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» Nous souvenant que, quand nos pères étoient persécutés à cause de leur foi, ils n'en continuoient pas moins, malgré les défenses humaines, à rendre en commun à Dieu le culte que leur prescrivoit leur conscience, et que, dans ces temps-là, des frères de l'étranger intervinrent à plusieurs reprises en leur faveur;

» Jaloux de détourner, autant qu'il dépend de nous, des églises protestantes l'accusation de favoriser l'intolérance civile, que pourroit leur attirer la loi du 20 mai 1824, qui continue à être exécutée, quoique cette loi ait été désapprouvée par un grand nombre d'ecclésiastiques, et d'autres citoyens de la Suisse et des autres pays protestans;

» Désireux de contribuer, selon notre pouvoir, à éclairer l'opinion sur ce grave sujet, en manifestant hautement notre manière de voir à l'égard de cette loi, qui prive des chrétiens de droits imprescriptibles;

>> Suivant l'exemple que nous ont donné, le 8 décembre 1824, 26 pasteurs de l'église nationale du canton de Vaud; le 3 mai 1825, près de 100 ministres des trois dénominations, presbytérienne, indépendante et baptiste, réunis à Londres, et en juillet 1826, 21 pasteurs du département du Gard;

» Déclarons que nous regardons les restrictions portées dans le canton de Vaud à l'exercice de la liberté de conscience et de la liberté du culte, et les peines prononcées contre ceux qui s'assemblent pour exercer le culte selon leur conscience, ou qui cherchent à répandre leurs opinions, comme attentatoires à des droits sacrés et imprescriptibles, opposées à l'esprit du christianisme, contraires en particulier à l'esprit du protestantisme, qui proclame le droit du libre examen, et qui, sans favoriser en rien l'indifference religieuse, réclame pour tous les cultes la tolérance civile qu'il réclame pour lui-même ;

>> Nous faisons en conséquence des vœux sincères pour que Dieu veuille exaucer nos prières, et rendre au canton de Vaud la liberté religieuse qu'un si grand nombre de nos compatriotes ont été autrefois y chercher. » Fait à Paris, le 4 mai 1829.

» Signé, MARRON, pasteur, président du consistoire à Paris; PAUMIER, pasteur, président du consistoire à Rouen; J. MONOD père, pasteur à Paris; JUILLERAT-CHASSEUR, pasteur à Paris; REVILLE, pasteur à Dieppe; MONTANDON, pasteur à Luneray; F. MONOD fils, pasteur adjoint à Paris; BELLOT, pasteur à Arras; ROSSELOTY, pasteur à Chatillon-sur-Loire; ALEGRE, pasteur au Havre; P. A. STAFFER, ministre du saint Evangile; MARTIN, ancien pasteur à Bordeaux; SOULIER, ancien pasteur; CLOTTU, pasteur suffragant à Leme; DUVIVIER, pasteur à Bourges; GRAND-PIERRE, ancien pasteur à Bale, directeur de la maison des Missions-Evangéliques à Paris; GUILLAUME MONOD, pasteur à Saint-Quentin; A. SABONADIÈRE, pasteur, président du consistoire à Meaux; NÉE, pasteur à Marsauceux; BOUDET-FENOUILLET, pasteur suffragant à Orléans.

» Ont adhéré à cette déclaration :

» A. DE KERPERZDRON, pasteur à Aulnay près Mer; ADOLPHE MONOD, pasteur, président du consistoire à Lyon; LAGARTE, pasteur, président du consistoire à Orléans; JALAQUIER, pasteur à Sancerre. »

Nous ne ferons aucune réflexion sur ce document, qui a été publié par la Gazette des cultes. Ce journal, qui paroît devoir être le journal officiel des protestans, rend compte, dans le même numéro, d'un discours prononcé le 17 mai, dans le temple des luthériens à Paris, par le pasteur Goepp. Il fait un pompeux éloge de ce discours, qui nous a paru assez médiocre, et qui est plein de lieux communs sur les avantages des lumières. Il va jusqu'à dire que par là le pasteur Goepp se met à la tête de la civilisation, que c'est un véritable apôtre, un sage. Ces hyperboles paroissent un peu ridicules, quand on les rapproche du discours qui y a donné lieu, et tout l'article paroit empreint d'un vernis d'exageration et d'enthousiasme dont on ne voit pas trop le fondement dans les choses simples et communes que cite le journaliste. Cet enthousiasme contraste un peu avec le ton de froïdeur, d'improbation, de raillerie même, avec lequel on parle dans le même journal des discours des missionnaires catholiques.

Nouvelles des missions d'Amérique.

(Fin du no 1520.)

A l'article de la mission de l'Ohio, qni, comme l'on voit, fait assez bien connoître l'état de la religion dans ce pays, succède l'article du Michigan, qui forme un diocèse particulier, mais qui reste encore sous l'administration de M. Fenwick. Cette mission fut établie par les Jésuites au commencement du 17° siècle. Il y a, dans le territoire, onze églises ou chapelles, et environ 8000 catholiques. Le territoire du nord-ouest a 2 chapelles et 2500 catholiques. M. Richard, supérieur. de cette mission, n'a avec lui que deux missionnaires, M. Dejean et M. Vincent Badin; cependant M. Badin, l'aîné, doit y être depuis quelques mois. M. Richard est un prêtre de la compagnie de Saint-Sulpice; il réside au Détroit depuis 30 ans, et y a construit une nouvelle église à la place de celle qui fut consumée dans l'incendie de 1815; la nouvelle église a 1 16 pieds de long sur 60 de large. Il y a, au Détroit, 1800 catholiques. M. Dejean, qui est un prêtre du diocèse de Rodez, est en Amérique depuis quatre ans seulement; il réside à la rivière aux Hurons, où il vient de batir une église. Il y a établi une école de demoiselles, tenue par une sœur du Sacré-Cœur, et il fait l'école aux petits garçons trois fois par semaine. On travaille à batir deux autres églises dans l'arrondissement confié à M. Dejean, savoir, à la rivière St-Clair et à l'Anse-Creuse. M. Bellamy, qui étoit passé en Amérique avec M. Dejean, et qui vient de quitter le Michigan, desservoit la rivière aux Raisins et la Baye-Miamis; il y a báti deux églises. Les deux missionnaires avoient, en outre, fait des missions dans quelques lieux éloignés. (Voyez notre no 1471.)

Nous avons parlé aussi, en cet endroit, des missions de M. Vincent Badin dans le nord-ouest. On lira avec intérêt, dans les Annales, les lettres de MM. Richard et Dejean. Ils se plaignoient beaucoup de la Propagande protestante; des ministres presbytériens ou baptistes se répandoient dans le pays. Une société de baptistes a distribué, en 1826, 106,000 dollars dans les missions de l'Amérique et des Indes. Que l'on se plaigne, après cela, de l'es

prit de prosélytisme des catholiques, et des distributions de l'association de la Propagation de la foi. M. Fenwick, trop éloigné et trop occupé dans l'Ohio, n'avoit pu encore visiter le Michigan.

On a peu de chose encore sur la mission des îles Sandwich. M. Bachelot, préfet apostolique, écrit d'Anaroura, île d'Oahes, archipel Sandwich; sa lettre, du 9 novembre 1827, n'est pas très-consolante. La traversée avoit été semée de contrariétés; l'équipage et les passagers étoient également dans des dispositions peu favorables pour des missionnaires. Le 7 juillet, on arriva à la hauteur des îles Sandwich. Le Français qui devoit y préparer les voies aux missionnaires étoit absent, et on doute qu'il revienne. Des ministres calvinistes s'étoient emparés de l'esprit de la reine. Nos missionnaires eurent de la peine à obtenir de descendre à terre; ils vivoient fort retirés, ne se produisant pas, et gardant leur déguisement, qui n'empêchoit pas qu'on ne les connût. Ils attendoient de la Providence le moment de commencer l'exercice de leur ministère. La lettre de M. Bachelot est pleine de sentimens de résignation, de patience et de courage au milieu des épreuves.

L'article de la mission du Su-Tchuen est assez court; ce qu'il contient de plus intéressant est une lettre de Joseph Song, chrétien, et ancien élève du collège de Pinang, exilé pour la foi au fond de la Tartarie chinoise. Sa lettre, écrite en février 1824, a été reçue à Macao en 1827; elle est fort édifiante.

Nous sommes obligé de nous borner à cet extrait du no 16 des Annales, qui, malgré quelques longueurs, nous paroît un des plus intéressans que l'association ait publiés.

Modèles d'une tendre et solide dévotion à la mère de Dieu dans le premier âge de la vie, par l'abbé Carron (1).

Cet ouvrage est à sa 4o édition; les précédentes ont été successivement annoncées dans ce journal, ce qui nous permettra d'être plus court dans cette dernière annonce. On sait que ces Modèles offrent le tableau de la piété de 18 jeunes gens prévenus de bonne heure des bénédictions célestes, et qui ont montré, dans leur vie et dans leur mort, les vertus les plus aimables et la résignation la plus touchante. Rien de plus édifiant que ces notices historiques, rien de plus propre à exciter dans la jeunesse ces sentimens de foi et de ferveur qui peuvent le mieux la préserver des illusions du monde et des dangers des mauvais exemples.

(1) In - 12, prix, 2 fr. et 2 fr. 75 cent. franc de port. A Paris, chez Poilleux, rue du Cimetière-St-André, et au bureau de ce journal.

Le Gérant, ADRIEN LE CLERE.

MERCREDI 3 JUIN 1829.

(No 1546.)

Progrès de la question de l'émancipation des catholiques

anglais.

Il est assez curieux de voir quel changement s'est opéré dans les esprits en Angleterre sur cette question, et par quels degrés, dans l'intervalle de vingt-quatre ans, on en est venu d'une opposition déclarée à l'adoption de la mesure proposée en faveur des catholiques. Nous trouvons, dans un journal anglais, le tableau des tentatives faites sur ce sujet depuis 1805, et des résultats qu'elles ont eus.

En 1805 fut faite la première motion pour prendre en considération les réclamations des catholiques; ce fut M. Grattan, Irlandais, qui fit cette motion, de concert avec un membre distingué de l'opposition, Fox. Il proposoit la formation d'un comité. Il y eut, pour la motion, 124 voix, et contre, 336. Une motion semblable, dans la chambre des lords, fut rejetée par 178 voix contre 49. Fox avoit cu, à cette occasion, des entretiens avec des amis de la cause catholique. Il entra au ministère en 1806, ce qui pouvoit donner quelque espérance aux catholiques; mais il mourut le 13 septembre de cette année.

A sa mort, le ministère fut changé; le parti opposé aux catholiques prévalut, le cri point de papisme se fit entendre par tout le royaume. Dans plus d'une ville, on eut à craindre des troubles semblables aux émeutes de 1780. On savoit d'ailleurs que le roi Georges III étoit personnellement opposé à l'émancipation, qu'il croyoit contraire au serment prêté par lui à son sacre. Ces scrupules du roi firent échouer une tentative de lord Howich, depuis lord Grey, pour un bill qui auroit admis les catholiques à servir dans l'armée, en prêtant un serment qui n'eût point contrarié leur croyance. (Voyez les Mémoires de Butler, t. II, p. 208.)

Il n'y eut point d'autre bill proposé en faveur des catholiques en 1806 et 1807. En 1808, M. Grattan présenta à la chambre des communes une pétition des catholiques d'Irlande, et le 25 mai, il fit la motion qu'elle fût soumise à

Tome LX. L'Ami de la Religion et du Roi.

G

un comité de toute la chambre. Appuyée par 128 voix, sa motion fut rejetée par 281. Le 27 du même mois, une semblable motion fut faite dans la chambre des lords; il y eut 74 voix pour, et 161 contre.

En 1809, la question ne fut point mise sur le tapis. En 1810, M. Grattan, avocat zélé des catholiques, présenta une autre pétition de ceux d'Irlande, et le 18 mai, il fit sa motion pour l'établissement d'un comité, afin de prendre en considération les réclamations des catholiques; 213 voix contre 109 rejetèrent sa motion. Le 6 juin, lord Donoughmore fit une semblable motion dans la chambre des lords; elle n'obtint que 68 voix, et en eut 154 contre.

En 1811, une motion pour un comité fut appuyée dans la chambre des communes par 83 voix, et rejetée par 146.

En 1812, nouvelle motion de lord Donoughmore dans la chambre des lords, le 21 avril, pour prendre en considération les réclamations des catholiques; pour la motion, 102 voix; contre, 174. Deux jours après, pareille motion de M. Grattan dans la chambre des communes; il y eut 215 voix pour, et 300 contre. Malgré ces échecs, les partisans de la cause catholique ne se découragèrent point, et le 22 juin, M. Canning fit une motion pour que, dans la prochaine session, on prît de bonne heure en considération les demandes des catholiques; cette motion, appuyée par lord Castlereagh, obtint une majorité de 129 voix, savoir, 235 pour, et 106 contre. C'étoit donc déjà un changement bien remarquable; mais dans le même temps, une semblable motion ayant été faite dans la chambre haute, par lord Wellesley, l'ordre du jour fut invoqué, et il y eut 126 voix pour l'adopter, et 125 contre. La motion se trouva donc rejetée par une voix.

La discussion fut bien plus animée encore en 1813. Le 25 février, M. Grattan fit sa motion ordinaire, de la formation d'un comité pour prendre en considération les récla mations des catholiques; les débats durèrent trois nuits, et la chambre s'étant divisée, donna le résultat suivant : pour, 264, et contre, 224. Ce premier point emporté, M. Grattan proposa, le 9 mars, que la chambre se formât en comité général; il y eut 186 voix pour sa proposition, et 119 contre. Le 30 avril, M. Grattan présenta son bill, dont la seconde

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