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la Constitution; l'Assemblée ordonne le renvoi au comité des rapports.

ter à l'Assemblée nationale une nouvelle preuve que leurs intentions ont toujours été dirigées vers le bien

» Je ne dois pas omettre de parler de l'aristocratie du commandant de la garde nationale; il nous a toujours empêcnés de porter la cocarde nous avons tout au plus cent aristocrates dans la ville. Pour moi, je me suis toujours montré un des plus zélés partisans de la Révolution."

Après plusieurs députations de quelques départe-public. ments, de la congrégation de la doctrine chrétienne et des écoliers du collège de Dôle, les officiers municipaux de Schelestadt sont admis, M. le president leur fait lecture du décret du 8 juin dernier, qui leur or donne de venir rendre compte de leur conduite. Le maire de cette ancienne municipalité, qui portait la parole, après avoir fait plusieurs observations sur les diverses parties du décret, continue ainsi :

M. LE PRÉSIDENT L'Assemblée nationale prendra en considération les motifs que vous venez de lui exposer; vous pouvez vous retirer.

M HENRY, rapporteur : Tout ce qui vient d'être dit dans l'affaire de Schelestadt ne détruit pas le compte rendu. S'il était nécessaire de rentrer dans la discussion, je prouverais facilement que le maire s'est toujours mis à côté des faits. Le comité est informé que tous ses officiers municipaux viennent d'être nommés de nouveau, à l'exception de celui qui, pour avoir soutenu la cause des prisonniers, a été excepté de se rendre à la barre.

L'Assemblée ordonne le renvoi du mémoire de la municipalité de Schelestadt au comité des rapports. M. le président annonce que le résultat du scrutin, pour la nomination d'un nouveau président, a donné 221 voix à M. Treilhard, 140 à M. Richier, et 120 à M. Riquetti l'aîné.

- Les nouveaux secrétaires sont MM. Rewbell, Dumetz et l'abbé Coster.

Tous les citoyens de Schelestadt ont rendu justice aux anciens officiers municipaux, les élections vienrent d'être recommencées en présence des commis saires du roi, en exécution de votre décret, et ceux même que l'excès de leur zèle soumet en ce moment à votre censure, sont choisis quoique absents, pour monter aux mêmes places dont ils étaient descendus. Qu'il soit permis à ces officiers de s'honorer auprès de l'Assemblée de cette nouvelle marque de confiance, et de solliciter quelque intérêt, en paraissant devant elle investis de l'opinion favorable de leurs concitoyens. Ceux-là ont rendu quelques services à leur patrie, qui absents et occupés à remplir une mission qui aurait pu les flétrir, si leurs intentions n'eussent pas été pures, recueillent le prix le plus précieux de l'estime publique. Mais une nouvelle difficulté s'élève; elle doit être soumise à votre décision par les commissaires qui ont présidé à l'élection. M. Herremberger, qui quittait les fonctions de maire, vient d'être --M. BROGLIE: Avant de vous rappeler le point auelu de nouveau. Les commissaires ont vérifié quelle quel vous avez laissé hier l'affaire d'Orange, je dois était sa part de contribution directe, il était porté sur vous annoncer que le vœu du comité est de vous enle rôle pour 3 liv. de capitation; mais il est propriégager à prendre le même parti que vous avez pris taire par indivis avec sa mère et ses sœurs de biens pour les colonies, c'est-à-dire nommer, parmi les restés en commun, et pour lesquels il paie, et au- membres de l'Assemblée, un comité de six membres, delà, les 10 liv. de contribution exigées pour être éli- pour s'occuper exclusivement de cette affaire. — II gible aux places de la municipalité. La mère de M. nous a été fait lecture hier de la lettre du maire d'OHerremberger en a fait sa déclaration. Les commis-range par laquelle il nous apprend que le service desaires n'ont pas cru devoir prendre sur eux de provient de jour en jour plus pénible à Avignon, que la noncer sur cette élection, et l'ont soumise à l'Assemblée nationale. Sans doute les commissaires du roi ont ignoré que le comité de constitution, consulté plusieurs fois sur cette question, a répondu : « Que les frères communiés et les fils de famille à qui le père a donné une propriété, dont il s'est néanmoins réservé l'usufruit, sont censés payer une partie de l'imposition directe portée sur les rôles, sous le nom du père, de l'aîné des usufruitiers ou du chef de la communion ou communauté..

» Les commissaires ont encore ignoré que cet avis du comité de constitution était maintenant une loi, puisqu'un décret du 29 mai s'explique en ces termes : Pour déterminer la qualité de citoyen actif, il faut avoir égard, non-seulement à la capitation et aux impositions territoriales, mais encore aux taxes pour la milice et l'industrie, et aux impositions affectées sur les biens communaux, lesquelles doivent être considérées comme des impôts directs.» Comment est-il possible qu'après une décision aussi précise, et lorsqu'il était prouvé que le maire nouvellement élu payait, et au-delà, la taxe exigée sur les biens qui sont communs entre sa mère, ses sœurs et lui, les commissaires aient hésité à proclamer l'élection?

» Les officiers municipaux, collègues de M. Herremberger, dans sa disgrâce et dans l'épreuve qu'il fait de nouveau de la confiance de ses concitoyens, ne se permettront pas d'en dire davantage en faveur de son élection. M. Herremberger n'entreprendra pas davantage de la défendre; il attendra dans le silence la justice que l'Assemblée daignera lui rendre quel que soit le jugement qui prononcera sur cette élection, ses collègues et lui se féliciteront d'avoir paru dignes à leurs concitoyens de leur confiance, lors même qu'ils paraissaient devoir être oubliés, et d'avoir à présen

misère y est à son comble et qu'il est même à craindre que les malheurs de cette ville ne réagissent sur Orange; je vais vous donner une seconde lecture du projet de décret que je vous ai présenté hier au nom du comité des rapports. L'Assemblée nationale, après avoir entendu le compte qui lui a été rendu par son comité des rapports, des lettres et procès-verbaux en date du 7 juillet, adressés par M. le maire et MM. les officiers municipaux d'Orange, a décrété et décrète que son président se retirera par-devers le roi, à l'effet de supplier Sa Majesté de donner les ordres les plus prompts pour qu'il soit envoyé à Orange le nombre de troupes de ligne qui sera jugé nécessaire pour veiller au maintien de la tranquillité publique et à la sûreté de cette ville.

M. BOUCHE: La cause des troubles d'Avignon est connue et je pense qu'elle vous honore; c'est le désir de vivre sous votre Constitution qui cause son agitation passagère. Le comtat Venaissin où depuis le mois dé décembre, un esprit malin souffle le venin de l'aristocratie.... (On applaudit dans la partie droite.)

Le comtat Venaissin, dis-je, n'était pas disposé à suivre cet exemple, et mettait tout en œuvre pour arrêter les démarches de la ville d'Avignon; les moyens que cette petite province a imaginés, ont enfin occasionné une explosion, et ce ne fut qu'après que 30 patriotes d'Avignon eurent été couchés sur le carreau que le reste repoussa la violence par la force légitime; la garde nationale d'Orange est venue à leur secours, et c'est alors qu'on a remis entre ses mains 24 prisonniers, instruments funestes des troubles qui ont agité Nimes, Uzès, et quelques autres villes de Provence et du Dauphiné. Aujourd'hui la ville d'Orange vous demande du secours, sans doute vous ne pouvez le lui refuser; elle sollicite aussi en faveur d'Avignon,

Paris. Typ. Henri Plon, rae Garancière,

et

yous ne croyez pas pouvoir satisfaire à cette dernière instance, sous prétexte que cette ville n'est pas française; mais beaucoup de personnes ignorent peut-être que vous y avez des greniers et des entrepôts de tabac; tous ces objets demandent votre protection. Vous la devez à une ville française par ses principes, à une ville qui sert votre commerce, et envers laquelle vous êtes obligés par des traités particuliers; tandis que Vous différez, une ville voisine où se trouve le cratère de cette infernale machination, tente de s'emparer de 80 canons qui sont dans Avignon, afin de les faire transporter dans les villes les plus aristocratiques du Midi; c'est alors que les troubles deviennent de plus en plus redoutables. Dans le moment où je parle, le ministre envoie à Avignon un régiment suisse : pourquoi un pareil ordre? la ville ne veut recevoir que les troupes que l'Assemblée nationale lui enverra : si ce régiment entre par d'autres ordres que par les vôtres, tout est perdu pour Avignon et le comtat Venaissin, ce pays gangrené d'inimitiés contre votre Constitution. Je suis ici l'organe des provinces du Midi; elles réclament la possession d'Avignon, les gardes nationales la regardent comme leur sœur; son plus cruel ennemi dans ce moment, c'est une ville française qui n'en est éloignée que d'un quart de lieue; c'est là que l'on fabrique 18 mille cartouches, et c'est aussi là que l'on assure que vos ennemis tiennent leurs conciliabules. Avignon demande du secours, et vous ne pouvez lui en refuser. Si la brave et généreuse garde nationale parisienne n'en était pas si éloignée, comme nous la verrions voler à son secours, avec quels efforts magnanimes on la verrait rétablir dans cette contrée l'abondance et la paix! Mais les gardes nationaux d'Orange sont sans doute ici présents; ils m'entendent, ils sont Français, ils se souviennent de l'expédition de l'armée bordelaise pour Montauban; ils savent que l'autel de la patrie est partout où il y a des hommes à consoler, et que la patrie des infortunés est partout où il y a des hommes qui ont le cœur des Français.

Voici le projet de décret que j'ai a vous proposer: L'Assemblée nationale décrète qu'il sera nommé, pour s'occuper de l'affaire d'Avignon, un comité de six membres chargés d'en faire le rapport sous quinzaine; décrète en outre que son président se retirera par-devers le roi, pour le supplier de donner des ordres pour qu'il soit envoyé des troupes à...... et à Villeneuve-les-Avignon, et que là elles attendront les ordres du pouvoir exécutif, d'après les décrets de l'Assemblée nationale.

M. L'ABBÉ MAURY: La question qui vous est soumise dans ce moment, et sur laquelle vous avez entendu votre comité des rapports, était simple dans son origine; le seul objet véritablement digne d'intéresser votre humanité, c'était l'élargissement des prisonniers détenus à Orange. (Un député d'Orange prétend que M. l'abbé Maury s'écarte de la question. Je ne sais pourquoi la question s'est généralisée, et comment les vues du préopinant lui ont donné de nouveaux objets qui devaient lui être étrangers; je ne cherche point pour cela à éluder la véritable question; je rappelle seulement ce qu'a dit le préopinant; il vous a entretenus de Nimes, d'Uzès, d'Avignon, du comtat Venaissin, et le sort des prisonniers d'Orange est précisément le seul dont il n'ait pas parlé. (Cinq à six membres de la partie gauche interrompent et prétendent que ce n'est point la question.) L'analyse est exacte, et ce n'est pas moi que, vous pouvez accuser de m'écarter de la question. Les murmures de ceux qui avaient déjà interrompu l'orateur, recommencent.)

M. l'abbé Maury descend de la tribune. On l'invite à continuer son discours.

M. L'ABBÉ MAURY: Des murmures bien prononcés m'annoncent de ne pas plaider une cause qui pourrait

compromettre des intérêts plus chers que ceux que défends. J'abandonne la parole.

je

M. LE PRÉSIDENT: Le calme des délibérations et la liberté des opinions sont la première loi de cette Assemblée ; j'avais supplié de ne pas interrompre l'orateur: on l'a fait, et on a eu tort. Je prie M. l'abbé Maury, au nom de toute l'Assemblée, de remonter à la tribune.

M. L'ABBÉ MAURY: Je ne croyais pas m'écarter de l'état de la question, en suivant la route qu'avait tracée M. Bouche; je devais penser que puisqu'on avait la liberté indéfinie de s'écarter d'un rapport, cette liberté devait exister pour tous les membres de l'Assemblée; je sais bien qu'il n'est question que de la ville d'Orange, et cependant M. Bouche vous a toujours parlé d'Avignon, du comtat Venaissin, et il a tâché de vous faire apercevoir, à travers le nuage d'aristocratie dont il s'est enveloppé, des principes aristocratiques qu'il combat avec un zèle si édifiant depuis le commencement de cette Assemblée : il m'est sans doute permis de dire que les troubles de Nîmes n'ont aucun rapport avec les troubles d'Avignon; que ces premiers ont eu pour prétexte la cause de la religion: on sait que Nîmes contient des protestants parmi ses habitants, et il n'en existe pas à Avignon. Quel rapport peuvent donc avoir entre eux des troubles si différents les uns des autres? Ou il faut renoncer à ce systême, si souvent mis en usage de nous présenter les villes de Nîmes et Uzès comme le théâtre du fanatisme; ou il faut avouer que les troubles d'Orange n'ont rien de commun avec ceux de ces deux villes malheureuses. On vous a parlé de la ville d'Avignon comme de votre propriété : le moment n'est pas venu de prouver la légitimité du Saint-Siége. C'est une ville dont il jouit depuis plus de 400 ans, une ville prise trois fois par la France, et toujours restituée. Louis XIV et Louis XV la rendirent volontairement à son souverain légitime, et l'on peut soutenir que ces trois entreprises rétractées sont le plus beau titre de sa propriété.Clément VI l'acheta en 1348 de Jeanne, reine de Sicile: elle a eu de tout temps une administration séparée et des titres différents de ceux du Comtat. Nous sommes bien loin de nous opposer à cette partie du décret par laquelle on propose de supplier le roi d'envoyer des troupes à Orange, nous désirons qu'elle soit défendue; que le maire, ce citoyen estimable, jouisse des avantages qu'il nous a procurés à nous-mêmes. Mais si l'on donnait plus d'extension à cette disposition, on préjugerait la grande question sur laquelle l'Europe entière a les yeux ouverts, celle de savoir s'il est permis à une ville de changer de domination et de souverain.

La ville d'Avignon n'a pas demandé de troupes étrangères; si de nouveaux troubles nous préparaient de nouveaux malheurs, alors nous aurions recours peut-être à la protection des Français; mais nous ne leur demanderions pas de protéger la révolte. (Je demande, s'écrie M. Bouche, que l'orateur déclare s'il est Français; car s'il est étranger, il doit descendre à la barre.) Je ne regarderais point comme une peine de descendre à la barre. Cet ordre, s'il m'était donné par l'Assemblée, m'honorerait, parce qu'il attesterait mon respect et mon patriotisme. La France cst bien maî tresse de disposer de ses troupes à son gré, mais elle ne peut pas s'emparer du territoire d'autrui. Je le répète encore; si l'embarras des circonstances exige des secours étrangers, les Français ne nous abandonneront pas. La ville d'Orange n'a-t-elle pas déjà eu la gloire de faire cesser les meurtres? Elle a, par malheur, été trompée sur ces hommes morts martyrs de la patrie, dont le gibet est devenu un autel patriotique, qui immortalisera leur nom dans cette malheureuse province. Nous vous demanderons que l'Assemblée se borne à accéder aux vœux de la ville d'Orange; mai que le décret qu'elle rendra n'indique en aucune ma

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Constituante. 236. iv.

nière les secours que l'on peut porter à Avignon : la France a solennellement renoncé à tout esprit de conquête; elle protégera ses voisins, mais elle n'attentera jamais à leur liberté.

M. CLERMONT-LODEVR: Quand j'ai vu à l'ordre du Jour l'affaire d'Orange, j'avais pensé que vous vous occuperiez du sort des Avignonnais détenus; mais on s'est emporté, on s'est porté à des invectives contre le comtat Venaissin et Villeneuve. On a voulu vous faire entendre que les troubles d'Avignon étaient 'ies avec ceux de Nimes; on n'a pas réfléchi qu'il n'y a à Avi gnon qu'une seule religion. On vous à dit que la ville de Carpentras était le cratère, on a voulu dire ie foyer du volcan qui avait occasionné une explosion dans cette contrée; elle a le plus grand intérêt à ce que l'ordre y soit maintenu; on a prétendu aussi que c'était la cause de l'aristocratie. Eh bien! parmi les prisonniers détenus, qui dans ce système seraient des aristocrates, il y a des portefaix, des artisans, de petits marchands détailleurs, trois seulement appartiennent à la classe de la noblesse, ou de la ci devant noblesse; ils n'ont commis d'autres crimes que ce qui était autrefois une vertu; la fidélité à leur souverain. Je demande qu'on s'occupe du sort des prisonniers. La discussion est fermée.

On demande la priorité pour le projet du comité. M. MALOUET: Je demande la parole pour proposer un amendement. Si l'Assemblée acceptait purement et simplement le décret qui lui est présenté par le comité, elle semblerait autoriser la détention des prisonniers d'Orange. Voici comme je proposerai de rédiger l'article:

L'Assemblée nationale décrète que son président se retirera par-devers le roi, pour le supplier d'interposer ses bons offices et sa protection, afin de rétablir la paix à Avignon; il sera accordé un asile inviolable sur le territoire français à tous ceux qui, pendant les troubles, se sont absentés ou s'absenteraient d'Avignon. Enconséquence les habitants transférés à Orange auront la liberté, et pourront, s'ils le veulent, sortir du territoire français. Sera aussi suppliée S. M. de faire passer des troupes dans les lieux voisins d'Avignon; elles ne pourront agir qu'à la réquisition des municipalités voisines, seulement pour maintenir la paix..

Ce décret est écarté par la question préalable. Le projet du comité est adopté comme nous l'avons rapporté ci-dessus.

M. L'ABBÉ MAURY: Je demande qu'on ajourne à jour fixe la question des prisonniers.

M. BROGLIE: Je renouvelle la motion que j'ai déjà faite, et je soutiens qu'il est impossible de faire de rapport des prisonniers, sans entrer dans tous les détails des troubles d'Avignon.

Une députation de la municipalité de Paris est

admise à la barre.

M. l'abbé Fauchet (1) obtient la permission de parler.

Lorsqu'il s'agit de Franklin, la commune ne craint pas de vous importuner; elle a pensé entrer dans vos vues, en ordonnant une cérémonie funèbre pour célébrer la mémoire de ce grand homme : il manquerait quelque chose à cette solennité, si vous n'y assistiez. pas. La commune est à vos ordres pour le jour et l'heure qu'il vous plaira d'indiquer.

M. LE PRÉSIDENT: L'Assemblée nationale voit avec intérêt les honneurs rendus à l'homme le plus fameux dans les annales des deux mondes: elle prendra votre demande en considération.

(1) Ce même abbé Fauchet devint bientôt évêque constitutionnel, et fut ensuite élu à la Convention nationale; il y siégea à côté des Girondins. Compromis dans l'affaire de Charlotte Corday, il périt avec ses éloquents amis. L. G.

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-M. Crillon le jeune demande à faire lecture d'une lettre écrite par le maire d'Orange; mais il observe que ce n'est point à lui que la lettre est adressée.

On s'oppose à la lecture de cette lettre, dont personne ne peut assurer la garantie.

M. CLERMONT-LODÈVE: On a bien lu la lettre calomnieuse d'un cabaretier dans l'affaire de M. Lautrec. M. le président consulte l'Assemblée pour savoir si la lettre sera lue. Deux épreuves successives paraissent douteuses.

M. L'ABBÉ***: Et moi aussi, j'ai reçu une lettre de M. le maire d'Orange, puisqu'il est mon cousin-germain: il s'est laissé attendrir, et demande qu'on procure du soulagement aux prisonniers, et même la liberté. Mais comme cette demande, si elle était accordée, pourrait avoir des suites funestes, je demande qu'elle soit regardée comme non avenue.

L'Assemblée décrète qu'il sera nommé un comité de six personnes, chargé specialement de l'affaire d'Orange. La séance est levée à 9 heures.

SÉANCE DU DIMANCHE 18 JUILLET. On lit le procès-verbal de la séance d'hier.

-M. Le Chapellier propose au nom du comité de constitution, un décret qui autorise l'uniforme adopté par les gardes nationales députées à la fédération, et qui enjoint aux gardes qui n'en ont pas de le prendre.

M. GOUTTES: Je demande l'ajournement de la seconde partie du décret. Nous ne pouvons point obliger nos paysans à faire une dépense aussi considérable

M. BARNAVE: Lorsque l'Assemblée organisera les gardes nationales du royaume, il sera évidemment nécessaire de ne faire qu'un même uniforme, car on ne pourrait trop démontrer par les signes extérieurs les mêmes parties d'un même tout. Nous devons donc attendre l'époque de cette organisation, et autoriser seulement à porter l'uniforme adopté par les fédérés, sans engager les citoyens a des frais peut être inutiles.

M. DUPONT : L'uniforme est un moyen de se reconnaître et de se rallier, qui doit nécessairement être le même, afin d'éviter les meprises. J'observe en outre que les formes agissent puissamment sur le cœur des hommes, et que tel homme, pris comme auteur de désordres en habit gris, serait le plus ferme soutien de l'ordre en habit bleu. Cette dépense se fera peu à peu. Je suis de l'avis du comité.

M. RÉGNAULT, député de Saint-Jean-d'Angely: Nous devons autoriser chaque municipalité à décider l'uniforme que devra porter la garde nationale de son territoire.

M. ANDRÉ : La couleur d'un uniforme ne peut pas être l'objet d'une longue réflexion ainsi, pourquoi ne déciderait-on pas sur-le-champ la couleur de celui de toutes les gardes nationales du royaume? Cependant comme plusieurs personnes seront bien aises de réfléchir là-dessus, je pense que demain matin le comité de constitution doit présenter la détermination d'un uniforme général. En conséquence je demande la question préalable sur le décret proposé par M. Le Chapellier.

L'Assemblée arrête que demain le comité de constitution présentera son travail sur l'uniforme que porteront toutes les gardes nationales quand elles seront organisées.

M. HARAMBURE: Les députés des régiments à la confédération, m'ont dit que leurs corps les avaient chargés de rapporter la constitution militaire. L'envie de voir renaître l'ordre et non l'intérêt, ont fait naître ce désir. Un règlement de police intérieure est ce que les soldats demandent avec le plus d'instance. Parmi les raisons qu'ils ont présentées, se trouve celle-ci, qui est d'un grand poids : Quand on rappelle les soldats aux anciennes ordonnances, ils répondent qu'elle

ne sont pas conformes à la Constitution. Je demande que le comité militaire nous fasse connaître si son travail sur la police intérieure des corps est en état d'être présenté à l'Assemblée. J'ai une seconde observation à vous faire; elle est relative à un objet sur lequel le comité et le ministre sont d'accord. Les porte-étendards et les porte-drapeaux n'avaient que le dernier rang des sous-lieutenants; le comité propose de leur faire reprendre leur rang quand ils seront lieutenants, du jour où ils ont obtenu leur brevet d'enseignes; et de même pour les capitaines. Il serait possible de décider cela sur-le-champ. Les députés des troupes de ligne m'ont aussi chargé de vous témoigner la satisfaction avec laquelle ils ont vu fixer à 150 livres le minimum de la retraite des soldats après trente ans de service. (On demande le renvoi au comité militaire.) Ils partent mercredi prochain; on pourrait décider encore, avant leur départ, le doublement ou le tiercement des régiments.

Le renvoi au comité militaire est ordonné.

- M. le président annonce que M. Dosfant demande la parole pour présenter une motion sur les dispenses de mariage.

La motion annoncée est renvoyée aux comités ecclésiastique et de constitution.

-M. LE COUTEULX: Je suis chargé de vous rendre compte de l'état actuel de la contribution patriotique. Malgré vos derniers décrets, 28,000 municipalités sont en retard, et n'ont encore envoyé ni rôles, ni aperçus. Les déclarations de 13,424 municipalités présentent une somme de 98,428,738 livres. Cette contribution est plus nécessaire que jamais; elle doit être considérée comme un supplément au revenu public. Nous avons pensé qu'il serait convenable d'inviter les députés confédérés à engager leurs compatriotes à remplir ce devoir, dont l'observation rigoureuse importe à la prospérité publique et à la liberté. C'est pour nous promettre de faire tout ce que demandent la félicité du peuple et la liberté que nous nous sommes

confédérés.

M. CUSTINE: Il faudrait en même temps inviter les fermiers et les débiteurs des droits conservés à payer ces droits et leurs fermages. Leur défaut de paiement est la cause du retard d'un grand nombre de citoyens. M. BARNAVE: Je réponds à la proposition du comité, que ceux qui sont chargés de faire des lois ne doivent point se borner à des exhortations, quand ces lois ne sont pas exécutées. Je pense que le comité des finances doit présenter un décret, qui indiquerait des moyens de coaction, dont pourraient user les municipalités à l'égard des contribuables, et des moyens de même nature pour les départements et les districts sur les municipalités. Je proposerai de décréter le renvoi au comité en ces termes.

M. Barnave lit une rédaction de sa proposition : elle est décrétée comme suit :

L'Assemblée nationale charge son comité des fihances de lui présenter à la séance prochaine un projet de décret sur les moyens coactifs qui doivent être mis entre les mains des municipalités, pour procurer les déclarations exactes et l'acquittement régulier de la contribution patriotique, et sur ceux qui doivent être indiqués aux directoires de district et de département, pour obliger les municipalités à remplir cette partie de leurs fonctions avec toute la diligence que l'intérêt public exige..

-M. LE COUTEULX : Les commissaires que vous avez nommés pour suivre la fabrication des assignats, m'ont chargé de vous rendre compte des soins qu'ils ont pris pour cette opération. Les papiers sont arrivés le 22 du mois de juin; les modèles ont été arrêtés le 27, deux jours après l'impression a commencé; on tire 14 mille par jour, le nonibre augmentera, et lundi prochain il sera porté à 16 mille. La gravure ne peut

pas aller aussi vite. Cependant M. Saint-Aubin a tellement multiplié les presses, qu'il y a actuellement 80 planches gravées de sa main, sur lesquelles se fait chaque jour un tirage considérable: 218 mille assignats sont maintenant imprimés, 46 mille sont prêts à être délivrés au caissier de l'extraordinaire, ce qui fait une somme de 15 millions. Les bureaux du trésorier sont disposés: ainsi, à cet égard, il ne pourrait y avoir aucun retard. Cependant le comité a cru qu'il ne fallait pas commencer l'échange des billets de la caisse d'escompte avec les assignats avant d'en avoir un nombre assez considérable pour répondre à l'empressement du public, et pour que le service une fois commencé ne soit point interrompu. Le comité a pris en considération les inquiétudes que cause, dans les provinces, l'approche du terme de rigueur fixé pour les échanges. Personne n'oserait se charger d'un billet portant promesse d'assignats qui devrait être, dans quinze jours, échangé à Paris, sous peine de perdre les intérêts depuis le 15 avril.

M. Le Couteulx lit un projet de décret.

Après quelques observations, l'Assemblée adopte un amendement proposé par M. Folleville, et qui a pour objet d'exiger du comité des finances, dans le délai de quinze jours, un rapport sur l'époque de l'émission des assignats et des échanges.

Le projet de décret, ainsi amendé, est adopté en ces termes :

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L'Assemblée nationale, sur le compte qui lui a été rendu par ses commissaires de l'état actuel de la fabrication des assignats, considérant qu'il convient de ne pas en commencer les échanges contre les billets de la caisse d'escompte, avant d'en avoir réuni une quantité assez considérable pour satisfaire à l'empressement du public, et de ne pas en interrompre le service, décrète que le terme qui avait été fixé pour les échanges, par le décret du 15 juin au 15 août, est prorogé. L'Assemblée nationale se réserve de déterminer par la suite le terme de cette prorogation, qui sera indiquée et annoncée un mois avant le jour auquel elle aura été fixée.-Le comité des finances est chargé de faire, dans le terme de quinze jours, un rapport sur la fixation de l'époque à laquelle commenceront l'émission et l'échange des assignats, ainsi que sur les dispositions qui seront adoptées pour cette émission et pour ces échanges.

M. ANSON: Vous savez qu'il y avait une caisse qui acquittait les pensions et les rentes qui existaient sur le clergé; elle a fixé les regards du comité; il y a vu les heureux effets d'une sage administration, et de l'esprit d'ordre du dernier agent du clergé, dont nous avons plusieurs fois admiré les talents aimables dans cette Assemblée (1). La masse des rentes et pensions que payait le receveur-général du clergé, montait à cinq millions sept cent mille livres; elles étaient acquittées de six mois en six mois avec le produit des dé cimes; comme il n'y a plus de décimes, et que la nation sera chargée des dépenses qui étaient acquittée. par cette caisse, il faut faire cesser la gestion du re ceveur-général après l'exercice de 1789. Mais les décimes n'ont pas été entièrement perçus; il est convenable de laisser les receveurs des décimes faire les recouvrements. Le projet de décret que le comité des finances m'a chargé de vous proposer est extrêmement instant; il présente l'extraction de la dernière pierre de l'antique forteresse du clergé, à laquelle Vous avez substitué un édifice admirable par sa simplicité.

(1) Cet agent du clergé était l'infatigabl Camus, dont l nom se trouve à la tête de chacun des rapports faits à l'As semblée sur les finances, les pensions, le livre rouge, etc. Camus, homme probe, sévère et positif, s'était posé comme l'adversaire le plus redoutable du ministre des finances, Necker.

L. 6.

M. Anson fait lecture de ce projet de décret.

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a éclairer la discussion. (L'Assemblée a décidé qu'ellç

I ANECDOTE.

Au moment où les députés du Béarn à la fédération sont entrés dans la rue de la Ferronnerie, ils se sont arrêtés à l'endroit ou Henri IV a été la victime du fanatisme, et dans le plus morne silence ils ont rendu au buste de ce prince les honneurs militaires. L'acte religieux de ces digr.es béarnais a enlevé tous les applaudissements.

Théatre de MONSIEUR.

M. L'ABBÉ MONTESQUIOU : Je ne viens point contra- entendrá la lecture au rapport. ) rier les propositions qui vous sont faites par votre comité, elles sont simples, vous les avez rendues nécessaires mais puisque décidément vous détruisez jusqu'à la dernière pierre de cette antique forteresse, vous me permettrez de solliciter votre bienveillance et votre justice, pour l'administration de ia caisse du elergé. Le comité vous propose bien de décider que les services des personnes qui y étaient employées se ront pris en considération, mais je ne sais si cette perspective lointaine suffira à votre humanité; il fant que l'Assemblée sache que cette caisse, par la sagesse de son administration, a diminué la dette publique au lieu de l'augmenter, elle a fait baisser les intérêts jusqu'à 4 un quart, et dans vingt années de travaux, cette administration a procuré une bonification de onze cent mille livres. Jamais elle n'a donné lieu à aucune plainte: votre comité verra qu'elle est dans le plus grand ordre; l'Assemblée qui toujours a montré de l'estime et de la bienveillance pour les services utiles, ne refusera pas d'accorder aux personnes qui étaient employées dans cette administration la moitié de leurs traitements, ce qui ne fera qu'une somme de 30,000 livres, qui sans doute ne vous paraîtra pas extraordinaire, quand il s'agit d'une caisse aussi considérable. La suite à demain.

'T

ERRATA.

Par un accident arrivé au manuscrit de la séance du dimanche 18 juillet, no 199, il se trouve dans cette séance une Tacune qu'il est indispensable de rétablir. Le discours qui suit doit se placer, p. 149, 1o colonne, après la ligne 66.

M. WIMPFFEN Je ne monte à la tribune que pour m'acquitter d'an devoir envers l'Assemblée nationale, dont plusieurs membres peuvent ignorer que la plupart des pensions des gens de l'armée de terre et de l'armée de mer étant tarifées par les ordonnances, ne doivent pas être confondues dans la proscription générale qu'on vous propose. J'appelle ceux-ci les justes, et vous savez qu'avant que Dieu lançât le fen du ciel sur Sodôme et Gomorrbe, il en fit sortir les justes. Je demande donc l'exception honorable en faveur de ceux des gens de guerre, de terre et de mer qui ne peuvent avoir participé à la dilapidation du trésor public. Il faut que vous sachiez encore que les ministres, les inspecteurs et les colonels en usaient avec un arbitraire révoltant à l'égard des officiers qu'ils voulaient faire retirer on réformer; et si aujourd'hui se présentaient devant vous pour vous demander justice, vengeance et réparation, tous ces officiers, victimes du despotisme des colonels, qui ont été forcés d'accepter la réforme on la retraite, après vingt ou vingt-quatre ans de service, et souvent plusieurs campagnes, par cela seul que leurs têtes ne paraissaient pas assez dociles pour recevoir le joug dont on a vainement cherché à dégrader l'armée, vous croiriez leur devoir cette vengeance et cette réparation qu'ils viennent vous demander. Et cependant si vous prononciez la suppression générale, les officiers ne se trouvant pas tous disposés à la faveur des nouvelles lois, seraient encore victimes de l'Assemblée nationale, après l'avoir été des ministres, et vous exerceriez ainsi cruauté sur cruauté. Sans doute tout ce que vous avez appris de révoltant sur la distribution des grâces vous a remplis d'indignation; et l'indignation est la colère du juste; mais observez, je vous prie, qu'il ne vous a pas été rapporté un seul abus de faveur qui ait eu ancun grade tarifé pour objet. Ce n'est pas à ceux-là que la fortune prostituait ses caresses; semblable à ces femmes qui ont le cœur dans la tête, et qui ne choisissent leurs amants que sur le rang qu'ils occupent et le bruit qu'ils font dans le monde, la fortune n'est jamais descendue à cette classe de subalternes.

Je fais donc la motion expresse que tout ce qui est relatif aux pensions des gens de guerre, de terre et de mer, soit renvoyé au comité de la guerre et de la marine, réuni à celai des pensions, pour vous en être rendu compte dans quinzaine, et que d'ici là tout demeure suspendu à cet égard.

Si vous le voulez, Messieurs, je vais vous faire lecture du rapport du comité militaire. Il n'est pas long, et il est propre

La Famille patriote ou la Fédération a été donnée vendredi dernier à ce théâtre avec un très grand succès, comme on devait s'y attendre. On est bien sûr des applaudissements lorsqu'on présente à un peuple qui vient de célébrer avec le plus vif enthousiasme la conquête de sa liberté, l'expression de tout ce qu'il a senti, le tableau de tout ce qu'il a vu; lorsqu'on lui retrace tous les sentiments de civisme qu'il porte dans son cœur, et lorsqu'on y joint l'éloge de tous ceux avec lesquels il vient de resserrer les nœuds sacrés de la fraternité. Cette pièce ne prétend point à l'intrigue; ce n'est qu'une image fidèle des conversations que la Révolution fait naître chaque jour dans les sociétés. On y entend les raisonnements de tous les bons citoyens, et même des mauvais; car on a introduit dans cette pièce ce qu'on appelle un aristocrate; un secrétaire du roi, qui a depuis peu acheté les priviléges de la noblesse, et qui regrette beaucoup d'avoir perdu son argent. Emu cependant par le récit de la fête, il se corrige à la fin et fait le sacrifice de ses titrès sur l'autel de la patrie. On y voit aussi un prienr Victoria, qui perd toute sa fortune au nouvel ordre de choses; mais qui n'en reste pas moins attaché anx bons principes, et qui achève même de convertir le premier. Ajoutez à cela une foule de détails domestiques très agréables, et vous aurez une idée de cette pièce, dont on ne peut bien sentir tout le mérite qu'à la représentation. Elle est de M. Collot-d'Herbois, déjà connu par plusieurs production: qui ont ea`du succès en province et à Paris.

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