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traité nouveau; 3° l'ordre d'augmenter les escadres en commission. J'observe d'abord que ces engage- | ments défensifs et commerciaux ne signifient rien et ne portent pas sur tous les droits stipulés dans les traités par exemple sur l'abolition du droit d'aubaine, sur les priviléges de nos vaisseaux dans les ports espagnols. Ce qui me paraît plus digne de considération, c'est que le Pacte de famille ne contient que des clauses défensives. (Il s'élève des murmures.) Il n'est pas question d'examiner maintenant ce traité, jamais l'Espagne n'en a donné de pareilles interprétations; c'est vous qui en avez fait un traité offensif. Deux fois vous avez entraîné l'Espagne dans une guerre étrangère. Je pense donc que l'énonciation d'engagements défensifs et commerciaux n'est pas sans inconvénients. Vous annoncez d'abord que votre volonté est d'exécuter les traités avec l'Espagne, et dans l'article suivant vous priez le roi de négocier un nouveau traité. Ce deuxième article est propre à donner à l'Espagne les plus grandes inquiétudes. Une pareille disposition ne doit pas se trouver dans un décret national. Vous laisserez à l'Angleterre le temps d'arriver à son but. Ce but est sans doute de faire un traité de commerce avec l'Espagne. L'Angleterre dira à l'Espagne, votre décret a la main: Vous n'avez avec la France que des traités incertains, je vous en offre de durables. Oui, sans doute ce sera là son langage, et si vous adoptez ce décret, pour la première fois dans l'histoire du monde les représentants d'un grand peuple ont ainsi raisonné: Nous exécuterons les traités, mais nous engagerons en même temps le roi à en conclure d'autres.

M. BARNAVE: Je ferai de très courtes observations; d'une part, je ne crois pas avoir besoin d'insister sur la conservation du mot défensif, cette expression ajoutée au décret est conforme aux principes que vous avez établis ; d'autre part, il est certain que les clauses défensives, insérées au traité, ne l'ont été que pour la France. L'Espagne avait uniquement intérêt à se conserver, nullement à s'accroître; ainsi, en renonçant aux clauses stipulées en votre faveur, vous ne faites rien qui soit contraire aux intérêts de votre allié. Quant à l'observation sur le traité national à négocier, vous ne pouvez que confirmer provisoirement les traités existants, puisqu'il est nécessaire de les modifier, en convenant de clauses non offensives, et puisque les clauses commerciales ont besoin d'être perfectionnées; mais en conservant provisoirement les stipulations du traité il est indispensable de continuer l'alliance entre les deux nations, en négociant des conditions plus convenables. L'Angleterre ne peut que chercher à attirer l'Espagne, pour l'éloigner de nous; l'Angleterre ferait un traité permanent: c'est un traité permanent et durable qui doit remplacer celui qu'il est indispensable de modifier, et que nous ne pouvons observer que provisoirement. Je demande donc la question préalable sur les amendements proposés par le préopinant. J'ajouterai moi-même un amendement, et je dirai qu'il est impossible d'exprimer vaguement que nous voulons conserver la paix; il faut non seulement dire que nous voulons maintenir des liens utiles aux deux peuples, mais que nous voulons les perpétuer. Il faut de plus une démarche positive: je demande que par un décret le roi soit prié d'entrer en médiation entre les deux puissances,

M. CHARLES LAMETH: En adoptant l'opinion de M. Barnave, je crois nécessaire, indispensable même de rappeler le décret du 22 maí, qui porte que l'As semblée se réservera le droit de conclure les traites. Si vous faites attention à la rédaction qui vous est proposée, vous y verrez qu'il s'ensuivrait que le ministre aurait ce droit.

M. RIQUETTI L'AÎNÉ, ci-devant Mirabeau Nous avons rédigé notre projet de décret suivant les vues

que l'Assemblée vient de manifester. Nous devons ce pendant vous rendre compte d'une observation faite entre nous. Nous avons cru que la répartition des forces militaires tenant à la manutention militaire, appartenait uniquement au roi. Nous avons également pensé qu'en stipulant l'armement de 45 vaisseaux de ligne, vous entendiez aussi l'équipement d'un nombre suffisant de frégates et de bâtiments légers. Voici la nouvelle rédaction du projet de décret:

« L'Assemblée nationale, délibérant sur la proposition formelle du roi, contenue dans la lettre de son ministre,

du 1er août;

» Décrète que le roi sera prié de faire connaître à S. M. Catholique que la nation française, en prenant toutes les mesures propres à maintenir la paix, observera les engagements défensifs et commerciaux que son gouvernement a

précédemment contractés avec l'Espagne;

>> Décrète en outre que le roi sera prié de faire immédiatement négocier avec les ministres de S. M. Catholique, à l'effet de resserrer, et perpétuer par un traité, des liens utiles aux deux nations, et de fixer avec précision et clarté toute stipulation qui ne serait pas entièrement conforme aux vues de paix générale et aux principes de justice, qui seront à jamais la politique des Français;

» Au surplus, l'Assemblée nationale, prenant en considération les armements des différentes nations de l'Europe, leur accroissement progressif, la sûreté des colonies françaises et du commerce national;

>> Décrète que le roi sera prié de donner des ordres pour que les escadres françaises en commission puissent être portées à 45 vaisseaux de ligne, avec un nombre propor

tionné de frégates et autres bâtiments. »

Ce décret est unanimement adopté.

Un de MM. les secrétaires fait lecture d'une lettre de M. Riquetti le jeune, ci-devant vicomte de Mirabeau, qui annonce qu'étant sorti de la France, le premier usage qu'il fait de la liberté est de donner sa démission de député à l'Assemblée nationale, et qu'il est prêt à se joindre à toutes les protestations faites et à faire contre tout ce qui porte atteinte à la monarchie et aux propriétés du roi.

On fait lecture d'une lettre de M. la Tour-duPin. Ce ministre annonce que l'ordre se rétablit insensiblement dans les divers corps militaires; que la garnison de Nancy paraît disposée à ne plus s'écarter des règles du devoir, et que le zèle de la garde nationale de cette ville n'a pas peu contribué à cet heureux retour.

L'Assemblée ordonne l'impression de cette lettre et charge son président de témoigner sa satisfaction à la garde nationale de Nancy. La séance est levée à 2 heures et demie.

ADMINISTRATION.

COUR DU CHATELET DE PARIS.

On vient de juger à ce tribunal un procès entre M. âgée de 15 ans, qui l'accusait d'avoir abusé de sa jeuJean-Baptiste le Moyne, marchand de vin, et une fille, nesse et de son inexpérience, et de l'avoir rendue mère. En vain les parents de cette jeune personne avaient sollicité M. le Moyne à se charger de l'enfant, pour éviter l'éclat d'une procédure scandaleuse, il s'y était toujours refusé. Il a été condamné à payer la nourriture et l'entretien de l'enfant, depuis sa naissance jusqu'à l'âge de 8 ans, à raison de 200 liv. par an, à payer la somme de 300 liv. par année, depuis 8 ans jusqu'à 14 ans, à laquelle époque M. le Moyne sera tenu de mettre l'enfant en apprentissage d'un métier convenable, et d'en payer les frais; à payer de plus 200 liv. de frais de gésine, et 1,200 liv. de dommages et intérêts.

FINANCES.

M. l'abbé Maury vient de faire imprimer et distri

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pour l'armillions sont compris cent vingt millions riéré non liquidé des départements, qui n'est connu jusqu'à présent que par aperçu, et que le comité de liquidation ne croit pas, comme je l'avais annoncé, pouvoir excéder cette somme.

Enfin M. l'abbé Maury finit par un assez long épi

buer une opinion sur la finance et sur la dette publique. Je laisse à ses lecteurs le soin de juger si cet écrit, sur une matière qui ne lui est pas familière, ajoutera quelque chose à la réputation que ses talents lui ont acquise; mais je dois rectifier une erreur qui se trouve placée sous mon nom à la page 10. M. l'abbé Maury me fait dire une chose inintelligible; je vais l'ex-sode sur les finances de l'Angleterre, qui pourra faire pliquer. Voici ses propres expressions: M. Necker sourire M. Pitt, s'il a le temps d'y jeter les yeux : nous a dit que les dépenses extraordinaires pour l'an- mais M. Pitt éprouvera un sentiment différent, lorsnée 1789 montaient à 105 millions. Il est vrai que qu'il lira le rapport du comité des finances. Toute lorsque j'en témoignai ma surprise au comité des dix, l'Europe y verra quelles sont les ressources de la dont j'avais l'honneur d'être membre, l'accommodant France, qui peut dans ce moment payer, avec des M. Anson me répondit qu'il allait en retrancher 40 mil-biens-fonds, la totalité de sa dette exigible montant lions dans un instant; il prit la plume, et tint parole. à plus de deux milliards. Ce n'est point là une hypoJ'admirerai longtemps ce talent merveilleux, avec le thèque illusoire, comme celle d'une banque nationale. quel on réduit en un instant de 40 millions une dé- Je ne me lasserai point de répéter a la France entière, et aux braves citoyens qui la composent: Payons nos pense déjà faite; et j'en ai rappelé plusieurs fois le souvenir à ce même M. Anson, qui m'a reproché depuis contributions avec courage, et bientôt la nation frauà la tribune de vouloir effrayer les créanciers de çaise sera la plus puissante comme la plus libre de l'u

l'Etat.

Un seul mot va éclaircir l'observation très simple que je fis alors dans le comité sur l'aperçu de M. Necker; c'est que cet aperçu n'était point, quoi qu'en dise M. l'abbé Maury, l'état des dépenses extraordinaires faites en 1789, mais le projet de celles à faire en 1790; je l'ai plusieurs fois répété à M. l'abbé Maury, qui paraît l'avoir autant de fois oublié. La voilà fort abrégée cette longue admiration que se promettait M. l'abbé Maury sur mon talent de reduire en un instant une dépense déjà faite : si j'avais ce talent merveilleux, la dette publique ne nous embarrasserait pas tant.

Lorsque nous examinâmes, au mois de décembre 1789, l'état des dépenses extraordinaires projetées pour 1790, je proposai, j'en conviens, d'en retrancher environ 40 millions, qui ne me paraissaient pas absolument indispensables: je croyais qu'ils devaient, pour la plus grande partie, rester dans l'arriéré non liquidé dont le comité projetait dès lors de différer le paiement jusqu'à son entière liquidation; j'insistais beaucoup sur cette opération, qui fut décrétée un mois après par l'Assemblée nationale avec l'approbation universelle: il était conséquent de ne pas vouloir adopter l'emploi d'une somme considérable, qui paraissait former une partie de l'arriéré; ce n'était pas être si accommodant que de s'opposer à 40 millions de dépenses proposées par les ministres.

Si j'avais le temps de faire une brochure, je m'attacherais avec quelque plaisir à détruire de nouveau l'effroi que voudrait toujours nous inspirer M. l'abbé Maury sur la situation de nos finances; car en vérité j'aime mieux le rôle de celui qui rassure que le rôle de celui qui effraie: mais son ouvrage ne changera rien à la mesure des choses.

Il se divise naturellement en trois parties: dans la première, M. l'abbé Maury reproche à M. Necker de répandre de l'obscurité sur nos finances, et de négliger les grandes routes de la renommée. Il me semble que celui qui le premier nous a rendu un compte public, et qui depuis a fait présent à la nation du célèbre traité sur l'administration des finances de la France, ne doit pas être fort alarmé de cette amère

censure.

La seconde partie de l'opinion de M. l'abbé Maury présente des calculs sur la dette publique, qu'il avait communiqués au comité des finances, et qui assurément n'y avaient pas été adoptés. Le tableau authentique de notre dette que présente dans ce moment même le comité, est la meilleure réponse aux exagérations de M. l'abbé Maury. J'ai dit hautement, dans l'Assemblée nationale, que la dette publique, tant constituée qu'exigible, était d'environ quatre milliards et demi; les calculs définitifs du comité justifient mon assertion, puisque dans le total de quatre milliards six cent vingt

nivers. »

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Si les caractères d'une action, Monsieur, sont, comme je le crois d'être utile à l'humanité, d'être faite sans faste ni ambition de récompense, il en est pea qui réunissent plus éminemment les caractères que celle dont les hasards les plus singuliers ont conservé la trace dans la lettre dont j'ai l'honneur de vous donner une copie. J'ai cru devoir en offrir l'original à la famille de M. l'abbé Morellet; mais sa publicité dans votre journal est le seul prix digne de lui. Elle affermira cette opinion si précieuse aux âmes honnêtes, que la Providence veille sans cesse à la récompense de DEMONBLANC.

la vertu.

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pièces, en effet, ont un extrême rapport, tant pour le sujet que pour les caractères. Seulement dans celle de M. Monvel, les personnages étant historiques, et les caractères donnés, ils captivent davantage l'attention des spectateurs. Dans celle-ci, au contraire, tout étant idéal, on ne sait plus à quelle époque se reporter, et il en résulte des disparates dans les costumes et dans les mœurs; on y voit avec peine le mélange des nsages d'autrefois avec le ton et le langage d'aujourd'hui. Les deux pièces different aussi pour la conduite et pour le style. On a cependant trouvé dans les Amours de Coucy quelques scènes fort gaies, d'un bon comique, dialoguées avec esprit.

Ce qu'il y a de plus remarquable, mais non pas de meilleur, surtout à l'égard de l'exécution, ce sont les trois intermèdes. Le premier est un divertissement donné à madame de Rainac par l'un des chevaliers français ses amants. On a éprouvé quelque surprise en voyant que cette fête consistait en quelques couplets chantés par un aveugle, accompagné de sa vielle, et secondé par une troupe de ces petits danseurs de Wauxhall. Cependant le dernier de ces couplets, dont l'idée est jolie, et les caricatures de M. Paillardelle, qui chantait l'aveugle, ont amusé quelques spectateurs. Le second intermède est un tournoi à l'antique, auquel il ne manquait qu'un emplacement convenable et un costume exact. Les deux personnages qui combattent, au lieu d'avoir un casque et la visière baissée, se sont présentés à visage découvert; ce qui rend le combat toutà-fait inintelligible. Le troisième est tout simplement une fête, qui n'a pas plus de dignité que le reste. En général ces sortes d'accessoires exigent beaucoup de magnificence; la mesquinerie en détruit tout l'effet. Ce n'est pas par des pièces de ce genre que ce spectacle pourra chez lui relever le genre français; il n'en a pas besoin, et il vaudrait mieux y renoncer que de chercher à s'étayer de ressources aussi dispendieuses.

THEATRE ITALIEN.

Chacun de nos théâtres s'est empressé à profiter de la liberté pour représenter des ouvrages avec un costume que jusque-là on aurait cru profané, s'il y avait paru: comme si la religion consistait dans les habits, et comme si l'on n'en pouvait montrer les ministres sans les rendre ridicules. C'est là le cas de dire que l'habit ne fait pas le moine, et l'on distingue sans peine aujourd'hui le caractère particulier et le costume du prêtre que l'on expose sur la scène, d'avec les fonctions augustes qu'il doit exercer.

Le Théâtre Français a déjà donné une pièce intitulée : le Couvent, dans laquelle, sur une intrigue fórt jolie, l'auteur a peint d'une manière très agréable les petites pratiques minutieuses de ces retraites déjà si gaîment décrites par Gresset. Au Théâtre Italien M. Fiévée a eu un but plus sérieux. Une jeune fille, dont la famille est persécutée par un homme puissant est forcée d'entrer dans un cloître et d'y faire des vœux, au moment où elle allait épouser un homme qu'elle aimait. Ses serments indiscrets et arrachés par la violence n'ont pu éteindre son amour. Elle reçoit des lettres de son amant, qui a même trouvé le moyen de s'introduire dans le monastère sous l'habit d'un jardinier. L'une de ces lettres est trouvée et tombe entre les mains de l'abbesse. On conçoit quel scandale cause une lettre d'amour parmi des religieuses, et surtout parmi les vieilles. L'abbesse donne cette lettre à lire à la sœur Lucile qui est justement celle qui l'a reçue. Ce moyen est ingénieux, théâtral, et fait beaucoup d'effet. Le trouble de Lucile la décèle. Le crime est connu; en vain une vertueuse compagne, en vain son amant même qui paraît, veulent la défendre; ils ne font qu'aggraver ses torts. Lucile doit être jugée, et c'est dans les préparatifs de son jugement que l'auteur a peint ces haines invetérées, ces longs ressentiments qui se nourrissaient dans les cloîtres, et le despotisme affreux avec lequel ils étaient gouvernés. Lucile est condamnée, malgré le zèle de son amie, à pourrir dans un cachot, lorsque son amant, soutenu par un détachement de gardes nationales, vient annoncer le décret qui rend la liberté à ces victimes de l'avenglement.

Il y a beaucoup d'intérêt dans cet ouvrage dont l'intrigue est d'ailleurs simple et naturelle. Plusieurs scènes offrent des détails très agréables qui ont été fort applaudis.

La musique est de M. Berton, déjà connu par beaucoup de productions infiniment intéressantes, mais à qui des associations malheureuses n'avaient jamais permis de réussir au théâtre, malgré la justice rendue à ses talents. Car,

on ne saurait trop le répéter, ce n'est jamais la musique qui fait le succès des pièces de théâtre; elle ne sert qu'à les soutenir quand elles ont réussi sans son secours. M. Berton a eu ici plus d'occasions de montrer tout ce dont il est capable. On a surtout distingué l'ouverture, qui forme un chant religieux et tout-à-fait claustral, et qui, rappelée au second acte, sert d'accompagnement à un chœur lugubre au moment où Lucile va descendre dans le cachot on y trouve aussi plusieurs morceaux d'ensemble au premier acte, et un air de désespoir au second, de la plus grande beauté. Ce succès mérité doit encourager ce jeune musicien dans une carrière où les athlètes commencent à devenir bien rares.

La pièce a été parfaitement jouée. Le public a demandé à grands cris madame Saint-Aubin, qui avait rendu le róle de Lucile avec beaucoup d'énergie et de sensibilité.

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1° 240.

Samedi 28 AOUT 1790.

POLITIQUE.

ALLEMAGNE.

Deuxième année de la Liberté.

Extrait d'une lettre de Francfort, le 16 août. Il y a longtemps que l'on croyait ici qu'il n'y aurait point de guerre déclarée entre la maison d'Autriche et la Prusse. Mais on était loin de penser que cette dernière dût commander à l'autre avec tant d'empire et lui imposer la paix avec tant de rigueur. La maison d'Autriche a soutenu contre la Porte ottomane une guerre dont les succès ont été funeste à ses financess et à ses armées. Elle y a perdu, outre ses trésors, 12 généraux, au nombre desquels se trouvent les maréchaux de Haddick et de Laudhon; 600 officiers, et environ 130,000 soldats et bas-officiers. Quand elle eût conservé toutes ses conquêtes, elle n'eût point été dédommagée de ses pertes; et la voilà forcée de terminer la guerre sans se réserver aucun fruit de ses victoires. Cependant on assure que dans la suite des négociations on cherchera à donner du moins quelque ombre de dignité à la paix que Léopold a consentie, soit en rasant les fortifications des places les plus importantes, comme de Belgrade et d'Orsowa, soit en traçant une nouvelle ligne de démarcation qui, sans rien ajouter au domaine autrichien, paraîtra dirigée d'après les convenances.

Une paix semblable ne manquera point, d'après les préjugés de la politique, de passer pour humiliante. Et les sujets de Léopold (tel est l'aveuglement des peuples) ne sont peut-être pas assez sages pour ne pas regarder comme une sorte d'humiliation nationale la nécessité où leur roi se trouve réduit. On ne tardera pas à revenir de cette erreur. La prudence de Léopold est commandée par sa position. Dans presque tous ses états héréditaires, l'esprit de mécontentement et même d'insurrection s'est manifesté. La Bohème a réclamé ses priviléges; la Galicie aspire à une réunion constitutionnelle avec la Hongrie; et les Hongrois, plus remuants encore, ont ajouté à plusieurs demandes hautaines celle d'avoir des représentants au congrès, où la paix ne peut, selon leurs prétentions, se traiter sans leur aveu. Partout les peuples s'agitent dans les divers états de la domination de Léopold. En Illyrie on veut assembler une diète générale, où déjà ont été appelés des députés de Servie, de Slavonie et de Croatie; enfin la reprise des provinces belges occupe encore les sollicitudes d'un prince qui, pour conserver tant d'intérêts héréditaires, doit sacrifier sans doute les projets d'une ambition impraticable.

On vient de répandre dans cette ville un imprimé qui a pour titre : Dénonciation à toutes les puissances de l'Europe d'un plan de conjuration contre la tranquillité générale, suivi d'un discours prononce au club de la propagande, le 20 mai 1790. Le but de cet écrit est, selon l'auteur, de détruire l'influence prétendue que la révolution française a dans toute l'Allemagne.

La déclaration des droits de l'homme, imprimée sur des mouchoirs, et qui s'est bien vendue à la foire de Leipsick, engagera sans doute quelques princes à faire attention à l'imprimé calomnieux dont je parle. On y dénonce surtout comme criminelle la société de 1789, établie à Paris, et dont le but vraiment philosophique est de défendre et de propager les principes d'une constitution libre, et de contribuer de toutes ses forces au progrès de l'art social.

Je pense que les ennemis du genre humain et de la société de 1789 ne sauraient aller plus directement 1 Série. Tome V.

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contre le but qu'ils se proposent eux-mêmes, et qu'en conséquence ils mériteraient une adresse de remerciment de la part de cette respectable société,

ITALIE.

La corvette française la

De Malte, le 23 juillet. Badine, commandée par M. le prince Victor de Rohan-Guémenée, lieutenant de vaisseau, qui était arrivée ici le 25 avril, après une longue campagne au Levant, a pris pratique le 17 mai, et a débarqué plusieurs Français et Anglais. Le 26 elle a appareillé pour une commission relative au commerce, est rentrée le L'escadre 2 juin, et est repartie le 10 pour Toulon. des galères de la religion, aux ordres de M. le bailli de la Tour-du-Pin-Montauban, est sortie le 18 mai dernier, mais elle a été forcée de rentrer le 21 juin suivant, pour réparer les dommages que lui ont causés les vents orageux qui ont été cette année-ci singulièrement prolongés. Elle se dispose à partir pour une nouvelle croisière. Il est sorti plusieurs corsaires maltais avec pavillon du grand-maître. Un d'eux a envoyé ici une petite prise faite sur les côtes de Barbarie. Les mers du Levant sont trop remplies de bâtiments de guerre tures pour qu'ils puissent diriger leurs croisières de ce côté.

De Venise, le 7 août. On est fort occupé ici des suites que peut avoir le différend occasionné par l'usage qu'ont fait les Vénitiens d'une nouvelle embouchure du Pò dans la mer Adriatique. Les Ferrarais ayant fait élever une digue destinée à les préserver des ravages de ce fleuve, mais qui peut devenir préjudiciable au territoire de la république, le sénat, par un mémoire du 31 du mois dernier, a demandé au pape que cette digue fût abattue, et l'on craint que, si la réponse de S. S. n'était pas telle qu'on la désire, il ne fût usé de voies de fait de la part des Vénitiens. En général cependant on espère que cette difficulté se terminera à l'amiable et par la voie de la négociation.

Au grand conseil d'hier MM. Barbarigo et Diedo ont été élus membres du conseil des dix, sans la moindre difficulté.

De Rome, le 11 août. —Le cardinal Bon-Compagni, secrétaire d'état de S. S., qui était allé aux bains de Lucques pour rétablir sa santé, y a été attaqué d'une fièvre maligne, dont il est mort le 9 de ce mois. Il jouissait d'une estime générale dans le sacré collége, et est universellement regretté.

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BULLETIN

DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE.

SÉANCE DU JEUDI SOIR 26 AOUT.

M. Seurrat entre dans quelques détails sur les droits de gruerie, ou grairie, paisson et glandée, auzqueis les bois de la forêt d'Orléans sont assujétis sous la dénomination d'accrues.

Ce mémoire est renvoyé à la commission des forêts, composée de plusieurs membres de l'Assemblée, tirés de plusieurs comités réunis.

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M. de La Jacqueminière, au nom des comités des finances, des impositions, d'agriculture et de commerce, pour l'organisation des postes et messageries, observe qu'il s'est glissé une erreur dans le décret adopté sur cette partie, dans la séance du mardi 24 de ce mois; qu'en allouant une somme de 30,000 liv. pour les frais des trois bureaux consacrés à ce service, on n'avait pas fait attention que le total des dépenses relatives à ce détail se montait à 30,600 livres, et qu'ainsi on se verrait obligé, contre toute justice, à réduire à 1,200 livres un des commis appointés à 1,800 liv. Sur la proposition du rapporteur, l'Assemblée fixe à 30,600 1. la dépense arrêtée par le décret sus-daté à 30,000 liv.

SUITE DE L'AFFAIRE DE TULLE.

M. Boullé, au nom du comité des rapports, donne les détails de l'affaire de Tulle et des troubles qui ont affligé le département de la Corrèze. Il propose un projet de décret qui, après une légère discussion, est adopté en ces termes : « L'Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des rapports, décrète que, sur les pétitions formées par les députés extraordinaires des municipalités de Tulle et d'Uzerche, en mainlevée de sursis à l'exécution des jugements prévôtaux prononcés par le décret du 6 mars dernier, sanctionnés par le roi le 7 du même mois, il n'y a lieu à délibérer.

» Déclare que la dénonciation qui lui a été faite le 31 mars dernier par le procureur du roi de la maréchaussée de Tulle contre les officiers de son siége, à l'occasion des procédures instruites ou jugées par eux, relativement aux troubles du département de la Corrèze, est de la compétence du conseil du roi, seul tribunal actuel de cassation, et la renvoie à ce tribunal.

» Renvoie devant les officiers municipaux, juges ordinaires en matière criminelle, à Bordeaux, tous les procès commencés par le tribunal prévôtal de Tulle, relativement auk troubles du département de la Corrèze, antérieurs au 1er mai dernier, pour en continuer l'instruction jusqu'au jugement définitif'; à l'effet de quoi les prisonniers détenus actuellement dans les prisons de Tulle pour cause de ces troubles, seront transférés dans les prisons de Bordeaux, et les minutes de toutes les procedures faites contre eux transportées au greffe de la municipalité de la même ville.

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Au surplus, l'Assemblée nationale, approuvant de nouveau le zèle des gardes nationales du département de la Corrèze, et satisfaite du patriotisme de l'ancien comité municipal, de la municipalité actuelle, de la commune et de la garde nationale de Brives, et des soins qu'ils se sont donnés pour ramener la tranquillité publique, invite toutes

les municipalités, communes et gardes nationales du dépar

tement de la Corrèze, aux sentiments de fraternité et d'union qui doivent animer tous les Français pour le maintien de l'ordre et de la Constitution. »

M. le président communique à l'Assemblée un extrait de la délibération de la commune de Toulon sur une

adresse qui lui a été présentée par un nombre très considerable de citoyens de toutes les classes, employés au service du roi dans l'arsenal, et conçue en ces termes :

« Nous, citoyens et ouvriers de l'arsenal, qui avons juré et jucons de maintenir la Constitution jusqu'à la dernière goutte de notre sang et d'être fidèles à la nation, à la loi et au roi, comme aussi de nous conformer aux décrets de l'Assemblée nationale;

suivis par le ministère public. Tels sont les sentiments d'honneur qui nous animent. Au moyen de quoi nous, citoyens de l'arsenal, qui avons affronté dans tous les temps les plus grands dangers, soit dans les combats, soit dans les tempêtes, avec une fermeté sans égale, et qui avons été expoels à tous les coups de canon de l'ennemi, désirant n'être pas confondus avec des malfaiteurs,

>> Prions MM. les officiers municipaux et notables de vouloir bien faire part de notre résolution à toutes les compagnies de la garde nationale, à celles des troupes de ligne et de mer qui forment la garnison de Toulon, comme aussi de nous instruire de leur opinion à ce sujet, que nous suivrons dans tous ses points.

>> Jurons de plus de nous aimer constamment comme des frères et de nous protéger mutuellement avec courage, et d'être toujours sur nos gardes contre les embûches des méchants qui ne cherchent qu'à corrompre les bons. » La séance est levée à dix heures.

SÉANCE DU VENDREDI 27 AOUT.

Un de MM. les secrétaires fait lecture du procèsverbal.

M. BOUCHE: Je demande que la motion de la démission de M. Riquetti le cadet soit rayée du procèsverbal. Il n'offre point de suppléant. Le procès-verbal ne doit pas être souillé par l'insertion de la lettre d'un homme qui s'est avili en fuyant sa patrie, et qui ne connaît ni ne respecte les décrets de l'Assemblée nationale.

M. GOUPIL: Ce serait beaucoup trop honorer l'auteur de la lettre qui renferme des expressions indécentes et pleines d'incivisme, que d'en ordonner la rédaction par une délibération en forme. Personne ne se lève pour contredire cette observation.

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On fait lecture d'une adresse de l'école de chirurgie, ainsi que de la société de médecine qui demandent à présenter un règlement pour leur organisation. L'Assemblée accueille cette proposition.

Un membre des comités de commerce et d'agriculture fait un rapport sur la suppression des traites dans l'intérieur du royaume, et le reculement des barrières aux frontières.

L'Assemblée, après y avoir donné les plus vifs applaudissements, en ordonne l'impression.

- M. MONTESQUIOU-Fezensac : Lorsque la nation française attendait la convocation des états-généraux, elle était accablée sous le poids d'une dette qui s'accroissait tous les jours. Le désespoir était le précurseur de la banqueroute. L'Assemblée s'est formée, et l'espérance a reparu avec la liberté. Un des premiers objets de vos travaux est de prouver que vous n'avez pas pris un engagement téinéraire, en mettant les créanciers de l'Etat sons la sauvegarde de la loyauté française. Un autre objet de vos travaux, c'est le soulagement du peuple. Pour concevoir une juste idée du changement qui s'est déjà opéré, il n'est pas néfisc et les abus de tout genre; un tel résultat serait cessaire de rappeler ce que coûtaient les suppôts du effrayant, et quelque interessant que fût ce calcul on serait toujours fondé à dire qu'il est hypothétique. Nous prendrons pour terme de comparaison, non point ce que l'on payait, mais ce qui entrait au trésor public. Au mois de mai 1789 les revenus de l'Etat sc montaient à 475,000,000 livres. Les provinces payaient en outre 4,000,000 livres pour le département de la guerre. L'accessoire des impôts indirects, outre le prix du bail, se montait environ à 18,000,000 livres, sans parler de la subvention représentative de la corvée. La contribution était donc de 497,000,000 livres, sans y joindre le calcul des saisies, contraintes et vexations de tout genre. C'est de cette base que nous partirons. Il s'en fallait de 56,000,000 livres que la recette pût suffire à la dépense.

» Jurons au péril de notre vie de soutenir de toutes nos forces nos compatriotes expatriés, dans le cas où ils reviendraient dans leur patrie, conformément aux décrets de l'Assemblée nationale, pour y prêter le serment de fidélité à la nation, à la loi et au roi. Demandons en outre que les malheureux qui ont été dénoncés à la municipalité, ainsi Les engagements étaient ou mal acquittés ou vioque ceux qui pourront l'être encore sur l'événement dé-lés; c'était la suite indispensable de cette monstrueuse sastreux arrivé dernièrement à M. de Castelet, soient pour-administration, et tout l'art de la finance réuni à l'au

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