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Nous avons pour garant des faits une lettre du ministre et l'assertion d'un de nos collègues. Jamais nos décrets ne doivent être rendus sur des assertions isolées et appuyées par des assertions ministérielles. Nos inquiétudes sont d'autant mieux fondées, qu'on n'a pas laissé au comité le temps d'éclaircir les faits. D'après ce qui m'est dit en ce moment par les députés des colonies, je demande le renvoi du projet de décret au comité colonial.

MM. Reynaud et Gouy, députés de Saint-Domingue, appuient la proposition du renvoi au comité colonial. M. ARTHUR DILLON: Si les craintes qui s'élèvent quelquefois contre les ministres sont fondées, ce n'est pas aujourd'hui. Comment peut-on savoir un événement arrivé à deux mille lieues, si ce n'est par le ministre de la marine? M, La Luzerne a fait remettre au comité un compte des faits, signé de lui et rendu par un commandant de la marine. J'ai reçu ce matin une lettre de MM. Labermoudrère et compagnie, de Dunkerque, par laquelle ils me mandent que le navire la Thérèse, arrivé le 27 dans ce port, a apporté la nouvelle de l'incendie du Port-Louis. Je propose, pour tranquilliser sur l'armement, qu'il soit dit dans l'article premier, que trois cents hommes seront transportés sur un bâtiment marchand, qui portera en même temps des armes et des vivres. Les armes que je demande sont trois cents fusils pour les habitants, qui, au nombre de trois cent cinquante, sont entourés de seize mille noirs, sortant à peine d'une insurrection qui a duré huit années.

On fait une lecture du projet de décret avec ce changement.

On demande à aller aux voix.

M. REYNAUD: Je propose l'ajournement à samedi, et le renvoi au comité des rapports et au comité colonial réunis.

On demande encore à aller aux voix.

M. TOULONGEON: On ne suit point dans ce décret la marche constitutionnelle. Il faut supplier le roi de mettre l'Assemblée à même de délibérer, en faisant connaître, par la voie des ministres, les secours qui seront nécessaires.

M. DESMEUNIERS: Le décret dont il s'agit est très important. La France ne veut pas la guerre; on n'accorderait pas indéterminément un armement et un envoi de troupes sans donner de l'inquiétude aux cabinets étrangers. Depuis que vous avez rendu sur la guerre un décret qui sera à jamais célèbre, il ne s'est point encore présenté l'occasion d'une délibération qui y eût quelques rapports. Je demande que pour consolider la maxine de la responsabilité, et consacrer la marche que les ministres doivent suivre en pareil cas, il soit décrété que le président se retirera pardevers le roi, pour prier S. M. d'ordonner aux ministres de notifier officiellement l'état de Tabago; ensuite le comité présentera un projet de décret. Cette proposition est adoptée.

M. NOAILLES: Quelques lettres particulières avaient laissé des doutes sur la soumission du régiment Royal-Marine. Une lettre du maire d'Uzès affirme que ce régiment est rentré dans l'ordre, qu'il a rappelé ses officiers, et qu'il est pénétré de reconnaissance pour la lettre que M. le président lui a écrite au nom de l'Assemblée nationale.

La séance est levée à quatre heures.

VARIÉTÉS.

Cas

Observations sur la guerre imminente entre l'Espagné et l'Angleterre, et sur les causes qui la préparent. ractère des guerres ministérielles des Français pendant le règne de Louis XV. - Principes des Républi ques, des Monarchies et des Etats despotiques sur la paix et la guerre. - Nécessité de lier les mains au ministère français sur cet objet.

Je devais lire, Monsieur, ce discours à la société des

Amis de la constitution, le 17 mai dernier; mais faute de préparation je n'ai pu qu'en dire deux mots; je le rétablis ici en partie, et sans autre préambule je veux démontrer

1° Qué dans les nations où le peuple exerce la souveraineté, une paix solide, des traités durables y font le bonheur du citoyen; 2° Que dans les puissances mixtes, où la souveraineté est partagée entre le roi ou un sénat d'un côté, et le peuple l'autre côté, la guerre est la perpétuelle ressource du prince et du sénat pour asservir le peuple;

de

3° Que dans les nations où le despote a ravi la souveraineté, des guerres longues, fréquentes, inutiles et toutes desastreuses, tourmentent sans cesse le citoyen, à cause de l'éternel intérêt que les grands et les ministres y ont de faire la guerre.

Il ne manque pas de preuves qui établissent la première de ces vérités; la paix dont jouissent les Américains; l'esprit pacifique de feur gouvernement, ce même caractère, qui fait le bonheur des Alpes Suisses, suffiraient pour l'etablir. A qui ces républiques pourraient-elles donc faire la guerre? Ont-elles des beaux-pères à établir rois en Pologne, comme Stanislas? Ont-elles des enfants d'un second lit et des cousins pour étendre des branches? L'usurpation du terrain d'autrui est une passion qui n'appartient qu'aux dynasties royales, tandis que le peuple souverain n'en connait d'autre que la prospérité de l'agriculture et de l'industrie. Vainement objecterait-on que la pauvreté et la situation des Alpes soumises aux Suisses, sont les causes de la tranquillité de cette portion de l'Europe, le côté gauche de ces montagnes, asservi à un roi, à été ravagé par son ambition sans cesse renaissante.

La seconde vérité n'est pas moins convaincante. Ainsi, en Angleterre, en Suède, en Hollande, où le prince et lá nation agissent de concert pour la guerre ou la paix, la paix ou la guerre, comme jadis à Rome, ont été constamment les moyens, les instruments du prince pour preparer une révolution ou soumettre le peuple. Ouvrez tous les manifestes du ministère français contre l'Angleterre, et vous verrez comme nos ministres prouvent à l'Angleterre, dans chaque guerre, qu'elle est le jouet de ses rois; comme ils lui prouvent avec éloquence, que les trois prétextes de Papisme, France et Prétendant ont été le signal preparatoire de la guerre; et aujourd'hui que l'Angleterre n'a plus à craindre de prétendant, que la France n'est plus son ennemie, et que le papisme n'est plus à redouter, ce mot Commerce devient le dernier retranchement du ministère angiais. En Suède, la guerre a été de même la ressource des ministres, parce que le retour d'un roi victorieux y avilit toujours le peuple, et asservit le sénat. Enfin, la paix a toujours été le seul élément de la Hollande; mais parce que quelques amants de la hiérarchie y favorisent un stadhouder, cette république, qui ne vit que de commerce, a été constamment le jouet de sa dynastie stadhoudérienne. Un tableau des guerres de la France, sous Louis XV, vous démontrera une troisième vérité. Soyons vrais, même contre nous-mêmes, toutes nos guerres ont été inutiles, prétextées, ministérielles, injuštes, désastreuses. Analysons ces cinq caractères dans les guerres de 1720, 1733, 1740, 1757.

1° Leur inutilité est évidente. En 1720, le règent seul y soutenait ses intérêts contre la branche espagnole notre alliée naturelle. En 1733, l'élévation de Stanislas en Pologne, ne pouvait être mise en balance avec les désastres de la guerre. En 1740, nous n'avions rien à craindre de l'Autriche, séparée de l'Espagne et attaquée par Frédéric. En 1757, il fallut peut-être se défendre des Anglais; mais nous avions provoqué la jalousie de ses ministres, en dilapidant nos finances et nous mettant dans la situation d'être impunément attaqués.

2o Le prétexte de ces guerres n'est pas moins coupable. En 1720, Dubois fait entendre au régent qu'il va établir ses droits naturels contre l'Espagne, tandis que la vraie cause de la guerre est la pension et le chapeau que lui pro mettent l'Autriche et l'Angleterre. En 1783, le prétexte est de relever la gloire de Stanislas détrôné; tandis qu'en 1726. on ne trouvait pas deshonorant de renvoyer l'infante et de prendre la fille de Stanislas détrôné. En 1740, le chimérique Belle-Isle determine madame de Mailly-Fleury et le roi à la guerre, pour démembrer l'Autriche que nous avions défendue en 1720; tandis que l'Autriche, qui avait perdu l'Espagne, était au niveau des autres puissances. En 1762, nous voulions soutenir, disions-nous, les Génois en Corse; et les ministres voulaient aussi leur ravir cette possession.

3° Après cela, l'injustice de nos guerres sera facile à démontrer. En 1720, on va combattre le petit-fils de Louis XIV, dont l'élévation avait tant coûté de sang français. En 1738, on veut, par une armée, déterminer et soutenir l'élection de Stanislas. En 1740, on veut démembrer les états d'une jeune orpheline, et on envoie en Ecosse un roi détrôné par son peuple, pour le despotisme inné dans sa famille, En 1762, on ravit la Corse aux Génois, et on la ravit aussi à la liberté que Paoli voulait etablir dans l'ile.

4o Le désastre de toutes ces guerres n'est pas moins évident. Croira-t-on que les Français n'ont pas joui de la paix pendant la moitié du règne de Louis XV? On ne se deterininait à des traités que lorsque la France était aux abois, chaque guerre nécessitait la ruine de nos campagnes, par

an, deux ou trois impôts, et occasionnait une guerre intestine avec le clergé ou le parlement. Nous avons uni, il est vrai, à l'empire français, nos bons frères les Lorrains; mais ce fut l'effet de la situation de l'Europe, plutôt que le fruit de nos conquêtes; nous n'avons fait la guerre qu'en sous-ordre et d'une manière subalterne; nous avons donné i l'Angleterre nos possessions dans les Indes; la Silésie au roi de Prusse alors notre allié; la Sicile, Naples et Parme à l'Espagne; voilà l'effet de nos guerres. Nous avons entichi nos voisins, et nous nous sommes appauvris. L'aveuglement de nos ministres a été tel, qu'ils se sont perdus eux-mêmes par leurs folies, puisque les guerres ont pré paré leur chute et la vengeance des peuples en 1790. Enfin, toute la France est convaincue aujourd'hui que la guerre était la moisson des grands et des ministres, un des moyens du despotisme. Voyez dans le Livre-Rouge la troi sième et la quatrième génération des militaires récom pensés, et la somme totale et permanente des pensions qui pesait depuis des siècles sur la France.

Après ces faits et ces vérités, livrerez-vous, Messieurs, à nos ministres le pouvoir de répandre le sang? Leur don nerez-vous le droit de paix et de guerre? Les laisserez vous même concourir à la confection des traités, eux qui n'en ont connu d'autres que ceux de leur intérêt versatile ? Voyez en Angleterre, où les deux puissances travaillent de concert à la paix ou a la guerre, le peuple joué et trompé depuis un siècle, malgré sa prétendue liberté. Voyez la dette dont elle est écrasée, malgré sa prétendue puissance d'accorder ou de refuser l'impôt. Et quelle différence mettez-vous entre la France despotique, qui fait pendant un siècle des guerres ruineuses et injustes, par l'effet des deux mots, je le veux; ou l'Angleterre avisée, qui la négocie avec le parlement, et qui, sous prétexte de France, de Papisme, de Prétendant et de Commerce, se trouve en 1790 avoir fait autant de guerres et de dettes injustes, inutiles, désastreuses, que les Français, dans la servitude, en ont fait pour la gloire de leurs rois? Eveillez vous donć, peuple anglais, de votre léthargie, ou ne nous vantez pas votre liberté prétendue.

Après ces faits, ces tableaux, ces résultats, si l'Assemblée nationale juge convenable d'associer le ministère à la fatale prérogative de déclarer la guerre, il me restera de prononcer dans cette Assemblée un discours sur ce problême politique : la guerre ayant été toujours et partout l'instrument du caprice, de la politique et des passions privées du pouvoir exécutif, quels moyens peut il rester au peuple pour garantir ses représentants des sugges tions anti-patriotiques?

Réponse à la lettre de M. Le Gris, chanoine de Sens, insérée dans le Moniteur, no 175. Vous avez réclamé, Monsieur, contre une note relative à votre chapitre et à votre archevêque. Vous laissez entendre que le premier n'a pas voulu adhérer à la déclaration du chapitre de Paris, et que le second n'a pas eu besoin de le rappeler à ses devoirs. Vous ajoutez, Monsieur, que la réponse, prêtée au dernier par le public, est fausse. J'avais prévenu votre réclamation, en publiant dans la chronique de Paris une lettre qui m'a été écrite avant la vôtre, par M. du Razel, et dont voici la copie.

« Le dilemme de M. l'archevêque de Sens, que vous citez dans votre ouvrage, Monsieur, ne me parait ni aussi juste ni aussi noble que celui que j'ai entendu faire par ce prélat à son chapitre. Je crois que vous ne serez pas faché de le connaître : le voici bien exactement : où vous êtes chrétiens, où vous êtes philosophes; si vous êtes chrétiens, il faut vous soumettre à la Providence; si vous êtes philosophes, il faut vous soumettre à la nécessité. » Ce 2 juin 1790. Signé DU RAZEl.

Cette lettre d'un témoin auriculaire atteste, Monsieur, deux faits contraires à votre réclamation; 1o que votre chapitre délibérait s'il adhérerait à la déclaration de celui de Paris; 2o que votre prélat a eu besoin de le rappeler à ses devoirs. CÉRUTTI.

AVIS DIVERS.

Quoique le journal militaire dont nous avons donné hier l'extrait du Prospectus, soit annoncé pour le 1er juillet, il ne faudrait cependant pas être étonne qu'il ne parût cette première fois que du 6 au 10 les officiers ayant eu jusqu'au 15 de juin pour se rendre à leur corps, l'envoi de ce Prospectus n'a pu leur être fait que depuis cette époque; ce qui, joint à quelques autres circonstances, pourra occasionner un retard de huit à dix jours. Mais on peut

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2 représentation de Viaggiatori Felici. - Dimanche 4, la Ire représentation d'Azélie, comédie en 3 actes. THEATRE DU PALAIS ROYAL. Aujourd'hui 1er juillet, les Défauts supposés, comédie en I acte; le Préjugé á vaincre, en 3 actes; et les Bonnes-Gens, en I acte En attendant la Double Intrigue.

THEATRE DE MADEMOISELLE MONTANSIER, au Palais Royal. Aujourd'hui 1er juillet, la 9e représentation du Maitre généreux, opéra en 4 actes. COMÉDIENS DE BEAUJOLAIS.

· Aujourd'hui 1er juillet, à la salle des Elèves, le Faux Serment, opéra-bouffon en 2 actes; le Divorce inutile, comédie en I acte; et le Fat en bonne fortune, opéra-bouffon en 2 actes. CIRQUE DU PALAIS ROYAL. Aujourd'hui 1er juillet, concert dans lequel on exécutera une symphonie de M. Rigel, une scène de M. Paesiello, l'ouverture de la Frascatana, une scène d'Atys, de M. Piccini père, une symphonie de M. Guénin, une scène du Samson de Voltaire, mise en musique par M. Mozin jeune, et un duo d'Iphigénie en Aulide.

GRANDS DANSEURS DU ROI. - Aujourd'hui 1er juillet, la Capricieuse; les Deux Niais, pièce en 3 actes; la 2o représentation des Ecosseuses, en 2 actes; les Réconciliés, en I acte; et le Tombeau de Nostradamus, pantomime en 3 actes avec des divertissements.

AMBIGU-COMIQUE. Aujourd'hui 1er juillet, l'Epreuve raisonnable; Adélaïde, pièces en I acte; la Ire representation du Comte de Comminges, pant. en 1 acte; et la Mariée de Village, pièce en I acte, avec des divertissements.

THEATRE FRANÇAIS COMIQUE ET LYRIQUE, rue de Bondy. -Aujourd'hui 1er juillet, la 2 représentation de Virginie, comédie en 3 actes; et la 2e de la Folle Gageure, opérabouffon en I acte, musique de M. le Blanc,

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Paris Typ. Henri Plon, rue Garanciero, 8

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Vendredi 2 JUILLET 1790.

On a récemment De Constantinople, le 22 avril. reçu des nouvelles de la mer Blanche: elles sont fâcheuses. Trois de nos frégates armées, chargées de grains, et venant de la Morée, ont été enlevées par des vaisseaux russes, sous les ordres du major Cazzioni. Les Russes ont encore attaqué et dispersé un grand nombre de nos bâtiments dans le golfe de SaIonique, dont ils sont aujourd'hui les maîtres, depuis qu'ils se sont emparés de l'ile de Zéa.

Il s'est tenu le 17 de ce mois une conférence de guerre en présence de Sa Hautesse : le caimacan, le reis-effendi et les autres ministres y ont assisté. Le résultat de cette conférence a été communiqué le lendemain au conseil de guerre, et ce jour-là même, M. de Dietz, ministre de Prusse, a vu le reis-effendi. Quelques jours après est arrivé M. le major Knobelsdorff, qui venait remplacer M. de Dietz, en qualité d'envoyé extraordinaire et de ministre plénipotentiaire de S. M. prussienne. On a remarqué avec complaisance que ce ministre s'était embarqué à Ve nise sur un vaisseau marchand anglais, et s'était fait escorter par le capitaine Smeer, commandant un brigantin_hollandais et nous apprenons en effet que les Russes regardent les alliés de notre allié comme leurs ennemis, et qu'en conséquence ils se sont emparés d'un vaisseau marchand d'Amsterdam, nommé l'Esther et le Dirck, faisant voile pour la Sicile. Cette nouvelle est favorable à l'espérance que nous avons d'une paix prochaine. La plupart des peuples soumis à la Porte, et ceux-là surtout témoins Du voisins des désastres de la guerre, commencent à manifester leur désir de voir poser les armes; ici même ce vœu est assez général. La première division de la flotte de l'Arsenal est sortie le 1er mai. Elle consiste en cinq caravelles, cinq frégates et plusieurs bâtiments de moindre force; la seconde division doit partir le 15, et le reste à la fin du même mois. Ces délais sont indispensables, tant on a de peine à rassembler des matelots. On dit que les gens de mer des iles de l'Archipel répugnent à s'engager pour servir sur la mer Noire, et que quelques-uns même, au moyen de quelques piastres, font approuver leur répugnance aux préposés des pachas. Un grand nombre des équipages de mer sera donc complété par les Asiatiques. On doit faire passer aussi dans l'Archipel quelques frégates qui se réuniront à une petite escadre que les puissances barbaresques y ont envoyée contre les armateurs russes. Mais il n'est pas probable que cette flottille puisse tenir contre l'ennemi qui, déjà nombreux, attend encore un renfort de Trieste. C'est plutôt sur les négociations que sur nos armes qu'il nous faut compter pour terminer la guerre. Le bruit se répand que S. H. n'ira point à l'armée en personne.. La nouvelle de la mort inopinée du nouveau grand-visir Ruschuglar-Seid-Hassan-Pacha, paraît aujourd'hui confirmée par des leures de Bucharest, du 23 mai. Mais comme cette confirmation ne donne pas plus de détails qu'une première lettre de Crajowa, qui avait déjà annoncé cette mort, l'événement n'est pas encore certain. Des avis de Spalatro, en Dalmatie, du 20 mai, annoncent que le pacha de Scutari, au lieu de se rendre dans la Bosnie, comme il l'avait promis à la Porte, a attaqué le pacha de Croya, s'est emparé de cette place, et y a commis les cruautés d'usage dans ces expéditions entre pachas. C'est la millième perAre Série. Tome V.

Constituante. 224e liv.

fidie du pacha de Scutari depuis la guerre; il paraît qu'il a de nouveau conçu le projet de se rendre

maître absolu de l'Albanie.

PRUSSE.

De Berlin, le 15 juin. M. le lieutenant-général de Braun a été nommé vice-gouverneur de cette résidence. Le corps de troupes qui se rassemble ici sous les ordres de M. le duc Frédéric de Brunswick, sera composé des bataillons de dépôt, et des régiments suivants, savoir: les bataillons du duc de Brunswick, de Tadden, de Knobelsdorff, de Kalkstein, de Bork, de Schenck, de Renouard, de Legat, d'Ernest et de Mulling; et des régiments de Knobelsdorff, de Raumer, de Kalkstein, de Bornstedt, de Mufling, du régiment du corps des carabiniers et de Tadden: ce corps sera servi par l'artillerie de Magdebourg. Il est très-vrai qu'un corps prussien de quatorze régiments sera posté entre Brunzlau et Lowenbourg: ces troupes sont en marche pour se rendre de ce côté : leur objet est, dit-on, d'observer l'armée saxonne. Les bataillons d'Anhalt et de Rembau sont partis de Konigsberg pour la frontière; ils seront suivis par tous les régiments dans cette garnison.

Le roi et le prince royal sont arrivés le 10 juin dans l'après-midi, à Schweidnitz: depuis le séjour de S. M. dans cette ville, on a expédié plusieurs courriers; l'un d'eux est allé à Breslau porter des ordres aux troupes. S. M. a dû arriver hier au quartiergénéral de Schonwalde.

ALLEMAGNE.

Le 29 mai, un orage terrible a éclaté à Weimar et dans les environs. La grêle et une grosse pluie ont presque tout dévasté. Le torrent d'eau a emporté des maisons et plusieurs personnes, et beaucoup de bétail a péri. S. A. S. le duc régnant, étant à cheval, s'est, à l'exemple du vertueux et immortel Léopold de Brunswick, précipité dans le torrent, et a sauvé la vie à un enfant qui allait périr; il est parti le 10 pour la Silésie, où il commandera une brigade. Ce prince ne trouvera jamais dans les armées une si belle occasion de signaler son courage à la fois et son humanité.

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de Rouen, du port de 160 tonneaux, destiné pour la Martinique; armateur M. J. Signouret, capitaine M. Lecuyer,

n° 95.

Navire passé en revue dans ledit port.

Du 14. Le navire le Saint Nicolas, du port de 277 tonneaux; armateur M. Decasse, capitaine M. J. Gentil, allant a la Martinique.

ADMINISTRATION.

DES RÈGLES D'ÉLECTION.

En déterminant les conditions à l'exercice du pouvoir public, les lois n'ont point fixé la règle de talents et de lumières qu'il demande, et sans lesquels il n'est souvent entre les mains qui l'ont reçu, qu'un instrument de trouble et d'inquiétude légitime. Elles ont suppose que l'habitude des hommes, la connaissance qu'en donne le commerce de la vie et le sentiment d'intérêt commun, suppléeraient à ce défaut d'exactitude, et rectifieraient les errears que l'intrigue ou l'ignorance introduiraient dans les élections.

Mais cette incertitude, qui peut être à l'abri de grands inconvénients, lorsqu'il n'est question que d'intérêt d'administration ou de régie pécuniaire, présente une incalculable suite de dangers, dès qu'il s'agit du gouvernement des personnes et des dispositions de liberté sociale. Dans ce dernier cas, la probité, la droiture ne sont pas, comme dans le premier, les seuls instruments de l'homme public; la sagesse des idées, l'amour de la loi, l'esprit de lumières et de connaissances sont aussi des moyens essentiels, et les seuls qui l'affermissent contre l'onbl des principes, la routine particulière, le régime fantastique, dont la multitude et l'embarras des affaires ne le portent que trop facilement à contracter la dangereuse habitude.

Ainsi la société, pour l'intérêt de ses lois et de sa liberté, doit soigneusement connaitre les forces de ceux qu'elle charge de la défense commune et de la protection de chacun de ses membres; elle ne doit point un moment perdre de vue que sa bonne volonté, le désir du bien ne suffisent pas toujours, qu'il faut encore y joindre cette mesure de génie, ce caractère de courage et de vertu pablique, qui supposent des méditations dont tous les hommes ne sont pas également capables.

Dans ce choix difficile à faire, par la nature fugitive et trompeuse des motifs qui peuvent le fixer, les plus grands dangers à courir, comine les plus difficiles à éviter, sont l'astuce adroite du pouvoir et l'audace usitée du charlatanisme de la parole. Ces deux écueils d'un gouvernement fondé sur le vœu populaire, entraineraient la ruine inevitable de l'état, sì la portion judicieuse, libre et éclairée des citoyens, livrait exclusivement à la multitude la nomination des dépositaires de l'autorité publique.

Le droit de donner son suffrage pour l'organisation de la puissance souveraine ou des magistratures électives, n'est pas, comme on parait le croire, une prérogative dont on puisse se permettre ou se refuser indifferemment et volontairement la jouissance. C'est un devoir de l'homme civilise, une obligation à laquelle il ne peut se soustraire sans mentir à sa conscience, sans refuser à la société une portion d'aide et de secours qu'il a promis de lui donner, saus une véritable prévarication.

Il est surtout impérieux à Paris, ce devoir; c'est dans son sein que se discutent les grands intérêts de la monarchie; c'est là que se forment la civilisation, les mœurs et l'esprit public. Placé au centre de l'état, il en reçoit les germes de la vie, pour les élaborer et les repousser ensuite dans toutes les parties de sa vaste étendue.

Que quelque vice en altère l'action, qu'une puissance mal combinée, que des hommes ignorants on trompeurs en dirigent les mouvements, disposent de sa force et décident de ses intérêts; alors, indépendamment des troubles, des inquiétudes, des accidents de la ville, le reste de l'empire, frappé dans son principal organe, n'offrira qu'une activité chancelante, le défaut d'ensemble dans les vues publiques, la langueur des arts et le découragement de l'industrie.

C'est à Paris que les éléments du bonheur public se développent ou se détruisent; c'est là que les provinces viennent puiser l'esprit qui les anime, et chercher les modèles de conduite et de disposition sociale. Rien de public ne s'y fait impunément, parce qu'une grande masse, dans l'ordre politique, comme dans celui de la nature, ne peut se mouvoir on s'altérer, sans réagir puissamment sur tout ce qui l'avoisine.

L'empire des lettres surtout, le progrès des mœurs, des arts et de la civilisation, sont inevitablement et perpétuellement assujétis à cette influence de la capitale. Qu'un régime de morale exaltée, qu'un esprit de parcimonie, que les erreurs de la fantaisie, que le despotisme de la nullité puissante et parvenue, en corrompent ou détournent les salutaires effets, voilà tout à coup un pas de fait vers la barbarie, et autant de perdu pour le véritable bonheur.

Car enfin, la liberté, l'ordre, ne se réalisent que par l'action des mœurs douces, des arts consolateurs et des habitudes généreuses. Un gouvernement farouche, ignorant, ou livré à l'incohérente doctrine d'hommes étrangers à ces principes de sagesse et d'intérêt social, ferait bientôt du séjour de la paix et de l'aisance, une demeure de sauvages, d'où la décence, les arts et la liberté disparaîtraient à jamais.

Je veux donc n'appeler au pouvoir que les hommes publignement connus par leur dévoůment à ces maximes. Je veux qu'ils ornent la société de tout ce qui peut embellir et faire aimer la vie, de tout ce qui peut concilier à l'exercice de la puissance, cet ensemble de moyens, de bonheur et d'harmonie, qui assure l'attachement aux vertus privées, l'amour et le respect de l'honneur public.

L'inquiétude des esprits légers, la morgue d'un pouvoir nouveau, l'exagération de conduite, la grossièreté individuelle, le mépris des égards, sont encore des fléaux à éviter dans ceux qui vont nous commander par la loi de nos suffrages. La multitude insensible à ces vices de caractere, qu'une éducation plus soignée peut seule apercevoir, ne manquerait pas, peut-être, de s'y méprendre et de nous en punir, si notre indifférence allait jusqu'à lui abandonner exclusivement l'usage d'un droit que nous devons tous exercer.

Un autre malheur suivrait ce premier; c'est que les fonctions publiques, avilies par le caractère de ceux qui pourraient en être revêtus, cesseraient d'être un objet d'ambition pour les hommes vraiment capables de les remplir.

Le premier des faux dehors de l'ambition incapable, est cette hypocrisie de manières, cet étalage de modestie, cette affectation à se déprécier, se mettre au-dessous des autres, lorsqu'on n'a véritablement d'objet que celui de commander a tous. Une franchise inconsidérée est peutêtre préférable à cette obliquité de conduite, qui trompe et séduit assez communément les hommes.

Il est naturel de prétendre au pouvoir, mais il n'est juste de s'y présenter qu'avec les qualités qu'il demande et la manifestation des sentiments qui y portent. A Rome, les candidats étaient vêtus de blans afin qu'on les distinguåt dans les comices.

Le charlatanisme de la parole l'emporie, par les dan gers, sur cette hypocrisie politique. Il exalte les esprits, précipite dans des choix inconsidérés, fait taire le mérite, et livre la chose publique aux mouvements d'orateurs stupides, lorsqu'ils ne sont point de fougueux et injustes agitateurs.

Il est une autre sorte d'ambitieux subalternes, pour qui l'obscurité même est un mérite. Ceux-ci fascinent l'esprit de la multitude, trompent la raison publique, égarent le peuple par des écrits captieusement tissus et adroitement dirigés. Livres presque toujours aux factions, ils n'écrivent en faveur d'un parti que pour l'or qu'on leur donne ou les voix qu'on leur promet. Insolents envers leurs supérieurs, jaloux de leurs égaux, protecteurs oppressifs de ceux qui leur sont soumis, ennemis de tout le monde, une fois parvenus aux emplois, ils s'y conduisent comme dans un pays de conquête dont ils n'ont jamais connu la

carte.

Un danger non moins funeste encore, serait l'élévation de ces hommes tranquilles, mais ignares, vraiment droits, mais faibles, et qu'une éducation hornée, des mœurs grossières, l'habitude de la sujétion, rendent parfaitement etrangers aux grandes qualités d'administrateur public. Si l'engouement de la simplicité, l'amour excessif de la popularité, pouvaient donner lieu à de semblables élections, elles perdraient une ville comme Paris, où, encore une fois, la fermeté de principes, la connaissance des lois, l'habitude de la raison, le sentiment de la liberté, sont par-dessus tout, les premières conditions, le principal titre au partage des fonctions judiciaires ou administratives. Ces considérations puissantes porteront sans doute aux assemblées électives tous ceux que l'intérêt de la paix, de la justice, le bonheur public et l'amour de leurs familles lient aux moyens d'ordre, aux bases conservatrices des mœurs et des agréments de la société. Peut-être aussi qu'on rendrait un service essentiel, en faisant connaître ceux que des talents réels, un caractère de courage et de raison rendent dignes du pouvoir et des honneurs que l'estime publique a coutume d'y attacher.

Quelques efforts cependant que l'on fasse, quelques moyens qu'on emploie, l'astuce et le charlatanisme auront toujours d'aveugles sectateurs; mais il n'est point douteux que lorsque toutes les classes de citoyens, tous les états voteront pour le choix de leurs mandataires, leur active influence ne perde de son énergie; il n'est point douteux que lorsque ceux que l'éducation, la richesse, le goût des arts et l'habitude des hommes ont éclairés sur les intérêts publics, se réuniront aux autres, le nombre des esprits faux, bas ou incapables, ne cède à cette réunion de volontés, et que les choix n'aient un degré de pureté, de convenance, inaccessible aux soins isolés d'une multitude souvent étrangère aux passions, comme aux mobiles des grands acteurs de la société. (Apt. de M. Peuchet).

BULLETIN

DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE.

SÉANCE DU JEUDI 1er JUILLET.

On fait lecture d'une lettre de M. Clermont-Tonnerre, député à l'Assemblée nationale: il rend compte des troubles survenus à Ris; cinq personnes ont été massacrées. En sa qualité de commandant de la garde nationale de Corbeil, il est retenu par la commune pour rétablir l'ordre dans les endroits voisins. L'Assemblée ordonne le renvoi de cette affaire au comité des rapports.

Sur le rapport fait par M. Vernier, au nom du comité des finances, l'Assemblée rend le décret suivant: • L'Assemblée nationale s'étant fait rendre compte par son comité des finances de l'opposition formée par des particuliers de la ville de Montbrison, l'emprunt décrété le 30 mai dernier, des actes relatifs à ladite opposition, et des motifs qui ont déterminé les officiers municipaux à donner leur démission; déclare que le décret du 30 mai sera exécuté selon sa forme et teneur, et invite les officiers municipaux à continuer leurs fonctions avec le zèle qu'ils ont apporté jusqu'ici dans l'administration qui leur a été confiée..

M. L'EVÊQUE D'OLÉRON : Un de vos plus chers désirs étant de venir au secours des malheureux, je vais vous mettre sous les yeux la situation déplorable des régions méridionales du royaume. Des inondations excessives ont causé dans ce pays d'affreux dégâts : les rivières, en se creusant de nouveaux lits, ont enlevé pour plus de 200,000 livres de biensfonds, détruit des moulins, renversé des maisons, et fait périr un grand nombre de familles. Les malheureux qui restent dans ces contrées, se trouvent dans Pimpossibilité non seulement de payer leurs impositions, mais même de pourvoir à leur subsistance. Tous ces faits ne sont que trop avérés.

Nos malheureux riverains m'ont écrit à ce sujet des lettres déchirantes : vous êtes devenus leur unique refuge et leur seule espérance; daignez prendre leur sort en considération. Ils m'ont chargé de vous exposer leur infortune pour la rendre plus touchante. Il est de mon devoir de vous faire considérer que nulle part on ne s'est montré plus ami de la révolution: la contribution patriotique de la ville d'Oléron seulement s'élève à 100,000 livres, quoique le commerce soit ruiné, et que nous n'ayons plus que des pauvres. Je ne doute pas que votre sagesse ne vous fasse trouver de promptes ressources. En conséquence, je vous proposerai d'ordonner que tous ceux dont les directoires de département et de district auront constaté les pertes, seront dispensés, pour la présente année, des impositions et de la contribution patriotique; et qu'afin de procurer le soulagement des pauvres de la dernière classe, les curés toucheront dès cette année, leur entier traitement de 1,200 livres.

L'Assemblée ordonne le renvoi de cette proposition

au comité des finances.

M. l'archevêque d'Aix demande la permission de absenter pour six semaines, après la fédération du 14 juillet.

M. DURAND, député de la sénéchaussée d'Arles: Le premier devoir d'un législateur, et son plus grand mérite, sont de disposer les lois de manière à en écarter le doute par là clarté, à en prévenir les exceptions par la prévoyance, et en assurer enfin l'autorité par la justice, et c'est tout l'objet de ce rapport, dont la matière sont les fondations et les patronages laïcs.

Les bénéfices en patronage laïc doivent-ils subir le même sort, ou peut-on les soumettre aux mêmes

lois de suppression et de réforme que les bénéfices ecclésiastiques?

N'y a-t-il pas dans l'exécution de ces lois quelque exception à faire pour les fondations laïcales, ou pour certaines conditions qui les accompagnent?

Ce sont là, messieurs, les deux questions générales sur lesquelles vous avez à prononcer, après les éclaircissements qui ont déterminé l'avis dont j'aura bientôt l'honneur de vous faire part.

C'est un principe assez connu et incontestable, que du moment qu'une fondation, soit de bénéfice, soit de service ecclésiastique, ou autre objet pareil, dans un esprit de religion, est acceptée, homologuée et décrétée par l'évêque diocésain, cette fondation prend dès lors la nature des choses ecclésiastiques ou sacrées, qui tenant à l'ordre public dans la société, n'appartiennent privativement à personne. res sacræ, res nullius.

Le respect infini que vous avez tous, messieurs, pour les propriétés, et dont l'Assemblée nationale s'est faite elle-même une loi solennelle dans sa déclaration des droits, vous a déjà fait plus d'une fois illusion, dans la crainte de vous en écarter au préjudice de ceux là-mêmes qui ont sur les biens ecclésiastiques bien moins de droits que le clergé; c'est cette réserve, vraiment estimable, qui vous a fait ménager les possesseurs laïcs des dîmes inféodées, dont vous avez mis le rachat à la charge de l'état, ou des biens ecclésiastiques dont il profite. C'est cette même réserve qui vous a fait encore tomber volontairement dans une omission assez conséquente, lorsque voulant arrêter les nouvelles provisions des bénéfices que votre intention était de supprimer, vous n'avez ordonné, par votre décret du 9 novembre dernier, que la suspension des provisions des bénéfices en collation et patronage ecclésiastiques; ce qui a été, non point une loi qui vous ait liés, ou qui mette à couvert les bénéfices en patronage laïc, mais une disposition qui, si elle peut avoir été alors nécessaire ou prudente, serait en ce moment aussi contraire à vos principes, que funeste au bien public.

Quant aux conditions que le fondateur a apposées à sa fondation, et que l'église a agréées en l'acceptant et la décrétant, elles ne changent rien à la nature ni à l'irrévocabilité du don; ça toujours été une maxime dans l'église, que tout ce qu'on offre à Dieu profite à l'âme de l'oblateur, sans jamais retourner dans ses mains: semel Deo oblata, semper oblata. Or, il ne se fait, ni ne peut se faire aucun don, aucune offrande, aucune fondation religieuse, que le donateur ou le fondateur n'ait Dieu en vue; et certes, il

répugne de concevoir que quelqu'un voulût composer avec Dieu dans les dons qu'il lui fait; il répugne d'employer contre un pareil donateur la maxime si connue, donner et retenir ne vaut.

Dans le nouvel ordre de choses, dans le plan de notre constitution, dont l'esprit régénérateur ne doit faire acception ni de choses, ni de personnes, il serait bien étrange que l'Assemblée nationale qui, jusqu'ici, a fait ceder en tout l'intérêt privé à l'intérêt public, qui a réformé des abus couverts de la plus longue possession en matière profane et civile, fût arrêtée et empêchée de faire le même bien et les mêmes réformes en matière ecclésiastique. Eh que serait notre constitution, que deviendrait-elle avec des établissements qui feraient prévaloir les volontés particulières sur la volonté générale? On a calomnié cette Assemblée jusque dans ses intentions, sans la juger par ses décrets. On lui oppose les volontés des fondateurs, les volontés de ces hommes pieux, dont la mémoire fait honte à ceux-là mêmes qui l'invoquent; ils osent même nous opposer la religion, cette religion sainte qu'on ne reconnaissait presque plus dans l'état nouveau de son régim、

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