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Les conclusions de Brissot furent: 1° que le comité de législation présenterait, dans huit jours, un projet de décret d'accusation contre les princes; 2o que le Roi serait chargé de rappeler les envoyés de France près des cours de Russie, de Suède, de Madrid et de Rome, et de congédier les ministres de ces cours; 3o que Sa Majesté réclamerait auprès de la cour d'Espagne l'exécution du traité des Pyrénées; et en conséquence, une réparation authentique des procédés injurieux de ce gouvernement à l'égard de plusieurs français, et du refus de porter des secours dans la partie française de Saint-Domingue; 4o que le Roi réclamerait aussi auprès de l'Empereur l'exécution du traité du 1er mai 1756, et le requerrait en conséquence de réduire les troupes, dans le Brabant, au nombre fixé par les traités, et d'interposer non-seulement ses bons offices, mais ses forces auprès des princes de l'Empire, pour défendre et empêcher tout rassemblement d'émigrés; 5o que le ministre des affaires étrangères serait tenu de communiquer toutes les nouvelles qui intéresseraient la sûreté de l'état, au comité diplomatique, qui serait chargé d'examiner les différents traités qui liaient la France avec les puissances étrangères, et d'indiquer les changements qu'il convenait d'y faire.

Extrait du discours prononcé par Isnard,
le 29 novembre 1791.

La voie des armes, a dit M. Isnard, est la seule qui nous reste contre des rebelles. Toute idée de capitulation serait un crime de lése-patrie. Élevons-nous à toute la hauteur de notre mission. Parlons aux ministres, au Roi, à l'Europe, avec la fermeté qui nous convient. Disons à nos ministres, que jusqu'ici la nation n'est pas très satisfaite de la conduite de chacun d'eux; que désormais ils n'ont à choisir qu'entre la reconnaissance publique et la vengeance des lois, et que par le mot responsabilité nous entendons la mort. Disons au Roi, que son intérêt est de défendre la constitution; que sa couronne tient à ce palladium sacré; qu'il ne règne que par le peuple et pour le peuple; que la nation est son souverain, et qu'il est sujet de la loi. Disons à l'Europe, que le peuple français, s'il tire l'épée, en jettera le fourreau; qu'il n'ira le chercher que couronné

des lauriers de la victoire, et que, si malgré sa puissance et son courage il succombait en défendant sa liberté, ses ennemis ne règneraient que sur des cadavres. Disons à l'Europe, que, si les cabinets engagent les rois dans une guerre contre les peuples, nous engågerons les peuples dans une guerre contre les rois. Disons-lui que tous les combats que se livrent les peuples par ordre des despotes, ressemblent aux coups que deux amis, excités par un instigateur perfide, se portent dans l'obscurité. Si la clarté du jour vient à paraître, ils jettent leurs armes, s'embrassent, et châtient celui qui les trompait de même, si au moment que les armées ennemies lutteront avec les nôtres, le jour de la philosophie frappe les yeux, les peuples s'embrasseront à la face des tyrans détrônés, de la terre consolée et du ciel satisfait.

Extrait du discours prononcé par Brissot,
le 17 janvier 1792.

« Le masque est enfin tombé; votre ennemi véritable est connu. >> L'ordre donné au général Bender vous apprend son nom, >> c'est l'Empereur. Les électeurs n'étaient que ses prête-noms; les » émigrants n'étaient qu'un instrument dans sa main. Vous devez >> maintenant mépriser les émigrants; c'est à la haute-cour natio» nole à venger la nation de la révolte de ces princes mendiants... >> Les électeurs ne sont pas plus dignes de votre colère, la peur les » fait prosterner à vos pieds... Votre ennemi véritable, c'est l'Em>> pereur... Il cherche à vous attaquer ou à vous effrayer... Si vous » devez être attaqués, il vous convient de prévenir; si l'on veut vous >> amuser, vous ne devez pas vous endormir; si l'on ne tend qu'à » vous forcer par la terreur à une capitulation indigne de vous, il >> faut réaliser ce que vous avez cent fois promis: la constitution >> ou la mort. La mort! elle n'est point à craindre; examinez votre » position et celle de l'Empereur... Votre constitution est un ana>> thème éternel aux trônes absolus. Tous les rois doivent donc haïr >> votre constitution; elle fait leur procès, elle prononce leur sen>>tence, elle semble leur dire à chacun : Demain tune se seras plus, » ou tu ne seras roi que par le peuple. Cette vérité a retenti au >> cœur de Léopold; il cherche à en reculer le fatal moment... Non. >> ce n'est point la noblesse française qu'il veut rétablir... C'est son

>> trône qu'il cherche à maintenir par une vaine ligue contre le >> torrent de l'esprit de liberté. Il en veut tarir la source, et la source >> est en France. Ah! s'il entendait mieux ses intérêts, s'il connais» sait la force de la révolution actuelle. il renoncerait à de pareils >> moyens pour l'arrêter; il la préviendrait, en la naturalisant dou>> cement chez lui. L'inoculer, c'est lui ôter son venin. Il faut dire >> à l'Empereur : C'est notre constitution que vous avez en horreur, » c'est elle que vous voulez détruire; ou renoncez à ce projet, ou >> préparez-vous à la guerre... On vous dira peut-être pour excuser >> cette ligne, qu'elle n'a point la violence pour but; qu'on veut seu>>lement dans un congrès, corriger quelques vices de votre consti>>tution. Mais ce congrès, fût-il pacifique, serait encore un outrage >> sanglant à la nation française. Anathème donc aux ambitieux » qui, pour perpétuer les troubles et leur influence, en ont >> conçu le projet! anathème aux puissances assez folles pour >> vouloir les protéger! eh! de quel droit l'Empereur veut-il inter>> venir dans nos démêlés ?..... Si nous ne devons obtenir que tergi>>versations, que des réponses équivoques; si ces réponses doivent >> nous engager dans une guerre de plume interminable, si cette >> guerre peut nous faire perdre un temps précieux pour la guerre, » pour la bonne guerre, ne serions-nous pas insensés de préférer à >> cette dernière une négociation infailliblement illusoire et funeste? >> Un peuple libre a rarement l'avantage dans les négociations de >> cabinet. Emploie-t-il des agents patriotes? ils sont trompés. Em>> ploie-t-il des agents ministériels? il est trompé; il l'est surtout >> quand il est obligé d'employer des agents qui ne sont pas de son >> choix...; quand ils sont choisis par un pouvoir exécutif que ta >> nature des choses rend un secret ennemi de la liberté. Un peuple » libre ne fait bien ses affaires que par lui-même, ou par des agents >> exposés sans cesse à ses regards; et à la guerre, c'est la nation qui » négocie, et la nation ne se laisse point tromper; à la guerre tout >> est public, tandis que tout est mystère et souvent fraude dans le >> cabinet. Quelle confiance le peuple français peut-il avoir dans >> ces négociations, tant que la diplomatie ne sera pas populaire..; >> tant qu'elle sera une feuille de bénéfices entièrement réservée >> aux privilégiés, ou aux créatures de l'ancien régime ?... On va se >> récrier contre ces défiances; eh! il s'agit du bien le plus précieux; » la confiance a perdu presque tous les peuples libres... Mais d'ail» leurs, quelle nécessité de négocier dans le moment actuel?... Pen

>> dant cette comédie politique, nos préparatifs militaires épuisent >> nos ressources; les inquiétudes renaissent, les agitations inté>> rieures continuent, les forces combinées s'assemblent, la saison >> favorable pour elles s'avance, les prétentions se montrent, la hau>>teur se déploie dans les offices, les menaces succèdent au ton miel» leux; on s'offense, l'invasion suit, une guerre désastreuse éclate » dans nos foyers mêmes, les mécontents se rallient bientôt aux >> drapeaux étrangers, et la guerre civile se joint à la guerre étran» gère. Telles sont les vues secrètes de vos ennemis; ils sont >> rois, et vous êtes peuple; ils sont despotes, et vous êtes libres : » or, il n'y a point de capitulation sincère entre la tyrannie et » la liberté... Je ne dirai donc pas à l'Empereur avec votre co>> mité: Voulez-vous vous engager à ne pas attaquer la France » ni son indépendance; mais je lui dirai : Vous avez formé une » ligue contre la France, je dois vous combattre; et cette attaque >> immédiate est juste, nécessaire, commandée par les circonstan>>ces et par vos serments; à moins que l'Empereur ne la prévienne » dans un bref délai par une satisfaction qui vous ôte toute inquié>>tude... Par quelle extravagance respecterions-nous un traité que >> l'Empereur a rompu tant de fois, et qui ne peut plus se concilier >> avec les principes de notre nouvelle constitution?... Elle défend >> impérieusement aux Français toute conquête, elle leur défend >> toute guerre offensive à moins que leur propre sûreté ne les y >> force; ils ne peuvent donc plus contracter, ni maintenir des traités >> offensifs avec aucune nation.... Les Français doivent être les >> frères de tous les hommes, de tous les peuples. Ils veulent être >> justes et bienveillants envers tous; se lier exclusivement avec tel >> ou tel peuple, s'engager à le défendre contre toute espèce d'atta» que, c'est faire un traité d'inimitié éventuelle contre tel ou tel >> autre peuple, c'est violer le principe sacré de la fraternité uni>> verselle.

N° 10.

Extrait de discours prononcé par Fauchet
le 17 janvier 1792.

«Les Français, après la conquête de la liberté, dit l'abbé Fau

>> chet, sont les alliés naturels de tous les peuples libres. Les traités >> faits avec les despotes sont nuls de droit, et ne peuvent être con>> servés de fait, sans une conséquence destructive de notre révolu» tion... Nous n'avons besoin ni d'ambassadeurs, ni de consuls, ce >> sont des espions superbes; rien n'est menteur comme eux ; ils >> manœuvrent pour les princes, et vendent le peuple. Rien n'est >> plutôt violé que le traité des rois, c'est un commerce d'impostures >> aussi ancien que les trônes. La diplomatie actuelle n'est autre >> chose que l'art de partager la tyrannie. Dans un pays libre, elle >> doit être remplacée par la science du peuple. Disparaissez téné>> breux fabricateurs de chaînes, la liberté vous poursuit, vous >> atteint, et vos yeux ne peuvent supporter sa lumière. En faisant >> une alliance avec les peuples libres, nous comptons les Anglais, » les Anglo-Américains, les Polonais, les Hollandais et les Suisses. >> Quand les autres peuples voudront de notre alliance, ils n'auront >> pour l'obtenir qu'à conquérir la liberté; en attendant, s'ils sont >> paisibles, nous commercerons avec eux comme avec de bons » sauvages... Nous ne pouvons plus être protégés que par la majesté » de la nation, et cette majesté ne réside pas dans quelques commis » de bureau... Passons-nous du pouvoir exécutif au dehors; il nous » donnera assez d'affaires au dedans; ses négociations sont des tra>> hisons, ses affidés sont des tyrans. Du moins dans l'intérieur, la >> force nationale est toujours prête à les contenir... Nous ne crain>> drons les brigandages ni des corsaires, ni des princes...... Qu'ils >> s'avisent de nous molester; la masse nationale les écrasera...... >> Envoyez ici, tyrans imbécilles, tous vos esclaves, et voyez-les se >> fondre comme un amas de glace sur une terre de feu... Point de >> guerre aggressive, la constitution jurée nous en fait la loi; mais >> la guerre aux princes qui favorisent les conspirateurs sur nos >> frontières, la guerre à Léopold, qui machine la destruction de >> notre liberté. Repoussons les brigands... Nous n'avons rien à de>> mander à tous ces despotes que de nous laisser en repos... Nos >> négociateurs sont nos canons, nos baïonnettes patriotiques et des » millions d'hommes libres. >>

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