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sur les crédits supplémentaires. Une grande agitation a lieu à ce sujet dans la salle.

M. Dumeylet, au nom d'une commission, propose l'adoption de cinq projets de loi relatifs à des intérêts locaux.

Après avoir entendu, en faveur de la loi sur le service des postes avec l'Amérique et l'Angleterre, MM. Martin, Laffite, de Maussion et le ministre des finances, ce projet est adopté à la majorité de 254 contre 4, avec les amendemens proposés par la commission.

Un congé est accordé à MM. Félix de Leyval et Haas.

On met en délibération le projet de loi pour l'interprétation des règlemens relatifs à la sureté et à l'excès de chargement des voitures publiques. MM. de Conny, Dupin aîné, Pardessus, de Cordoue, Ricard et le ministre de l'intérieur sont entendus sur ce projet, qui est ensuite adopté à la majorité de 240 contre 4.

A cinq heures, la chambre se forme en comité secret. On assure qu'il s'agissoit de la proposition de M. Mauguin, sur les formes à suivre dans l'accusation des ministres. D'après cette proposition, lorsque la mise en accusation des ministres seroit demandée par un député et prise en considération, elle seroit renvoyée à une commission de 9 membres, qui appelleroit le ministre accusé, lui feroit représenter toutes les pièces nécessaires, entendroit des témoins, et feroit ensuite son rapport à la chambre. Si l'accusation étoit alors définitivement admise, il seroit nommé cinq commissaires pour la soutenir et la développer devant la chambre des pairs.

Il paroît qu'il s'est d'abord élevé une question préjudicielle. M. Mauguin présentoit sa proposition comme des articles supplémentaires au règlement; M. le président avoit d'abord fait observer qu'elle avoit plutôt un caractère législatif. MM. les ministres de la justice et de l'intérieur ont, dit-on, prouvé cette assertion par les plus solides argumens. M. B. Constant auroit alors insisté pour l'adoption de ces mesures, que l'on ne sauroit tarder plus long-temps à attendre, et se seroit plaint amèrement de ce que MM. les ministres les éludent toujours. M. Dupin aîné auroit ensuite avoué que la proposition étoit véritablement législative; mais il auroit soutenu qu'il devenoit urgent qu'on eut une loi sur la responsabilité des ministres. On ajoute que la majorité ayant déclaré que la proposition ne pouvoit être traitée comme réglementaire, M. le président a engagé son auteur à la représenter sous la forme d'une supplique au Roi; que la discussion en a été fixée au lendemain, sans qu'elle puisse avoir lieu en séance publique.

Examen apologétique de la Charte de Louis XVIII, par un prêtre catholique (1).

L'auteur ne dissimule pas qu'il existe dans beaucoup d'esprits des

(1) In-8°, prix, 2 fr. et 2 fr. 25 c. franc de port. A Paris, chez Thiériot, rue Pavée-St-André-des-Arts, et au bureau de ce journal.

craintes, des répugnances, et, si l'on veut, des préventions contre la Charte. Mais, ajoute-t-il, ne faut-il pas pardonner un peu à ceux qui confondroient quelquefois dans leur opposition les principes contenus dans la Charte, et l'abus qu'on en a fait?

<< Ils ont vu, sous l'empire de la Charte, grâce aux usurpations républicaines ou du moins aux méprises de certains administrateurs, outrager par des révoltes, par des cris, par des pamphlets, la majesté du Roi et celle de Dieu même. L'autorité royale a été méconnue, son nom prostitué, ses amis persécutés, ses défenseurs amnistiés, ses ennemis prônés et portés en triomphe. Comment un serviteur du Roi n'accuseroit-il pas un tel régime? La liberté des cultes a servi de prétexte pour humilier la religion de l'Etat, et tandis que les juifs et les mahométans sont respectés avec leur habit et au milieu de leurs cérémonics, plus d'une fois les fétes et les ministres de l'Eglise catholique ont été exposés aux profanations et aux insultes. Tandis qu'on vante ces sociétés prétendues chrétiennes, qui, pour propager leur Bible et leur morale, envoient partout leurs livres et leurs missionnaires, la France a vu persécuter, maltraiter des hommes paisibles qui prêchoient la morale de l'Evangile, la charité et la concorde. Est-il donc étonnant que les chrétiens qui ont conservé la foi dans l'exil et dans les prisons soient indignés d'une pareille déception, et se plaignent d'un régime où ces scandales ne sont pas empêchés, où ils semblent favorisés ? »>

L'auteur se flatte de réconcilier avec la Charte ceux dont il conçoit les préventions. « Il s'agit, dit-il, de faire voir que la Charte n'est point la cause des désordres qui ont eu lieu depuis qu'elle a été publiée; que, sous l'empire de la Charte, tous les droits, tous les intérêts, toutes les prétentions légitimes peuvent être respectés ; que la Charte est une sage composition entre les anciens titres et les services nouveaux, entre l'autorité souveraine et les libertés publiques, entre les traditions et les idées du jour ; que la Charte enfin, bien entendue et bien observée, doit être pour la France un gage de paix et de bonheur. »

Après des observations préliminaires sur les constitutions précédentes et sur l'esprit qui a présidé à la nouvelle, l'auteur examine et explique chaque article en particulier. Il s'arrête un peu plus sur les articles 5, 6, 7, 8, qui offrent le plus de difficultés. Il croit que ces articles, bien entendus, n'ont rien qui doive effrayer les esprits sages, et il indique même des moyens de calmer les scrupules et les inquiétudes que l'on pourroit con-cevoir. Si ses raisons ne sont pas toutes également concluantes, du moins ses explications, ses réflexions, ses vues sont d'un homme modéré et conciliant, qui demande surtout que l'on apprécie la différence des temps, la disposition des esprits et les modifications que peut subir l'état de la société. L'auteur ne s'est pas nommé; mais nous savons que c'est un ecclésiastique tour à tour employé dans l'enseignement et dans le ministère, et qui, dans cette double carrière, a fait preuve d'autant de capacité que de zèle.

Le Gérant, ADRIEN LE CLERE.

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Essai historique et critique sur la suprématie temporelle du pape

et de l'Église, par M. Affre (1).

(Suite du n° 1542.)

lors de

Cet ouvrage avoit été composé il y a trois ans, l'éclat du livre de la Religion considérée dans ses rapports avec l'ordre politique et civil; mais quand l'ouvrage fut terminé, la discussion commençoit à s'affoiblir, et le judicieux auteur crut qu'il étoit plus sage de ne pas ranimer une controverse qu'il espéroit voir tomber dans l'oubli; mais, au contraire, on vient de la réveiller avec plus de chaleur que jamais. M. l'abbé Affre a donc cru devoir publier son travail, d'autant plus que les recherches qu'il a faites et les développemens où il est entré donnent à ce travail un intérêt indépendant des circonstances. Il s'est proposé d'expliquer comment les opinions qu'il combat s'étoient élevées dans l'Europe, après avoir été totalement inconnues pendant les premiers siècles, et il examine et discute les actes et les faits qu'on invoque à l'appui de ces opinions. Il remplit son plan en 26 chapitres, dont nous essaierons de donner une analyse, aussi courte que possible pour un sujet qui embrasse toute l'histoire de l'Eglise.

La doctrine de l'indépendance des rois n'étoit plus depuis long-temps un objet de discussion sérieuse. On ne citeroit pas, depuis 150 ans, une école catholique où elle ait été combattue. Le plus célèbre adversaire des autres parties de la déclaration de 1682, le cardinal Orsi, passe condamnation sur celle-ci, et le cardinal de La Luzerne assure que l'opinion contraire n'a plus qu'un petit nombre de partisans, même en Italie. Nous citions, il y a peu de temps, une lettre d'un théologien, écrite de Rome en décembre 1826, et

(1) Un vol. in-8°, prix, 6 fr. et 7 fr. 50 cent. franc de port. A Paris, chez Adr. Le Clere et compagnie, au bureau de ce journal, et à Amiens, chez Caron-Vitet.

Tome LX. L'Ami de la Religion et du Roi.

F

où il étoit dit formellement : « Quant au pouvoir des papes sur le temporel des rois, je puis vous assurer qu'il n'est pas une école à Rome où il en soit question. Une thèse où l'on soutiendroit que le pape a le droit de déposer les rois, quand ils abusent de leur autorité, ne passeroit pas à la censure de Rome. Il est bien fâcheux qu'on agite ces sortes de questions en France, et qu'on les agite avec tant de chaleur.

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L'Ecriture, la tradition ancienne de l'Eglise, sa pratique constante durant les premiers siècles, tout repousse l'idée d'une autorité même indirecte de l'Eglise dans l'ordre politique. J. C. a envoyé ses apôtres, comme son père l'avoit envoyé; or, il n'a point sur la terre affecté l'autorité temporelle, il a dit que son royaume n'étoit point de ce monde; il a ordonné de payer le tribut à César, il a refusé de juger un différend entre deux frères. Les apôtres ont enseigné la même doctrine; ils étoient soumis à des empereurs païens, à des tyrans cruels; ils recommandoient aux fidèles de leur être soumis, et ils ont perdu la vie en prêchant cette maxime. Rien de plus connu et de plus avéré que la patience avec laquelle les chrétiens supportèrent les persécutions pendant trois siècles. Dira-t-on que c'étoit parce qu'ils étoient les plus foibles qu'ils se laissoient égorger? Ce seroit leur ôter tout le mérite de leur courage et de leur héroïsme. Dirat-on que la société chrétienne n'étoit pas encore formée? Toute l'histoire des martyrs répond à ce sophisme. Cette légion thebaine, qui se laisse immoler sans combat, auroit donc pu vendre chèrement sa vie, et ces généreux guerriers auroient été des hommes simples, qui n' n'auroient pas connu leurs droits, ou des hommes serviles, qui n'auroient pas osé les défendre. C'étoit donc aussi par foiblesse que tant de martyrs, prêts à verser leur sang pour la foi, proclamoient leur respect pour l'autorité temporelle! C'étoit donc aussi par flatterie que Tertullien appeloit le respect pour les rois la religion de la seconde majeste! Les chrétiens auroient pu se révolter contre des princes chrétiens, mais ils devoient être soumis et fidèles à des monstres de cruauté, servir de flambeaux dans les jardins de Néron, et expirer dans les supplices pour ses menus plaisirs. M. l'abbé Affre réfute éloquemment cet absurde paradoxe. (Voyez page 122 de son Essai.)

La doctrine et la pratique de l'Eglise furent les mêmes sous les empereurs hérétiques, sous ces princes foibles et

violens, qui faisoient prévaloir l'arianisme, qui exiloient les plus grands évêques, qui faisoient la guerre aux images, qui bouleversoient tout dans l'Eglise. La constitution de l'Eglise chrétienne n'étoit-elle pas suffisamment développée alors? Les Osius, les Gelase, les Léon, les Grégoire, les Augustin, les Ambroise ignoroient-ils les droits du saint Siège et de l'épiscopat, ou les sacrifioient-ils par pusillanimité? Les princes du moyen âge, qui eurent des différends avec les papes de leur temps, étoient-ils plus coupables que ceux qui rendirent la moitié de l'empire arien, et qui troubloient toute l'Eglise par la protection qu'ils accordoient à l'hérésie, et par leurs violences contre les catholiques? Et quand Julien l'apostat abjura le christianisme, et travailla avec une haine si perfide à le détruire, pourquoi n'entreprit-on pas de le déposer? Assurement le péril étoit imminent, et Julien étoit sujet de l'Eglise par son baptême. Que manquoit-il donc ici, dit M. l'abbé Affre? Une autorité que J. C. n'a pas donnée à son Eglise.

Plus tard, la puissance temporelle des papes s'élève à la faveur des circonstances. La décadence de l'empire grec sous des princes qui se succédoient rapidement, et se détrônoient les uns et les autres, leur éloignement de l'Italie, l'abandon où ils laissoient cette contrée, envahie par des nuées de barbares; le respect qu'on avoit pour les papes, leur médiation, souvent efficace, au milieu des troubles et des guerres qui désoloient les villes et les campagnes ; les vœux des peuples, qui cherchoient un refuge et un point d'appui, tout sert à expliquer l'origine et les progrès du pouvoir temporel des papes. Il étoit tout simple que l'Italie se détachất des princes qui ne s'occupoient plus d'elle, et qu'elle se mît sous la protection de ceux dont l'habileté, le zèle, la sagesse et l'activité adoucissoient son sort. L'auteur discute ici quelques faits, celui de Pépin et du pape Zacharie, l'avènement de Charlemagne à l'empire, la conduite des évêques sous Louis-le-Débonnaire. Cette conduite inouie, avant le règne du foible empereur, est condamnée aujourd'hui par tous les ultramontains. Le sacre des rois a été aussi quelquefois invoqué comme une preuve de la puissance de l'Eglise sur les souverainetés; mais cette cérémonie est plutôt un emblême destiné à rappeler l'origine divine du pouvoir, et les obligations que contracte le prince, c'est encore un acte de piété

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