné son amour au jeune et pauvre chevalier Rodolphe, que Rheinhart aurait à peine voulu pour écuyer. Cependant Rheinhart, appelé près de l'empereur, laissa sa fille sous la garde du chapelain qui l'avait élevée. Huit mois se passèrent sans qu'on apprit aucune nouvelle du comte. Mais un matin Ételina reçut un message lui annonçant la prochaine arrivée de son père avec l'époux qu'il lui destinait. Épouvantée de cette nouvelle, elle confie son secret à Werner, le suppliant de la sauver de l'époux qu'on lui destine et de la fureur de son père. Le bon chapelain, pour gagner quelques jours, la conduit, avec Rodolphe, dans un secret souterrain, avec un panier de pain et une cruche d'huile. Le chapelain espérait fléchir le comte par ses prières. Mais Rheinhart ne put rien entendre; il voulut savoir le lieu où étaient cachés les deux amants, et, sur le refus de Werner, il le fit descendre, avec une corde, par une trappe de fer, au fond d'un cachot creusé à trente pieds au-dessous du sol; en même temps, il jura d'y plonger sa fille, si jamais il la retrouvait. «Et puissé - je, dit-il, mourir à l'instant et errer jusqu'au jour du jugement, comme un fantôme, si jamais je lui pardonne. » Un an s'écoula, et Rheinhart, toujours sombre et triste, errait dans son châ teau, où personne ne venait plus. Or, voici qu'un jour, après une longue chasse, il vit tout à coup devant lui, sur les bords du Danube, un homme couvert de peaux de bêtes, Au delà de Vienne, le Danube quitte les montagnes pour courir à travers des plaines immenses qui annoncent déjà celles de la Hongrie. Là, plus de châteaux, plus de sites pittoresques couronnés par la vieille tour féodale; car là c'est la Marche, le pays ouvert, incessamment dévasté par les incursions des Slaves. Le grand fleuve semble avoir peine à quitter ces belles contrées: il tourne et retourne dans le Marckfeld; à chaque pas, il se partage pour former des îles nombreuses, entre lesquelles se remarque l'île Lobau, si célèbre dans nos annales militaires. Puis, reprenant enfin sa course impétueuse, il s'en va droit jusqu'à Presbourg, et quitte l'Autriche pour la Hongrie, où il va devenir comme une mer au milieu de trois cents lieues carrées de marais. HAUTE AUTRICHE. « La haute Autriche est l'une des plus belles provinces de la monarchie autrichienne, celle qui présente le plus de sites variés, d'aspects agréables ou sauvages, mais qui, surtout, donne l'idée d'une culture avancée, d'un peuple heureux et fidèle. Si cette province était plus connue, les voyageurs viendraient la parcourir comme la Suisse et l'Italie; les hommes passionnés pour les beautés de la nature, pour ce repos, cette fraîcheur qui règnent dans les hautes régions pendant un qui, sans parler, le conduisit près d'une jeune femme et d'un enfant. Le comte reconnut sa fille. La solitude lui pesait trop depuis un an; il serra sa fille dans ses bras, la ramena au château, et adopta le fils de Rodolphe; puis, pour réunir tous les vieux amis, il courut à la prison de Werner; mais son pied heurta contre la trappe qui, s'ouvrant, le laissa se briser sur la pierre du cachot. Depuis lors, son ombre erre sans cesse autour des murs durant la nuit, et elle ne s'éloignera que quand la trappe sera tellement usée qu'elle se rompra d'elle-même en deux parties. Mais à peine y voit-on, aujourd'hui, quelques indices de vétusté; aussi y a-t-il encore des fantômes qui errent la nuit autour du château ruiné de Greiffenstein. certain temps de l'année, viendraient y fixer leur séjour. On va chercher bien loin des émotions vives; on suit les pas de ceux qui ont signalé quelques pays et tracé, pour ainsi dire, une route sur le globe, et on néglige des lieux qui renferment ces mêmes beautés, mais qui sont près de vous: quod quæris, hic est. Combien de voyageurs racontent avec enthousiasme les courses qu'ils ont faites en Suisse, sur les Apennins, dans le Hartz, en Bohême, ou dans la forêt Noire, et qui ne savent pas que le cercle seul de la Traun offre, dans un espace de douze lieues carrées, vingt lacs, dont quelques-uns ont 7 à 8 lieues de tour, des montagnes dont le sommet se perd dans les nues, des chutes d'eau aussi fortes et plus pittoresques que celles du Rhin; enfin un peuple dont les mœurs, les habitudes, les coutumes méritent une étude particulière (*). » << La haute Autriche est arrosée par le Danube dans la direction de l'ouest à l'est; toute la partie montagneuse présente un aspect sévère et imposant, c'est l'asperum cœlo, tristem cultu aspectuque de Tacite; mais la vallée située entre Krensmünster, Steyer, Saint-Florian et Lintz, est un jardin continuel. L'industrie des cultivateurs, jointe aux beautés de la nature, y forme partout les plus riants tableaux. Une riche végétation d'arbres forestiers répandus dans toutes les campagnes, de plus nombreuses plantations d'arbres fruitiers, des champs ornés de haies vives et cultivés avec soin, se joignent sur un sol inégal et varié avec les plus hautes projections des monts qui les dominent. Les villages sont très-disséminés par la grande division des de la culture et à l'ornement du pays. propriétés, ce qui contribue à la facilité Chacun habite au milieu de son champ et ne possède guère que ce qu'il peut cultiver. Aussi les chevaux et les boeufs ne reviennent point fatigués du travail, et leur exploitation ne s'étend pas au delà d'un quart de lieue. (*) De Laborde, Voyage pittoresque en Autriche, t. I, p. 207. 6 « L'activité et l'industrie sont la source principale de l'aisance du peuple: il n'est pas rare de rencontrer des paysans possédant 30,000 francs de revenu (*). Une partie de la haute Autriche, et principalement le cercle de la Traun qui confine avec la Styrie et le pays de Salzbourg, est coupée par de hautes montagnes qui ne laissent entre elles que d'étroites vallées. Les montagnes les plus rapprochées du Danube, où le climat est plus doux, sont fertiles et offrent partout une végétation abondante. Les sommets sont couverts de forêts, et à leur pied règne une culture active; mais il n'en est pas de même à mesure qu'on s'enfonce dans les gorges qui séparent l'Autriche de la Styrie, et surtout dans la chaîne des montagnes qui part des frontières du pays de Salzbourg, contournant à droite le lac d'Hallstadt, et se rejoint aux montagnes de la Styrie. La on n'aperçoit plus qu'une végétation incertaine, que des plantes alpines qui couvrent à peine les rochers aigus dont les sommets sont cachés sous la neige. Telles sont les gorges de Gosa, de l'Alster et d'Ischel, et cette partie qu'on appelle Montagne de la mort à cause de sa tristesse et de son dénûment absolu de toute production. Le point le plus élevé de ces montagnes n'est habité que par les bergers avec leurs troupeaux, et seulement encore pendant une petite partie de l'été. Pendant le reste du temps ces parages sont déserts, et la mort seule, dont ils portent le nom, semble les habiter. C'est ici le point de séparation entre la haute Autriche, la Styrie et le pays de Salzbourg. Le soin des bestiaux est le seul revenu des habitants de ces contrées, qui vivent là toute l'année pour recevoir un médiocre salaire qui suffit à peine à leurs besoins. Les pâturages sont divisés en plusieurs catégories, suivant leur hauteur sur la montagne, qui permet d'y envoyer pâturer plus ou moins longtemps. Les meilleurs ont quarante semaines de pâture, les (*) Idem, t. I, p. 208. autres seulement quatorze, d'autres « Ces pauvres habitants, qui n'ont pour patrimoine que quelques landes couvertes de neiges, aiment cependant leurs montagnes, et savent trouver et mettre de la passion dans les petits événements qui leur surviennent. Après s'être consacrés à la pâture, le temps qu'ils passent chez eux les indemnise de leurs pénibles travaux. « Je me suis souvent trouvé, dit Schultes, dans le moment où les vaches descendent des montagnes. C'est alors une fête pour le pays; les taureaux et les vaches ont les cornes garnies de rubans, la tête et le cou ornés de guirlandes et des plus belles fleurs alpines. Plusieurs portent au cou de grosses sonnettes qui annoncent de loin leur arrivée. Les jeunes filles qui les avaient soignées avant qu'elles n'aient été envoyées à la montagne, vont au-devant d'elles et de leurs gardiens. Elles ont pour cela une toilette plus recherchée: elles ornent leurs grands chapeaux des rubans et des bijoux que leur ont donnés leurs amoureux le dernier dimanche qu'ils ont passé près d'elles. Dès qu'ils se rencontrent, l'air retentit de leurs cris, de leurs démonstrations de joie. Les bestiaux semblent eux-mêmes éprouver un semblable plaisir, et ils se précipitent, en sautant, dans la porte de leurs étables, qu'ils reconnaissent. Les enfants, les mères caressent les vaches, et se réjouissent de les voir en bon état; elles se plaisent à considérer combien leur veau et leur taureau ont acquis de force et de poids. Le petit paysan, pendant ce temps, a été jeté par terre par le veau qu'il a voulu, comme autrefois, prendre par les cornes et monter, sans penser qu'il n'est plus aussi patient; ses sœurs et les voisines rient de sa mésaventure (*). » Les plus élevées des montagnes de la haute Autriche sont les Zachstein (2,426 mètres), le Rumerkogel (1,569 (*) Idem, t. I, p. 216. |